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 Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira

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Moira Kovalainen
Moira Kovalainen

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SUR TH DEPUIS : 30/04/2015
MessageSujet: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMar 22 Déc 2015 - 14:28

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

J'étais de bonne humeur.

Pour la première fois depuis deux mois, je voyais les choses du bon côté et pas l'inverse, le verre à moitié plein et non à moitié vide... Si tout était loin d'aller comme je le voulais, les choses commençaient néanmoins à s'améliorer. L'arrivée de mon père à Radcliff avait été plus que salvatrice, et j'avais le sentiment que, sans lui, je me serais encore plus laissée dépérir. Mais il avait su trouver les mots, la patience et la compassion nécessaire pour que j'essaye de remonter lentement la pente, et ma rencontre avec Razen m'avait prouvé que je n'étais pas la seule taupe de cette ville. Lui aussi m'avait été d'un grand secours... J'appliquais ses conseils tous les jours, et me sentais moins bête quand je déambulais dans les rues... Déjà, je ne me prenais plus les murs ce qui, en soi, était un exploit. Tout ce qui m'empêchait vraiment d'aller bien, désormais, c'était cette boule que j'avais dans le ventre et qui grandissait chaque jour. Un concentré de haine, de rage, de colère, d'amertume... De tristesse et de chagrin, aussi. Une excroissance que je laissais grandir en moi sans chercher à la freiner et qui, bientôt, prendrait le pas sur ma raison pour s'exprimer.

Je n'avais jamais tué qui que ce soit. Je n'avais d'ailleurs jamais blessé quelqu'un volontairement sans que l'on puisse parler de légitime défense. Et pourtant, je ne rêvais que d'une chose : Faire la peau à Kingsley. Lentement, en prenant soin de savourer chaque instant de son martyr... Bien sûr, ça c'était dans la théorie. Je rêvais d'être celle qui prendrait un malin plaisir à le faire agoniser, mais dans la pratique... Ca serait autre chose. Si déjà j'avais le courage d'appuyer sur la détente pour lui mettre une balle dans le crâne, ça serait un bon début. On sous estime souvent la puissance la conscience humaine... La mienne avait tendance à me dire « peace and love, meuf, tu vas pas aller descendre un type si c'est pour que je te rappelle sa mort tous les jours ! » Certes... Mon besoin de vengeance et la haine que je vouais à Moren m'empêchaient de penser à autre chose et surtout de faire mon deuil. Je n'acceptais tout simplement pas la mort de William, et encore moins la part de responsabilité que je m'imposais dans cette histoire.

Pourtant, pour une fois, son visage avait cessé de hanter mes pensées l'espace d'une matinée. Je m'étais rendue à mon rendez-vous hebdomadaire à l'hôpital pour subir quelques tests et examens oculaires. C'était d'ailleurs Kaisa, une jeune étudiante en médecine qui s'était occupée de moi. La plupart du temps, nous nous envoyions des vacheries et autres piques à la tronche, par jeu, par provocation, par... Je ne sais quoi, en fait. J'avais cordialement détesté cette nana dès le début, avant de finalement la trouver sympathique et amusante. Enfin maintenant, c'était plus ma sauveuse qu'autre chose. Elle avait eu l'air aussi démunie que moi et pourtant, je n'avais pu m'empêcher de la remercier encore et encore... Alors qu'elle faisait un bête contrôle de routine, agitant un petit faisceau lumineux devant mes yeux pour voir s'ils réagissaient, j'avais senti la lumière me brûler la rétine, et puis ce petit éclat qui m'avait aveuglée... Je n'avais pas tout de suite compris ce qui m'arrivait, elle non plus. Mes yeux semblaient enfin réagir, après plus d'un mois de non évolution, et j'avais commencé à voir des images totalement floues autour de moi. Tout le paysage qui s'offrait à moi était encore sombre et je ne distinguais que vaguement les contours des éléments autour de moi, mais la seule chose qui comptait...

C'était que j'y voyais à nouveau.

Très mal, certes, mais je voyais, j'arrivais à comprendre ce qui m'entourait... L'effet secondaire du vaccin commençait à s'estomper. Pour le moment, j'ignorais si j'allais retrouver pleinement la vue, mais le simple fait de ne plus être complètement aveugle me mettait dans un état d'euphorie et d'allégresse incroyable ! Kaisa était restée là à bafouiller qu'elle ne comprenait pas pourquoi ni comment j'avais retrouvé la vue, et pour le moment je m'en foutais royalement ! Je m'étais contenté de la prendre dans mes bras en piaillant comme une ado hystérique et avais promis de lui ramener les chocolats la prochaine fois.

J'étais donc sortie de l'hôpital en sautillant gaîment... Et avais vite déchanté quand la lumière aveuglante du soleil était venue me flinguer les yeux. Super... J'étais maintenant un vampire nouvelle génération. Il ne me manquait plus que l'air dépressif et les crocs pour avoir l'air d'une réplique authentique de Dracula ! Je remettais alors mes lunettes de soleil pour tenter d'y voir plus clair, et quittais le parking de l'hôpital pour rentrer chez moi. J'avais l'impression de voir des ombres autour de moi plus que des humains, et chaque bâtiment me donnait l'impression d'être un mirage tant ils étaient flous. Je devais passablement avoir l'air complètement torchée, à tituber comme je le faisais... A tout juste midi, c'était un peu honteux.

Je m'arrêtais à l'épicerie pour acheter de quoi faire des macarons au citron – qui a cru que je ne fêterais pas le retour de ma vue sans celui qui m'avait rendue aveugle ? – et tentais d'envoyer un message à mon frère pour lui dire de me rejoindre dès qu'il aurait fini sa journée de travail. J'avais à peine fini d'envoyer mon message que j'arrivais devant chez moi, et fouillais dans mon sac pour y trouver mes clés.
J'avais les bras si chargés que j'en fis tomber le trousseau, qui se glissa, bien évidemment, entre les planches de la terrasse. Je posais mon sac de courses sur le paillasson et m'accroupissais pour chercher les clés, bien trop occupée à m'y affairer pour voir venir le coup.

Une doulour fulgurante me traversa le crâne, mais je n'eus pas le loisir de hurler ou de me défendre. Extinction des feux, rideaux... Je sombrais dans l'inconsciente sans comprendre ni savoir ce qui venait de m'arriver.
crackle bones
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Cesare DeMaggio
Cesare DeMaggio

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SUR TH DEPUIS : 15/02/2015
MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeJeu 24 Déc 2015 - 2:21


Aria. Aria. Aria. Artur Kovalainen. A la mélopée tortionnaire de ses regrets – d’sa culpabilité – étaient venues s’ajouter les disharmonies glaciales de la rage. L’assassine avait couru dans ses veines pendant tant de temps, tendant ses muscles, gardant son esprit éveillé, réceptif, observateur : Cesare DeMaggio avait franchi ces pas qui lui avaient fait traverser le voile qui l’avait séparé de l’enfer jusqu’alors – tout ça pour ça. Un vulgaire nom, un patronyme qui n’signifiait rien, n’résonnait en rien à sa mémoire, et n’éveillait rien. Rien d’autre que les événements qui s’étaient déroulés cette nuit-là, sous le firmament baigné de flammes qui avait vu sa sœur cadette pousser son ultime soupir. Combien d’fois le chasseur avait-il imaginé l’identité du tueur de sa sœur ? Combien de scénarii possibles s’était-il construit sur le voile de ses paupières ? Combien d’théories, combien d’cadavres, combien de confidences arrachées d’entre les lèvres de ses ennemis par la prescience d’une lame ou d’une balle savamment logée au bon endroit ? Quelle quantité d’âme, d’humanité frêle et inutile, avait-il sacrifié pour obtenir quoique ce soit de vraisemblable sur le meurtrier qui lui avait arraché sa cadette ? Mais il était sûr – aussi sûr qu’à chaque fois, ses convictions vibrant sous ses chairs comme un tambour de guerre : l’sang qui appelait le sang, l’irrémédiable cercle vicieux qu’on s’plairait un jour à dénoncer. Un jour. Un autre jour. Ce s’rait là surement l’unique héritage qu’il laisserait derrière lui : le regard sombre, les paupières cernées par les nuits sans sommeil, le bout de ses doigts tremblant d’une détermination qu’il n’s’connaissait que dans ces moments-là. Ces moments-là où le devoir remplaçait toute lassitude ; où la vie retrouvait un sens, aussi éphémère, futile et sanguinaire était-il. Jusqu’alors le chasseur n’avait pas daigné songer à autre chose, pas même attarder une fraction de ses pensées en direction d’il ne savait son nom, le bébé, cette petite fille qui était née, comme ça, du jour au lendemain, sans crier gare, d’entre les entrailles d’Isolde. Paraissait-il, sa fille à lui, une héritière du sang DeMaggio qui courait dans ses veines à lui : le sang des assassins, des maudits, d’ces êtres qui n’étaient destinés à rien de mieux, qu’à plonger tête la première dans des cauchemars aux démons cannibales. Les quelques graines de conscience que Cesare avait rudement gagné, arraché à la vie en rencontrant Isolde, il les avait désormais perdues à nouveau – elles n’avaient eu qu’une valeur fragile, et ses quelques espoirs s’étaient désormais transformés en cendres arides placés juste là. Au creux de sa gorge, dans les tréfonds de son poitrail, là où aurait pu s’trouver son âme, s’il avait encore eu qui que ce soit à qui la vouer. Isolde ; sa fille… aussi inaccessibles que non-désirées, chassées par la hargne qui habitait l’animal blessé, acculé, qu’avait toujours été Cesare. On n’l’avait jamais voué à plus, on n’lui avait jamais imaginé une destinée qui pouvait ressembler à ça. Ca, quelque responsabilité paternelle qui lui tombait sur les bras telle un énième cauchemar qui ne faisait que boucler la boucle – et l’rendre encore plus indigne de tout ce qu’il avait là, à portée de main. Non, lui, tout ce sur quoi il était apte à se concentrer, c’était ce nom insignifiant, ces lettres qui s’étaient alignées dans l’néant, l’air tendu sous la sentence qu’il avait arrachée à sa cousine. Rayen, crachant enfin le morceau ; la vérité pure et brutale : elle avait su, su depuis un moment sans doute, et elle s’était jouée de lui, l’avait baladé comme un vulgaire toutou assagi par le désespoir.

C’était là, facile de déterminer à quel point il avait été désespéré, à quel point il s’était échoué, décharné, épuisé, à la charnière d’une confiance à qui il n’savait plus vouer : irrémédiablement, c’était seul qu’il marchait aujourd’hui – indécis, imprévisible.

Aria, Aria. Le son de sa voix qui lui semblait déjà artificiel, reconstitué à partir de souvenirs dissonants, et seul le silence pour répondre à ses hésitations et ses incertitudes. Son visage, son sourire, la caresse de la peau de ses mains lorsque leurs doigts s’enlaçaient avec toute la force du désespoir sur l’quel ils étaient bien incapables de mettre des mots. La senteur de ses cheveux – c’que ça faisait, de la serrer dans ses bras. Tant de choses qu’il avait si souvent prises comme acquises, vouées à lui pour l’éternité : le grand-frère qui avait senti ce devoir se faire tout naturel en lui aussitôt avait-il posé les yeux sur le petit corps de sa sœur encore nourrisson. Chaque souvenir de la jeune femme, chaque brin de vie quotidienne qu’ils avaient partagé sans même s’en soucier, commençaient déjà à lui filer entre les doigts. Tout comme la vie elle-même, la raison, tout c’qui pouvait expliquer pourquoi il continuait – continuait à errer d’la sorte, continuait à respirer. Continuait à subsister alors même que son but premier avait été un lamentable échec. Cesare DeMaggio, uniquement voué à être deux choses : un tueur, et un frère. Quelle destinée lui restait-il désormais ? Celle qui lui filait la nausée, celle où l’sang poisseux collait à ses doigts, imprégnait sa peau d’une odeur ferreuse et impossible à déloger. Celle où il n’finirait jamais par atteindre une quelconque Pénitence, la clémence d’une entité supérieure, sans visage, omniprésente, qui l’jugerait digne d’être au moins quelque chose dans l’éternel. Tout chasseur qu’il était – uniquement chasseur, traqueur aux pulsions violentes et coléreuses – ses desseins étaient aussi clairs qu’la façon dont il mourrait, la facilité avec laquelle tout le monde l’oublierait. L’aisance qu’on aurait à n’pas penser à Cesare, le meurtrier ; Cesare, qui pointait son courroux tâché du sang de ses victimes, en direction du prochain qui tomberait par sa faute. Sa responsabilité. La lourde tâche qui lui incombait : et aujourd’hui, quand bien même il avait perdu l’compte des jours, des semaines et des mois, tuer s’avérerait plus facile que jamais. Il l’espérait en tout cas, l’voulait de toutes ses tripes, devait se l’imaginer de la sorte, alors même qu’il avait enfin – enfin, enfin – ce qu’il voulait. Le gibier trappé, la victime ferrée, ses pas se calquant, discrets et agiles, sur le trajet pavé vermeil qui le mènerait à au moins ça. Au moins l’fait de savoir qu’il aurait obtenu justice pour sa sœur ; qu’il aurait fait quelque chose, quelque chose d’autre que de semer des cadavres pour n’poursuivre que des spectres inatteignables. Et déjà au faciès d’Aria, s’mélangeait celui de Moira – Moira Kovalainen, Moira la sœur – celle au visage de marbre, l’air fermé, à n’pas remarquer le monde tout autour d’elle. Aussi discret qu’il était, le DeMaggio avait d’ores et déjà compris que quoiqu’il fasse, quelque faux pas imprudent il commette, elle ne remarquait rien. Rien, presque comme une innocente qui n’avait pas de question à se poser, pas d’ombre planant dans son sillage, prête à lui bondir dessus. L’inconsciente ne les voyait pas, plus qu’autre chose – car depuis des jours, par intermittences déjà, le chasseur se frayait passage jusqu’à la fameuse jeune femme, à la recherche d’une réponse qui n’venait pas. Moira la sœur. Aria la sœur. Lui, il aurait donné sa vie, son cœur, ses membres, son existence toute entière pour sa cadette, chacun de ses souffles de survivance, l’ultime chance à la rédemption qu’il aurait pu avoir. Il aurait sacrifié tout c’qu’il y aurait eu à sacrifier – pour Aria, une fraction de minute de plus avec elle, l’sentiment de pouvoir sentir son regard clair se poser sur lui. La douce appartenance qu’il avait toujours senti frissonner en lui aussitôt avait-il eu la responsabilité d’être un frère.

Etait-ce le cas pour tout le monde ? Même ses ennemis les plus dégueulasses ? Même ces êtres qu’il détestait le plus dans ce bas-monde ? Presque un questionnement existentiel, de quoi construire un raisonnement complexe pour lequel il n’avait pas accordé tant de temps que cela : il y avait le pouvoir du sang, la prescience d’une responsabilité invisible, l’appel des liens indéfectibles de deux personnes partageant le même nom. Tant de choses qu’il avait lui-même perdu, à l’instant où Aria avait été assassinée comme un vulgaire animal au beau milieu du chaos. Y’avait sa sœur à lui, qu’on lui avait arrachée sans crier gare, sans prévenir, avec toute la barbarie qui pouvait exister dans la vile nature humaine. Et y’avait Moira Kovalainen, qui continuait de respirer, continuait d’subsister, continuait de donner un sens à quelqu’un comme Artur Kovalainen – curieusement, dans la nature toute entière, les lois immuables de la vie, y’avait une ironie que le DeMaggio était bien incapable de supporter désormais. Ce furent toutes ces assurances, toutes ces convictions entrant en ébullition les unes avec les autres qui se transformèrent en détermination : une ambition aussi glaciale que la lame qui avait poignardé sa sœur, des mois plus tôt. Des mois de supplice. Des mois de quête désespérée. Des mois qui trouvaient une fin – ici, maintenant. Ici, maintenant – il n’savait encore comment, n’y pensait qu’à peine, et n’y songea pas un instant lorsque, ayant demeuré trop longtemps dans le sillage de la rousse, il sortit de son rôle de simple prédateur. Si patient qu’il avait été, il fut plus empressé, précis et agile au moment de pousser la jeune femme, tête la première, contre l’encadrement tranchant de la porte d’entrée – une simili-stratégie se mit en place en une fraction de seconde à peine. Il avait déjà réussi à tourner la clé que la rousse avait introduit dans la serrure, lorsque l’arcade sourcilière de celle-ci dégoulina en des éclats carmins à même de trahir l’attaque furtive dont elle avait été victime. La dernière chose dont il avait besoin pour l’heure, c’était d’un élément perturbateur duquel il devrait s’occuper. Car il n’reculerait pas, pas ce soir, pas à présent ; peu importait finalement l’nombre de cadavres qu’il allait devoir déposer aux pieds du tueur de sa sœur. Après avoir relâché la mutante inconsciente sur le sol propre et froid de son appartement, il revint vers l’entrée, poussant du pied les emplettes qu’elle avait faites, les faisant disparaitre juste derrière la porte – il n’était pas v’nu pour lui ranger ses achats, ou même l’aider avec ses petites courses. Bien assez tôt, la fameuse Moira aurait assez à faire avec autre chose. Autre chose, elle n’savait pas quoi pour l’heure – lui non plus : aussi efficace était-il quand l’adrénaline courait dans ses veines, le DeMaggio s’était déjà laissé déborder par sa hargne, l’impatience qui avait été trop longtemps cultivée en lui – par les circonstances, par les autres, par l’absence d’Aria. Par le chaos – ouais, le complet chaos qu’était devenue son existence dès l’instant où Artur Kovalainen avait décidé d’entrecroiser leurs routes. Il n’y avait à tout cela, qu’un seul et unique responsable : pourtant, aux pieds du chasseur, c’n’était pas la carcasse inanimée du frère qu’il y avait, mais bien la silhouette familière de la dénommée Moira. Il la connaissait, l’avait déjà croisée – et il voulait simplement s’répéter que ça ne changeait rien. C’n’était pas comme s’ils s’étaient appréciés, comme s’il lui devait quoique ce soit. Comme si ça pouvait rattraper quoique ce soit. Avec tout son savoir, son don pour la manipulation, Rafael avait su construire dans l’esprit de ses enfants des pensées aussi complexes qu’aberrantes – des assurances qui foutaient aujourd’hui la nausée au DeMaggio, tout autant qu’elles demeuraient, comme des réflexes qu’il n’pouvait mâter : avec le temps, à force de se le répéter, Cesare finirait probablement par croire que le chemin qu’il venait d’emprunter là, en s’lançant à la gorge de la sœur innocente était celui qui le mènerait à la justice la plus rude et la plus pure.  

La mutante encore inconsciente, Cesare rejoignit la table qui se trouvait à quelques pas de là, tirant une chaise pour l’y trainer – comme si ça pouvait changer quoique ce soit – était-ce là, la nouvelle mélopée de ses convictions ? Rien, rien n’pourrait le faire reculer. Pas ici, pas alors que sous son poitrail, son palpitant tambourinait contre ses côtes, mû par un appétit ragaillardi. Combien de temps allait-ce durer, cette mascarade ? Subitement, le chasseur eut envie de se jeter sur la rousse pour la secouer jusqu’à ce qu’elle reprenne conscience. Il se retint, non sans difficulté – ses muscles tendus, faisant les cent pas ici et là, ses pensées s’enchainant toutes plus superficielles les unes que les autres. Combien d’temps encore ? Les minutes s’enchainant pour devenir une éternité, de longs instants qui mirent au supplice sa patience – Cesare s’occupa vaguement en cherchant dans les placards de la jeune femme, sans retenue aucune. Dans la salle de bain, il trouva toute une boite d’aspirine à peine entamée - en avala deux pour lui-même, presque plus par réflexe, pour répondre à la peine fantôme qui lui ravageait le cœur, lui saccageait l’épaule, là où il portait encore les cicatrices fraiches de la balle qui s’était logée là. Enfin – enfin – la mutante émit un signe de vie, un grognement qui traina jusqu’au gémissement de douleur ; sans bouger d’un pouce, tel un fantôme qui se faisait prendre la main dans le sac, le DeMaggio se montra plus patient qu’il ne l’avait été jusqu’alors. Une seconde après l’autre, il laissa tout son temps à Moira de reconstituer les éléments, chacun des petits événements qui s’étaient enchainés pour qu’elle se retrouve là. Là, son téléphone portable posée sur la table hors de sa portée, un presque-étranger dans son habitation, à la dévisager sans qu’elle n’puisse y décrypter quoique ce soit. Haine, dégoût, compassion ; comment décrire le chaos tout entier qui grondait dans les entrailles du transmutant à l’heure actuelle ? Pour s’occuper, n’pas soutenir le regard de sa vis-à-vis, presque par souci du détail, Cesare déposa le verre d’eau qu’il avait eu en main, le désignant à la rousse, tandis que le médicament qui fondait au fond de celui-ci continuait de diffuser des petits bruits pétillants. « Pour la tête. Ça devrait au moins éviter que tu divagues trop. » comme s’il s’en préoccupait. Comme s’il savait c’qu’y allait advenir d’elle. Comme s’il savait quel serait son prochain acte, dans la réaction en chaine qu’était sa vengeance. Justice. Vengeance. Impossible de savoir. Pas tant qu’ils en étaient là. Sans attendre l’accord de la rousse – ou même se préoccuper de celui-ci – Cesare attrapa le téléphone portable sur la table, analysant le fil des messages qui défilaient. Artur, était en tête de liste. Visiblement, le frère avait reçu une gracieuse invitation de la part de sa sympathique sœur – c’était comme ça, donc, que la vie marchait pour les gens comme eux. Ceux qui tuaient si impunément, et passaient à autre chose. C’était ce sentiment de vide-là, qu’avaient ressenti les familles des victimes, les restes de branches familiales, que Cesare avait laissées derrière, lorsqu’il avait assassiné quelqu’un. « Tu crois qu’il va venir – ton frère – si tu l’as invité ? » le jeune homme n’avait pas répondu à l’invitation cordiale de la mutante – alors quoi ? Allaient-ils devoir redoublé d’arguments pour le faire sortir de sa cachette ? Pour un instant, Cesare sembla peser le pour et le contre, avant d’opter pour l’inaction, comme s’il préférait simplement sonder la seule personne qui se trouvait là, avec lui, dans cette pièce : était-ce donc ça, son ultime épreuve pour obtenir c’qu’il voulait ? Un p’tit peu de patience, une discussion obséquieuse avec une jeune femme qu’il exécrait ? Elle sembla faire un mouvement, penser quelque chose, peut-être bien envisager une échappée – le DeMaggio saisit son hésitation avant qu’elle n’ait pu faire quoique ce soit. La pauvre semblait handicapée par quelque chose de plus encore que le fait de s’être pris un sacré coup sur la tête et d’avoir l’arcade sourcilière ouverte. « Je me lèverais pas à ta place. Tout c’que tu vas réussir à faire, c’est vomir par terre, ou tourner de l’œil à nouveau. J’essaye juste de déterminer si Artur Kovalainen se déplace pour des macarons au citron ou s’il a besoin d’arguments plus convaincants. » le rôle du grand méchant-loup lui revenait toujours facilement – si facilement. Comment avait-il pu croire, un jour, qu’il était voué à autre chose qu’à ça ? Les ténèbres étaient là, en lui, elles réclamaient leur dû, hurlaient vengeance et appelaient déjà le sang ; si affamées qu’elles débordaient sur le visage du jeune homme. Chasseur. De ces monstres que Moira devaient bien connaître, pour partager le sang de l’un d’eux.  
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Moira Kovalainen
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SUR TH DEPUIS : 30/04/2015
MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeVen 25 Déc 2015 - 13:22

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

Que s'était-il passé ? A quel moment cette journée en apparence si ordinaire avait-elle basculé dans le cauchemar ? Une douleur aiguë palpitait contre mes tempes au rythme erratique de mon cœur, chaque pulsation m'arrachant un grognement de douleur. Je vagabondais encore entre conscient et inconscient, tentant comme je le pouvais de sortir de cette torpeur désagréable. Les idées se bousculaient dans ma tête... Que s'était-il passé ? Je me souvenais vaguement avoir fais tombé mes clés, les avoir cherché... Et puis plus rien. Rien d'autre que cette douleur vive et si soudaine que je n'avais rien vu venir. J'ouvrais alors les yeux, grimaçant alors que la lumière me brûlait les rétines. Parfait. En plus de m'être faite assommée, je n'avais toujours pas les yeux parfaitement opérationnels. Je manquais d'ailleurs de me casser la figure avant de réaliser que j'étais assise – ou plutôt avachie – sur une chaise. Je portais difficilement la main à mon visage et me pinçais l'arrête du nez en poussant un grognement de douleur. Quelque chose de chaud et poisseux coula sur mes doigts, et je soupirais en constatant que j'allais non seulement avoir une belle bosse, mais aussi une jolie cicatrice sur le front... Mais ça, c'était bien le cadet de mes soucis... Un bruit attira mon attention, et je relevais alors vivement la tête.

Je regrettais immédiatement mon geste... Le sang se remit à palpiter dans mon crâne, et mon estomac se souleva avec violence, manquant de me faire rendre mon petit déjeuner. Tout tournait autour de moi, comme si je m'étais trouvé à bord d'un bateau en pleine tempête... Et je n'avais absolument pas le pied marin. Quand j'eus repris mes esprits, je plissais les yeux pour déterminer qui j'avais en face de moi. Ce n'était pour le moment qu'une forme floue, indéfinie et à l'apparence vaguement humaine, mais pas moyen de mettre un nom sur un visage dont je ne pouvais déterminer les contours. L'ombre s'approcha alors, et je me raidissais sur ma chaise, prête à me défendre avec le peu de forces qu'il me restait. Finalement, je haussais un sourcil lorsque l'inconnu déposa simplement un verre d'eau où une aspirine était encore en train de se dissoudre. Un agresseur avec des remords ? Vraiment ? Et sa voix me disait quelque chose, sans que je sois capable de réellement dire pourquoi elle avait tendance à me crisper. Trop surprise pour dire quoi que ce soit, je regardais le verre en me demandant si c'était une bonne idée de faire confiance au type qui m'avait assommée... Seulement, la douleur était telle que cette aspirine avait quelque chose de profondément salvateur. Je tendais mollement la main vers la table pour attraper le verre et le portait à mes lèvres, le vidant d'une traite. Si au moins l'aspirine pouvait m'aider à avoir les idées claires, en effet...

«C'est quand même pas courant, un malade qui assomme les gens pour leur faire boire de l'aspirine après... T'as déjà des remords ?» Grognais-je d'une voix pâteuse.

A mesure que les minutes passaient, ma vue s'éclaircissait peu à peu, et je passais d'un aveuglement lumineux à un flou pas du tout artistique. Enfin, j'arrivais à distinguer les contours des meubles, des éléments d'une pièce que je n'avais pas vu depuis plus d'un mois. Tout y était parfaitement rangé... Trop bien rangé, même, pour que l'on croit un seul instant que le ménage était de moi. Cette façon presque maniaque de poser les choses, ça venait d'Artur, indéniablement... Et soudain, mon cœur s'emballa. Un malade avait déjà de fracasser le crâne contre ma porte, sous mon toit... Qui sait ce qu'il ferait de la petite ménagerie qui vivait ici aussi ? Et, tout aussi soudainement que l'angoisse m'avait saisie à la gorge, elle se calma. C'était mon père qui avait gentiment accepter de les garder, le temps que je sois suffisamment autonome avec ma cécité pour ne plus risquer de me casser la figure sur un chat qui aurait eu la brillante idée de se faufiler dans mes pattes. Au moins, ce fou furieux n'aurait rien d'autre à se mettre sous la dent que ma carcasse... A laquelle je tenais quand même un peu, mine de rien.

Je me passais une main dans les cheveux en soupirant à nouveau, observant l'inconnu qui pianotait sur ce qui semblait être mon téléphone. Eh bah vas-y, te gêne pas ! Et... Et je le connaissais. Ma vue commençait à s'éclaircir petit à petit, suffisamment pour que ce visage me paraisse familier. La population de cette ville avait beau être en grande partie composée de fous furieux, je n'avais pas croisé beaucoup de gens avec une telle haine sur le visage. C'était à croire que rien de bon ne s'exprimait sur ses traits et curieusement, je connaissais cette expression. C'était celle d'un type meurtrit criant vengeance. De là à savoir de quoi il voulait se venger... A moins d'ailleurs que ça ne soit son expression naturelle, ce qui était autrement plus effrayant. Ah ça oui, je me souvenais de lui ! Je me souvenais bien d'un malade qui n'avait eu aucun remords à tirer sur Malcolm pour l'achever, alors même que celui-ci était manipulé par une mutante complètement cinglée. Dire que j'avais été affectée par le décès de mon coéquipier aurait été un bien grand mot. J'avais suffisamment à faire avec deux deuils dans ma vie. Seulement, pendant cette mission, j'avais vu un peu trop de morts et de sang pour en ressortir parfaitement détendue et indemne. Ce type me rendait nerveuse... Peut-être parce qu'il avait l'air complètement taré et perturbé par je ne sais quoi. Peut-être aussi parce qu'il m'avait frappée sans la moindre sommation, au choix.

«Ta mère t'a jamais appris qu'c'est pas poli de fouiller le téléphone des gens ? T'as été élevé où, franchement ?»

Cynisme, sarcasmes... C'était bien là mes seules armes face à un type capable de transformer mon crâne en passoire sans le moindre état d'âme. Puis il mentionna mon frère, et je restais un moment silencieuse. Qu'est ce qu'Artur avait à voir là dedans ?

«Qu'est ce que j'en sais, moi ? Il viendra s'il a envie, s'il ne travaille pas... Je suis pas dans sa tête...»

Un problème à régler avec Artur ? Ou un super copain à lui qu'il voulait inviter à un barbec ? La première option, Moira, la première option... Mais pourquoi ? Qu'avait bien pu faire mon frère ? Qu'avait-il bien pu ENCORE faire, surtout... Je tournais alors la tête vers la droite, vers l'entrée... Dans le tiroir de la commode, il y avait ce petit revolver que Seth m'avait donné. Cette arme que j'exécrais autant qu'elle m'était utile depuis que j'étais à Radcliff. Si j'arrivais à m'y précipiter assez rapidement, je pourrais peut-être mettre mon agresseur hors d'état de nuire ? C'était trop beau... Car je me souvenais que ce type tirait bien mieux que moi, et surtout qu'il était capable de dévier les balles d'un simple geste de la main. J'aurais fini avec une balle dans le ventre avant même de comprendre ce qui m'arrivait. Pourtant, je tentais un mouvement pour me lever, geste qui ne lui échappa pas. Je tournais à nouveau la tête vers lui, le fusillant du regard.

«Ah ouais ? J'ai plus l'droit d'aller pisser ? J'suis encore chez moi alors t'es gentil, tu m'lâches... Qu'est ce que tu lui veux, à mon frère ? Il t'a piqué ton goûter ? Il a dit du mal de ta sœur ? Vois ça avec lui, j'ai rien à voir là dedans...»

J'ignorais qu'à force de sarcasmes je venais de mettre les pieds dans le plat... Et parce que je l'ignorais, je poussais la provocation plus loin encore. Je me levais avec la difficulté et la lenteur d'une grand mère, prenant appui sur la table pour ne pas tanguer et tomber à nouveau sur ma chaise. C'est qu'il n'avait pas tort, ce cinglé... J'allais tourner de l'oeil ou lui vomir dessus, aussi... J'usais de mes dernière forces pour rester droite et faire deux pas dans sa direction.

«Qu'est ce que tu vas m'faire ? M'assommer à nouveau, si Artur ne vient pas ? Parce qu'il ne viendra pas, tu sais... Ce n'est pas parce que j'lui ai envoyé un message qu'il va rappliquer aussi, faut pas croire...»

Oui je mentais mal. Très mal. Même si Artur et moi étions en froid depuis que j'avais rencontré Ellie, même s'il nous nous en voulions mutuellement pour ce que nous avions appris... Il restait mon petit frère. Et un foutu opportuniste. Bien sûr qu'il rappliquerait au trot en apprenant que j'avais retrouvé la vue ! Et pour la première fois, j'espérais qu'il ne viendrait pas, resterait tranquillement à travailler jusqu'à ce que l'autre se fatigue.

«Alors je répète ma question : Qu'est ce que tu lui veux, à mon frère ? C'est quoi tes « arguments plus convaincant », hin ?»

Je n'avais pas de raison de le craindre... Pas encore... C'était peut-être d'ailleurs ça qui me rendait si vive et acide pour le moment. Et peut-être aussi parce que j'essayais de gagner du temps. Mon téléphone n'étais plus qu'à une enjambée, peut-être qu'en étant assez rapide je pourrais le récupérer pour prévenir Artur... Mais qu'est ce qui était préférable ? Lui dire de ne pas venir parce qu'un malade voulait sa peau ? Ou ne rien lui dire et espérer qu'il boudait encore suffisamment pour ignorer mon invitation ?
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Cesare DeMaggio
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMer 30 Déc 2015 - 2:07


Combien d’années s’étaient écoulé, depuis qu’il avait commencé la chasse ? Combien d’jours qui s’étaient tous ressemblés, d’actes si répétitifs qu’ils en étaient devenus mécaniques ? Combien de visages, combien de voix dont il se remémorait bien trop souvent ? Moïra Kovalainen ne serait qu’un faciès parmi les autres, une âme parmi les autres – une infime parcelle du lourd tribut qu’il aurait à payer, un jour ou l’autre, il n’savait quand. Peut-être lors du Jugement Dernier, se serait-il dit, s’il avait encore le luxe d’y croire ; peut-être, comme Isolde l’espérait, publiquement, lors d’un grand procès, devant tous ceux qui le détesteraient pour une raison ou une autre. L’accord silencieux qui l’avait lié au monde de la chasse aussitôt avait-il accepté la destinée que lui avait offerte son père, n’pouvait pas s’envoler comme ça : Rafael le lui avait rappelé lui-même, d’une bien cruelle façon, des mois plus tôt. D’autres s’en étaient chargés à nouveau, plus récemment : et voilà que Cesare s’engageait sur le même chemin, encore et encore, celui pavé d’bonnes volontés, d’bonnes intentions – vengeance, justice, peu importait le nom que ça portait. Il n’pouvait pas supporter l’idée que le tueur de sa sœur respire encore l’air d’ici-bas, alors même que la carcasse d’Aria était en train de pourrir, quelque part, sous terre. Tant de choses qu’il n’pouvait pas supporter, ces mots qu’il était incapable de prononcer – faute de moyens, faute de capacité à le faire : on lui avait sûrement appris à manier les armes et les poings avant d’argumenter ses opinions de manière crédible – pire encore, d’parler de quoique ce soit qui le traversait. C’n’était pas pour rien qu’il demeurait toujours une telle énigme, qu’il parvenait si bien à tromper les gens : on le prenait surtout pour un type froid, qu’il fallait apprivoiser lentement mais sûrement – la vérité était toute autre. La vérité était bien plus brutale, sanglante et dégueulasse : Cesare n’avait jamais été voué à être un humain, quelqu’un qui entretiendrait une quelconque relation avec qui que ce soit – fils au sang DeMaggio, il avait été voué à autre chose. Offert sans concession à une cause dont il n’savait plus aujourd’hui où elle pouvait bien aller. A quoi bon, à quoi bon – répétaient inlassablement les fibres entremêlées de son être, chaque parcelle de ses chairs qui souffraient le martyr à cause de l’absence d’Aria. Le silence assourdissant, la solitude – lui qui avait cru l’avoir toujours connue, s’l’être approprié comme sa plus fidèle compagne, il avait eu tort jusque-là, et c’n’était qu’aujourd’hui qu’il s’en rendait compte. Qu’aujourd’hui, tandis qu’il dévisageait chacune des personnes qui gravitaient dans c’monde, une vague de haine et de méfiance déferlant à travers toute son âme. Y’avait eu Aria, et personne d’autre comme elle ; l’acquise, s’était-il trop facilement dit sûrement – ça n’avait pas été faute d’avoir toujours été sur son dos, d’avoir inspecté le moindre de ses mouvements, passé au crible chacune de ses relations. Encore, toujours, pour les vingt-et-une années qu’ils avaient passées ensemble : une machinerie bien huilée, tout un pan de sa vie qui s’effritait dangereusement à mesure que les semaines s’alignaient, immuables, inévitables. Elles le vidaient de sa substance, lui arrachaient peu à peu toute raison d’se raccrocher à quelque chose : il n’y avait dans le néant que l’effroi, l’effroi simple et putride créé par son imagination incessante, les images de la mort d’Aria qui s’enchainaient et variaient inlassablement au gré des nuits. Encore, encore et encore : sûrement était-ce là une sentence qu’il avait bien mérité, une Pénitence qui le rendrait fou à tous les coups.

Fou, était-ce ce qu’il était devenu ? Impossible d’le dire, DeMaggio avait trop longtemps navigué dans des endroits de son âme que beaucoup jugeraient trop sombres, imprévisibles, ténébreuses – inhumaines. Alors quant à savoir où et quand il avait perdu la raison… il avait arrêté d’essayer, il y a un moment déjà. Aussitôt avait-il croisé le regard véhément et haineux d’Isolde, sous les éclats incendiés de l’entrepôt qu’il avait lui-même détruit, pour sauver sa sœur, ou parce que ça faisait partie de lui, parce que c’était ce qu’il était. Un tueur avant tout, particulièrement avant quelqu’un qu’elle pourrait aimer, qui pourrait l’aimer en retour – quelqu’un qu’elle méritait, somme toute. Une assurance à laquelle il s’était toujours raccroché, en fuyant la jeune femme, ses jugements sévères et toute possibilité de réconciliation : à quoi bon expliquer, s’justifier, alors même qu’il n’y avait que des déchets usités d’un passé bien meilleur à rattraper ? Cesare et Isolde n’seraient plus jamais le Cesare et l’Isolde qu’ils avaient été lorsqu’ils s’étaient rencontrés, lorsqu’ils s’étaient si volontiers raccrochés l’un à l’autre. D’tout ça, il n’restait rien – d’autres s’étaient âprement chargé de tout décimer. D’autres, d’autres, il n’avait su qui pendant bien longtemps : il tenait l’un des acteurs de sa déchéance aujourd’hui – et la folie pulsait désormais si facilement dans ses veines, qu’elle alimentait chacun de ses souffles, qu’il l’épousait si volontiers, qu’il s’y accouplait sans concession pour arriver à… ça. Ca, Moira à peine réveillée, qui grognait de douleur, marmonnait des paroles dont il n’avait cure. Rares avaient été les opinions dont il avait tenu compte au cours de sa vie – elles avaient toutes eu leur importance, à leur façon, le guidant et le façonnant pour devenir le type qu’il était. L’espérait-il en tout cas, encore profondément, quand bien même les apparences étaient toutes autres : Cesare était cette coquille vide qui s’était déjà présentée devant la rousse par le plus grand des hasards – c’était à croire que leur destinée avait voulu les guider jusque-là, la confrontation pure et dure. C’était donc le sang de cette fille, qui avait fait couler celui de sa propre sœur. DeMaggio contre Kovalainen, et peu importait qui tomberait : quelque part, le fils avait une certaine consolation à l’idée que peut-être, un jour, quelqu’un portant son nom crierait aussi âprement vengeance que lui. Son père, sa mère, difficile à dire : y’avait lui, pour le moment. Lui et Moira, et c’était tout ce qui importait : était-elle innocente ? Guère plus ou moins qu’Aria, sûrement, c’était ce que hurlait le torrent des convictions du frère déchu ; Cesare était celui qui avait volontiers oublié les facettes détestables de sa sœur, il se souvenait simplement de celle-ci avec la mort imprimée sur son visage, la sensation glaciale de sa peau contre les paumes de ses mains. Sa voix, éteinte à jamais. La lueur dans ses yeux, disparue pour toujours. Un martyr qu’il n’souhaitait à personne – qu’il avait sûrement déjà infligé pourtant, par l’ironie des choses, le plus grand sarcasme de l’existence : cette façon qu’avaient les destinées de s’entrecroiser pour amener une justice indéfectible, immuable, arbitraire et pourtant impartiale. Ici, maintenant, c’était l’tour des Kovalainen : était-ce forcer les choses, boucler la boucle ? Tant mieux. « C'est quand même pas courant, un malade qui assomme les gens pour leur faire boire de l'aspirine après... T'as déjà des remords ? » il n’connaissait que trop bien le sentiment cuisant que pouvait créer le remord – ça n’en était pas. Pas vraiment. C’était différent ; certains auraient dit un instinct sadique à faire durer les choses. Un esprit de contradiction, la capacité à repousser ce qui ne pouvait venir que trop tôt, l’ambiance glaciale qui flottait dans l’air et filtrait jusqu’à leurs poumons. « P’tèt que tu préfères les malades qui poignardent les gens et les laissent pourrir derrière eux. » qu’il ne put s’empêcher de répliquer, sa haine viscérale se transposant facilement – finalement – sur la mutante à la langue acérée. Y’en avait qui n’avaient franchement pas la gueule de l’emploi, parfois, pour faire des leçons de morale. Il n’était pas v’nu pour ça, pas même pour tester sa détermination : il en avait déjà pleinement conscience maintenant, ses yeux sombres analysant chacun des gestes et mouvements de son otage.

« Ta mère t'a jamais appris qu'c'est pas poli de fouiller le téléphone des gens ? T'as été élevé où, franchement ? » c’était comme si elle n’avait pas parlé, ou que les mots s’étaient enfoncés dans les oreilles d’un sourd : maintenant qu’il était si près du but, qu’il avait le nez collé au nom de celui qu’il avait tant cherché, Cesare pouvait facilement en oublier tout l’reste. Le passé, l’avenir qui s’étendait là, à quelques secondes de l’instant présent. Ou quelques heures plus tard. Il était clair que, de toute manière, il n’y avait rien à répondre à tout c’la ; c’n’était pas comme s’il s’attendait à ce qui que ce soit comprenne, accepte, ou bénisse sa vendetta, d’où il venait ou dans quelle direction il allait. Depuis bien trop longtemps déjà, il était un chasseur, un chevalier solitaire, qui n’avait que trop abruptement appris que c’était mieux ainsi. Elle était l’appât, guère la proie ; un fait que la rousse semblait encore incapable de calculer – c’qu’y n’était pas nécessairement une mauvaise chose. Sûrement était-ce le coup à la tête, la difficulté avec laquelle ses petits neurones se mettaient en place. Franchement, tant qu’elle restait sagement assise à sa place, ils pouvaient même en arriver à n’pas s’adresser la parole. Pas encore. Pas alors qu’ils n’avaient rien à s’dire, rien à comprendre l’un de l’autre, aucun espoir à retirer de ces retrouvailles. « Qu'est ce que j'en sais, moi ? Il viendra s'il a envie, s'il ne travaille pas... Je suis pas dans sa tête... » à nouveau, aucune réponse de la part du DeMaggio – Cesare semblait déjà être parti dans ses pensées, les calculs incessants des probabilités sous toute leur forme. La jeune femme allait-elle comprendre qu’elle n’était finalement qu’un instrument, posé bien en valeur, à celui qui viendrait la prendre ? Sûrement ; parce qu’il n’s’en cachait pas, n’tentait pas de la traiter d’une quelconque meilleure façon, ou d’faire la conversation avec elle rien que pour sympathiser, sauver les apparences. Ouais, déjà la dernière fois qu’ils s’étaient croisés, leurs joutes verbales avaient été loin d’être amicales – il n’y avait pas b’soin de se poser plus de question que cela, sûrement étaient-ils simplement incompatibles, incapables de s’adapter l’un à l’autre. Et ça convenait très bien au chasseur, tant que la mutante restait sur place, presque docile, uniquement combattive avec des mots qu’il pouvait aisément balayer : si elle avait un minimum d’instinct de survie, de toute manière, elle ne tenterait rien d’autre – un fait qu’il lui fit bien vite remarquer. Il avait lu le fameux message amical qu’elle avait envoyé à son frère après tout et elle devait déjà le savoir. « Ah ouais ? J'ai plus l'droit d'aller pisser ? J'suis encore chez moi alors t'es gentil, tu m'lâches... Qu'est ce que tu lui veux, à mon frère ? Il t'a piqué ton goûter ? Il a dit du mal de ta sœur ? Vois ça avec lui, j'ai rien à voir là-dedans... » et comme ça, juste comme ça, l’impassibilité de Cesare s’envola en une fraction de seconde. Il avait déjà quitté le rebord de la table vers lequel il avait été, alors que Moira continuait sa tirade. « Qu'est-ce que tu vas m'faire ? M'assommer à nouveau, si Artur ne vient pas ? Parce qu'il ne viendra pas, tu sais... Ce n'est pas parce que j'lui ai envoyé un message qu'il va rappliquer aussi, faut pas croire... » sans doute mentait-elle encore plus mal qu’elle l’imaginait ; « [color:7c34=0066ff]Alors je répète ma question : Qu'est-ce que tu lui veux, à mon frère ? C'est quoi tes ‘arguments plus convaincant’, hein ? » il passait comme ça, de l’eau obscure et calme à la tempête indécise en une fraction de seconde : elle avait à peine fermé la bouche qu’il était sur elle, empoignant brutalement sa tignasse rousse à l’arrière du crâne pour lui faire relever le nez. « J’vais t’conseiller de fermer ta gueule – et tu ferais bien d’m’écouter cette fois- » les mâchoires crispées, ce même air dément qu’elle n’pouvait que trop bien connaître ; il n’avait pas fini sa tirade à lui, que le téléphone de la jeune femme les alerta juste par-dessus son épaule. Il suspendit ses mots à une seconde éphémère et silencieuse, avant de relâcher la mutante, pour attraper l’objet qui ne lui appartenait pas. Sauvée par le gong, ou même son frère, presque sans le savoir ; et dans les entrailles du DeMaggio, gronda le monstre assoiffé de sang que ce même Kovalainen avait réveillé. Sans un mot, pour un temps à peine, Cesare reposa le téléphone. « On dirait bien que ton frère a un instinct de survie qui dépasse l’entendement. » ou un sixième sens, ou peut-être était-ce juste les circonstances qui le poussaient à devoir redoubler d’inventivité. Et c’était comme s’il le prenait bien, acceptait ce petit contretemps ; « Alors comme ça, tu es devenue aveugle ? » presque une ironie, qui força un rictus sur ses lèvres. « Dis-moi, c’est ton dégénéré de frère qui t’a vaccinée ? » pas besoin de réfléchir bien longtemps ; Moira avait été une mutante à leur dernière rencontre, une de ceux qui n’hésitaient pas à user de leurs pouvoirs en cas de complications. Or, elle ne l’avait pas fait, ici et maintenant, et se trainait une cécité qui n’avait pas existé lors de leur traque aux Greenberg . Un plus un, égal deux ; au moins pouvait-il garder ça, son esprit de déduction, des longues décennies de chasse qu’il avait menées ici et là. « Peut-être bien qu’j’aurais pu me creuser un peu plus la tête – rien qu’pour faire les choses différemment… » mieux, soi-disant parce qu’il s’était imaginé capable d’être plus vertueux, prompt à embrasser une autre destinée que celle baignée dans le sang de ses victimes. A sa ceinture, il tira le couteau qui lui avait tant de fois sauvé la vie – à défaut de toujours pouvoir trimballer un flingue, cette arme silencieuse et discrète s’était révélée indispensable. Et il en avait affuté la lame, encore et encore, sur de nombreuses personnes au cours des derniers mois – pour en arriver là. « Mais j’suppose que tu dois connaître le truc- vu qu’ton frère est un peu allé à la même école. » l’avait-elle été aussi ? Non – évidemment, la rousse tirait comme un pied et s’était laissée surprendre si facilement. Curieusement, le schéma d’cette famille inconnue ressemblait au leur, aux DeMaggio – des transmutants et des chasseurs qui s’mêlaient les uns aux autres, se trahissaient les uns les autres. S’déchiraient les uns les autres. Et tous se rejoignaient là, à la croisée des destins, la clé de voute de leur existence : à celui qui survivra.
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeLun 4 Jan 2016 - 18:26

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

« P’tèt que tu préfères les malades qui poignardent les gens et les laissent pourrir derrière eux. »

Je haussais un sourcil, regrettant immédiatement ce geste qui suffisait à accentuer la migraine qui enserrait mon crâne dans un étau.

« T'essayes de me faire croire que tes intentions sont louables et que, justement, tu n'iras pas me poignarder après m'avoir expliqué ton super plan de super vilain ? »

Ca j'n'y croyais pas. Il n'était pas là pour me faire la causette et encore moins à m'aider à faire la cuisine. Etrangement, j'imaginais ce gars là dans n'importe quelle situation, n'importe quelle tenue, mais surtout pas avec un tablier de petit chef et un fouet à mayonnaise dans les mains. L'image était d'ailleurs si irréaliste que je me retenais de rire à grand peine. Au lieu de ça, je continuais à le provoquer, imaginant peut-être que ça le mettrait suffisamment hors de lui pour qu'il finisse par cracher le morceau... Mais rien à faire. Il restait là à me regarder avec ses yeux de merlan frit sans prononcer un mot. Alors quoi ? Il hésitait ? Ou bien cherchait-il le meilleur moyen de me faire la peau ? Quitte à crever là, j'aurais voulu savoir pourquoi. Quelle cause chère à ce grand malade pouvait valoir la vie d'une nana qui ne lui avait rien fait ? Car soyons réaliste, je ne me souvenais pas lui avoir fais quoi que ce soit ! Je l'avais ptet traité de tous les noms, à la réflexion... Mais il devait être vachement susceptible pour vouloir ma peau pour si peu ! Et qu'est ce qu'Artur venait faire là-dedans, bon sang ? Qu'est ce que mon incorrigible petit frère avait ENCORE fait ? Je n'étais pas dans sa tête, ça c'était certain...

La seule dont j'étais sûre, c'est que j'avais poussé le bouchon un peu loin. D'un calme olympien, mon agresseur était passé à la colère et l'agressivité. Ainsi donc il était capable de s'énerver un peu ? C'était bon à savoir pour la suite, et je n'en menais pas large. Tandis qu'il agrippait mes cheveux, les tirant en arrière à m'en déboîter les cervicales, je me débattais pour me libérer. Entre ça et le coup sur la tête, j'avais l'impression que cerveau était prêt à imploser sous la douleur, et des larmes perlèrent à mes yeux, comme si ça suffisait à calmer tout ça... Comme si ça allait pousser l'autre à lâcher prise, tiens... Et entre deux grognements de douleur, j'articulais en ricanant.

« Ah... On dirait bien qu'j'ai touché un point sensible... »

Mais je n'ajoutais rien... Je venais croiser son regard, qui suffit à me glacer le sang et me clouer le bec une bonne fois pour toutes. Ca, c'était le regard d'une bête assoiffée de vengeance, le regard d'un type qui n'a plus rien à perdre et cherche juste à détruire ce qui l'entoure pour laisser sa trace dans l'Histoire... Ou peut-être simplement pour avoir l'impression de faire quelque chose de juste. Ce regard là, je le connaissais et surtout je le comprenais. Seulement, ça ne me disait toujours pas ce qu'il voulait à Artur, mais si je doutais que ça soit quoi que ce soit de positif. D'ailleurs, l'autre me le confirma en parlant de l'instinct de survie de mon frère... Deux choses étaient certaines : Artur n'avait pas l'intention de venir, et mon agresseur avait celle de le tuer. En soi, ce n'était pas plus mal que mon frère ne pointe pas le bout de son nez. Mais s'il ne venait, je doutais que l'autre reparte gentiment en s'excusant pour le désordre qu'il venait de causer.

Alors, peut-être pour patienter un peu, retarder l'échéance ou se mettre dans le bain, il se mit à user des mêmes sarcasmes que les miens... Des réflexions qui avaient le don de me faire monter au créneau en deux secondes chrono.

« Oh ta gueule, tu veux ? J'ai eu des petits problèmes de vue mais ça va mieux... J'peux voir ta sale gueule, j'm'en serais bien passé... »

Voilà voilà... La bassesse d'un langage proche de celui d'une collégienne. Mais son sourire me donnait envie de lui limer les dents sur la table, et je serrais plus fort les poings lorsqu'il poursuivit dans la provocation.

« La ferme ! Tu sais rien d'moi ou d'mon frère... Qui te dit que c'est pas un autre qui m'a vaccinée, hin ? »

Je n'avais pas envie d'admettre qu'Artur était l'unique et entier responsable de toute cette mascarade. C'aurait été admettre qu'à défaut d'être dégénérée, mon frère avait bien peu de limites pour parvenir à ses fins. Mais ce qui m'effrayait le plus, c'est que ce type en sache autant sur moi et Artur que j'ignorais jusqu'à son prénom. Je jetais un œil à mon téléphone, me demandant si j'aurais le temps de l'attraper et d'appeler Artur avant que l'autre ne se jette sur moi... Mais c'était une mauvaise idée. Je doutant tant de mon frère ces derniers temps que je me demandais s'il ne m'enverrait pas simplement balader, me livrant en pâture à un cinglé, ou si au contraire il rappliquerait en vitesse avant que nous ne nous fassions tuer tous les deux. Trop occupée à peser le pour et le contre, je ne remarquais pas tout de suite l'objet que mon agresseur avait tiré de sa ceinture. Quand je le remarquais, je fis un bond en arrière, les mains levées en signe de reddition.

« Oh la... Tout doux, mec... On est peut-être pas obligés d'en arriver là, tu n'crois pas ? On pourrait gentiment discuter comme deux adultes civilisés, range ton arme, s'il te plaît... »

Là je commençais à avoir peur et à véritablement prendre conscience de ce qui était en train de m'arriver. Ce n'était certainement pas pour s'éplucher un citron qu'il avait sortit un couteau de chasse, ce grand malade !

« A... Attends, tu m'as encore perdue ! Bordel mais c'est quoi cette histoire ? De quelle école tu parles ? Si tu es un genre de mutant cinglé qui s'en prend à ses semblables, t'as pas tiré le gros lot, mon vieux. J'ai été vaccinée et Artur est aussi humain et dépourvu de mutation que la quasi totalité de la population de cette planète. »

Réfléchis, Moira, réfléchis... J'avais beau me triturer l'esprit, je n'arrivais pas à faire le lien entre tout ça... A moins que... En fait si. Je ne voyais qu'un seul lien. Une chose évidente à laquelle j'aurais du penser plus tôt.

« Ce n'est pas pour ça que tu en veux à Artur, hin ? C'est le contraire... Tu lui en veux parce qu'il fait le clown dans l'autre camp... Je vois pas pourquoi tu lui en voudrais autrement. Alors non, je ne connais pas le « truc », comme tu dis. Artur n'a rejoint les rangs des hunters qu'après mon départ, il y a plus de dix ans, je n'ai appris qu'il avait merdé que depuis un mois. T'auras pas les réponses que tu cherches avec moi... »

En revanche... Si je pouvais toujours tenter de sauver ma peau et celle d'Artur, j'n'avais aucun scrupule à l'idée d'honteusement balancer le fou furieux qui lui servait de mentor. Ca ne ferait jamais qu'une personne de plus sur Terre pour le haïr.

« Tu d'vrais interroger Moren... Kingsley Moren. C'est le type qui l'a formé. Je doute qu'Artur ait fait quoi que ce soit sans son consentement... Tu veux bien baisser ton arme, maintenant ? »

Pas sûr que ça marche... Pas sûre du tout, même, mais ça valait la peine d'essayer. Et ça me faisait chier, oh oui ça m'faisait chier de balancer ainsi le type que je rêvais d'étrangler, dont je souhaitais plus que tout voir la tête perchée au bout d'une pique... Mais c'était peut-être mon seul argument pour détourner l'autre d'Artur.
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMar 5 Jan 2016 - 1:27


Les ennemis de Cesare avaient revêtu bien des apparences ; ils avaient guidé sa vie, façonné celle-ci à l’image de leurs démons, le jeune homme soumis à leurs attaques pernicieuses, où qu’ils soient. Et qui avait été l’adversaire, en fin de compte ? Les transmutants et leurs pouvoirs surnaturels, à même de détruire le monde au gré de leurs envies ? Ces êtres humains sans vertus aucune ? Sa famille, le propre sang qui battait à ses veines ? Le fait était là, aussi immuable qu’injuste et inacceptable – les gens à qui il avait pu se fier s’étaient comptés sur le doigt d’une main, ils n’avaient été que quelques visages dont les reflets continuaient de le hanter. Y’avait eu Isolde ; en cette confiance pure, quasi aveugle qu’elle lui avait voué alors même qu’il n’avait fait que piètrement lui mentir, évitant les sujets qui fâchaient, alors même qu’elle lui avait promis son cœur, une destinée meilleure. Y’avait eu Skylar, l’irremplaçable Skylar, le faciès des rares moments d’insouciance dans sa jeunesse, les petites marques de rébellion qu’ils avaient commises ensemble, comme ça, dans le dos de leurs parents. Skylar qui avait été morte pendant si longtemps qu’ils n’daignaient guère aujourd’hui observer les dégâts que le silence avait causé à leur relation. Le fait était qu’ici, aujourd’hui, la jeune mutante n’était pas à ses côtés pour mener cette vendetta dont il avait tant besoin : pas de Skylar, pas d’Isolde. Pas d’Aria – et pourtant, dans l’océan des doutes et des questionnements, les allers et retours qu’il avait commis entre son passé et l’humanité qu’il avait tant cherché, c’était le souvenir de sa sœur qui motivait chacune de ses intentions. Moira n’avait rien pour ressembler à sa cadette ; si ce n’est peut-être bien c’caractère qu’elle affichait si volontiers aux yeux de ses agresseurs : si prompte à répondre, provoquer, relancer les joutes verbales aussitôt qu’elle ouvrait la bouche pour déverser le venin d’une vipère. C’avait été tout Aria ça aussi, la défense de celles qui avaient des choses à prouver sûrement, la quête sempiternelle de la petite brune à la recherche de la fierté de son patriarche – somme toute, dans le champ de bataille qu’avait été toute sa vie, la fille DeMaggio n’avait toujours eu que ça, son caractère pour la rendre un tant soit peu orgueilleuse. Cesare y était donc habitué ; il avait affronté les provocations diverses et variées, les adversaires aux langues aiguisées ou aux regards chargés de hargne – la rousse Kovalainen n’était guère différente, et si elle ne se laissait pas à prononcer des mots dont elle ne connaissait pas l’emprise, peut-être bien que les choses pouvaient bien s’passer entre eux. Peut-être bien ; peut-être – avec toujours la même hésitation pesant dans l’air, tendant celui-ci d’une électricité sans cesse renouvelée, à chaque fois qu’ils se dévisageaient l’un l’autre. Moira était l’appât, Moira serait bientôt une encombrante, un témoin dont il n’avait pas besoin. Et Moira était cette jeune femme emplie de rancœur et revancharde sur les bords – c’était ça, sûrement, la prescience du sang, l’importance du devoir familial que ses géniteurs étaient incapables de comprendre. De la même façon qu’il était prêt à remuer ciel et terre pour affronter de face le meurtrier de sa sœur, sa mutante d’interlocutrice en ferait de même s’il devait abattre Artur ici, à ses pieds. Non, en décidant de mêler Moira à l’équation, le DeMaggio avait signé son arrêt de mort à elle aussi : était-ce pour cela qu’il était si enclin à supporter sa vilénie ? Pour cela qu’il ne l’observait pas plus de quelques secondes d’affilée, préférant se concentrer sur autre chose dès l’instant d’après ? Pour cela qu’il l’avait attaquée par derrière et avait presque espéré qu’elle ne reprenne jamais conscience ?

En Cesare se faisaient bataille aujourd’hui deux aspects de sa personnalité : celui qui avait germé en lui aussitôt avait-il tenu une arme entre ses mains, le chasseur impétueux et brutal, déterminé et froid. Et le Cesare qui était né presque malgré lui, trouvant toute sa profondeur et son importance au fond des prunelles d’Isolde. Isolde et Aria, Aria et Skylar. Ces quelques rares relents d’humanité qui en valaient la peine, qui avaient vu une valeur à l’humain qu’il avait toujours été, au-delà du bras armé qu’on lui avait dit qu’il était. « T'essayes de me faire croire que tes intentions sont louables et que, justement, tu n'iras pas me poignarder après m'avoir expliqué ton super plan de super vilain ? » il lâcha un vague ricanement, plus torve et sarcastique qu’autre chose, comme si, le temps faisant, les faciès s’alignant, Cesare avait enfin compris l’concept : « J’suppose qu’avec les bons prétextes on peut tout justifier, hein. C’est une question d’point de vue après tout. » mais ça n’avait pas été faute d’en sortir, pas été faute de préférer la fuite au combat. Il avait poussé Aria à se planquer comme une criminelle, ils avaient vaqué, survécu sans vraiment vivre alors même que les frontières de Radcliff s’étaient refermées autour d’eux. Ils étaient restés,  figés par un sens du devoir qu’ils n’avaient su expliquer : le grand-frère avait poussé sa cadette à la prudence, se fondre dans la masse et ne surtout pas mener une guerre armée contre leurs parents, comme ça, aux yeux du monde. Il avait eu tort, et ç’avait été Aria qui en avait payé le prix, comme ça, sûrement au beau milieu de la fête la plus innocente et désuète de Radcliff. Le beau feu de joie, qui n’avait eu sa place nulle part, car la joie n’avait jamais été synonyme à cet endroit, et quand bien même elle avait pu l’être pour certains, voilà des mois déjà qu’elle avait quitté l’atmosphère pourri du Kentucky. A cause de Lancaster, à cause d’ces gens qui le suivaient si volontiers au beau milieu du chaos, à cause de ceux qui rétorquaient de la même façon. On pouvait blâmer tout l’monde, on pouvait haïr tout l’monde ; somme toute, ça aussi, c’était une question d’point de vue. « J’ai rien à justifier, certainement pas à quelqu’un comme toi. » elle, non pas une dégénérée ou une fille à la  langue bien pendue et aux sarcasmes incessants : une Kovalainen, peu importait ce que ça pouvait signifier – un point sensible en elle-même, quand bien même une once de retenue empêchait encore Cesare d’abattre une lame glacée entre les côtes de la jeune femme. Peut-être parce que c’était plus malin de l’utiliser comme petit prix à agiter dans le vent pour faire accourir le soi-disant frère. Peut-être parce qu’il s’accrochait encore à ça, une vague illusion qu’il trouverait mieux à faire – qu’il s’abaisserait pas à ça. En quinze ans de chasse, le DeMaggio n’avait jamais agi de la sorte, préférant l’action du terrain, la brutalité d’un combat déclaré à toutes les ruses serviles que d’autres n’hésitaient jamais à utiliser. Avait-ce été une combine, après tout, de s’attaquer à Aria en premier dans l’attente que le frère ainé sortirait de sa cachette, bondissant tel un animal blessé à la gorge des meurtriers ? Déjà, des dizaines de noms s’alignaient, appartenant à des types, des femmes, des enflures capables d’penser comme ça, et d’mettre un tel plan à exécution. C’était comme disait Isolde, à un moment, il fallait savoir s’adapter à ses adversaires – et répondre de la même façon qu’ils l’auraient fait ; en embrassant les mêmes ténèbres qu’eux. La mutante l’avait-elle compris ? Avait-elle saisi un certain désarroi, la hargne glacée qui pulsait dans les veines du chasseur au rythme du palpitant empressé par la rage ? Peut-être bien, après ses provocations, la voilà qui demeurait silencieuse, à encaisser, encaisser les petites rixes dans lesquelles il se lançait lui. A chacun son tour de toucher un point sensible, sûrement : « Oh ta gueule, tu veux ? J'ai eu des petits problèmes de vue mais ça va mieux... J'peux voir ta sale gueule, j'm'en serais bien passé. (…) La ferme ! Tu sais rien d'moi ou d'mon frère... Qui te dit que c'est pas un autre qui m'a vaccinée, hin ? » à quoi bon s’donner la peine de lui répondre ? C’était presque sous le coup d’un cercle vicieux, de provocateur à provoqué, qu’ils s’adressaient la parole. Tout ce que Cesare voulait était là, à portée de main – un coup de téléphone, sûrement, et le frère Kovalainen accourrait comme le ferait n’importe qui. Sûrement.

Elle n’était clairement pas la guerrière exemplaire, chasseresse à même de se défendre : dans ces mêmes circonstances, Aria avait sûrement offert plus de résistance que la rousse qui déjà, frémissait de la tête aux pieds à la vue d’une lame aiguisée et glacée. La prescience d’une menace qu’il n’voulait qu’à peine mettre à exécution – Cesare et sa recherche désespérée d’une autre nature qui n’avait jamais été vouée à exister. Qu’ils en payent tous le prix ; lui répétait encore et encore une conviction maladive, la graine de folie assoiffée qui germait en lui. Là, face à face, le DeMaggio tenant sa justice au bout des doigts – ils avaient été voués en arriver là depuis avant même qu’ils n’se connaissent, n’se supportent pas et se haïssent profondément – chaque minute qui s’égrenait n’était qu’une illusion, d’la poudre aux yeux comme pour faire durer le plaisir. Ou le supplice. « A... Attends, tu m'as encore perdue ! Bordel mais c'est quoi cette histoire ? De quelle école tu parles ? Si tu es un genre de mutant cinglé qui s'en prend à ses semblables, t'as pas tiré le gros lot, mon vieux. J'ai été vaccinée et Artur est aussi humain et dépourvu de mutation que la quasi-totalité de la population de cette planète. » et sans le vouloir, la Kovalainen venait de lâcher une information capitale, essentielle – l’avantage qu’il n’avait su avoir en épluchant des paperasses au sujet du fameux Artur. Contrairement à son interlocutrice, le jeune homme était dépourvu de toute mutation ; il n’eut pas le temps de vraiment déguster ces mots avant qu’elle ne reprenne sur sa lancée, comme si son cerveau s’mettait lentement mais sûrement en marche. Enfin. « Ce n'est pas pour ça que tu en veux à Artur, hin ? C'est le contraire... Tu lui en veux parce qu'il fait le clown dans l'autre camp... Je vois pas pourquoi tu lui en voudrais autrement. Alors non, je ne connais pas le « truc », comme tu dis. Artur n'a rejoint les rangs des hunters qu'après mon départ, il y a plus de dix ans, je n'ai appris qu'il avait merdé que depuis un mois. T'auras pas les réponses que tu cherches avec moi... » « J’ai pas b’soin de réponse de ta part. Tu penses sérieusement que j’t’ai assommée pour te tirer des informations ? Et sur quoi ? Tu sembles aussi stupide que  la chaise sur laquelle t’es assise. » ou du moins, naïvement bernée sur le type avec qui elle partageait du sang, des gènes et un nom d’famille. Sourcils froncés, visages fermé, Cesare n’avait qu’à peine pensé la petite pique qu’il avait lâché, comme si ç’avait simplement été un moyen de la faire taire. Qu’elle cesse d’essayer d’comprendre ce qui était infiniment simple et la dépassait totalement – oui, Moira n’était qu’un petit asticot suspendu au bout d’un hameçon, la viande fraiche pour attirer un plus gros gibier. Et ainsi d’suite et ainsi d’suite. « Tu d'vrais interroger Moren... Kingsley Moren. C'est le type qui l'a formé. Je doute qu'Artur ait fait quoi que ce soit sans son consentement... Tu veux bien baisser ton arme, maintenant ? » Moren – le nom suffit à provoquer un éclair de dégoût tout le long de son échine, la hargne ravivée en un éclair, comme ça, par des mots maladroits dont elle n’comprenait même pas l’impact : « Moren – qu’est-c’que tu sais sur lui, hein ?! » il s’était rapproché à nouveau, pressant, sans même avoir songé un instant à l’éventualité de baisser son arme pour rassurer un tant soit peu sa captive : il semblait qu’aux abords de la panique, elle était tout de suite plus loquace, et enfin intéressante. « Ton frère est plus con qu’il n’y parait s’il a décidé d’suivre Kingsley Moren. T’as d’la chance s’il a pas encore été transformé en fanatique religieux. » qu’il marmonna, avant de sonder la jeune femme. « C’est Kingsley qui lui a dit d’te vacciner ? Ou qui l’a convaincu de le faire ? » si lui avait toujours eu une profonde aversion pour le chasseur et ses pratiques, y’avait toujours des petits connards prompts à le suivre, l’admirer, vouloir l’impressionner. Rayen faisait partie de ceux-ci, comme une idiote ; elle, elle essayait d’satisfaire tout le monde, d’prouver sa valeur coûte que coûte, quitte à s’acoquiner d’un monstre pareil. « Crois-moi, si ton frère bosse avec Moren, j’ferai une faveur à tout l’monde en l’étripant. C'est juste une cause perdue. »  à elle-même, à tous les autres – hunters, dégénérés ; une évidence aussi froide que la voix du DeMaggio. D’une main déterminée, rattrapée par une hargne renouvelée par le nom Moren, Cesare attrapa le téléphone portable de la mutante, le lui mettant sous le nez. « Maintenant on va faire un truc. Soit tu trouves un moyen d’convaincre ton frère de venir, soit c’est moi qui m’en occupe. Et crois-moi, peu importe c’que tu peux penser, si c’est pas sur lui que ça tombe, ce s’ra sur toi – et si tu doutes de ma détermination, t’as qu’à t’dire que Kingsley Moren m’a appris quelques trucs, à moi aussi. » d’ces pratiques qui le répugnaient au plus profond de lui-même ; mais maintenant, là, juste dans les yeux clairs de la mutante, les démons de Cesare hurlaient si fort à la vengeance qu’il était sourd au reste, sourd à la retenue ou à cette humanité inutile. Car dans tous les visages de ses ennemis, toutes les auras de ceux-ci, il n’pouvait songer à pire dernier visage à voir avant de mourir, que celui de Kingsley. Soudainement, le supplice d’Aria revêtait une toute autre apparence, plus lugubre et sanglante que ce qu’il avait eu la force d’imaginer – c’était à croire que c’était tout ce dont il avait besoin, comme motivation.
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeJeu 7 Jan 2016 - 17:27

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

J'avais l'impression d'halluciner... A croire qu'il m'avait vraiment cogné un peu trop fort, ce malade... Avec de bons prétextes on peut tout justifier ? Et mon genou dans tes parties, tu veux voir s'il est justifié ? C'était totalement gratuit, cette animosité que nous avions l'un pour l'autre, mais pour une raison que je ne cherchais même pas à expliquer, j'avais juste envie de le fracasser jusqu'à ce qu'il ferme son claque merde. Enfin... Après m'avoir dit ce qu'il voulait à Artur. Car bizarrement, je doutais qu'il ait très envie de l'inviter à boire une bière, ou alors il avait de curieuse façon de le faire. Si chez lui on envoyait les invitations avec un gros bleu sur le front en bonus, je n'osais pas imaginer la gueule des faire part de mariage. Pourtant, je ne répliquais rien de plus et me contentais de lever les yeux au ciel. C'était stérile et voué à l'échec, ce genre d'échange. Pourtant, je n'avais pas l'impression de demander quelque chose de compliqué : Quitte à me faire démolir, je voulait savoir pourquoi, au nom de qui, de quelle cause... ? Et je haussais un sourcil lorsqu'il appuya ce « toi » tellement dédaigneux.

« Oooh... Bah alors... J'suis pas assez bien pour toi, c'est ça ? Justement si, t'as des choses à justifier. On ne fracasse pas le crâne de quelqu'un contre une porte sans raison valable. »

Bordel, mais donne-moi la moi, cette raison ! Je commençais à m'impatienter, la douleur de mon crâne était à peine calmée par l'aspirine, et j'avais la gorge sèche. J'aurais vendu mon âme pour un verre de thé glacée ou une bière bien de chez moi, tiens... Bon sang que je regrettais d'être clouée sur place et d'avoir pratiquement tout oublié des techniques de défense de mon père... Je les regrettais d'autant plus maintenant que le grand malade qui me faisait face brandissait un couteau. Et il n'avait pas l'allure fébrile de celui qui hésite, qui ne sait pas ce qu'il fait, qui en est encore à son coup d'essai... Non, il avait tout du type qui tient son arme aussi aisément qu'un innocent stylo, qui le tient fermement et qui a déjà du s'en servir un paquet de fois. Et ça ne faisait qu'accroître plus encore ma terreur. Car soyons honnête, j'étais terrifiée. Pétée de trouille, dites ça comme vous voudrez. Aussi terrifiée que cette fois où  Griske était venu toquer à ma porte, plus encore que celle où ce dégénéré de hunter m'avait à moitié étranglée dans une rue... Mais pas autant que le jour où je m'étais retrouvée face à Moren. Non lui... Il avait une place toute particulière dans mon esprit, à mi chemin entre le monstre de mes cauchemars et la pinata que je rêvais de défoncer à coups de barre à mine.

J'avais le regard rivé sur la lame du couteau, comme si le fait de le regarder pouvait la rendre inoffensive. Et si je servais à monsieur le grand malade ma plus belle moue vexée, je n'en menais par large. Car s'il n'avait pas l'intention de m'arracher des renseignements, c'est qu'il n'était pas venu négocier. Je l'imaginais déjà faire de moi un joli petit tas de viande hachée, et ce n'était pas pour me rassurer, loin de là. Jusqu'ici, je m'en étais toujours sortie avec des bleus, des contusions et de grosses frayeurs, mais cette fois j'avais un étrange présentiment. Celui que je ne m'en sortirais pas aussi bien, cette fois. Ma voix s'était faite moins assurée, plus tremblante... Et je regrettais que ma mutation ne soit pas revenue en même temps que les effets secondaires du vaccin s'estompaient. Car tout comme Artur, j'étais persuadée qu'il ne pouvait pas s'être trompé de seringue... Ça ne lui ressemblait pas.

« Mais je t'emmerde, mon p'tit père ! Et ma stupidité aussi ! Toi en revanche t'as pas l'air capable de faire marcher tes neurones deux secondes pour comprendre que c'que tu fais est voué à l'échec... Artur viendra pas, fous-toi ça dans le crâne ! »

Je lançais alors mon dernier argument, probablement le seul, l'unique nom qui pouvait éventuellement détourner mon adversaire d'Artur, et de moi par la même occasion. Raté... Il s'approcha un peu plus, et je me levais avec une telle vivacité que je vacillais. La nausée me pris et je manquais alors de vomir sur ses chaussures, ce qui ne l'aurait certainement pas aidé à se calmer. Pâle comme un mort, je repoussais la chaise plus loin et reculais, me foutant royalement du fait qu'en quelques pas, j'aurais atteint le bar et ne pourrais plus reculer davantage. Qu'est ce que je savais de Moren, c'est vrai ça ? Suffisamment de choses pour savoir qu'il méritait cent fois le bûcher, le pilori, la question, l’écartèlement, la dame de fer et même un bon petit démembrement des familles ! Seulement ça, il devait le savoir... A moins que ça ne soit l'un de ses potes, auquel cas il choisissait aussi mal ses fréquentations qu'Artur.

« C'est le roi des connards, ça te va ? Il se fait passer pour un honnête avocat mais c'est une espèce de fanatique qui traque et tue les gens comme nous pour le plaisir... On me fera pas croire que c'est pour autre chose... Y a rien à savoir de plus... »

Mon ton amer parlait pour moi. C'était évident que je n'avais pas besoin d'ajouter que Moren était responsable de la mort de quelqu'un qui m'était cher. Et de toute manière, ce n'était pas avec un type armé dont je ne savais rien que j'allais me mettre à pleurnicher sur la mort de mon fiancé. Je ne le faisais déjà pas avec mes proches, alors encore moins avec un taré ! Et finalement, il me confirma que lui non plus n'avait pas l'air de beaucoup apprécier Moren. Pour le coup, Artur était plus qu'un peu con. Il était naïf, influençable, s'était fait berné et se laissait maintenant emporter par le courant de haine que Kingsley avait déversé sur lui.

« Ah... Pour changer Artur en fanatique religieux, faudrait encore qu'il croit en autre chose que la science et les chiffres... C'est pas d'main la veille que mon frère ira prétendre qu'il tue des gens au nom d'un type que personne a jamais vu... », je pinçais les lèvres, le foudroyant du regard. « Bien, jolie déduction, Sherlock... C'est lui, ouais... Pourquoi ? T'as eu des problèmes de ce genre toi aussi ? »

C'était plus la moquerie que l'intérêt qui ressortait de mon discours, finalement. Artur était intelligent, il était censé savoir réfléchir... Sauf que ce petit con s'était bêtement laissé embrigader par le roi des manipulateurs. Parce que ce fou furieux lui avait dit que la seule manière de me sauver et de sauver Ellie était de me vacciner, Artur avait accouru comme un brave petit toutou et m'avait planté sa seringue dans le cou sans la moindre hésitation. A croire que Moren l'avait lobotomisé au passage.

Et puis la menace tomba. Ou plutôt la certitude que mon agresseur en voulait à la vie d'Artur. Si j'en avais été convaincue assez rapidement, c'était autre chose que de l'entendre. Alors, bêtement, j'oubliais la lame qui me menaçait toujours, repoussant la terreur pour laisser la colère prendre le dessus. Je l'attrapais par le col et sifflais entre mes dents serrées.

« Touche à un seul cheveu d'Artur et je te jure... Je te jure que j'te fais la peau. Tu peux te marrer, penser c'que tu veux, si tu touches à mon frère, je t'écorche vif, c'est clair ? Alors maintenant, tes menaces tu peux te les carrer au cul. Parce que je n'appellerai pas Artur, je n'irai pas signer son arrêt de mort pour te faire plaisir. De toute manière, que je l'fasse ou non, tu vas m'tuer. Alors autant qu'tu fasses ça maintenant et qu'Artur reste en dehors de ça. Moren t'a ptet appris deux trois trucs... »

Je le lâchais d'un geste vif, tremblante de colère, et répliquais d'un coup de genou dans l'estomac pour le faire reculer avant d'attraper mon téléphone. Si je n'avais pas été aussi persuadée que ma mutation n'existait plus, je aurais pu la laisser s'exprimer pour moi, j'aurais pu me battre à armes égales avec ce type... Pourtant elle était là, commençant tout juste à se réveiller après un mois d'hibernation.

« Mais c'est pas ça qui va m'faire plus peur. De toute manière j'ai déjà peur, alors un peu plus un peu moins... Finalement, t'es un suiveur, toi aussi... S'il t'a appris quelque chose, c'est qu't'as du le suivre comme un petit toutou bien élevé... C'est pathétique, tiens... »

Derrière moi, posé sur le plan de travail, y avait ce service à couteaux de cuisine que j'avais depuis des années... J'aurais pu en attraper un et tenter de me défendre avec... Si je n'avais pas eu affaire à quelqu'un capable de retourner mon arme contre moi. Finalement, ça avait du bon de l'avoir déjà vu à l’œuvre une fois. Je profitais d'avoir une ouverture pour me faufiler comme je le pouvais à l'autre bout de la pièce. Non seulement j'y voyais mal, mais j'avais l'impression d'être sur un bateau en pleine tempête. Près de la cheminée, j'attrapais le premier objet qui me tombait sous la main : Une bouteille de bière, restée là depuis la dernière visite de Seth. J'en brisais le fond pour m'en faire une arme de fortune, pas pour autant plus rassurée.

« Si t'as cru que j'me laisserais faire gentiment, tu t'es fourré le doigt dans l’œil jusqu'au coude. »

Si j'étais assez rapide, j'aurais peut-être le temps d'appeler quelqu'un à l'aide... Mon père, tiens... Maintenant qu'il m'avait révélé qui il était, je savais qu'il pouvait réduire mon adversaire à un petit tas de cendres d'un claquement de doigt. Mais me défendre face à un adversaire bien plus entraîné que moi et retrouver un numéro que je ne connaissais pas encore par cœur, ça me semblait compliqué.

Pour ne pas dire suicidaire.
crackle bones
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Cesare DeMaggio
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeJeu 7 Jan 2016 - 20:21


La chasse l’avait amené sur bien des chemins ; pour la plupart obscurs et tortueux avec des années de recul, dans ces actes qui avaient peu à peu déchiqueté son intérieur, les parcelles de son âme. Au final, les seules qui avaient survécu à la gigantesque machine du destinée imposée par son patriarche et toutes les attentes familiales, avaient été celles vouées à Aria. Aria et ses yeux clairs, son insouciance, son sourire, de ces petites habitudes qui avaient permis de chasser de son esprit, tous les noirs secrets et cauchemars qu’il gardait soigneusement pour lui. Encore aujourd’hui, personne n’connaissait quoique ce soit de tout c’temps passé sur les routes, entre Radcliff et d’autres endroits, à exterminer des gens qui n’avaient rien d’mandé. Sa sœur en avait eu quelques échantillons, mais jamais elle ne l’avait accompagné, il avait toujours refusé, comme déterminé à cacher à celle-ci le masque monstrueux du chasseur de dégénérés duquel il s’était si facilement affublé. Et ce, pour la plupart de son existence : sur les presque vingt-sept années de vie qu’il avait connues, nombre d’entre elles avaient été vouées à la traque, à la chasse, à la mort en elle-même : et en tout c’temps, combien d’âmes exactement avait-il livrées aux griffes de la Faucheuse ? Combien de cadavres avait-il laissés derrière lui ? Sûrement que dans l’ordre du monde, Cesare DeMaggio était l’une des dernières personnes ayant l’droit de réclamer vengeance ou justice ; il le faisait quand même, défiant tout ce que les autres appelleraient c’qu’il avait bien mérité. Après tout, n’avait-il pas imposé le même supplice à tous les proches des gens qu’il avait lui-même tués, au nom d’un fanatisme planté et alimenté dans son cerveau depuis son plus jeune âge ? C’avait été une expérience servile et assassine qui l’avait forgé, transformé en un animal dont peu d’gens avaient vu le visage, en fin de compte – Skylar s’en faisait probablement quelques idées, comme ça, en supposant le tracé de vie de son ami, alors même qu’elle avait grandi et fui une famille de chasseurs aussi folle que la sienne. Mais elle était la seule, la seule à saisir, la seule à comprendre, la seule à savoir. La seule à pouvoir se projeter concrètement dans ces desseins arides et complexes – y’avait Isolde, qui parlait en boucle de choix, de décision, du fait qu’il aurait pu choisir une vie différente. Il l’avait fait, seulement, vingt ans trop tard ; et les années et les cadavres resteraient irrémédiablement inscrits sur son âme comme des atteintes à l’humanité avec laquelle il avait pu voir le jour. Le monstre était toujours là, quelque part, caché derrière un faciès qui avait tenté de s’faire plus humain, trop vulnérable : au temps où on n’aurait pas oser faire couler le sang d’un DeMaggio, celui-ci était aujourd’hui souillé par l’indifférence et ces hunters qui prônaient nettoyer le patronyme en supprimant les éléments gênants. Aria en premier. Cesare ensuite, sans doute ; la menace était là, constamment pesante sur son échine, un murmure affamé par-dessus son épaule – irrémédiablement, on viendrait pour lui. Alors pourquoi tenter quoique ce soit ? Pourquoi prétendre être ce qu’il n’était pas ? Non, non – il avait pris les armes, une vieille habitude qui lui collait à la peau – et déjà avec une lame entre les doigts, il y avait le monstre trop ignoré qui grondait à nouveau. A la façon d’un transmutant ayant grandi avec son pouvoir, embrassant celui-ci, acceptant sa destinée, Cesare avait le sang chasseur qui courait dans ses veines, les savoirs inculqués par son père qui vibraient dans son esprit – à quoi bon le nier ?

A quoi bon, maintenant ? Aussi défaitiste que la mort d’Aria l’avait rendu, c’était désormais le seul credo qui trouvait écho dans sa tête – il était devenu un spectre, au regard dément ; chaque muscle chaque souffle d’air, chaque instant de vie voué à quelque chose qu’il n’connaissait que trop bien. La traque d’un ennemi qui était partout, un adversaire sans visage, sans nom, sans identité quelconque – lentement, sûrement, il avait remonté chacune des pistes, il avait assassiné, torturé, nourri la sauvagerie en lui pour en arriver là. Là ; oui face à Moira Kovalainen, cette rousse au sale caractère qui lui avait déjà tapé sur les nerfs à une reprise, ce visage trop familier et associé à ces images qu’il préférait oublier. « Oooh... Bah alors... J'suis pas assez bien pour toi, c'est ça ? Justement si, t'as des choses à justifier. On ne fracasse pas le crâne de quelqu'un contre une porte sans raison valable. » que faire hormis lever les yeux au ciel dans un soupir explicite ? Cesare ne put s’empêcher de le faire ; c’n’était pas comme s’il avait été apte à cracher la vérité sur les récents événements à n’importe qui – surtout pas à quelqu’un comme Moira, qui n’pourrait pas comprendre, n’pourrait pas accepter et trouverait probablement des circonstances atténuantes à son meurtrier de frère. « Tu devrais pas poser des questions auxquelles tu n’veux pas les réponses. Crois-moi. » après tout, la dévotion de la transmutante à l’égard de cette enflure de frère qu’elle se coltinait, relevait sûrement de l’exploit – ou d’une vieille histoire de laquelle il n’avait cure. Au fond, il n’pouvait que trop bien compatir avec le sens de la famille, le devoir immuable imposé par le sang coulant dans les veines, la loyauté qui se créait entre deux entités qui partageaient un nom, des parts de vie, quelques gènes en commun. Somme toute, le cercle vicieux de leurs existences était ironique jusqu’au bout : des frères et sœurs poussés à s’entretuer sur un champ de bataille qui n’en avait rien à foutre d’eux. Il en avait des raisons valables, pas b’soin de chercher bien loin – Artur Kovalainen avait croisé le chemin des mauvaises personnes, il avait choisi d’assassiner la mauvaise personne et c’était là le lot auquel s’exposait chaque hunter – la base aurait été de faire un minimum de recherches sur la victime avant de la laisser moisir parmi les décombres d’une fête foraine tournée au chaos. Ou des traces évidentes de son attaque. Encore et encore, passaient dans la mémoire de Cesare, toutes les conclusions du médecin légiste qu’il avait lues après les avoir volées ; tout c’qui concernait de près ou de loin les derniers instants de la vie de sa cadette. Y avait-il un de ses cauchemars qui avait été vrai ? Impossible de n’pas trouver là-dedans, dans le martyr des uns et des autres, une raison valable à devenir ça – une bête blessée jusque dans ses chairs les plus profondes : logique, somme toute, que Cesare n’expose pas aux yeux de n’importe qui le désastre qui s’étendait derrière son visage de marbre, sa voix monocorde et ses menaces parfaitement calibrées. Pour l’heure, Moira avait la verve de quelqu’un qui n’comprenait pas probablement, quelqu’un qui n’mesurait pas l’étendue des ruines au beau milieu desquelles elle s’était retrouvée comme ça, juste parce qu’elle n’avait pas fait attention à qui s’était trouvé dans son dos. « Mais je t'emmerde, mon p'tit père ! Et ma stupidité aussi ! Toi en revanche t'as pas l'air capable de faire marcher tes neurones deux secondes pour comprendre que c'que tu fais est voué à l'échec... Artur viendra pas, fous-toi ça dans le crâne ! » Artur ne viendra pas, la seule chose censée qu’elle venait de déblatérer et une conclusion qui s’imposa au DeMaggio plus lourdement que n’importe laquelle des piques ou des insultes qu’elle pouvait balancer si vertement. C’était qu’elle en avait à revendre, des expressions toutes faites, la rousse.

Moren était au moins un point sur lequel ils pouvaient s’entendre : entre connard et fanatique, ils n’pouvaient que trouver des accordances ici. Voir le chasseur qu’il était, apprécier l’œuvre de Kingsley dans toute sa splendeur était sûrement l’étape suivant la simple conclusion de le trouver fou. Cesare en avait vues des choses, lorsque le soi-disant avocat avait été jugé bon précepteur par son père – il fallait croire que Rafael avait aspiré à avoir un fils comme Kingsley. Irrémédiablement, ç’avait été voué à l’échec, et le fils DeMaggio avait tout d’une déception ambulante – plus encore qu’être un dégénéré, il s’était bien avant découvert aucun plaisir à tuer ceux qu’il tuait. Il l’avait fait, par devoir, dans une volonté bien au-dessus de la sienne, le respect immuable qu’il avait voué au père qui l’avait façonné de A à Z, du jour de sa naissance jusqu’à celui où il avait été capable de se défaire de son emprise. Les familles de chasseurs, ç’avait tout d’une véritable secte, et pour certains Moren devait être le Messie – comme quoi, il n’était pas si mégalo que ça. Kingsley, Artur – s’ils devaient être du même acabit, l’ordre n’avait pas d’importance, et l’homme de main, petit apprenti stupide était bien évidemment la première étape : c’n’était pas comme s’il imaginait Moren attaché au fameux Kovalainen au point d’avoir l’ambition de le venger en découvrant sa mort. La jeune femme, en revanche, c’était une autre histoire – elle en devint presque brave, ignorant les menaces et la présence plus qu’explicite du couteau avec lequel il n’aurait eu aucun mal à lui trancher un doigt, si l’envie lui avait pris. Il avait trop hésité, trop oscillé, s’était trop rattaché à cette parcelle de lui qui se mourait à petit feu, quoiqu’il fasse. Et c’était l’moment de le regretter, la répétition ironique des circonstances. « Touche à un seul cheveu d'Artur et je te jure... Je te jure que j'te fais la peau. Tu peux te marrer, penser c'que tu veux, si tu touches à mon frère, je t'écorche vif, c'est clair ? Alors maintenant, tes menaces tu peux te les carrer au cul. Parce que je n'appellerai pas Artur, je n'irai pas signer son arrêt de mort pour te faire plaisir. De toute manière, que je l'fasse ou non, tu vas m'tuer. Alors autant qu'tu fasses ça maintenant et qu'Artur reste en dehors de ça. Moren t'a p’tèt appris deux trois trucs… » il aurait pu la repousser sans aucune difficulté, la mettre au sol en quelques mouvements adroits que lui dictaient toutes les parcelles de son corps ; il aurait pu lui sortir les viscères avec son couteau, mais il n’en fit rien. Rien, pas pour les quelques secondes de flottement qui tendirent l’air, avant que le coup de ne vole. Bien peu impressionnant en comparaison de ce qu’il s’était déjà pris dans toute sa vie : ça n’aurait jamais été son père qui aurait mis de la retenue dans le geste, pire encore, ç’avait été comme si sa précision avait été accrue lorsqu’il avait été question de lui faire entrer quelques idées dans le crâne en quelques coups bien placés. Le genou de la rousse laisserait une trace, sûrement un bleu, pas d’quoi se rouler en boule ou se laisser déstabiliser plus d’une poignée de secondes. « Mais c'est pas ça qui va m'faire plus peur. De toute manière j'ai déjà peur, alors un peu plus un peu moins... Finalement, t'es un suiveur, toi aussi... S'il t'a appris quelque chose, c'est qu't'as du le suivre comme un petit toutou bien élevé... C'est pathétique, tiens... » mais à la simple observation des faits, se supplanta déjà la hargne qu’elle éveilla en un éclair comme ça, une parole bien placée ou déplacée – impossible de savoir. Tous les muscles du transmutant se tendirent dans une rage dévastatrice, qui annihila la retenue, les petites hésitations qu’il avait pu avoir. Son regard s’assombrit, les traits de son visage se raffermirent tous ensemble. « Si t'as cru que j'me laisserais faire gentiment, tu t'es fourré le doigt dans l’œil jusqu'au coude. » mais déjà bourdonnaient des torrents de sang à ses tempes, brouillant ses tympans, ils n’en étaient plus à la politesse, à l’attente fébrile d’un accord quelconque. « Qu’est-c’que tu vas faire hein ? Essayer d’me tuer avec une putain d’bouteille ? » il en ricana d’ironie, avant de se redresser sur lui-même, comme s’il coopérait pour un instant. « Okay- tu veux savoir c’qu’il a fait, ton cher frère ? » quelques secondes de suspens, le temps qu’il ravale son orgueil, sa hargne, ce nœud au creux de sa gorge. « Il a tué ma sœur. Probablement parce qu’un jour, par hasard, elle a croisé son ch’min. Ou son ch’min à lui et à Moren. Tu vois, on pourrait s’dire – comment il a fait ? Un pathétique crétin sans expérience, quand ma sœur a été entrainée depuis qu’elle a douze ans. » il se retint, juste le temps que sa main parte vers sa ceinture. « Il avait un flingue, tu vois. » vif comme l’éclair, les doigts, les mains, les bras, l’attitude, le cerveau, les tripes habitués à tuer, Cesare tira un coup, droit dans le genou de la rousse. « Il lui a tiré dessus. Une fois, et deux fois- » le deuxième coup partit comme ça, dans l’autre genou.

Et enfin, il s’approcha, pesant ses gestes comme l’avait sans doute fait le frère qu’elle aimait tant avec sa sœur à lui. « Tu savais qu’y’a trois os dans le genou ? Le légiste a analysé que ceux d’ma sœur avaient été brisés en des milliers de petits morceaux. C’qui veut dire que ton connard de frère a tiré à bout portant, parce qu’il est visiblement incapable de faire ça à plus de deux mètres. » et ouais, jusque-là elle avait eu affaire au Cesare qui s’était refoulé jusqu’à la dernière seconde, celui qui s’était retenu, retenu de n’pas la réduire en charpies rien que parce qu’il aurait pu le faire – mais l’animal que son père, que Kingsley Moren avaient tant aimé utiliser, il était toujours là, quelque part. Aussi monstrueux que ses créateurs. « Et quand elle n’pouvait pas bouger, pas s’défendre, pas fuir, pas penser clairement à cause de la douleur. C’est là qu’il l’a égorgée. Et contrairement à c’qu’on pense, c’est vraiment pas la façon la moins douloureuse ou la plus rapide, de crever. » combien de temps à suffoquer, à s’noyer dans son sang, à sentir la vie couler entre ses doigts ? Et la rage revint, il aurait pu la tuer, comme ça, lui prendre les cheveux et lui trancher la carotide comme à du gibier, il aurait pu la dépecer rien qu’pour lui prouver que ses menaces n’avaient mené nulle part. Il aurait pu aller exhiber son corps juste sous les yeux de Moren et du morveux qui lui servait d’apprenti. Il n’en fit rien, n’bougea pas pour un long moment. « J’savais pas c’que j’ferai en venant. Honnêtement, tu pourrais être une personne normale et détester le petit con qui te vaccine sans crier gare. J’crois qu’j’aurais pas vraiment être plus patient que ça avec toi. » il s’accroupit, s’pencha vers elle, arquant un sourcil. « Peut-être que j’vais te tuer. Peut-être que tu vas m’tuer. C’qui est sûr, c’est que j’vais tuer ton frère, et peu importe c’qui vient après. » du bout des doigts, il vint reprendre le téléphone qu’elle avait tenté de subtiliser rapidement au passage ; comme s’il n’l’avait pas remarqué. Sûrement qu’avec les coups de feu qu’ils avaient entendus, les voisins n’tarderaient pas à débarquer, ou à alerter la police ou peu importe ; peut-être, peut-être pas, il n’en avait rien à faire. Son expérience à Radcliff prouvait surtout qu’le monde était rempli d’enflures qui préféraient fuir une zone de danger plutôt que d’se poser des questions ; ainsi allait le monde.
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Moira Kovalainen
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeJeu 7 Jan 2016 - 23:54

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

Je n'avais pas envie de les avoir, les réponses à mes questions. J'en avais besoin. J'aurais vouloir pouvoir imaginer Artur aussi innocent qu'il l'avait été à une époque, son sourire d'ange fiché sur ses lèvres quand il me demandait de lui raconter une histoire, l'enfant solitaire, réservé et pourtant toujours à me confier ses cauchemars le plus sombres pour que je le rassure... Chaque fois que je sentais le mensonge poindre dans la voix de mon frère, je me remémorais cette époque, pas si lointaine, où il était encore innocent et incapable de faire du mal à qui que ce soit. C'était lui, le vrai Artur, pas ce monstre qui avait pris possession de son corps pour en faire sa marionnette. Ça ce n'était pas Artur. Ça c'était le pantin de Kingsley et de tous les autres fanatique dans son genre. C'était en partie pour ça que je défendais tant mon frère : Je savait que sous cette carapace de haine et de jalousie, si l'on grattait l'épaisse couche de rancoeur, on pouvait retrouver mon petit frère. Il était simplement embourbé dans les miasmes de sa propre solitude. Et j'avais ma part de responsabilité dans l'histoire. Ou plutôt, je me l'imposais, me forcer à porter sur mes épaules la culpabilité qu'il refusait d'assumer. Peut-être que si j'étais restée en Irlande avec lui, il ne se serait pas laissé embarquer dans toutes ces histoires, peut-être... Qu'il n'aurait jamais eu à tenir une arme dans ses mains. Mais avec des si on aurait refait le monde pour mieux le détruire à nouveau.

Alors je me retrouvais là, dans mon salon, brandissant un simple tesson de bouteille alors même que je peinais à rester debout. Ah elle avait fière allure, la mutante ! D'ailleurs mutante... Même ça, je n'y avais plus le droit. On aurait pu se demander pourquoi je protégeait Artur avec l'énergie du désespoir, pourquoi je m'acharnais à le défendre alors qu'il était en tort... Mais c'était mon devoir de sœur, d'aînée, de le protéger. C'était à moi de souffrir pour lui, pas l'inverse... C'était ce qu'on m'avait répété depuis l'enfance, tant et si bien que je ne cherchais plus à remettre ça en question. Et je ne cherchais plus non plus à expliquer à qui que ce soit pourquoi je le défendais. C'était comme ça.

« Bin à défaut d'te tuer, j'peux toujours essayer... », raillais-je.

Je m'attendais à ce qu'on se mette joyeusement sur la gueule, pas à ce qu'il consente enfin à me dire ce qu'avait fait Artur... Je baissais ma garde, trop occupée à l'écouter et à tenter d'analyses toutes les informations. Un mois plus tôt, mon frère avait refusé de me répondre quand je lui avais demandé s'il avait déjà tué... J'avais à présent ma réponse. Artur était un meurtrier. Qui avait tué une jeune pour... Pour quoi ? Parce qu'elle était une mutante, peut-être ? Parce qu'elle avait eu le malheur de naître avec un gène que ces malades appelaient « défaillant » ? Mon expression changea, passant de la colère à la stupeur. Car malgré moi, malgré tout l'animosité que j'éprouvais à l'égard de celui qui me faisait face, je ne pouvais que comprendre et compatir à sa douleur. Car moi aussi j'avais perdu quelqu'un à cause de la folie meurtrière des hunters, et moi aussi je rêvais de vengeance.

Artur avait tué une jeune fille sans doute innocente, qu'est ce que j'en savais ? Et pour peu que ce soit la cadette du grand malade, elle devait avoir quoi... 22 ? 23 ans ? Peut-être 25 tout au plus ? Certainement pas un âge pour mourir, et encore moins de cette façon. D'un coup, je doutais de mes intentions, de mon frère... Toute ma jolie plaidoirie tombait à l'eau en même temps que tombaient toutes ces accusations. Etait-ce le premier meurtre d'Artur ? Ou bien un énième et anonyme trophée sur son tableau de chasse ? Combien de litres de sang avait-il sur les mains ? Au fond... Je n'avais pas vraiment envie de le savoir. Et je fronçais les sourcils. Artur ne pouvait pas se servir d'une arme à feu, c'était impossible ! La détonation aurait été une véritable torture pour ses oreilles déjà bien abîmées... Je serrais les poings, ajoutant ce détail à la longue liste des reproches que je faisait à Moren. J'ouvris la bouche pour répliquer, mais je n'en eus pas le loisir. Car pour accompagner ses mots, il sortit sa propre arme et la braqua sur moi. Pas d'hésitation, pas de sommation, rien. Rien qu'une froide et violente détonation qui résonna dans toute la maison.

Et puis la douleur... Elle me frappa avant même que je réalise ce qui était en train de m'arriver. Elle irradia le long de ma jambe, remontant en flèche jusqu'à mes organes comme une décharge électrique. On dit souvent quand on se blesse ou qu'on est malade qu'on a jamais éprouver une douleur aussi atroce... Cette fois je pouvais sans conteste dire que jamais je n'avais eu aussi mal. Jamais. Instinctivement, je poussais un hurlement de douleur et m'effondrais, ma jambe refusant de porter mon poids plus longtemps. Et alors le deuxième coup parti. La seconde balle vint se loger dans ma rotule gauche, éclatant l'os dont les éclats se fichèrent sans ménagement dans mes muscles. Je m'écroulais sur le sol, la douleur m'arrachant des gémissements incontrôlables. J'avais la respiration lourde, mes poumons cherchant un oxygène que mon organisme consommait bien trop vite... Quant à mon cœur, j'avais l'impression qu'il était prêt à surgir de ma poitrine tant il battait vite et fort. Tremblante, je portais une main à mon genou droit, retenant un haut le cœur en sentant les chairs broyées sous mes doigts et le sang qui poissait mes vêtements. Je ne sentais plus mes jambes si ce n'est la douleur qui les irradiait et faisait rouler des larmes d'impuissance sur mes joues. Chaque spasme m'arrachait un frisson de douleur supplémentaire, mais je n'arrivais pas à les contrôler. Alors c'était ça ? C'était le martyr qu'avait subit sa sœur ? Pire encore, c'était Artur qui lui avait infligé ça ? Pourquoi ? A quoi bon ? Incapable que j'étais de prononcer le moindre mot, je me contentais de l'écouter.

Si ses gestes trahissaient une évidente animosité meurtrier, j'étais frappée par la froideur de sa voix, l'abominable vérité qu'il me débitait d'une voix monocorde pour mieux me l'imprimer dans le crâne. Il l'avait égorgée... Artur avait égorgée cette pauvre fille comme on l'aurait fait avec un animal innocent... Pourquoi, Artur... ? Je ne pouvais plus nier la vérité. Il y avait bien trop de sincérité et d'esprit de vengeance chez ce type pour que j'ose lui dire qu'il mentait. J'avais mal, mal à en hurler, mal à en souhaiter qu'on me sectionne les jambes, qu'on m'achève, que sais-je ?

« J’savais pas c’que j’ferai en venant. Honnêtement, tu pourrais être une personne normale et détester le petit con qui te vaccine sans crier gare. J’crois qu’j’aurais pas vraiment être plus patient que ça avec toi. »

Ces paroles se gravèrent d'autant plus dans mon esprit. C'était vrai, après tout : Comment pouvais-je pardonner celui qui m'avait vaccinée, qui m'avait mis sur le dos ses erreurs à lui et qui continuait à me faire culpabiliser ? Mais tout simplement parce que je savais qu'il y avait encore quelque chose à sauver, voilà pourquoi !

« Tu... Comprendrais pas... »

Trois mots. Et j'avais l'impression d'avoir épuisé mes dernières forces, c'était ridicule. Quand il se pencha vers moi, je tentais de reculer, me traînant à la force vacillante de mes bras. S'il avait dans l'idée de me faire subir la même chose que sa sœur, je préférais garder ma gorge aussi éloignée de lui que possible. Seulement, il se contenta de parler, réveillant en moi ce putain d'instinct suicidaire qui m'aurait poussé à me mettre entre Artur et la mort à tout moment. Et après ça il osait dire que j'étais odieuse et ingrate... Petit con... Ma main tremblante et maculée de sang agrippant la manche de l'autre dans un effort désespéré.

« J... J't'en prie...Non... Laisse... Artur... Je suis désolée pour ta sœur, vraiment... Il mérite de payer pour ses fautes mais... Pas comme ça... Si tu tiens absolument à tuer quelqu'un, finis c'que t'as commencé. Mais laisse mon frère, par pitié... »

Ma voix tremblait, mais plus seulement parce que j'avais mal... Elle vibrait, oscillait avec tout ce qui nous entourait, tandis qu'un vrombissement très léger commençait à se faire entendre. Je n'y faisais pas attention, bien trop focalisée sur la douleur et sur ma tentative désespérée d'amadouer mon agresseur. Je ne voulais pas mourir. Je ne voulais pas qu'on fasse de moi une martyre ou qu'on me prenne en pitié, je m'en foutais de tout ça. Je voulais juste être sûre qu'Artur ne viendrait pas, qu'il était en sécurité, qu'il resterait en vie... Qu'il ne risquerait pas de se faire tuer parce qu'il malade avait déjà de faire de lui un monstre à son image.
crackle bones
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Cesare DeMaggio
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeJeu 14 Jan 2016 - 19:35


Tuer créait un cercle vicieux ; un fait qu’il n’avait appris que bien trop tard. Combien d’ennemis s’était-il lui-même fait dans la croisade de son existence ? Y aurait-il, un jour quelqu’un comme lui, qui s’pointerait à sa porte pour réclamer vengeance ? Et que ferait-il à ce moment-là ? Partagerait-il la peine de son accusateur, acceptant la main du Destin refermant son étreinte autour de lui ? Aucun des DeMaggio n’y avait jamais pensé, sans doute ; car toujours, de père en fils, s’était transmise la pratique de ne laisser aucune trace, aucune preuve, aucun témoin. Certes, l’idée était de privilégier l’efficacité, la discrétion, un certain talent pour s’mêler dans la foule, ne jamais s’faire remarquer, et disparaître le crime aussitôt commis. Il y avait pourtant toujours eu ces faux-pas, ces moments d’insouciance où Cesare avait dû subir le fait de supprimer tout témoin potentiellement dérangeant – aux yeux d’son père, sans doute un genre de punition, de réprimande pour avoir fait preuve de trop d’assurance au beau milieu d’un terrain miné. Il y avait toujours eu des ennemis, partout, revêtant tous les visages possibles et imaginables ; une chaine de conséquences qu’amenait sûrement le fait de commettre son premier meurtre, comme ça. Irrémédiablement, ça transformait tous les autres en potentielles cibles, ou potentiels adversaires se détachant de la foule pour réclamer leur dû. Au fond, il avait fallu vingt-cinq ans à Cesare pour s’rendre compte que son existence à lui, l’existence de sa sœur, avaient revêtu des aspects de solitude que peu de gens pouvaient saisir, comprendre, apprécier d’une quelconque façon. Ça n’avait rien à voir avec le fait de s’cacher, de vivre en fugitif, de perdre toute sa famille ; c’était différent, infiniment plus insidieux. Et au moment d’se retourner vers les rares repères qu’il avait eus dans sa vie, ceux-ci s’étaient avérés être devenus des ennemis eux aussi. Son père, sa mère : combien de cicatrices marquaient désormais sa peau pour prouver cela ? Les plus récentes dataient de sa dernière visite dans la maison familiale – les entailles faites par son combat contre son père. La cicatrice encore douloureuse qu’avait laissée la balle que sa mère avait fichu dans son épaule. Le cercle vicieux dans son ensemble, la façon dont ça pourrissait le monde et l’âme de l’intérieur – le fils DeMaggio n’était plus bon qu’à ça. Uniquement poussé par ça, cet instinct d’avoir les armes, la possibilité d’arracher d’entre les griffes de l’inconnu, la vengeance que sa sœur méritait ; ou qu’il méritait, assoiffé par le sang de ses ennemis autant que par le martyr qu’ils pourraient connaître. Infiniment différent du sien, de c’qu’il endurait quotidiennement à avaler chaque goulée d’air qui le faisait subsister sur cette planète – à peine vivant, parce que ça lui était physiquement impossible désormais. Mais toujours là ; loin d’sa sœur, loin de toute substance d’humanité, loin de ses repères d’antan, de ses assurances stupides. Mais que donnerait-il pour être le même Cesare que cinq ans plus tôt ? Celui qui ne faiblissait pas dans ses convictions ? Celui qui chassait les dégénérés en étant persuadé de sauver une part du monde en en sacrifiant une autre, tel un Dieu érigé par l’héritage de son sang ? Marche-arrière ou marche-avant, le chasseur n’savait plus vers où le pousseraient ses tripes aujourd’hui, si elles en avaient le choix. Autrefois au moins, avait-il toujours eu sa sœur, l’instinct de la protéger, une quelconque utilité au beau milieu du chaos – quelque chose qui le rendait différent d’un simple tueur. Des survivances d’humanité qui s’étaient éteintes avec Aria, et qu’il n’parvenait pas à rallumer, peu importait la foi qu’il pouvait mettre là-dedans ; c’n’était pas faute d’avoir essayé. D’avoir dévisagé Isolde à la recherche de quelque chose – mais ç’avait été comme dévisager une étrangère, observer un reflet de toutes ses erreurs, les faux pas fatidiques qui lui avaient révélé le cercle vicieux, la réalité. Et toutes ses conséquences.

La réalité, elle faisait un mal de chien, aux tripes, à l’esprit, au cœur ; tant de tortures qu’il infligeait à sa vis-à-vis. Après la défiance, venait la réalité, aussi glacée que les balles qu’il avait fichées dans les genoux de la rousse qui s’était malencontreusement retrouvée au beau milieu d’une guerre ouverte. Le Kovalainen avait-il su, au moment de prendre le dernier souffle de vie d’Aria, que quelqu’un viendrait pour lui, que cette personne fracturerait de part en part son existence et viendrait réclamer son dû de la manière la plus sanglante qui soit ? Peut-être bien qu’Aria avait été son premier meurtre, et qu’Artur n’avait fait qu’un timide pas dans le putain de cercle vicieux que Cesare n’connaissait que trop bien. Cette géante machine infernale qui déchiquetait l’âme, et jetait le corps au beau milieu d’un charnier de causes perdues. Il l’avait acceptée, l’idée d’être une cause perdue ; l’fait de causer de la peine à quelqu’un qui n’avait rien demandé, qui s’trouvait simplement là, sur son chemin – et de n’rien ressentir à l’égard de cela. Et tous les idiots qui pouvaient espérer compter sur l’humanité de Cesare DeMaggio auraient tôt fait de regretter la mort de sa sœur, l’imprudent qui avait arraché à c’monde la seule personne en laquelle avait subsistées les faiblesses du frère ainé. Peut-être bien que certains, comme son père, y trouveraient une quelconque consolation : Cesare était-il alors devenu le fils héritier que son père avait tant attendu ? Aussi monstrueux, meurtrier et sans remord que lui ? Ou pire encore ; les ravages que le chasseur accomplissait à l’heure actuelle n’atteignaient aucunement son âme – ni les cris, ni les supplications, ni les douleurs qu’il devinait sur les traits de sa victime. Au fond, tout c’qu’il était bon à faire, c’était imaginer le visage d’Aria, les martyrs d’Aria, la lente agonie de sa petite sœur – et repassaient, repassaient sur les voiles de ses paupières les mille façons dont il s’était construit cette scène. Un visage, deux visages ; il n’y avait pas à douter que Moren avait joué son rôle dans l’histoire ; était-il l’entremetteur qui avait désigné sa victime à ce gamin ? Ou celui qui avait porté le coup fatal ? C’était comme si, subitement, Cesare avait un besoin de réponse encore plus oppressant qu’auparavant. Il n’comprendrait pas, non, y’avait trop de choses qu’il n’comprenait pas – la façon dont le sort pouvait s’retourner comme ça, sans crier gare. La façon dont la vie exigeait ses tributs sans aucun signe avant-coureur. La façon avec lesquelles les circonstances s’retournaient contre la mauvaise personne, pour faire comprendre à un autre coupable quelles souffrances il avait pu semer sur tout l’chemin de son existence. « J... J't'en prie...Non... Laisse... Artur... Je suis désolée pour ta sœur, vraiment... Il mérite de payer pour ses fautes mais... Pas comme ça... Si tu tiens absolument à tuer quelqu'un, finis c'que t'as commencé. Mais laisse mon frère, par pitié... » finir c’qu’il avait commencé, quand il n’savait pas exactement c’qu’il avait commencé. Dans toutes les théories, toutes les possibilités qu’il avait construites dans son esprit, celle-ci, avait probablement été celle que le DeMaggio n’avait jamais voulu envisager. Car dans les prunelles qu’il accrocha au regard de Moira, il n’y avait ni compassion, ni empathie, ni sympathie. Ni culpabilité. Car la rage une fois embrasée n’faisait que tout ravager, tout consumer, et c’était cet autre Cesare, monstrueux depuis trop longtemps, qui prenait l’pas sur tout le reste. « Va savoir s’il ferait la même chose pour toi. » se contenta-t-il de marmonner, se dégageant de la prise faiblarde et ensanglantée de la Kovalainen. Elle était pitoyable, comme ça, à ses pieds, toute crédibilité envolée avec les relents d’âme de son bourreau ; à nouveau, il n’pouvait qu’imaginer Aria – parce que c’était dans ces circonstances là qu’elle aussi, avait connu ses derniers instants. Infiniment similaires à ceux-ci, et pourtant bien plus glacés encore : Aria avait trouvé la mort au beau milieu d’un champ de ruines, dévasté par les flammes, inconnu et hostile, alors que Moira aurait le luxe de pousser son dernier soupir dans un endroit où elle pouvait un tant soit peu s’sentir appartenir.

Appartenir, une notion qui n’avait jamais été faite pour les DeMaggio, sans doute. Il y avait renoncé, en poursuivant la chimère de sa vengeance – et peut-être bien qu’ça n’avait pas été pour rien. Sans faillir, délaissant volontiers Moira dans son coin de sol, Cesare inspecta le téléphone, retrouva le nom d’Artur dans le répertoire et laissa à quelques bips le devoir de tendre l’air. D’électriser l’instant, jusqu’à ce que le jeune homme ne décroche à l’autre bout du fil, marmonnant quelques paroles dont le chasseur n’eut cure : « A vrai dire Moira est un peu indisponible pour le moment. On dirait bien qu’elle s’est pris une balle à un endroit plutôt douloureux. » un deux, quelle était la différence ? « Et j’parierais que t’as approximativement moins de dix minutes avant que le secteur n’grouille de flics et que j’doive disparaître – en devant éliminer le moindre témoin gênant à proximité. J’sais pas encore, si ça se trouve j’la laisserai juste se vider de son sang. » et c’était comme si les vieilles habitudes n’l’avaient jamais quitté, elles avaient la vie dure, le rendaient froid et impérieux dans sa litanie. « Ta sœur pense que t’as encore assez d’attachement pour elle pour voler à son secours. On va pas s’cacher que c’est c’que j’attends. J’te conseillerai de venir seul, et d’prendre le moins de temps possible – les hémorragies, ça va vite. » il n’se serait jamais cru avoir autant de sang-froid, à quelques minutes à peine d’un face à face avec le connard qui avait tué sa sœur – et pourtant, Cesare raccrocha sans attendre ; le message était passé. Et quoiqu’il en soit, y’aurait un cadavre ce soir – et si Moira Kovalainen était prête à revêtir le rôle de la martyre, qu’il en soit ainsi. Peut-être qu’elle serait là la justice, peut-être qu’elle serait dans l’moment où il planterait une lame droit dans le cœur de l’assassin de sa sœur. Personne n’pouvait savoir encore ; le carnage n’faisait que commencer, et pourtant, l’odeur du sang semblait déjà planer partout autour.  
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMar 19 Jan 2016 - 0:32


Si le monde avait été rationnel, s’il n’avait été qu’un entrelacs certes complexe mais explicable de phénomènes logiques, quantifiables, scientifiques et constamment descriptibles dans les moindres détails, alors Artur aurait été capable de l’aimer, ce monde. Seulement… depuis quelque temps, il avait la preuve, et la preuve indiscutable, que le monde n’était rien d’autre qu’un conséquent foutage de gueule et qu’il ne possédait strictement aucune logique. La fiole d’échantillon trembla dans sa main, son poing se crispa sur le verre, dans une contraction de ses muscles qui ne pouvait laisser présager que d’une chose : sa colère. Oui, Artur était en colère. Contre le monde, contre la vie, contre son père, contre sa sœur, contre le reste de l’Humanité. Et s’il creusait même un peu plus loin, Artur était en colère contre lui-même. Il se força à reposer le tube à essai dans la centrifugeuse pour ne pas le jeter contre le mur et perdre des heures de travail, pour ne pas céder à la tentation de tout balayer sur sa paillasse en hurlant sa colère. Il en avait assez. Vraiment. Il en avait assez parce que… et bien parce que plus rien n’avait de sens, plus rien n’avait de cohérence, et que pour une personne comme lui qui avait bâti sa vie sur l’explication de l’inexplicable, sur le contrôle, la compréhension et l’intellect, c’en était douloureux que de devoir subir des enchaînements incessants d’incohérence sans pouvoir ne serait-ce qu’enrailler la machine infernale. Ses poings heurtèrent le support glacé de la table. Il fallait qu’il respire. Il fallait qu’il se calme, il fallait impérativement qu’il retrouve un semblant de maîtrise de sa colère pour pouvoir continuer à faire illusion le temps de rentrer dans son appartement où sa catatonie face à la réalité l’engluera comme tous les soirs.

Depuis qu’il avait appris la mort de sa mère, Artur oscillait constamment entre la colère, le déni, l’apathie ou une hypersensibilité qui le laissait aussi bien vulnérable que susceptible. Depuis qu’il avait appris la mort de sa mère, Artur ne retrouvait plus ses repères. Sa sœur, aveugle. Ellie, au loin. Sa mère… morte. C’était trop pour lui, trop pour son monde structuré, agencé, répertorié et figé, trop pour cette toile de confiance, d’arrogance, de certitudes et d’hypocrisie qu’il avait patiemment tissée autour de lui aux fils des ans. Il se retrouvait enfermé dans un rôle, enfermé dans un être, enfermé dans un paraître bien trop limité à son goût. Et tous les jours, il devait se lever, mécaniquement. Automatismes, réflexes, son sourire s’épanouissait sur ses lèvres, sa voix saluait ses collègues, ses joues se plissaient sous le rire poli qu’il se sentait obligé de faire en réponse à leurs inepties. Tous les jours, il se levait, tous les jours, il souriait, tous les jours il les détestait un peu plus et s’enfermait davantage dans une spirale vicieuse de colère, de déni, d’apathie et d’hypersensibilité. Sa main quitta la paillasse, dégringola le long de son visage pour s’attarder sur son menton tandis qu’il se forçait réellement à souffler le plus longtemps possible dans une tentative de retrouver un semblant de contrôle. Le contrôle. Tout n’était qu’une question de contrôle. Il devait paraître, il devait simuler, il devait encaisser pour ne pas s’écrouler. Au final, c’était la seule chose qu’il était tout à fait certain de devoir faire. Et forcément, il n’y arrivait pas. Contournant son bureau, Artur se réfugia du côté du lavabo pour s’asperger le visage et tenter de s’extirper de ce mauvais cauchemar. De cette terreur nocturne qu’il vivait les yeux ouverts, maintenant. L’eau glacée n’eut aucun effet, la sonnerie de son portable non plus. D’un mouvement las il tendit malgré tout le bras vers son bureau. Ses yeux parcoururent les quelques lignes, son poing se serra sur l’écran comme pour mieux masquer le message. Des macarons au citron ? Ma vue commence à revenir Garder le contrôle. Respirer. Artur se murmura à lui-même ces consignes, comme pour s’en convaincre, comme pour les rendre plus tangible. Tu penses pouvoir passer pendant ta pause ? Ses pas le menèrent à son bureau où il s’écroula dans son fauteuil, jetant le téléphone devant lui. Ses mains tremblaient, il s’obligea à les poser et à attraper un stylo pour évacuer sa nervosité. Et sa colère. Sa mère. Moira. Ellie. Et même la seule chose qui retenait Moira à ses côtés, voilà qu’on la lui enlevait… L’Irlandais se prit la tête entre les mains. Si le monde avait eu un semblant de cohérence, il aurait pu l’aimer, ce monde. Mais le monde n’était qu’une connerie, le destin aussi, ce SMS qu’il répondit à sœur n’était qu’une connerie lui aussi. Et ses macarons au citron… Il ne voulait pas la voir. Pas maintenant. Pas alors qu’il était incapable d’avoir des réactions posées, pas alors qu’il doutait d’être capable de la regarder et de lui sourire. Pas alors qu’il… il devait terminer de traiter ces dossiers. Maintenant.

Sauf que maintenant n’était qu’un regard dans le vide, des pensées hagardes, des souvenirs, le poids d’une alliance passée dans une chaîne, elle-même passée autour de son cou, enfouie sous son tee-shirt, protégée par sa chemise. Sauf que maintenant, c’était une lente agonie dans laquelle il s’empêtrait et dont il était incapable de parler à quiconque. Et encore moins à ceux qu’il voulait prêt de lui. Perdu dans ses pensées, il mit quelques secondes à comprendre que son téléphone vibrait, encore. Plus longuement. Plus intensément qu’un peu plus tôt. Pas un SMS, pas un simple message, un véritable appel. Son regard glissa sur l’écran, heurta le prénom de sa sœur, sa photo, son sourire. Il ne voulait pas répondre. Mais… Artur connaissait sa sœur et s’il y avait bien une chose qu’il avait comprise depuis longtemps, c’était que sa sœur pouvait être aussi têtue que stupide. Inspirant profondément, Artur prit le temps de se passer une main sur le visage et de clarifier ses pensées. Suffisamment, du moins, pour que lorsqu’il décrocha, il eut la satisfaction d’avoir une voix aussi désintéressée qu’agacée, aussi loin de sa colère que de ce tremblement larmoyant qu’il avait parfois. « Moira, ça ne sert à rien d’insister, j’ai du travail et si tu m’appelles toutes les deux minutes, je n’aurai… « A vrai dire Moira est un peu indisponible pour le moment. On dirait bien qu’elle s’est pris une balle à un endroit plutôt douloureux. » La voix autant que les mots glacèrent le sang d’Artur et lui firent l’effet d’une gifle. S’il déambulait dans un brouillard dense et poisseux depuis des semaines, il eut pendant une fraction de seconde l’impression de plonger la tête dans un bac d’eau glacée. « Qui êtes-vous ? » Sa voix claqua, siffla, coupa. « Et j’parierais que t’as approximativement moins de dix minutes avant que le secteur n’grouille de flics et que j’doive disparaître – en devant éliminer le moindre témoin gênant à proximité. J’sais pas encore, si ça se trouve j’la laisserai juste se vider de son sang. Ta sœur pense que t’as encore assez d’attachement pour elle pour voler à son secours. On va pas s’cacher que c’est c’que j’attends. J’te conseillerai de venir seul, et d’prendre le moins de temps possible – les hémorragies, ça va vite. » Artur déglutit, ses pensées filant à toute vitesse dans son esprit, clair pour la première fois depuis bien longtemps. Sans attendre davantage, il se leva sans éloigner une seule seconde le téléphone de son oreille. « Dix minutes ? Et je suis supposé faire quoi ? Jouer au devin et éventrer un ours en peluche pour trouver où vous êtes ? » Oui, il était en train de cracher, le petit frère, il crachait sa colère autant que sa haine pour cet homme qui était en train de menacer sa sœur, sans la moindre précaution, avec une voix aussi glaciale qu’atone, d’une colère contenue qui ne demandait qu’à se répandre en giclée de sang chaud. Le vide lui répondit, suivit d’une tonalité aussi explicite qu’angoissante, comme un électrocardiogramme de mauvais augure.

Le portable traversa le bureau, gémit en heurtant le mur et s’échoua au sol, dans un silence absolu face au hurlement qui s’échappa de la gorge d’Artur à cet instant. Un hurlement retenu depuis des semaines, un hurlement jusque là lové dans sa gorge, perdu dans sa poitrine dans l’attente douloureuse de pouvoir s’exprimer. Un hurlement qui s’acheva en couinement alors qu’il tentait de trouver une solution et d’endiguer sa panique croissante. J’te conseillerai de venir seul. Artur attrapa son manteau. Sortit du bureau. Sortir du bâtiment. Sortit dans la rue sans l’ombre d’une hésitation. Docteur en biologie moléculaire, maître en génétique, en biochimie, en physique et certainement dans d’autres domaines, ce n’était pas un imbécile. C’était un homme qui calculait, un homme qui réfléchissait constamment, un homme qui prenait le temps de peser les avantages et les conséquences de chaque action avant de faire le moindre geste. Sans un mot pour personne, Artur mit son intelligence au service d’une seule chose et il ne lui fallut au final qu’une poignée de secondes pour savoir où se trouvait sa sœur. Et où se trouvait le fils de pute qui avait osé s’en prendre à une Kovalainen. Un Hunter ? Certainement pas. Un Mutant ? Connaissant le potentiel des monstres, c’était plus probable. Un fou ? Artur s’arrêta. Devant la maison de sa sœur. Dont il connaissait tous les recoins à présent. Il avait deux minutes. Encore deux minutes. Deux petites minutes. Le regard dur d’Artur prit les devants, le laissant poser les mains sur le portail pour reprendre son souffle. Et porter son téléphone à son oreille. « Papa, Moira a été agressée chez elle, préviens la police, je vais la voir. Elle est blessée mais je ne sais pas encore à quel point. » Il raccrocha sans attendre, et passa le portail. Le temps que son père, actuellement en cours, ait le message, il pourrait régler son compte à l’imbécile. Il venait seul, oui, mais il n’avait pas non plus promis de ne pas faire venir de personnes.

Sa main se posa sur la poignée, il n’eut qu’à pousser la porte du bout de l’index pour qu’elle s’ouvre dans un léger grincement qui crissa dans ses os, comme un avertissement. Ce qu’il était en train de faire ? Venir au secours de sa sœur. Armé de ? Armé de son intelligence et de guère plus. Quelques pas lui suffirent à rejoindre le salon. Il s’était promis, en chemin, de garder son calme, de garder la tête froide, de ne pas se précipiter, de ne pas se perdre dans une impulsivité aussi ridicule que contre-productive. Il s’était promis, lorsqu’il courrait en direction du quartier sud, de rester maître de lui-même malgré tout. La première chose qu’il fit, ce fut pâlir en voyant sa sœur. La deuxième ? Regarder le connard. La troisième… « MOIRA ! » S’écrouler devant elle. Ses genoux flanchèrent au moment même où il vit l’état de sa grande sœur. D’un bond il fut à nouveau debout. D’un bond, il fit un pas en avant en direction de l’agresseur. « QU’EST-CE QUE TU LUI AS FAIT ! » Artur n’était pas une personne qui perdait facilement le contrôle de ses mots, de ses actes, de ses pensées. Sa voix hurlait en gaélique. « Petit fils de pute, je te jure, je te jure que si elle meurt, je te tue ! » Un pas en avant, encore, il se rendit compte de la vulnérabilité de sa position. Avec pour seul secours son père, avec pour seul allié le temps qui filait et qui rapprochait autant les secours que… Artur se força à respirer. Et à reprendre. Et à détourner le regard de sa sœur. Il s’était promis, en rentrant, de garder la tête froide. Il avait envie de vomir. Il avait envie de se jeter sur le mec, il avait envie de se précipiter encore auprès de Moira. Et incapable de faire un choix, il était entre les deux, comme pour protéger sa sœur. Il tendit un bras en direction de l’autre. Paume levée comme pour lui interdire d’approcher. « Ne t’approche pas de ma sœur. » Le regard du petit frère se posa dans celui bien plus sombre du mec qui lui rappelait vaguement quelqu’un.
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMar 19 Jan 2016 - 20:16

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

Un cauchemar... A mesure que les minutes passaient, ce mot prenait tout son sens. Une définition bien plus douloureuse et effroyable que celle que tous les gamins pouvaient avoir, à des années lumière du monstre qu'un simple réveil pouvait chasser. Ce cauchemar là, il était réel, tangible, et il n'était pas terminé. Il avait débuté par un violent coup à la tête, des menaces, et puis cette révélation... Artur était un meurtrier. En avoir la certitude, c'était différent de simplement le soupçonner. Ca faisait de mon petit frère l'un de ces monstres que j'exécrais, l'un de ceux que j'avais juré de combattre pour ma propre survie et celle de mes semblables. Ca faisait finalement de lui mon ennemi. Je détestais cette idée... Imaginer un seul instant que celui que j'avais vu grandir, que j'avais protégé, aidé, guidé comme je le pouvais... De le voir prendre un chemin à l'opposé de celui que j'avais pris ou que nos parents nous avaient enseigné, c'était trop. Je n'arrivais pas à ôter de mon esprit le visage souriant et innocent d'un Artur âgé d'à peine douze ans. Je ne cessais de me dire que si je n'avais pas quitté la maison à ma majorité, peut-être n'aurait-il pas été manipulé par une bande de parfaits connards. J'aurais veillé à ce qu'il n'ait pas ce genre de fréquentations. Car si mon frère était incroyablement intelligent et studieux, il était aussi bien trop influençable. C'était déplorable de voir avec quel facilité ces enfoirés avaient réussi à lui faire pleinement embrasser leur cause. Quel crétin... Quel petit con... Je lui aurais volontiers mis quelques paires de baffes, mais il ne fallait pas qu'il vienne. Surtout pas. J'avais besoin d'aide, ça c'était indéniable, mais pas de celle d'Artur. Je ne voulais pas de son aide car je savais qu'il ne s'en sortirait pas indemne.

Tremblante, je sentais la fièvre monter et mon front perler de sueur, tandis que le sang continuait à couler de mes genoux. Tout était devenu synonyme de douleur. Mes blessure, les spasmes qui secouaient mes muscles, ma respiration erratique... Le simple fait de lutter pour ma survie m'arrachait des gémissements de douleur. Et pourtant, ce n'était « que » deux balles dans les genoux. Aucun organe vital n'avait été touché. Au fond, ça ne faisait que prolonger mon agonie, si c'est ce que cherchait mon agresseur. Alors je tentais, en vain de l'amadouer un peu, de le pousser à renoncer à son plan dément... Mais rien à faire. Il était déterminé, et il avait raison. Artur aurait-il fait la même chose pour moi ? Aurait-il donné sa vie pour moi sans rien attendre en retour ? N'aurait-il pas justement jugé que c'était normal pour son aînée de mourir pour lui ? Je n'en savais rien... Je n'étais plus sûre de rien au sujet de mon frère. La seule chose que je savais, c'est que je ne comptais pas me dégonfler ou me cacher derrière Artur. Je me contentais de fusiller l'autre du regard, économisant mes forces pour... Pour quoi au juste ? M'enfuir ? La bonne blague... Pour ça, il aurait fallu que je puisse me lever et ça... Ce n'était même pas envisageable.

Je tentais tant bien que mal de me redresser, ou pour voir s'il n'y avait pas autour de moi de quoi déconcentrer et ralentir ce malade, mais je me voyais mal lui jeter une table basse à la figure, vu mon état. C'était peine perdue, et je sentais la panique me gagner, chose que la fièvre ne faisait qu'accroître plus encore. Bientôt je me mettrais à délirer, c'était certain... Et j'assistais impuissante à la mise en place d'un piège qui se refermerait certainement sur mon frère dans les minutes à venir. Eberluée, je n'eus même pas le temps de hurler à Artur de ne pas venir que déjà, l'autre avait raccroché. Intérieurement, je priais toutes les divinités possibles et imaginables pour que mon frère soit bien le connard que tout le monde me décrivait... Pour qu'il reste en sécurité loin de ce malade déterminé à le tuer. Ce qui me poussait à faire preuve d'autant de masochisme et d'abnégation vis à vis d'Artur ? C'était mon petit frère. Et ça aurait du suffire à n'importe qui, comme explication. Fallait que je fasse mon possible pour m'assurer qu'il resterait envie. Même si pour cela je devais passer à côté de ma seule chance de l'engueuler comme il le méritait. Artur n'était pas un ange, encore moins quelqu'un de fréquentable avec un idéal de paix proche de celui d'un vieux hippie défoncé au persil, mais c'était mon frère. Tout ce que je pouvais espérer, c'est que cette histoire lui servirait de leçon.

«T'es... Taré... Ca va t'apporter quoi de tuer Artur ? Tu crois que tu te sentiras mieux après ?»

J'étais prête à parier que non. Et pourtant, quelque part je le comprenais. Parce que moi aussi je ruminais ma vengeance, j'en voulais à quelqu'un au point de vouloir le tuer. Et malgré tout, je n'arrivais pas à savoir si les choses seraient différentes après. Tuer le meurtrier de mon fiancé ne le ramènerait pas, pas plus que tuer Artur ne ramènerait la sœur de l'autre type. Je pris appui sur la table basse, grimaçant en sentant la pièce tourner autour de moi. C'était con, vraiment... J'avais pris deux balles dans les genoux et j'avais l'impression d'avoir subis bien pire. Encore un mensonge du cinéma dont je ne me serais bien passé. Le sang pulsait à mes tempes, la bile laissait un goût amer sur ma langue et je ne sentais pratiquement plus mes jambes. Certes je n'avais plus aussi mal, mais l'angoisse de me retrouver paralysée m'enserrait tout autant le cœur.

J'avais espéré qu'il ne viendrait pas. Quelque part, j'avais commencé à me faire à l'idée qu'Artur ne viendrait pas... Et pourtant, lorsqu'il passa la porte, je fus soulagée de le voir. C'était bête, j'aurais du le maudire d'être venu, mais c'était la preuve qu'il avait peut-être un peu plus de considération pour moi que je ne l'aurais cru. Ce qui ne m'empêcha pas de paniquer plus encore en le sachant seul face à un fou furieux armé. Et comme chaque fois qu'il était énervé, il délaissait l'anglais, peut-être tendre à son goût, pour le gaélique. Ca avait toujours été comme ça. Une langue pour chaque situation, avec Artur. Si j'étais habituée à cela, je restais un instant choquée par ce que je voyais. Les colères d'Artur était comme celles de mon père : Rares mais dévastatrices. Seulement, la dernière fois que j'avais vu mon frère vraiment remonté à bloc, il devait avoir quinze ans. Là... Ca n'avait rien à voir. Il émanait de lui une aura glaciale de colère et de contrôle mêlés, il semblait prêt à exploser tout en tentant de garder un visage impassible. Pourtant, lorsqu'il compris ce qu'il se passait, il tomba à genoux prêt de moi et je secouais la tête, murmurant dans la même langue.

«Vas-t-en, Artur... J't'en prie, vas-t-en... Si tu restes ici il va te tuer... Fous le camp tu peux rien pour moi...»

Pour m'aider, il aurait fallu qu'il puisse me porter tout en esquivant les balles de l'autre et ça... Ca me paraissait compliqué. Pour la simple et bonne raison que nous étions dans la réalité, et qu'elle était autrement plus cruelle que la fiction. Mais à peine avais-je prononcé ces mots que déjà, Artur était debout, s'avançant vers celui qui voulait sa peau à tout prix. Hoquetant, je hurlais.

«Dégage, Artur ! Bordel mais vas-t-en tu vois pas qu'il veut te tuer ? Fous-le camp, putain !»

La douleur, les sanglots, la terreur et l'angoisse de ce qui allait suivre, tout cela faisait battre mon cœur un peu plus vite mesure que les minutes s'écoulaient. A chaque instant, je craignais de voir une balle se fiche dans le crâne de mon frère. Je refusais cette éventualité, elle me retournait l'estomac et ne faisait que faire croître un peu plus la haine que je vouais au grand brun. Finalement, Artur avait raison sur un point : Des tarés, on en trouvait autant que les hunter que chez les mutants. Après tout, nous étions tous humains, partis de là nous avions tous une tare en nous. J'étais là, affalée sur le sol, impuissante tandis que mon frère, désarmé, faisait face à un type véritablement entraîné pour tuer. Je me demandais même combien de vie il avait prises, et combien d'autres il avait brisées, avant de venir ici. Artur allait se faire tuer, c'était la seule chose que j'avais en tête, la seule dont j'étais certaine. Car personne ne viendrait nous aider. Même si les voisins appelaient les flics après avoir entendu les coups de feu, ils n'arriveraient pas à temps... Nous aurions le temps de mourir trois fois, Artur et moi, avant que qui que ce soit ne mette les pieds ici.

Et je refusais que ça arrive. Avec le peu de force qu'il me restait, profitant de cette décharge d'adrénaline qui me submergeait pour me relever, je me hissais contre la table basse à la force vacillante de mes bras. Je n'avais pas envie de mourir. Pas ici, pas maintenant, pas sans avoir tenté le tout pour le tout. Mes jambes me faisaient atrocement souffrir, et le simple fait de poser mes pieds par terre pour prendre appui dessus me faisait grimacer de douleur. Les larmes coulaient sur mes joues sans que je cherche à les retenir, et je m'accrochais comme je pouvais au minuscule espoir qu'il nous restait. Il était hors de question que j'assiste impuissante à un massacre. J'attrapais le dossier de la chaise sur laquelle je m'étais réveillée quelques minutes plus tôt, et pris appui dessus pour ne pas retomber. J'étais à présent à la même hauteur qu'Artur, sur l'épaule duquel je posais une main pour garder l'équilibre mais aussi pour l'inciter à reculer. Combien de temps allais-je tenir ici ? Combien de secondes avant que mes jambes ne m'abandonnent définitivement ou que la douleur ait raison de ma volonté ? Je tremblais de toute part, mon visage avait pris une étrange couleur cadavérique, mais mon regard était toujours aussi vif et haineux. Et lorsque j'élevais la voix, elle se mis malgré moi à résonner avec le corps de mon adversaire. C'était comme si ma voix c'était dédoublée, comme si un grondement rauque résonnait sous les mots. Ce timbre menaçant, il résonnais avec les os et la chair de celui qui me faisait face, faisant vibrer et craquer ses articulations. Et j'en était la première surprise.

«Vas-t-en... T'as fais assez de mal comme ça... Fous le camp avant que les flics n'arrivent... Y a d'autres moyens pour se venger...»

J'écarquillais les yeux en comprenant trop tard que ce grondement dans ma voix, c'était ma mutation qui revenait peu à peu. Elle était encore timide, intermittente, mais elle était là. Pleine de haine, résonnant avec le corps de mon adversaire dans l'espoir désespéré de le faire reculer. Si j'avais été en pleine possession de mes moyens, j'aurais pu lui briser les tympans ou encore faire vibrer sa cervelle de cinglé jusqu'à l'anévrisme... Mais ça aurait été trop beau, trop facile... D'autant que j'étais la première étonnée de voir ma mutation se manifester à nouveau. J'aurais le temps d'y penser, si je survivais. Pour l'heure, je sentais mes jambes vaciller et mon regard s'attarda sur l'arme que l'autre tenais toujours.

«T'as vraiment pas besoin de faire ça...»,dis-je en tendant la main pour tenter de le calmer et l'inciter à baisser son arme.

Mes jambes tremblèrent à nouveau, et je du agripper le bras d'Artur pour ne pas tomber.
Mon principal problème, c'est que j'avais tendance à toujours voir le bon avant le mauvais. C'était peut-être pour ça que des trois personnes présentes dans cette pièce, j'étais la seule à n'avoir jamais tué et à être la seule blessée.
crackle bones
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Cesare DeMaggio
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeMar 19 Jan 2016 - 23:34


La vengeance ; l’envie assassine que tout le monde avait connu une fois dans sa vie, et que tant de gens prétendaient ne jamais avoir éprouvé. Car tendre la joue gauche était finalement une politique qu’aucun être ici-bas n’était apte à adopter ; c’était dans la nature humaine, d’éprouver des désirs aux abîmes tortueux – de vouloir détruire, faire payer, rendre la pareille. La souffrance, il fallait croire que c’était une condition inhérente à toute existence humaine, se baladant sur ces terres désolées ; à Radcliff, ou n’importe où. Au final, peu importait le décor, peu importait le maire qui était élu et les politiques qu’il présentait ; c’était comme si endurer était inscrit dans les codes génétiques d’un être humain – pour la simple et bonne raison que les obstacles, les difficultés se présenteraient d’elles-mêmes, comme ça, sans crier gare. A cause de la vie, à cause des autres ; à cause de la simple existence d’une humanité décharnée, meurtrière, armée, et sans aucun égard pour les autres. « T'es... Taré... Ça va t'apporter quoi de tuer Artur ? Tu crois que tu te sentiras mieux après ? » peut-être était-ce parce qu’il était un chasseur. Peut-être était-ce parce qu’il était un tueur ; ou un DeMaggio. Ou un paria. Mais il savait déjà qu’il n’s’en sentira pas meilleur ; pas de cette façon que les autres pouvaient attendre lorsqu’ils touchaient la mort d’un ennemi du bout des doigts. Ça n’lui apporterait pas le deuil, ni l’acceptance. Ça ne lui rendrait pas le sourire d’Aria, ça n’lui donnerait même pas une infime chance de la serrer une dernière fois dans ses bras ; dix secondes, une minute, une éternité, le temps d’oublier le reste du monde et la situation misérable dans laquelle il se trouvait. Bête blessée, l’animal qui se retrouvait au point culminant de la justice qui l’avait tant poursuivi – justice, ou vengeance du Destin ; il y avait désormais un trou béant dans ses chairs, un handicap à son cœur battant contre ses côtes, qu’aucun assassinat, aucun instant dans les yeux du meurtrier de sa sœur, ne pourrait faire disparaître. Le téléphone encore entre ses doigts, ayant soigneusement gardé le silence face aux questions de la voix à l’autre bout du fil, Cesare n’essayait pas d’trouver une réponse à la question de sa victime – pas b’soin de remuer dans son esprit, les réalités dont il ne connaissait déjà que trop bien la prescience : le fait que rien, aucun acte ne le ferait échapper à la prescience de la vie autour de lui, du monde - de l’instant qui était passé, et l’avait définitivement séparé de sa petite sœur. Car il pourrait utiliser ce couteau pour s’prendre la vie, n’jamais plus errer des pas maudits sur cette terre dégueulasse – il n’rejoindrait pas Aria pour autant. Il n’trouverait pas le moindre Salut pour autant, et ne renouerait certainement pas avec le Pardon qui lui était plus que jamais inaccessible désormais. Tant de choses, ouais, y’avait tant de choses à l’arôme inachevé, d’échec qui se mettait en branle en lui aussitôt qu’il pensait à Aria. Son corps. Les mots qu’ils n’avaient jamais daigné se dire ; les disputes qui s’étaient enchainées. Et le silence qui avait remplacé les vérités qu’ils avaient tant cherchées l’un en l’autre. L’assourdissant mutisme qui suivait, maintenant, le départ impromptu de sa cadette. Tu n’pourrais pas comprendre, pourrait être la réponse qu’il lui servirait à elle aussi ; la vérité fracassante qui lui était insoutenable à lui, ni Moira, ni le meurtrier de sa sœur ne pouvaient comprendre – pour la simple et bonne raison que c’était lui, Cesare, qui avait perdu sa sœur et endurait quotidiennement c’que ça faisait. Les ravages, les ruines – le froid glacé, étouffant, jusqu’au bout des doigts.

Ils n’avaient qu’à attendre désormais ; et quand bien même la rage semblait avoir enserré sa gorge il y a quelques secondes à peine, le DeMaggio sentait le fer de sa volonté avoir glissé dans ses veines, pour faire battre son palpitant de manière régulière. Calme, paisible. Comme s’il avait un plan ; comme s’il était assez con pour croire avoir toutes les clés en main. Artur Kovalainen serait-il docile au point d’écouter ses instructions ? Volerait-il seulement au secours de sa sœur ? A l’entente des rares paroles qu’il avait saisies de son vis-à-vis à l’autre bout du combiné, la réponse lui était évidente désormais ; mais il y avait toujours l’imprévu, cette connerie d’imprévu qui planait juste au-dessus de leur tête. Combien de temps ? Et pendant tout c’temps, que pourrait-il se passer ? Quel événement risquait de survenir sans crier gare, pour le priver d’une justice qu’il avait tant quémandé ? Combien de semaines, combien des mois avaient couru à toute vitesse depuis la mort d’Aria ? Les jours lui avaient semblé être des tortionnaires sans pitié, tous identiques les uns aux autres ; et pourtant, cela faisait déjà trop longtemps que le meurtrier d’Aria continuait de vivre impunément. Et cette simple idée, fracassant l’instant tendu par le silence, suffit à faire remuer le monstre dans les entrailles du chasseur ; éveiller chaque couche de hargne qui se cachait derrière le regard noir de Cesare, le mutisme dans lequel il semblait s’être plongé tête la première depuis qu’il avait raccroché le vulgaire téléphone – l’arme du crime. Et l’appât qui rampait vulgairement au sol, le bourreau qui n’faisait aucunement attention à ses plaintes désespérées, ignorant l’odeur ferreuse du sang qui planait déjà dans l’air, et annihilant l’insouciance d’il n’y a pas si longtemps. Insouciance, suivie par la réalité ; et  l’amertume qui s’ensuivait. Moteur d’une vengeance dévastatrice. Et le désir de n’plus répéter les mêmes erreurs, l’humanité qui apprenait et subsistait ; c’était comme ça que le monde semblait tourner, l’espéraient-ils tous du moins. Il était, quelque part, ironique de la part d’une jeune femme ayant hurlé à son vis-à-vis qu’elle le tuerait, dusse-t-il prendre la vie de son frère, de marmonner des paroles sur l’inutilité de la vengeance. Et en y réfléchissant, en s’penchant sur les instincts élémentaires d’un être humain, tout ceci n’était qu’on ne peut plus logique ; des péripéties qu’Artur Kovalainen aurait dû voir venir avant même de planter son couteau glacé dans les entrailles d’Aria DeMaggio. Car à toute petite sœur, il y avait un grand-frère ; et c’était plus encore qu’un simple titre, plus qu’une appellation qu’on apposait à une personne sous prétexte que des liens du sang liaient celle-ci à une autre. C’était plus que ça ; c’était plus compliqué que ça. Plus immuable que cela. Un devoir gravé dans les chairs, l’appel d’une biologie envers une autre. Une âme vers une autre. Une essence vouée à une autre ; qui pour mieux comprendre tout cela, le vide désespéré, les affres de perdition et la légitimité de sa revanche, que quelqu’un comme Moira ? S’il n’avait pas été là, prêt à tuer son frère, sans doute lui aurait-elle trouvé toutes les excuses du monde ; qui était le coupable dans cette histoire ? Cesare DeMaggio, réclamant son dû, arrachant sa responsabilité toute naturelle de la gorge de son ennemi tout nouveau ? Ou Artur Kovalainen, qui, un jour, avait décidé d’s’en prendre à une fille qui n’lui avait jamais rien demandé ? Qui serait-il, Cesare, le chasseur de toujours, le jour où le frère, la sœur d’une de ses victimes du passé, viendrait réclamer la même justice vengeresse que celle qu’il exigeait, ici, et maintenant ? Selon Isolde, la réponse était toute faite ; et une certaine légitimité habitait ses entrailles. Un jour, on viendrait à lui, et il tomberait à genoux, accablé par un remord qu’il ne cessait de remuer, des paroles qu’il entendait avec la voix de la blonde – alors quoi ? Les autres pouvaient bien faire la même chose pour lui. Y’avait définitivement un cercle vicieux dans toute cette histoire ; et il avait fallu que le DeMaggio le subisse lui-même pour s’rendre compte de son existence – lui qui avait tué si impunément, lui qui avait si volontiers accepté les paroles de son père ; celles qui disaient que les dégénérés n’étaient que des monstres. Personne n’réclamait vengeance ou justice pour des monstres ; personne, à part lui, aujourd’hui, pour sa sœur. Et comme tout le reste dans sa vie ces derniers temps, cela allait parfaitement à l’encontre de tout ce qu’on lui avait toujours appris.

Les minutes passèrent infiniment vite et dans le tumulte de ses songes, Cesare en avait délaissé Moira – lentement, sûrement, comme du sable glissant d’un sablier, le sang vermeil de la jeune femme avait glissé sur le sol, pour devenir flaques, torrents, l’empreinte indélébile d’une hargne qui subsisterait aussi longtemps qu’ils vivraient. Lui, ou tous les deux. Ou tous les trois. « MOIRA ! » la voix avait presque une allure juvénile qu’il n’avait pas attendue – et pourtant, il aurait dû s’y préparer : quoi de mieux que l’esprit d’un jeune con à manipuler, pour quelqu’un comme Kingsley Moren ? Comme un ver dans sa pomme, un misérable parasite, empoisonnant tout c’qui passait sur son chemin. Et pourtant, les circonstances atténuantes n’transformaient pas la hargne du DeMaggio en autre chose – certainement pas en pitié. Dommage, il aurait suffi qu’il vise une autre personne, tue une autre gamine de vingt-et-un ans, pour que les choses se passent plus facilement. Ou juste, différemment. Pour cela, il aurait sûrement fallu que Moren ait quoique ce soit à faire de son protégé. Et l’autre déblatérait déjà dans une langue inconnue, Cesare faisant aisément fi de tout cela, des détails des mots qui s’échangeaient imbibés de petits sursauts de caractère qui auraient fait peur à quelques personnes. N’importe qui, sauf lui. Il était trop occupé à analyser, observer le corps maigrelet du fameux frère qui venait d’débarquer comme un cheveu sur la soupe ; ne voyaient-ils pas, tous, qu’ils avaient déjà largement dépassé le stade des stupides menaces et des paroles pacifistes ? L’envie le traversa, tentatrice sauvage, d’envoyer une balle dans la tête du jeune connard sans attendre, sans ciller, une mort rapide embrassant de son linceul quelqu’un qui ne la méritait pas. Il aurait été animé par rien d’autre que la rage, et aurait alors offert à son interlocuteur, son adversaire, un dernier souffle clément. Trop clément. « Ne t’approche pas de ma sœur. » et pourtant, il aurait dû voir que depuis qu’il avait passé la porte, le regard noir du DeMaggio avait volontiers délaissé la pauvre Moira affaiblie et immobilisée au sol. Il n’avait d’yeux que pour lui, le futur cadavre qu’il laisserait derrière lui, le dernier visage qu’avait vu Aria avant de sentir la vie la quitter. « Vas-t-en... T'as fait assez de mal comme ça... Fous le camp avant que les flics n'arrivent... Y a d'autres moyens pour se venger... » il aurait presque pu être agréablement surpris par les instincts de Moira, la volonté avec laquelle elle s’était relevée tant bien que mal, prête à lutter jusqu’au bout. Presque – s’il ne s’était pas su capable de le faire lui aussi, s’il n’avait pas déjà su que trop bien, qu’il l’aurait fait, lui aussi, mille fois et plus encore, si ç’avait permis de sauver la vie de sa sœur. Si elle n’faisait pas que lui rappeler, en définitive, l’impuissance qu’il avait ressentie en se retrouvant au-dessus du cadavre de sa cadette. Il avait manqué à tous ses devoirs, abandonné sa sœur du tout au tout ; et un connard avait décidé de saisir cette opportunité pour marquer à jamais, à sa mémoire, toutes ces fautes indignes. Artur Kovalainen avait déjà assez fait d’mal comme ça ; Cesare ne faisait que commencer. « T'as vraiment pas besoin de faire ça... » mais tous ses instincts lui dictaient le parfait opposé. « C’est ça l’truc. J’en ai vraiment besoin. » marmonna-t-il en simple réponse ; ignorant la conviction de la rousse, ses paroles, sa fausse raison, sa main tendue – y’avait pas d’paix, pas de rédemption possible dans ce monde. Peut-être était-ce ça, le message que son père avait toujours voulu qu’il retienne. Il l’avait retenu, grâce à l’imbécile qui lui faisait face – peut-être était-ce la moindre des choses de lui rendre la faveur. « J’parie que tu sais même pas pourquoi t’es là. Au lieu d’beugler, peut-être que t’aurais dû ouvrir les yeux. Après tout- » un vague silence, tandis qu’il évaluait les capacités de Moira, le teint cadavérique qu’elle affichait, ses jambes tremblantes. « j’montrais juste à ta sœur comment t’as tué la mienne. » et il n’avait pas encore levé son arme, il s’retrouvait même à délaisser le couteau qu’il avait tenu pendant tout ce temps entre ses mains, l’arme qui avait tant menacé la jeune femme ; indéniablement, le DeMaggio était en position de force, et ça l’enrageait plus qu’autre chose.

« Et c’est ça l’truc… tu vois j’savais pas vraiment à quoi tu ressemblais avant que tu débarques. J’vais te dire, t’as aucune idée du nombre de fois où j’t’ai imaginé. » c’n’était pas une confession ; presque un interlude, une annonce à ce qui l’attendait, lui – la façon dont son cerveau répéterait à l’infini, jusqu’à l’instant de sa mort, les prochaines secondes qui allaient s’écouler. Dans ses rêves, au beau milieu de ses instants éveillés ; au beau milieu de la nuit ou au cours d’une journée baignée de soleil. Le vide à nul pareil pour c’qui semblait être une éternité. « Tu fais quoi ? Quarante kilos tout mouillé ? » il y eut un ricanement, plus acerbe, torve et misérable que moqueur. « T’avais besoin d’tirer deux balles dans les genoux d’ma sœur pour la dominer, et tu crois qu’tu peux m’menacer ? HEIN ?! » il n’était même pas un adversaire digne de c’nom, même pas un être à même d’le laisser déverser toute la rage qui sommeillait en lui et le bouffait de l’intérieur. Alors Cesare aurait pu lui sauter à la gorge, lui éclater la tronche, lui laisser une quelconque chance de s’débattre dans l’espoir que ça servirait à quelque chose. Il aurait pu, s’concentrer sur son unique ennemi ; et pourtant, ce n’est pas sur le misérable corps d’Artur Kovalainen qu’il déversa toute sa colère, mais sur son cœur, ce pitoyable palpitant, faiblard chez n’importe qui. Celui qui f’sait un mal de chien, pour des raisons si stupides, et pourtant si élémentaires. Il n’eut qu’à faire un mouvement de ses doigts pour qu’un craquement sinistre n’interrompe le jour de regards, la simple menace des voix et des insultes ; Moira retomba à genoux au sol, alors que les balles si soigneusement logées dans ses jambes faisaient leur chemin à travers ses chairs – tout ça, au rythme des caprices du DeMaggio. Et Artur, impuissant, désemparé, tout juste bon à voir le sort se nouer d’une façon morbide juste devant ses yeux – car au fond, peu importait combien cette idée pouvait lui être répugnante, tous les deux n’étaient pas si différents ; et Artur aurait déjà dû savoir qu’il n’avait imposé à Cesare, sans jamais l’avoir vu ni connu, une douleur qu’aucune peine des chairs ne pourrait égaler. Qu’il sente l’écho des secondes s’alignant les unes après les autres sans qu’il n’puisse rien y changer. Qu’il vive chacune des secondes qui constituerait le supplice de sa sœur – c’n’était que justice, justice revancharde. « Tu vas m’dire. Tu vas lui dire c’que t’as fait à ma sœur. Et tu vas m’dire avec qui tu l’as fait - et va savoir, p’tèt bien que j’te laisserais assez d’temps pour m’supplier comme une merde d’laisser ta sœur vivante. » quand bien même il ne l’méritait pas ; quand bien même ça n’ferait que remuer le couteau dans la plaie, lui arracher le cœur. Il n’méritait même pas de pouvoir ouvrir la bouche pour parler, ou de faire le moindre mouvement ; sûrement que tout c’qu’Artur aurait pu espérer de cet entretien, serait d’entendre sa sœur prier la mort pour les prochaines minutes – il fallait croire que Cesare était plus clément qu’on n’l’attendait de lui, ou que c'que les autres méritaient.
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Artur Kovalainen
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeVen 5 Fév 2016 - 0:49


Sa soeur. Le sang. La douleur. L’ennemi. Les pensées d’Artur carburaient, s’éparpillaient, se concentraient sur bien trop de choses en même temps pour qu’il puisse seulement être efficace. Et cette peur panique qui s’enracinait en lui, cette angoisse qui empoisonne ses veines, l’ensemble de cette terreur qui s’immisce en lui le fait tomber devant sa sœur dans un hurlement d’effroi. Ca n’avait peut-être rien de comparable avec ces terreurs nocturnes qui l’empêchaient d’avoir un sommeil tranquille depuis l’enfance, c’était juste bien pire. Douloureusement pire. Il s’était promis, en arrivant, de garder son calme. Il avait à présent la preuve que non seulement cela s’avérait impossible mais que c’était même impensable. Inimaginable. Ses jambes tremblaient lorsqu’il se releva pour faire face à celui qui avait osé toucher sa sœur. Un cauchemar, un cauchemar dans lequel il était englué, un cauchemar duquel il ne pouvait se réveiller, voilà à quoi ressemblait péniblement sa vie en ce moment. Et il était hors de question de laisser ce cauchemar gagner. Et la colère fut la première à reprendre pied, à s’imposer dans les pensées de l’Irlandais pour hurler avec cette acidité qu’il avait hérité de son père. Injures, cordes vocales malmenées, gaélique, rien de tout cela ne ressemblait au plus jeune des Kovalainen et c’était certainement l’indice le plus probant de sa panique. Un pas en avant, deux même, il s’intercala entre Moira et l’autre, naturellement, sans calculer. A des années lumières, en résumé, de son attitude habituelle. Elle lui avait demandé de s’en aller, elle venait de lui dire de partir, qu’il ne pouvait rien pour elle. Sa terreur se conjugua à sa colère, les sentiments s’entremêlèrent pour se renforcer chacun de leur côté. Colère, haine, effroi, il ne restait plus qu’un contrôle glacé pour le maintenir debout, droit, face à cet homme dont il ignorait tout mais dont il voulait la mort. Parce que si Artur avait une certitude, c’était bien celle-là : tuer ne le dérangeait pas, ne le troublait pas. Prendre la vie de la dégénérée ne l’avait troublé que parce qu’il n’avait strictement rien ressenti ; éliminer cet homme qui s’en était pris à sa sœur… «Dégage, Artur ! Bordel mais vas-t-en tu vois pas qu'il veut te tuer ? Fous-le camp, putain !» Il secoua la tête. La douleur, les sanglots de sa sœur, loin de le dissuader, accentuaient encore sa détermination pour la simple raison qu’elle… qu’elle était potentiellement dans cette situation à cause de lui. Et que s’il ne comptait pas l’avouer à voix haute, son intellect ne pouvait passer à côté de cette conclusion.

Sa respiration, calme et posée, était à son image : toute en contrôle. Il était terrifié. Mais il trouvait encore la volonté de conserver sur son visage une impassibilité glacée, copie conforme sans le savoir de l’attitude que son père pourrait avoir dans de telles circonstances. Main tendue dans l’illusoire espoir de placer une distance, il oscillait entre l’envie de se précipiter aux côtés de sa sœur et ce besoin irrépressible de mettre son poing dans la figure de l’autre, à propos duquel son instinct tentait de lui hurler quelque chose. Ne t’approche pas de ma sœur articula-t-il en le fixant sans ciller. Un mouvement dans son dos manqua de lui faire détourner le regard, il lutta pour ne pas se laisser un seul instant déconcentrer. Déconcentrer par qui, déconcentrer par quoi ? Par Moira, qui bougeait. Il ne la regarda même pas. « Moira, ne sois pas plus idiote que d’habitude, plus tu bouges, plus tu perds de sang, plus les secours seront inutiles. » Il était trop concentré sur le fait de garder son calme et une certaine maîtrise de son comportement pour pouvoir en plus de cela déléguer une partie de son attention à son hypocrite diplomatie coutumière. C’était la verve la plus pure et naturelle de l’Irlandais qui demandait à sa sœur de cesser de bouger, verve stimulée par la panique et l’inquiétude contenues.

Attention fixée sur l’autre, il était en train de sentir la sueur s’accumuler à ses pores, marque involontaire de sa terreur, preuve indéniable de son anxiété. Docteur en génétique, maître dans bien des domaines, il n’avait pas de formation médicale et n’avait même jamais cherché à en avoir. Mais il n’avait besoin de nulle formation pour savoir ce que son intuition et le simple bon sens lui hurlait : chaque minute d’inactivité était une minute de moins pour sa sœur. Et cette seule pensée le tétanisait. Sans son attention monopolisée par l’autre, Artur craquerait, il le savait. Et voir sa sœur, l’observer se déplacer, être obligé de suivre ses mouvements à l’angle de son champ de vision… la main de Moira posée sur son épaule fut de l’acide posée sur sa peau. Sa voix, un avertissement. Son timbre… «Vas-t-en... T'as fais assez de mal comme ça... Fous le camp avant que les flics n'arrivent... Y a d'autres moyens pour se venger...» Les os d’Artur vibrèrent avec la force de la certitude, sous l’injonction de sa sœur. Il la sentait, comme un animal blessé, comme un animal en cage, qui se défaisait peu à peu de ses liens. Trop tard pour la sauver, trop en avance pour qu’il puisse observer son retour. «T'as vraiment pas besoin de faire ça...» Un frisson l’épuisa. Parce qu’elle avait beau parler à l’autre, à cet inconnu, à cet ennemi, à ce dégénéré dans ses actes si ce n’était dans son sang, Artur ne pouvait que se sentir concerné par cette mise en garde. Tu n’as vraiment pas besoin de faire ça, de s’interposer, de s’intercaler, de venir tenter d’être là, tenter d’être utile. L’impuissance était là, logée dans ses reins, logée dans ses muscles, lovée dans son incapacité à mobiliser ce que Kingsley lui enseignait. « C’est ça l’truc. J’en ai vraiment besoin. » Un simplement marmonnement, un simple grognement jaugea Artur. Et une claque. Verbale. « J’parie que tu sais même pas pourquoi t’es là. Au lieu d’beugler, peut-être que t’aurais dû ouvrir les yeux. Après tout-j’montrais juste à ta sœur comment t’as tué la mienne. »

L’Irlandais ne cilla pas, ne trembla pas, soutenant sa sœur sans un mot, la forçant même à s’asseoir sur la chaise. Elle devait s’allonger, mais pour l’allonger, il devait se baisser. Et se baisser, c’était être vulnérable à DeMaggio. Parce qu’il n’y avait qu’un frère pour attaquer une sœur. « DeMaggio. Tu es le frère de la mutante. » Sa voix était aussi pâle que son teint, aussi maîtrisée que ses gestes. Un coup d’œil avait déjà suffi à l’Irlandais pour se rendre compte de la situation précaire et instable dans laquelle ils se trouvaient, un battement de cœur lui permit de comprendre que c’était pire que cela. Il était à la merci d’un frère qu’il avait privé de la sœur, et puisque des chiens ne faisaient pas des chats, il était à parier que non content de porter l’héritage des Hunters, il devait lui aussi dans ses veines charrier un ADN muté. J’montrais juste à ta sœur comment t’as tué la mienne. Ses genoux. Artur inspira profondément, ses doigts se parant du sang de la mutante qu’il avait égorgée. « Et c’est ça l’truc… tu vois j’savais pas vraiment à quoi tu ressemblais avant que tu débarques. J’vais te dire, t’as aucune idée du nombre de fois où j’t’ai imaginé. Tu fais quoi ? Quarante kilos tout mouillé ? » Il parlait, il ne cessait de parler. Comme un imbécile. Ne voyait-il pas qu’à parler de la sorte, il laissait aux secours le temps d’arriver, à Artur le temps d’organiser ses pensées, à sa supériorité momentanée le temps de disparaître. Lentement, Artur saisit sa sœur et en profita pour la forcer à s’allonger, conscient non seulement qu’il gagnait du temps mais qu’il assistait à une hémorragie qu’il ne pouvait contenir. Et l’autre parlait, comme s’il s’était plongé dans une catharsis ridicule. Si la situation avait été inversée, Artur savait qu’il aurait sans tardé mis une balle dans la tête du meurtrier de sa sœur, qu’il aurait même passé le fil d’un poignard sur sa gorge avec minutie pour mieux le vider de son sang. Mais non, l’autre parlait. Et si Artur faisait mine de prêter une oreille attentive, à renfort de coup d’œil dans la direction du DeMaggio, ce n’était que pour mieux marmonner en finnois à sa sœur un bref « Ne fais pas l’héroïne, Andreas est en route, les flics aussi puisqu’il les aura appelés. Il s’agit de le faire parler juste que là et toi, il s’agit que tu ne perdes pas connaissance » La santé mentale d’Artur ne tenait qu’à un fil : celle du contrôle qu’il s’imposait par la force de sa volonté.

S’il était au bord de la panique ? Bien évidemment, et ce depuis le début. Et si son calme apparent, son regard froid, son visage délibérément fermé, et si rien de cela ne le laissait paraître, c’était parce qu’il avait des années de maîtrise derrière lui. « T’avais besoin d’tirer deux balles dans les genoux d’ma sœur pour la dominer, et tu crois qu’tu peux m’menacer ? HEIN ?! » Une nouvelle claque, Artur cilla, et ce fut sa seule réaction. Les mots, il savait les gérer. Les cons aussi. Les psychopathes… Artur cilla et ce fut sa seule réaction. Jusqu’à ce que d’un claquement de doigt, il comprenne qu’il ne s’était malheureusement pas trompé dans ses déductions. Un cri, un hurlement trancha ce fil qui le maintenait droit. « Tu vas m’dire. Tu vas lui dire c’que t’as fait à ma sœur. Et tu vas m’dire avec qui tu l’as fait - et va savoir, p’tèt bien que j’te laisserais assez d’temps pour m’supplier comme une merde d’laisser ta sœur vivante. » Il tremblait, le petit frère, il tremblait de terreur en comprenant que cet homme maîtrisait le sang, maîtrisait les os, maîtrisait les muscles, maîtrisait l’air, maîtrisait quelque chose sur lequel lui, simple humain, n’avait aucun contrôle. « LAISSE LA ! » Artur pouvait gérer les mots, pouvait gérer les menaces, pouvait gérer le stress. Mais il ne pouvait gérer cette impuissance qui le laissait apathique. Son cri se craquela, se brisa dans un sanglot qui résonnait douloureusement avec ceux versés quelques temps plus tôt face à la mort de sa mère. Ses mains percutèrent le mutant avec force pour le faire inutilement reculer. « Laisse ma sœur ! » Tu vas lui dire c’que t’as fait à ma sœur Artur se força à respirer. Il ne pouvait se faire aucune illusion sur l’inégalité du combat qui se profilait, encore moins sur l’espérance de vie, et de lui, et de sa sœur. Et pour un égocentrique comme il savait si bien l’être, s’apercevoir que la vie de sa sœur primait sur la sienne, c’était dérangeant. Exaltant. Angoissant. Il se força à inspirer et se força à expirer. Avec difficulté. Tenta de poser ses mots, tenta de poser sa voix. « Si tu veux qu’elle entende ce que j’ai fait à ta sœur, alors laisse-la tranquille ! Stop l’hémorragie avec ta… avec ce que tu es ! » Tu crois qu’tu peux m’menacer Non, bien sûr que non, Artur n’était pas bête à ce point et c’était là un problème. Il réfléchissait, il analysait et toutes ses conclusions ne menaient qu’à un terme : fatal. Doublement fatal.

Réfléchir n’était pas une solution. Son cerveau, ses redoutables capacités intellectuelles, sa nature scientifique, logique et rigoureuse, rien de tout cela n’était un recours possible. Il ne lui restait plus qu’autre chose. La provocation. Détourner l’attention du brun. Sa colère suintait tous ses pores, Artur percevait même une légère folie. Un levier sur lequel appuyer. Il fit un pas en avant délaissant sa sœur pour laquelle il ne pouvait présentement rien. «  Oui, j’ai tué ma sœur, comme tu es en train de tuer la mienne. Oui, j’ai eu besoin de lui exploser les genoux pour la dominer. Toi, tu as besoin de tes tours de passe-passe pour abattre ma sœur. » Son regard se fit méprisant. Le contrôle, tout n’était qu’une question de contrôle. Et d’illusion. « Ma sœur est une mutante, comme l’était la tienne. Tu es un mutant, toi aussi. Où vont tes conclusions ? » Il n’avait rien, il n’était rien, il n’avait pas ce frisson au bout des doigts, ce frisson que lui transmettait Ellie. Mais il avait autre chose. Il leva la main droite, index pointé, comme une mise en garde. « J’ai peut être le gabarit d’un enfant de douze ans… » Il n’acheva pas sa phrase. Son poing gauche partit se fracasser sur le menton de l’autre, simple diversion, tandis que son genou heurtait avec force l’entrejambe de DeMaggio. Il devait juste gagner des minutes. Quelques minutes. Et espérer que pour une fois, son père se présenterait quand il avait besoin de lui.


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Moira Kovalainen
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MessageSujet: Re: Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira   Sleep the journey from your eyes... | Cesare, Artur & Moira Icon_minitimeDim 7 Fév 2016 - 14:24

Sleep the journey from your eyes...

"Ft. Cesare DeMaggio & Artur Kovalainen"

« C’est ça l’truc. J’en ai vraiment besoin. »

Je baissais la main, le fixant avec un regard à la fois effaré et compatissant. Depuis notre première rencontre, je savais que nous n'étions pas vraiment fait pour nous entendre : Je lui tapais sur le système, et lui me donnait envie de lui nettoyer les sinus à l'acide. Et en effet, il m'avait tiré dessus sans le moindre regret... Mais je n'arrivais pas à ne pas compatir. J'étais incapable de ne pas lui trouver des excuses, parce que je nourrissais la même rancœur, le même besoin de vengeance que lui. Et parce que je savais que si l'on assassinait mon frère, j'en perdrais la raison et retournerait ciel et terre pour mettre en pièces son meurtrier. Je peinais à me remettre de la mort de William, mais je savais que je pourrais surmonter cette épreuve. Tout comme la mort de ma mère me hantait sans parvenir à m'abattre totalement. Mais Artur... Si mon frère se faisait tuer, genoux en miettes ou pas, je jurais de lui arracher la jugulaire avec les dents s'il le fallait. J'avais compatir et comprendre sa douleur, jamais je n'accepterais de lui offrir mon frère en sacrifice. De toute manière, rien de tout ce qu'il voulait ne ramènerait sa sœur.

« T'en as pas besoin, ça la ramènera pas, imbécile! »

J'énonçais l'évidence, mais étant donné la détermination de ce type, j'avais le sentiment qu'il avait besoin qu'on lui mette ça sous le nez. Je pouvais comprendre qu'il en veuille à la terre entière, mais il avait eu la preuve avec sa sœur que s'en prendre à n'importe qui pouvait attirer des ennuis. C'était peut-être un mutant, lui aussi, mais je connaissais mon père. S'il nous arrivait quelque chose, à Artur et moi, il lui ferait la peau. Et pas forcément de la façon la plus délicate qui soit. Dans cette pièce, j'étais la seule à n'avoir jamais tué, et si je pouvais empêcher un meurtre de plus, je le ferais. D'autant que je n'avais pas spécialement envie de finir entre quatre planches aussi tôt.
Les jambes flageolantes, je sentais les éclats d'os remuer dans mes genoux tandis que de longs frissons fiévreux me secouaient l'échine. J'avais si mal que je me sentais comme en apesanteur, et chacun de mes membres semblait peser une tonne. Je serrais plus fort la manche d'Artur pour ne pas m'effondrer, luttant pour ne pas bêtement tomber dans les vapes. J'avais ignoré sa remarque, me retenant de lui dire que je doutais que les secours puissent faire quoi que ce soit pour mes jambes. Et finalement, il sembla comprendre qui était notre agresseur. S'il me manquait encore son prénom, j'avais un nom à mettre sur son visage. DeMaggio. J'avais beau chercher, ce nom ne me disait rien, mais je n'étais pas à Radcliff depuis suffisamment longtemps pour connaître tout le monde. Je me tournais vers Artur avec un regard sévère. La mutante. Voilà comment il avait appelé cette pauvre fille qu'il avait apparemment tué. Il l'avait privée de son nom, de son identité pour qu'elle ne soit plus qu'une chose, une créature à abattre... Pourquoi ? Parce que ça rendait son meurtre plus légitime ? Ou parce qu'il avait peur d'admettre qu'il avait pris la vie d'une de ses semblables ? Elle avait une nom, bon sang ! Une identité, une vie, un frère, peut-être une famille ou des amis qui se faisaient du souci pour elle... Il l'avait tuée simplement parce qu'elle avait eu le malheur de naître mutante. Comme moi. C'était ça, qui résonnait à mes oreilles : Elle et moi, nous n'étions pas si différentes. Mutantes, avec un frère capable de tuer. La seule différence, c'était que j'avais eu, pour le moment, plus de chance qu'elle. Malgré les idées qui se bousculaient dans mon esprit, je gardais le silence, préférant économiser mes maigres forces pour rester debout. Jusqu'à quand ? Combien de temps allait durer leur petit combat de coqs ridicule ? J'aurais voulu pouvoir en prendre un pour taper sur l'autre mais déjà, Artur attrapait mon bras pour ne forcer à me rallonger. Je tentais de lutter, préférant rester à leur hauteur pour avoir encore le sentiment de contrôler un peu la situation. Seulement, je ne pouvais lutter. Les articulations malmenées ne supportaient plus le poids de mon corps, et la douleur sembla s'atténuer un peu lorsque je me retrouvais à nouveau allongée au sol. Le sans qui imbibait mes vêtements s'insinuait entre les rainures du parquet, comme un flot continu et inarrêtable. Quelle quantité avais-je perdu ? C'était difficile à dire, mais je sentais le sang pulser à mes tempes et une migraine abominable m'enserrer le crâne dans un étau. A mesure que les minutes s'écoulaient, je palissais et sentais mon corps s'enfoncer dans le sol. Tout ça pour deux petits morceaux de métal. Deux petits, minuscules, insignifiants, putain d'éclats de métal dans mes genoux. Je hochais la tête pour signifier à mon frère que je comprenais, et serrais sa main de toutes mes forces dans la mienne. Qu'il le fasse parler quelques minutes c'était une chose, mais je le suppliais silencieusement de ne pas jouer les téméraires. Mon père était en route... C'était une bonne chose, du moins je l'espérais. Une crainte ne me quittait pas, celle de voir mon frère et mon père tomber sous les balles d'un malade déterminé à avoir sa vengeance. Tout ce que je souhaitais naïvement, c'est qu'il n'y ait pas plus de sang versé ce jour-là.

Je suivis alors l'échange de loin, comme si je me trouvais dans la pièce d'à côté. Finalement, je n'avais pas envie de savoir ce qu'Artur avait fait subir à la sœur du DeMaggio. Je ne voulais pas en savoir plus, ces deux balles fichées dans mes genoux me suffisaient. Mais alors que je les croyais concentrés sur leurs petits échanges à la courtoisie douteuse, je sentis la douleur se réveiller dans mes jambes, tétanisant mon corps et m'arrachant un hurlement de douleur. J'avais oublié... Oui, j'avais oublié qu'il contrôlait le métal, qu'il pouvait me tuer à tout instant en jouant simplement avec les deux balles qu'il avait tiré. L'une d'elle remonta insidieusement le long de ma jambe, explosant mon fémur avant d'aller se loger dans ma hanche. Des larmes de douleur coulaient sur mes joues tandis que mes ongles entamaient le bois verni du parquet. J'avais mal, si mal que je ne pensais pas que l'on puisse souffrir plus encore. La douleur me rendait folle, les hurlements n'apaisaient plus ma souffrance et les tremblements incontrôlable de mes muscles ne faisaient qu'accroître plus encore le mal. Et alors que je pensais avoir traversé le pire, la seconde balle suivi sa voisine et termina sa course dans mon estomac. Un hoquet, un hurlement qui mourut dans un gargouillis ridicule, et voilà que je sentais l'arôme âpre et ferreux du sang sur ma langue. Tant bien que mal, je tentais de contrôler mes tremblements pour me tourner sur le côté et cracher l'hémoglobine qui manquait de m'étouffer.

« Arrête... Pitié... Arrête... »

C'est tout ce que j'étais capable de geindre, de gémir d'une voix pâteuse et éteinte. Trois mots qui me coûtaient tant que je m'affaissais à nous sur le dos, incapable de bouger davantage. Tout ce que je pouvais faire, c'était écouter et assister, impuissante, à l'échange qui se déroulait juste au dessus de moi. Artur perdait pied, je le sentais dans sa voix. La panique commençait à avoir raison de son habituel calme olympien, et je le suppliais en silence de ne pas céder à l'angoisse, de rester calme... De réfléchir pour nous deux, car je n'étais plus capable de penser à autre chose qu'à la douleur incommensurable qui vrillait mon corps tout entier. Seulement, j'étais encore assez consciente pour comprendre ce que disait Artur, et son discours me fit frissonner d'angoisse. Il l'avait tuée parce qu'elle était mutante. Seulement pour ça. Il n'y avait pas eu d'autre raison, d'autre explications. Et ses mots étaient d'une cruauté et d'une méchanceté qui me dépassaient. Je savais qu'Artur luttait pour ne pas se laisser submerger par la colère, je savais aussi que quelque part en lui, son humanité et sa gentillesse subsistaient. Seulement, elles étaient bien trop embourbées dans la cruauté dont il pouvait faire preuve. Il était venu à mon secours, mais ce n'était pas mon frère qui parlait. C'était un esprit corrompu, manipulé, mis à sac par une haine que je ne comprenais pas et trouvais totalement injustifiée. J'aurais voulu lui demander pourquoi il était devenu ainsi, mais tout ce qui franchissait mes lèvres, c'était des gémissements de couleur. Et alors le coup parti. J'écarquillais les yeux en voyant le poing de mon frère percuter le menton de l'autre, et profitais de notre seul atout pour le mettre en garde.

« Il... Contrôle le métal... Méfie-toi de son... Arme ! »

C'était tout ce dont j'étais capable, consciente que la seule chose qui pouvait donner un minuscule avantage à Artur, c'était de pouvoir communiquer avec lui dans une langue que notre assaillant ne connaissait pas. Et que foutaient les flics et les secours, bon sang ? Combien de temps s'était écoulé entre le moment où je m'étais faite tirer dessus et celui où j'assistais, impuissante, à un duel inégal ?
crackle bones
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