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 Retrouvailles sur fond d'aéroport.

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MessageSujet: Retrouvailles sur fond d'aéroport.   Retrouvailles sur fond d'aéroport. Icon_minitimeMer 5 Avr 2017 - 9:26

@Lawrence Evans

J'avais décidé de quitter la France pour le rejoindre aux U.S.A, c'était un choix délibéré, mais là dans ce putain de poste frontière je regrettais âprement ma décision.
J'étais descendue de l'avion et j'avais suivi le troupeau qui allait chercher ses bagages, sauf qu'en plus des différents formulaires à la con de ces paranos de ricains il fallait maintenant passer un test...

Un putain de test de dépistage... Est ce que Lawrence savait ça ? Je ne savais pas vraiment puisque c'était exactement ce qu'il cherchait à éviter à mon sujet. Il faisait tout pour que je ne sois pas détectée comme transmutante et voilà qu'un putain de test biologique allait l'annoncer à la face du monde ? Vraiment, non, je n'aimais pas ça du tout.
Mais, que pouvais je faire d'autre ? M'enfuir ? Courir ? Me cacher ? Bad plan, de toute façon je finirais traquée et je me désignerais aussi sûrement que leur putain de test allait le faire.

Je me soumis à l'examen avec le cœur au bord des lèvres et la sensation que la terre s'ouvrait sous mes pieds. Je sentais monter la pression et l’accélération de mon rythme cardiaque ne présageait rien de bon. Une petite voix commençait à murmurer dans mon esprit... « Vous voulez de la mutation, vous allez en avoir bande de cons ».

Et ça crépitait déjà dans mes prunelles tandis que je sentais la chaleur affluer vers mes mains... Je respirais lentement. Inspirer, expirer, ne pas brûler, inspirer, expirer, trouver mon frère...
Mes objectifs étaient clairs. Je devais trouver mon frère... Il saurait quoi faire...
Les tests tombaient rapidement. En même temps je connaissais le résultat, même s j'avais espéré un bug de leur système si bien rodé de ségrégation... Raté !!

Coup de chance du destin je tombais sur un employé poli et respectueux, ce qui dans ma situation était déjà beaucoup. Ça me permit d'abaisser la pression à un niveau tolérable.

« Votre document d'identité sera disponible rapidement avec la mention des résultats de ce test. Etant ici en vacances vous serez amenée à aller le retirer... »

Je n'écoutais pas vraiment, me contentant d'agiter la tête quand il avait l'air d'attendre une réponse. J'étais pas vraiment en vacances, mais c'était ce que j'avais raconté. Je pouvais pas donner d'adresse et j'avais bien saisi qu'il fallait pas de toute manière.

« Vous pouvez y aller. Soyez prudente mademoiselle. »

Charmant ce petit agent gouvernemental, tout prévenant... A priori je lui plaisais. Je lui fit un sourire avant de me saisir de mon sac et de ma valise que je faisais rouler derrière moi.
Je gagnais rapidement la sortie, les larmes avaient remplacé le feu dans mes yeux.
Je me sentais salie par cette façon qu'ils avaient de croire que mon état nécessitait un dépistage. Je n'avais pas la moindre maladie, j'étais simplement différente...

L'humanité n'apprenait donc rien de son histoire ? Les massacres les plus ignobles avaient eu lieu à cause d'illuminés qui pensaient que la différence devait être nommée dégénérescence... Et voilà que la dégénérée c'était moi...
Je me cognais contre quelqu'un et murmurais un petit :

  « Désolée »

En français dans le texte... Signe de mes émotions qui prenaient le dessus.
Je levais les yeux sur la personne que je venais d'emboutir et découvris mon frère... Je m'accrochais à lui me plaquant contre son torse et j'appuyais mon front de toute mes forces contre lui. Je laissais monter les larmes mais un sanglot me coupait le souffle et m'empêchais de parler. Je me contentais donc de le serrer contre moi inconsciente du monde qui continuait sa course autour de moi. J'étais rentrée à la maison, j'étais en sécurité...
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MessageSujet: Re: Retrouvailles sur fond d'aéroport.   Retrouvailles sur fond d'aéroport. Icon_minitimeJeu 6 Avr 2017 - 20:01

Fin Mars
“Je reviendrais te chercher Elo.”
C’était ce que j’avais promis à ma sœur le jour où j’avais quitté la France. Mais elle était trop jeune à l’époque pour que je puisse l’emmener tout de suite. Et même si je détestais Charles, je ne pouvais pas délibérément l’arracher à son foyer, à ma mère. Ma mère qui avait toujours su et qui avait gardé le secret face à l’intolérance de son enfoiré de mari.
Alors j’avais promis. Pour au cas où ça tournerait mal, pour au cas où elle en éprouverait le besoin. Mais je n’avais encore jamais eu l’occasion de tenir cette promesse et Eloïse avait toujours eu la décence de ne jamais me l’avoir reproché. Pas directement. Elle aurait pu. Mais peut-être savait-elle que si mes mots avaient revêtu des atours de paroles en l’air, il n’en était rien. C’était une promesse tout ce qu’il y avait de plus sincère. D’ailleurs, il était rare que j’en fasse. Je ne promettais jamais rien car j’avais une sainte horreur de l’engagement. Mais pour Eloïse, c’était différent. Elle était mon sang et ma chair. Et puis c’était ce que j’avais toujours voulu : la garder auprès de moi pour pouvoir mieux la protéger.

J’avais beau être un téléporteur, la France, c’était loin et je me sentais impuissant d’assumer correctement mon rôle de grand frère protecteur à distance. Par chance, tout s’était toujours bien passé, jusqu’à ce jour fatidique. Je m’étais résolu à lui laisser mener sa vie comme elle l’entendait, mais je préférais la savoir en sécurité. C’est pourquoi j’avais toujours gardé un œil sur elle, même lointain.
Malgré la distance, notre proximité et notre complicité n’en avait aucunement été altérée. Elo était ma Luz, comme maman aimait l’appeler et elle savait qu’elle pouvait compter sur moi. J’étais capable de me mettre en quatre pour elle. La preuve… je venais de céder à son dernier caprices. Si s’en était un… Ça ne me plaisait pas, mais elle avait su tirer sur la corde sensible et je n’étais pas en position de force pour la sortir d’un mauvais pas dans ma retraite forcée à Radcliff.
J’avais cédé pour la simple et bonne raison que bien que j’ai tout fait pour effacer sa trace, jusqu’à lui faire changer d’identité, je n’étais pas tranquille depuis qu’elle avait croisé le chemin des Hunters. J’avais toujours cru à cette menace latente contre laquelle j’avais été mis en garde lorsque j’étais enfant, mais sans lui accorder plus de crédit que nécessaire, tant que l’on n’est pas directement concerné, ça n’existe pas vraiment. Il avait fallu qu’ils s’en prennent à elle pour me faire prendre conscience que ma mutation ne faisait pas de moi un surhomme et me ramène les pieds sur terre. Nous étions exceptionnels, mais surtout, nous étions vulnérables, et le jour où nous serions parfaitement acceptés, malgré tous les traités qui avaient pu être signés, n’était pas encore arrivé. J’avais alors découvert ce sentiment d’insécurité qui avait réveillé mon instinct protecteur. J’avais peur pour ma sœur.

Alors oui, elle ne devait pas toujours comprendre mon excès de précautions la concernant, mais mon travail dans les services secrets m’avait rendu méthodique et procédurier. C’est pourquoi j’avais absolument tenu à optimiser son trajet pour venir ici, à défaut d’aller moi-même la chercher en France. Je lui avait fait tout son plan de vol et lui avais donné des indications précises à suivre pour le changement à New York, pour la correspondance avec le vol interne pour Detroit. Et comme le risque zéro n’existait pas, je lui avais délibérément fourni un faux itinéraire afin de modifier son parcours en cours de route, sans l’en informer. Au cas où elle serait suivie.

J’attendais impatiemment devant le terminal où son vol devait arriver. Les étrangers étaient obligés de passer par le poste frontière avant de pouvoir se rendre dans l’aile de l'aéroport d’où partaient les vols internes. Si j’avais l’air le plus calme du monde, j’étais anxieux. Et ce fut avec une certaine appréhension que mon regard se posa sur tous les visages des étrangers qui affluaient dans ma direction pour prendre leur correspondance. Mon cœur se serra quand je l’aperçu enfin, mélange de soulagement et de crainte, au vu de la tronche qu’elle tirait. D’un pas déterminé, j’allais à sa rencontre et elle me percuta de plein fouet, sans me voir. “Hey ! Regardez un peu où vous mettez les pieds mademoiselle !”* dis-je avec nonchalance et mon sourire en coin disparu dès qu’elle posa son regard brillant sur moi. Je la pris aussitôt dans mes bras et la serrais contre moi. “Je suis là Luz. Tout va bien.”* Je la sentis se crisper en réprimant un sanglot et je carressai chaleureusement son dos en signe de réconfort. “Là Là ! Ca va aller, maintenant. Je vais veiller sur toi.”* lui chuchotai-je à l’oreille. “D’accord ?”* Ca c’était pour m’assurer qu’elle n’allait pas s’embraser dans la seconde. Je préférais me ménager un peu car on avait encore de la route à faire, j’accusais encore le coup de la téléportation de l’aller et je voulais éviter de trop attirer l’attention sur nous en nous téléportant ailleurs tout de suite, sauf si elle m’y contraignait bien-sûr. Je restais à l’étreindre le temps qu’il fallait à l’écoute du moindre signal.

Lorsque je la sentis plus apaisée, je me reculai doucement pour l’observer, mes mains de part et d’autre de ses épaules. “Je suis content que tu sois là.”* Puis je déposai un baiser sur son front comme j’avais l’habitude de le faire. “Je me suis dit que j’allais venir te récupérer ici directement. Je n’fais pas confiance aux douaniers. Je vais te prendre ça. Notre prochain vol est dans une heure trente, il ne faudrait pas le rater.”* dis-je avec un clin d’œil en m’emparant de sa valise. L'horaire ne concordait pas avec celui qu’elle était sensé prendre. Naturellement. Nous ne nous rendions à Détroit. “Ca va, ton voyage s’est bien passé ?”* dis-je en passant mon bras autour de ses épaules pour l’enjoindre à me suivre.


*en français dans le texte.
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MessageSujet: Re: Retrouvailles sur fond d'aéroport.   Retrouvailles sur fond d'aéroport. Icon_minitimeVen 7 Avr 2017 - 9:53

Peur, colère, honte, tristesse... je n'étais même plus vraiment capable de nommer ce que je ressentais là tout de suite. J'étais bouleversée et je fonçais droit devant moi vers la sortie. Je voulais aller fumer une clope, dehors, seule, sans ces regards qui me vrillaient l'esprit. Objectivement je passais inaperçue mais au fond de moi j'avais l'impression que tout le monde savait.

Que depuis leur batterie de test c'était marqué sur mon front. En grosses lettres dégoulinantes « dégénérée ». C'était ainsi que mon père appelait les mutants...
J'avais le sang qui bouillait et je me sentais bien capable de perdre pieds quand finalement je bousculais un homme que je reconnus avec un soulagement énorme.

Mon frère était là, pile au bon moment... Même si il n'avait rien à foutre là...
J'étais sensée prendre encore un ou deux avions je ne savais plus trop au juste tant cet itinéraire était bizarre. Je m'accrochais à lui comme une perdue, j'avais le sentiment que sa simple présence m'empêchais de me noyer.
Je sanglotais comme une idiot tandis qu'il me serrait contre lui et m'embrassait sur le front comme à son habitude.

Il m'expliqua la suite du programme et je fronçais les sourcils sans plus de réaction. On allait prendre un autre avion... Ok
Là tout de suite je m'en foutais, même si j'avais sacrément hâte de me prélasser sous une douche avant de gagner un lit confortable pour déposer mes émotions meurtries dans les bras de Morphée.

« Le voyage, ouais ça a été jusqu'à ces types là... »

Je m'expliquais de façon peu convaincante mais c'était déjà pas mal je reprenais le dessus. La flamme au fond de mes prunelles s'éteignit tranquillement tandis que je l’entraînais sur le parvis de l'aéroport.

« Me faut une clope, tout de suite. Et je t'explique ce merdier...  »

Je l'enlaçais tout en marchant et lui fit un beau sourire.

« Tu m'as manqué !»

C'était tellement évident mais je voulais tout de même qu'il en soit certain.
Une fois dehors je sortis mon paquet de clope et mon briquet et relâchait la pression avec une bouffée de tabac mentholé.
Je fermais les yeux et inspirais à fond avant de planter mon regard dans le sien.

« Je ne savais pas quoi faire... Ils m'ont fait passé un test. J'ai hésité à fuir et puis je me suis dit que ce serait encore pire. Je ne savais pas que c'était encore pire ici. »

Plus je parlais et plus ma voix retrouvait sa fermeté coutumière. Exit la honte, exit la peur, exit le chagrin... C'était la colère qui prenait le relais et j'en voulais à la terre entière.
Pourquoi le simple fait d'avoir un ou deux gènes mutés devait il me désigner comme paria ? Pourquoi la différence amenait elle toujours la haine ? Je n'avais jamais saisi la conception du monde des ségrégationnistes de tout poil. Les blancs qui se croyaient supérieurs ? Les cinglés qui avaient suivi Hitler dans sa haine des peuples gitans et Juifs ? Les fous qui avaient imaginé l'esclavage ? Les religieux osant affirmer que l'homme noir n'avait pas d'âme ? L'histoire de l'humanité étaient empreinte de cette haine de l'autre et nous étions la nouvelle cible de cette vindicte.

C'était sûrement très con mais j'en prenais conscience ici, devant ce putain d'aéroport. J'avais été élevée par un homme comme ça, qui pensait que les mutants ne méritaient pas la moindre considération, mais je ne pensais pas cette gangrène aussi étendue.
Ma mère, mon frère m'avaient préservé de cette violence et c'était dur de prendre le revers dans la gueule.

« Je suis désolée. Je comprend maintenant pourquoi tu paniquais à la simple évocation de ces types. »

Ceci dit avant d'écraser ma clope dans le cendrier tout en poussant un soupir de gosse devant une tâche insurmontable.
J'allais devoir admettre que je devais faire attention, pour de vrai... Et je savais que mon impulsivité coutumière ne m'aiderait en rien.
D'un autre coté mon frère était doué pour ça, la preuve il avait inventé un itinéraire digne de James Bond à mon intention.
Je souris à cette pensée et j'attrapais sa main pour le ramener à l'intérieur.

« 1h30 ça va te laisser tout le temps du monde pour tout me raconter. Ou tu vis, qu'est ce que tu fais comme job, qui tu vois... Je veux tout savoir. Mieux mon poulet, j'exige de tout savoir. »

J'assortis ma tirade d'un clin d'oeil mutin. Je ne pouvais jamais rester triste bien longtemps. Une force de vie intense me poussait toujours en avant. Ma mère avait choisi Luz et elle disait toujours que je brillais de lumière. Son rayon de soleil.

« Tu vas avoir l'immense privilège et honneur de m'offrir un café dégueulasse. »

C'était tellement bon de le retrouver. Avec lui en toute occasion je me sentais aimée, épaulée, à ma place tout simplement.
Un frère c'est mieux qu'un ami, mieux qu'un amant... Un frère comme le mien c'était l'assurance de ne jamais être seule.
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MessageSujet: Re: Retrouvailles sur fond d'aéroport.   Retrouvailles sur fond d'aéroport. Icon_minitimeMer 12 Avr 2017 - 23:13

J'avais bien fait de venir chercher Eloïse à New York. Au début, j'avais pensé la faire venir au plus près de Radcliff, mais j'avais vite chassé cette idée de merde de mon esprit. J'étais devenu un soupçon parano depuis son agression et je ne voulais pas prendre de risque inconsidéré. Et j'avais eu raison à en juger par l'état dans lequel je la trouvais. Je n'aimais pas ça. Pas du tout.
Je pris mon mal en patience, le temps qu’elle se ressaisisse. Je ne savais pas vraiment ce qui l’avait bouleversée ou s’il s’agissait simplement de larmes de soulagement.

Après lui avoir très brièvement expliqué la suite du programme, car comme d’habitude, j’étais énigmatique à souhait, je l’enjoignis à bouger d’ici et à me conter son voyage. Il valait mieux ne pas s’attarder trop longtemps. Je n’étais pas le bienvenu dans cette ville, même si la superficie de New York équivalait à la botte de foin dans laquelle il serait compliqué de trouver une aiguille. On n’était jamais trop prudent et la vie nous avait prouvé que les emmerdes n’arrivaient pas qu’aux autres. “Quels types ?” demandais-je sur le ton de la conversation. J’avais l’air de le prendre avec détachement et philosophie, mais il ne fallait pas s’y laisser prendre. J’avais déjà tous les sens en alerte, attentif au moindre phénomène suspect. Et si je redoublais autant de vigilance c’était parce que que je n’étais pas venu armé. Il n’était pas judicieux de prendre l’avion avec un tel engin, même avec le permis de port d’arme que me conférait mon insigne. D’une, je tenais à ma couverture, de deux, Eloïse n’était pas encore au courant et de trois, ce n’était pas le moment de me faire remarquer.

J’accédai à sa requête, pour la clope. J’en avais bien besoin aussi, même si j’étais sensé avoir arrêté. “Tu m’as manqué aussi.” Et nous marchâmes bras dessus, bras dessous jusqu’à la porte du Terminal. Ma tension retomba d’un cran lorsque je compris que les types en question étaient ceux du poste frontière et qu’ils lui avaient fait subir le test de dépistage. Cette saloperie de test que j’avais à tout prix voulu lui éviter ! Putain, je m’en voulais de ne plus bosser à la NSA. Il m’aurait suffit d’un coup de fil… Mais si je le faisais, j’allais nous mettre en péril tous les deux. “Ha ! Oui. Je suis désolé. Ils contrôlent systématiquement les gens maintenant.”* Je m’allumais une clope à mon tour. “Les mecs d’en haut ont instauré ça. Sur tout le continent américain. On va tous y passer. Soit disant que c’est pour notre sécurité, tu parles ! Pourquoi pas nous faire porter l’étoile jaune tant qu’ils y sont !” * Je ne mâchais pas mes mots, mais ils reflétaient parfaitement le fond de ma pensée. C’était aussi une des raisons qui pouvait justifier le fait que je ne veuille pas qu’Elo foute les pieds aux Etats-Unis. C’était là tout mon paradoxe. Je la voulais près de moi pour la protéger et je l’avais gardée tout ce temps à distance pour les mêmes raisons. Je la gratifiai d’un sourire reconnaissant de se montrer compréhensive. Je n’avais pas toujours été un grand frère exemplaire, mais j’avais toujours fait tout mon possible pour m’assurer de son bien être. Même à distance. “Non, ce n’est pas juste de la paranoïa, ni une crise de jalousie fraternelle. Et je ne panique pas.”* jugeais-je bon de relever, pour mon égo. “Je suis prudent. C’est tout. Aller, viens vite !”* Mais elle avait eue la même idée que moi, puisque déjà nous rentrâmes à l’intérieur.

Elle n’avait pas tenu longtemps avant de m'assommer de questions. Je me laissai aller à rire. “1h30, ça passe super vite, le temps d’aller jusqu’à la porte d’embarquement et de monter dans l’avion et nous y seront. Ne soit pas si impatiente. Tu auras tout le loisir et le temps de voir où je vis. Tu vas voir, c’est un vrai paradis !”* Ma dernière phrase fleurait bon l’ironie. “Va pour le café dégueulasse si tu veux, mais on ne traîne pas. T’auras tout le loisir d’en boire chez moi. Je suis expert en café dégueulasse !”* dis-je en riant. C’est pour ça que je le prenais toujours à l’extérieur d’ailleurs.

Je commandais nos cafés dans des gobelets à emporter et dirigeai Eloïse vers la porte d’embarquement.d’où partaient les vols pour le Kentucky. Je déposai la valise sur le tapis roulant, puis nous prîmes quelques instants pour siroter notre café avant de passer la fouille. “Je n’habite pas là bas depuis très longtemps tu sais. D’ailleurs c’est très...austère chez moi. Ca manque un peu de touche féminine. Tu n’te formaliseras pas trop.”

J’attendis que nous ayons passé tous les points de contrôles et que nous soyons assis dans l’avion pour lui murmurer : “Et je bosse dans la sécurité.” Enfin, si on veut. Eloïse savait que j’avais bossé dans les services secrets et qu’un événement récent m’avait poussé à quitter Washington. Je ne lui avais rien dit de plus lorsque j’étais d’ailleurs venu le lui dire en personne, hormis le fait que je partais me mettre au “vert” et que c’était pour cette raison que je ne voulais pas de contact avec l’extérieur pendant quelques temps, qu’il ne fallait pas qu’elle s’inquiète si je ne donnais plus de nouvelles. Je n’avais pas répondu à ses questions, car j’étais contraint par le secret professionnel. Et je n’avais surtout pas eu envie qu’elle s’inquiète de trop au sujet de la “bavure” que j’avais commise. Mais je n’avais pu m’y tenir. J’avais craqué au bout de trois semaines, et je lui avais envoyé un mail dès que j’avais mis les pieds dans le commissariat de Radcliff en fait.

“Et toi ? Raconte-moi. C’est encore l’autre con là ? Il faut que j’aille lui faire bouffer ses dents ou… comment ça se passe ?” demandais-je avec désinvolture. Mais il ne fallait pas grand chose pour que ma plaisanterie vire en propos très sérieux.


*en Français dans le texte
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