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 I fuck up everything but let me explain | Hipporius

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Hippolyte Caesar
Hippolyte Caesar

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SUR TH DEPUIS : 26/05/2015
MessageSujet: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeDim 28 Aoû 2016 - 22:59

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Une chose était certaine, prendre l'habitude du luxe n'était pas une bonne chose. Vivre en haut de la chaîne alimentaire, dans des appartements luxueux, meublés avec élégance et goût, c'était une chose. Pouvoir se permettre de payer sans compter pour des toiles de maîtres, des vêtements de créateurs et un cuisinier étoilé également. Travailler sans relâche pour atteindre les sommets et rouler sur l'or, ce n'était pas à la portée de tout le monde. En revanche, faire une erreur, une seule, pouvait conduire n'importe qui en prison. Du milliardaire au petit voleur sans ambition. L'ennui, c'est qu'un voleur se retrouvant derrière les barreaux ne perdait généralement que sa liberté, alors que le respectable chef d'entreprise... Il voyait sa crédibilité fondre comme neige au soleil et s'envoler ses privilèges. Fini les salons de cent mètres carré, oublié les draps fraîchement lavés et les repas de fin gourmet... Bonjour les cellules insalubres à partager, le matelas défoncé et une nourriture dont même un chien affamé n'aurait pas voulu.

Cette vie-là, Hippolyte entendait bien y mettre un terme rapidement. Il s'était tiré de la misère lui-même, sans l'aide de personne, seulement grâce à son intellect et sa ténacité. Et, il fallait bien l'admettre, quelques sombres histoires un peu douteuses qui lui avaient permis de mettre la main sur l'entreprise à la tête de laquelle il était depuis bientôt trente ans. Il s'était hissé au plus haut, ce n'était certainement pas pour retomber maintenant. Tout ce qu'il voulait, c'était se montrer coopératif pour qu'on lui laisse son droit de regard sur l'affaire du monstre qui avait hanté les rues de Radcliff pendant quelques semaines. Après ça, il lui suffirait de mettre en place une bonne stratégie avec son avocat et de graisser la patte de quelques magistrats corruptibles et il serait dehors.

Pour l'heure... Il lui fallait supporter la puanteur qui régnait dans cette cellule qu'il occupait avec un assassin multi récidiviste au Q.I semblable à celui d'une moule avariée. C'était à peine si le type savait compter jusqu'à dix ou épeler son prénom. Aussi, malgré les vingt bons centimètres d'écart et une masse musculaire qui faisait bien le double de celle du Caesar, le type avait rapidement compris que le chef, ça ne serait pas lui. Après tout, Hippolyte savait y faire, surtout avec les idiots. Il suffisait de leur dire ce qu'ils avaient envie d'entendre, de subtilement les manipuler pour leur faire croire qu'on partageait leurs idéaux, et en moins de temps qu'il fallait pour le dire, on se retrouvait à avoir certes un simple d'esprit à sa botte, mais surtout un gros bras. Le Caesar était tranquille, si qui que ce soit lui cherchait des noises, son compagnon de cellule se chargeait de corriger l'importun pour lui.

Pour l'heure, l'idiot avec quitté la cellule comme la plupart des prisonniers, laissant le Caesar seul avec lui-même, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Il commençait à en avoir sérieusement marre des questions existentielles que l'autre ne cessait de lui poser à toute heure du jour et de la nuit. Allongé sur sa paillasse, il était en train d'achever la lecture de 1984, qu'il comptait enchaîner sur un autre des vieux bouquins jaunis qui prenaient la poussière dans la bibliothèque de la prison. Depuis son arrivée, il l'avait à vrai dire pratiquement dévalisé, et attendait avec impatience que Poppy lui ramène des dossiers ou d'autres livres avant qu'il ne s'ennuie définitivement comme un rat mort. Difficile pour un insomniaque et boulimique de travail comme lui de rester tranquille plus de vingt minutes... Hippolyte n'avait jamais compris l'intérêt de rester immobile à regarder le mur ou pire... Passer une journée à dormir. Perte de temps, inutilité, très peu pour lui merci !

Il tourna une page... Pour constater que la suivante avait été à moitié déchirée. Pestant contre l'imbécile qui avait fait ça, il s'apprêtait à jeter le livre un peu plus loin quand on frappa violemment à sa porte. Hippolyte tourna la tête pour croiser le regard du gardien dans la petite fenêtre qui s'ouvrait sur le couloir.

« Caesar ! Y a d'la visite pour vous ! Levez-vous et présentez vos mains... »

Le français soupira, se leva de mauvaise grâce et s'approcha de la porte. Lui faisant dos, il glissa ses mains dans la petite ouverture le temps que le gardien lui passe les menottes. Bon sang qu'il détestait être ici... Entre la combinaison orange criarde et les menottes qu'on lui passait en permanence aux mains lorsqu'il recevait de la visite... On l'accusait d'avoir signé un bout de papier, pas d'avoir commandité le meurtre de dizaines de personnes ! Mais il fallait croire qu'on prenait les prisonniers un peu plus futés que la moyenne pour des types dangereux susceptibles de s'évader. Qu'ils se calment donc, le Caesar aurait pu réfléchir à un moyen de s'échapper, mais il n'aimait pas plus que ça la perspective d'une vie de fugitif. Docile, il suivit le gardien jusqu'à la petite pièce où les prisonniers pouvaient recevoir de la visite. Hippolyte s'étonnait que Poppy soit déjà là, elle lui avait pourtant dit qu'elle ne reviendrait pas avant la fin de semaine... Il espérait simplement que rien de grave n'était arrivé... Qu'elle n'allait pas lui apprendre que Marius était décédé des suites de sa malformation cardiaque. Car s'il y avait bien une chose que le Caesar comptait faire, c'était bien sortir de prison le plus rapidement possible pour profiter au maximum des quelques mois qu'il restait à son fils.

Aussi, lorsque le prisonnier passa la porte, ses sourcils se arquèrent en découvrant un Marius fébrile, arpentant la pièce comme un ours en cage. Sans pourtant prononcer le moindre mot, il alla s'asseoir docilement sur une chaise et laissa le gardien défaire une menotte pour mieux la passer dans l'anneau fixé au centre de la table et la raccrocher à son poignet, s'assurant ainsi qu'en cas de tentative de fuite il ne pourrait pas faire un pas en dehors de la pièce. Une fois que le gardien eut quitté la pièce, Hippolyte leva les yeux vers Marius. Oh il l'attendait, la grosse colère, le vent tempétueux d'insultes et de reproches... Mais après tout, n'y était-il pas habitué ?

« Tu ne veux pas t'asseoir, au lieu de cavaler ? Tu me fatigues rien qu'à te voir faire... », grommela-t-il.

Hippolyte voulu poser son menton dans le creux de sa main, mais il se ravisa rapidement en constatant que la chaîne de ses menottes était trop courte. Il se contenta d'un soupir avant de reprendre.

« Bien... Je suppose que tu vas hurler, me traiter de tous les noms, blablabla... Si nous en venions à ce qui importe. Comment vas-tu ? »

Autant commencer par cette question et peut-être aurait-il une réponse d'ici la fin de leur conversation...
© Grey WIND.
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Marius Caesar
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SUR TH DEPUIS : 24/01/2015
MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeLun 29 Aoû 2016 - 8:26

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Je crois que je vais le tuer. Non, mieux : je vais le démolir. Bien proprement. A sa façon. Je vais le regarder dans les yeux, je vais lui dire le plus calmement du monde qu’en plus d’être un enfoiré, c’est un connard doublé d’un enculé. Ca sonne bien, comme phrase d’accroche. Ensuite, je vais enchaîner, toujours calmement parce que le calme est pri-mor-dial dans ce genre de situation, qu’il a bien de la chance que Martial ne soit toujours pas revenu à Radcliff, sans quoi ce n’est pas moi qui me serais pointé mais bel et bien le prodigieux avocat de la famille, et qu’il doit bien me croire, il n’aurait pas préféré cette situation là. Ensuite, je vais me lever, lui lancer un regard méprisant et lui dire qu’il n’a pas à compter sur moi pour le laisser croupir là et que le jour où il ira en prison, ce sera parce que je l’aurais voulu et non pas parce qu’il est bien trop lâche pour admettre que c’est son raté de fils qui est l’origine du nouveau scandale Caesar. Voilà. Sur quoi, je compte bien quitter la pièce sans un regard en arrière et ne surtout, surtout pas écouter ce qu’il aura à me dire.

« Je voudrais parler à mon père. » Je voudrais. J’inspire à fond, lorsque ma carte d’identité atterrit dans les mains du main, lorsqu’on me demande de laisser mon sac, ma veste, mes affaires dans une consigne, lorsqu’on passe sur mon torse, dans mon dos, sur mes bras et sur mes jambes un détecteur de métaux, lorsqu’on me rappelle des consignes de sécurité, mais bien sûr, comme si mon père allait me tirer dessus… une nouvelle fois, lorsqu’on me somme de suivre la gardienne de prison qui va avoir l’amabilité de me conduire dans la salle où je pourrai le voir. Le petit bâtard. Si je n’avais pas eu ce message comme quoi son téléphone n’était plus en course, je crois que j’aurais juste cru pendant longtemps qu’il m’avait blacklisté. Le petit bâtard. J’inspire à fond, prends même le temps, au bon moment, de fermer les yeux pour me concentrer et me calmer. Et me prendre le dos de la femme qui vient de s’arrêter. « C’est là ? » Ah. C’est… elle me laisse presque seul, se calant dans un coin, juste pour rester là, au cas où. Je lève les yeux au ciel, avant de croiser les bras. Calme, Marius, calme. Zen aussi. Je vais le regarder dans les yeux. Voilà, commencer par le regarder dans les yeux. Ne pas dire un mot. Arrêter de gesticuler, aussi, passablement, histoire qu’il comprenne que je suis en colère. Que je vais m’énerver. Mais je ne vais pas non plus lui faire le plaisir d’être aussi immature qu’habituellement. Non. Que je vais lui opposer sa colère à lui, son impassibilité à lui, histoire de le mettre dans la situation du gamin en tort qui a des comptes à rendre à… son fils ? Chelou. Je m’arrête de tourner en rond, cherchant un endroit pour m’appuyer, un endroit où m’immobiliser par qu’à la seule pensée de m’asseoir j’en ai la nausée.

Une table. Deux chaises. Le grand luxe. La grande classe. Et un anneau, au centre de la table, qui m’intrigue autant qu’il me captive, histoire de repousser au loin l’anxiété qui grimpe en flèche dans mes veines. Qu’est ce qu’ils font ? Ils sont allés le chercher dans le trou du cul du monde pour que ça prenne autant de temps, c’est ça ? Et puis d’abord, qu’est ce qu’il fait là, hein ? Et pourquoi, surtout pourquoi est ce qu’il paye des sommes faramineuses à des avocats si c’est pour qu’à la moindre broutille, il se retrouve ici comme un vulgaire malfrat ? Et lui qui a toujours été si prompt à débourser du fric pour effacer mon casier judiciaire histoire que ça ne porte pas préjudice à l’entreprise, lui qui n’a jamais rechigné à corrompre toutes les personnes corruptibles sur son chemin, il ne se sort pas d’ici tout seul, à grand renfort de quelques milliers de dollars qui ne seront qu’une putain de goutte d’eau dans sa fortune ? Je tourne en rond, comme un lion en cage, incapable de me calmer, finalement. De toute manière, vu le temps que ça leur prend de le faire venir ici, je vais avoir tout mon temps pour… mon pas ralentit, s’immobilise lorsque je croise son regard.

Putain de bordel de merde. Le orange ne lui va pas du tout. Muet, je suis tétanisé, à les regarder l’enchaîner à la table. Muet, je me contente de le fixer sans décocher un mot, sans même oser ciller. Jusqu’à ce que le gardien sorte de la pièce. Et qu’il embraye immédiatement. Forcément. Il doit avoir peur que je hurle, ou une connerie dans le genre. Ce qui ne serait absolument pas mon style, bien sûr. « Tu ne veux pas t'asseoir, au lieu de cavaler ? Tu me fatigues rien qu'à te voir faire... » Ah ouais ? Même pas d’échauffement aujourd’hui. Je croise les bras sur ma poitrine, pour tenter de paraître… imposant. « Non. » Je n’aime pas être assis. Et il le sait. « Bien... Je suppose que tu vas hurler, me traiter de tous les noms, blablabla... Si nous en venions à ce qui importe. Comment vas-tu ? » J’ai un temps d’arrêt. Être calme : déjà c’est raté, il n’y a qu’à voir la nervosité qui se propage dans le moindre de mes muscles, qui me hurle de rompre mon immobilité pour mieux me remettre à faire les cent pas devant lui. Ce que je ne vais vraiment pas tarder à faire. J’inspire à fond. Comment je vais ? Il s’est regardé ? « T’es pas croyable quand même… » Ah ça… non, il ne l’est pas. « Je suppose que je n’étais pas supposé l’apprendre, c’est ça ? » Calme, Marius, calme toi. Trop tard. Mes jambes viennent de se remettre en marche. « Si c’est pour en arriver là qu’on a déménagé aux States il y a quatorze ans, tu aurais franchement dû me laisser publier mon article, ça nous aurait évité de perdre bien des années, tu sais. » Je m’arrête une fraction de seconde pour pointer un index accusateur dans sa direction « Et ne t’avise pas à m’interrompre tant que je ne te donne pas l’autorisation de parler, compris ? » Oui, je lui pose une question alors que je viens de lui interdire de parler. Fuck la logique. « J’ai quelques questions. Légèrement plus importantes que comment vas-tu, toi Marius mon fils à qui j’ai promis de ne pas l’abandonner une seconde fois alors que sa vie est franchement merdique en ce moment ?. Je te conseille de toutes les retenir parce que tu n’as pas intérêt à en oublier une après. Déjà, c’est quoi ce putain de bordel ? Ensuite, c’est surfait maintenant de prévenir son fils de ce genre de petits détails ? » Dès qu’il fait mine de parler, je commence à hausser le ton. Alors que ma voix tremble de plus en plus de colère. « A quoi ça sert, putain, à quoi ça sert qu’on se parle à nouveau, que tu parles de confiance, qu’on tente de réparer tout le bordel, de mon enfance et tout ce que tu as pu foutre en l’air, si c’est pour que j’apprenne presque par hasard, que tu es en prison ? Et en prison pour quoi ? » Ma voix tonne maintenant, dans la pièce qui résonne. Je passe instinctivement au français. Presque inconsciemment. « A quoi ça sert que je te fasse la promesse de faire des efforts pour TE faire plaisir si toi tu ne te fais pas prier pour foutre TA vie en l’air, tout ça pour quoi ? Pour ENCORE rattraper une de mes conneries, hein ? » C’est marrant, lorsque je me répétais ce que j’allais lui dire, ça ne sonnait pas tout à fait comme ça. « COMMENT TU VEUX QUE J’ARRÊTE UN SEUL INSTANT DE ME SENTIR MINABLE, MOI, MAINTENANT ? » Je me contrains au calme en me mordant la lèvre, ma montre s’excitant légèrement à mon poignet sous mon rythme cardiaque qui s’emballe. Ma mutation est peut être de retour, le vaccin est loin d’être purgé de mon organisme. Très loin de l’être. Et les dégâts qu’il a fait à mon cœur sont… irréparables. « ET POURQUOI TU M’AS CACHE QUE C’ETAIT DE MA FAUTE ? » Calme toi, Marius. Il faut que je me calme. Tout de suite. « Pourquoi tu ne m’en as pas parlé, hein ? Ce n’était pas compliqué, pourtant, bordel ! Qu’est ce qu’il s’est passé pendant mon coma ? Oh, pas grand-chose, Marius. Les conséquences de ta putain de connerie ont libéré une bête hybride dans la ville, mettant les entreprises Caesar dans une situation précaire et me mettant moi, en prison parce que je suis le PDG de la boite. Mais non… MONSIEUR préfère régler tout ça TOUT SEUL, parce qu’il ne me fait pas CONFIANCE pour assumer mes CONNERIES ! » Et le pire dans tout ca, c’est qu’il n’a pas tort, je le sais. Je sortais d’une tentative de suicide. Ce qui me vexe le plus ? C’est qu’en fait, tout ne fait que confirmer une chose : que mon père a toujours eu raison lorsqu’il me traitait de parasite nocif. « Alors ? Qu’est ce que tu as à répondre ? »

© Grey WIND.


Dernière édition par Marius Caesar le Mer 31 Aoû 2016 - 22:42, édité 1 fois
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Hippolyte Caesar
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeLun 29 Aoû 2016 - 15:36

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Quelque part, toute la relation d'Hippolyte et Marius était basée sur la colère, l'opposition, les hurlements, le désaccord... C'était devenu presque rassurant de les voir se chamailler, car au moins cela signifiait qu'ils se parlaient. Ou du moins qu'ils essayaient. C'était devenu leur rythme de croisière, une engueulade par rencontre, une nouvelle raison d'en vouloir à l'autre, mille et une façons d'arranger les choses et une seule pour les envenimer... Mais rien à faire, ils parvenaient toujours à un désaccord en fin de compte. D'autant que cette fois, les torts étaient partagés. Marius était responsable de cet incroyable merdier qui avait conduit à la création d'une créature assoiffée de sang, responsable aussi de tout le bazar médiatique et juridique qui retombait sur les épaules de son père... Mais c'était lui, Hippolyte, qui s'était arrangé pour faire disparaître toutes les preuves susceptibles de faire inculper son fils. C'était lui qui avait délibérément choisi la prison pour épargner à Marius ses derniers mois de vie dans un environnement aussi insalubre. C'était lui qui, quelque part, cherchait sa rédemption entre quatre murs.

Quatorze ans plus tôt, Hippolyte avait fait des pieds et des mains pour ne pas finir en prison, allant jusqu'à délocaliser son entreprise et quitter le territoire français après un procès plus que suspect. Cette fois... Il n'avait pas lutté. Il s'était laissé passer les menottes, avait discuté avec son avocat, et cet arrangement qui l'avait conduit à avoir un droit de regard sur l'affaire à condition de se tenir tranquille en prison lui convenait. Il détestait l'idée d'être enfermé loin de son travail, de sa vie quotidienne et de son luxe habituel, mais il avait aussi le sentiment de purger plus qu'une peine de prison non méritée. Car s'il y avait bien une chose qu'Hippolyte peinait de plus en plus à dissimuler à son entourage, c'était bien son mal-être et sa tristesse, qui tenait plus du désespoir qu'autre chose. Entouré de prisonniers bêtes à manger du foin, il en oubliait presque Victoire, qui pourtant ne cessait de hanter son sommeil, réduisant encore plus ses courtes nuits. Il en oubliait ce qu'il avait fait subir à Marius pendant des années par ignorance et mépris... Il en oubliait un instant que trôner au sommet d'un empire pharmaceutique avait fait de lui un triste être humain. Il aurait aimé hurler à qui voulait l'entendre combien cette boule dans son estomac lui pesait, combien il se sentait mal et vulnérable, mais il en était incapable. Qui l'aurait écouté ? Qui aurai accepté de voir sa volonté infaillible s'écrouler comme un château de cartes ?

Certainement pas Marius, songea-t-il alors qu'il renonçait à le suivre du regard. A la première question posée, Hippolyte soupira et voulu répondre mais déjà, Marius embrayait sur la suite, ne lui laissant pas le moindre répit pour prononcer un mot. Et lorsque le jeune homme lui interdit de dire quoi que ce soit tant qu'il n'aurait pas fini, Hippolyte leva les yeux au ciel en soupirant de nouveau. Si ça pouvait lui faire plaisir de vociférer cinq minutes en arpentant la petite pièce... En apparence, Hippolyte avait l'air calme, posé, absolument pas dérangé par le bruit ambiant produit par les hurlements et vulgarités de Marius... Mais intérieurement, il bouillonnait d'une envie irrésistible de lui mettre trois paires de baffes en lui ordonnant de prendre sa vie en main et d'arrêter d'être aussi négligeant avec sa santé. Ce que Marius pensait des actes de son père, Hippolyte s'en fichait royalement. Chaque fois qu'il croisait le regard de son fils, il ne pouvait s'empêcher de se dire que c'était peut-être la dernière fois qu'il le faisait, qu'il était face à un mort en sursis... Lorsque Marius commença à hausser le ton, son père grimaça mais resta attentif. Puisqu'il voulait des réponses, il allait les avoir... Mais certainement pas de la manière la plus agréable et courtoise qui soit.

Lorsqu'enfin Marius eut fini, Hippolyte darda sur lui son regard glacial puis se tourna vers la gardienne qui n'avait pas bouger en lui faisant signe d'approcher. Habituée qu'elle était, elle tira de la poche de sa veste un paquet de cigarette, en tendit une au prisonnier et l'alluma. S'il y avait bien une chose qui manquait à Hippolyte c'était bien ça : pouvoir s'encrasser les poumons toute la journée comme il avait l'habitude de le faire depuis des années. Se tournant pour ne pas déclencher de crise diplomatique en soufflant un nuage de fumée sur le visage de Marius, il répondit d'une voix incroyablement calme et posée, dans un français aussi limpide pour son fils qu'il était étranger à la gardienne.

« Pour commencer, ici c'est une prison, pas un bordel. Ensuite, tu n'étais pas censé l'apprendre, non. Car si je t'avais appelé pour te dire « ne t'en fais pas pour moi, je vais faire un petit séjour à l'ombre aux frais de l'Etat », tu te serais précipité au commissariat pour empêcher nos bien-aimés policiers de faire leur travail. Je me trompe ? Non. Ensuite, j'ai tenu à ne pas te prévenir pour plusieurs raisons. Tout d'abord pour ne pas t'inquiéter, car tu auras beau me dire ce que tu veux, cette montre que tu portes au poignet et qui hurle depuis dix minutes me rappelle à chaque fois à quel point ton cœur est fragile et susceptible de flancher dans la minute. »

Il s'interrompit pour tirer à nouveau sur sa cigarette, bénissant la nicotine de le maintenir aussi calme alors qu'il mourait d'envie de cracher à Marius de déguerpir en vitesse.

« Quand nous avons parlé de confiance, de tenter de construire quelque chose, tu étais à l'hôpital. Ai-je besoin de te rappeler que tu as bien failli mourir d'un arrêt cardiaque ? Non, bien sûr, ce serait dommage d'oublier ça... En revanche, j'ai été amnésique pendant plus d'un mois, et n'ai appris cette histoire de créature génétiquement modifiée qu'à mon retour au laboratoire, à savoir deux jours après ton réveil à l'hôpital. Ensuite, je ne t'ai pas demandé de faire des efforts pour me faire plaisir, Marius. Je t'ai demandé d'en faire pour avoir l'espoir de voir tes trente ans, bon sang ! Te rends-tu compte que tu es en train de me reprocher tout ce que moi je t'ai reproché il y a quelques semaines ? Que tu me parles de foutre ma vie en l'air quand tu fais exactement la même chose avec la tienne tout en affirmant que tu sais très bien ce que tu fais ? »

A nouveau, il marqua une pause, grimaçant à chaque mouvement du poignet tant les menottes lui brûlaient la peau.

« Rien de tout ceci n'est de ta faute. Enfin... Pas directement. Oui tu as commis une erreur en signant un document dont tu ne savais rien, mais je n'ai pas l'intention de te traiter d'idiot, cette fois. Car sans ma petite altercation avec ta mère et sans mon incapacité à savoir que tu n'étais pas fait pour diriger une entreprise pharmaceutique, je ne t'aurais jamais laissé signer quoi que ce soit. Tu auras beau dire ce que tu veux, te sentir minable si tu veux, tu as voulu bien faire en signant ça. Le seul à qui il est légitime d'en vouloir, c'est le fou qui a fait sortir ce monstre de nos laboratoires. DONC ce n'est pas de ta faute et arrête de grogner ou d'essayer de m'interrompre ou je te jure que de nous deux, je serai celui qui hurlera le plus fort, est-ce que c'est clair ? »


La colère montait, petit à petit, allant crescendo sans pourtant atteindre le point de non retour. La voix était toujours maîtrisée, calme, et le ton posé... Du moins pour le moment.

« C'est mon entreprise, Marius, mes affaires, pas les tiennes, c'est à moi de les gérer, un point c'est tout. Et d'ailleurs, qu'est ce que tu aurais pu faire, toi qui es si malin ? Venir hurler au scandale ? Insulter les flics qui m'ont passé les menottes ? Te jeter aux pieds du juge pour nous faire un caprice d'enfant en affirmant que « c'est pas mon papa le responsable » ? Grandis un peu, bon sang, grandis, Marius ! »

S'il avait toujours l'air calme, l'acidité de ses propos trahissait sa colère et l'envie qu'il avait de tenir Marius éloigné de tout ça, le temps que ça se calme.

« Il n'y a rien que tu puisses faire pour m'aider, Marius. J'ai accepté la prison à condition qu'on me laisse un droit de regard sur l'affaire en cours. Tu as beau ne pas avoir envie que je rattrape ta connerie, je ne vois pas comment tu pourrais m'aider, à moins que tu ne sois brutalement devenu généticien... Alors pour la dernière fois : tiens-toi loin de tout ça si tu ne veux pas d'ennuis. »

Ce que craignait le plus Hippolyte, c'était l'incroyable capacité de Marius à mettre ses neurones en marche lorsqu'il s'agissait d'obtenir ce qu'il voulait. Car il était tout à fait capable de s'arranger pour prouver qu'en effet, il était à l'origine du document qui avait mis le feu aux poudres. Et alors c'est lui qui se retrouverait derrière les barreaux.

« Je crois bien n'avoir rien oublié... C'est bon, tu es content ? » Demanda-t-il d'un ton sec.
© Grey WIND.
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Marius Caesar
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeJeu 1 Sep 2016 - 21:01

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



C’est con quand même la vitesse à laquelle je peux déraper. Je me le suis promis pourtant. Ne crie pas, Marius, reste calme. Garde le contrôle, garde la tête froide, garde un ton mesuré, tes yeux plantés dans les siens, garde le cap, garde ton calme. Mais non. Il faut coire que j’en suis incapable. Vraiment. Mais c’est de sa faute, aussi, à lui, là ! Il a une telle prestance, une telle aisance à me regarder avec froideur que je ne peux que voir à quel point tout ça, c’est hors de ma portée. J’ai essayé, pourtant. J’ai lutté. J’ai lutté contre ce besoin que j’ai de hurler pour me faire entendre, de gueuler pour me faire remarquer, de gesticuler pour exister. Mais non. Raté. Il n’aura pas fallu longtemps pour que ma montre hurle son désaccord à mon poignet, dans des bip que j’ai appris à ignorer depuis que je suis sorti de l’hôpital avec une ordonnance longue comme… mon bras. Des questions, j’en ai. Par centaines. Des exigences aussi, j’en ai. Et celles là, je ne les compte même plus sinon je risque d’être déprimé par cette définition de l’infini dont je me serais bien passé. Dans tous les cas… je perds le contrôle, ma voix claque, ma voix s’égosille en français pour nous donner un peu plus d’intimité, ma voix lui hurle ce que j’ai sur le cœur, ce que j’aurais bien aimé garder pour moi, pour ne pas paraître aussi… immature. Non, même pas immature : pire que ça. Je me fais l’impression de ne pas avoir grandi. D’être bloqué à quatorze ans. D’être bloqué à six ans. D’être bloqué à cet âge où je voulais le foutre en prison, juste pour me venger de ne pas exister, d’être un moins que rien, juste pour étrangler cette culpabilité et cette jalousie qui s’entremêlaient à chaque fois que j’avais la confirmation de ne pas être au niveau. Je perds le contrôle. Comment veut-il que je cesse un seul instant de me sentir minable ? Qu’est ce qu’il a à répondre, hein, qu’est ce qu’il a à me dire pour sa défense, qu’est ce qu’il a… un mouvement. Et son silence. Une clope. Mes poings percutent la table, faisant sursauter la gardienne. « C’EST CA ENCRASSE TES POUMONS AU LIEU DE ME REPONDRE, JE TE DIRAI RIEN ! » J’ai le souffle court, une respiration poussive, un cœur qui me supplie de me calmer et de me taire. Un cœur qui gagne cette bataille, je fais un pas en arrière en croisant les bras sur ma poitrine. Avec un visage fermé. Ouvertement hostile. Qui se force à rester silencieux même s’il lui en coûte.

« Pour commencer, ici c'est une prison, pas un bordel. » J’arque un sourcil. Qu’est ce que j’en ai à faire, qu’il chipote sur les mots ? Depuis quand ça l’emmerde que je cède à la facilité de la vulgarité ? Depuis toujours, certes mais… « Ensuite, tu n'étais pas censé l'apprendre, non. » Au moins, j’ai la preuve qu’il joue la carte de la franchise, même si je ne sais pas si je préfère ça ou le contraire. Ca fait mal. Bien sûr que je me serais précipité au commissariat, bien sûr que je l’aurais défendu, comme je pouvais. Bien sûr que… « […] Tout d'abord pour ne pas t'inquiéter, car tu auras beau me dire ce que tu veux, cette montre que tu portes au poignet et qui hurle depuis dix minutes me rappelle à chaque fois à quel point ton cœur est fragile et susceptible de flancher dans la minute. » J’ouvre grand les yeux. Il s’interrompt. Comme ça. Comme si de rien n’était. Comme s’il ne venait pas de confirmer ce dont j’étais certain. « Tu me vois comme un handicapé, hein, c’est ça ? Laisse mon cœur en dehors de ça. » Je crache, avec toute la rancœur que je peux héberger. J’ai envie de lui dire que je le déteste. J’ai envie de lui dire d’aller se faire foutre. Mais pas tout de suite. Parce qu’il n’a pas répondu à toutes mes questions. Et que, mine de rien, même si je les ai criées, j’y tiens, à ces questions. « Quand nous avons parlé de confiance, de tenter de construire quelque chose, tu étais à l'hôpital. Ai-je besoin de te rappeler que tu as bien failli mourir d'un arrêt cardiaque ? » Mon claquement de langue est éloquent : je n’ai pas envie d’en parler. J’y tiens à mes questions, mais honnêtement, celle là on peut la jeter, finalement. J’en veux plus. « […] Ensuite, je ne t'ai pas demandé de faire des efforts pour me faire plaisir, Marius. Je t'ai demandé d'en faire pour avoir l'espoir de voir tes trente ans, bon sang ! Te rends-tu compte que tu es en train de me reprocher tout ce que moi je t'ai reproché il y a quelques semaines ? Que tu me parles de foutre ma vie en l'air quand tu fais exactement la même chose avec la tienne tout en affirmant que tu sais très bien ce que tu fais ? » Je recule, comme si je venais de me prendre une claque. Et, étonnement, je considère vraiment cette question, avec ce regard perdu de celui qui réfléchit. De celui qui n’avait pas vu les choses comme ça. Vraiment. Mais qui se serait bien passé de les voir comme ça, aussi. « Tu racontes de la merde, ça n’a rien à voir, tu as encore des années devant toi, toi. Moi, c’est différent. Et… et puis c’est même pas la question ! » Si ça l’est. Et je suis stupide de clamer le contraire. Et… Je ferme les yeux avant de jeter un regard à ma montre où mon rythme cardiaque se calme peu à peu.

« Rien de tout ceci n'est de ta faute. » Je fixe à nouveau mes yeux dans les siens. J’ai envie de cracher un ah ouais ? provocateur mais il ne m’en laisse pas le temps. Ouais, voilà, pas directement. J’ai commis une erreur, mais ce n’est pas de ma faute, c’est cela, oui… Mais bien sûr. Je ne me laisse absolument pas toucher parce qu’il peut me dire, je refuse même de l’écouter. Je l’entends, oui, mais je ne l’écoute pas. Pour me préserver ? Tu n’étais pas fait pour diriger une entreprise. J’ai la nausée. Bien sûr que je ne suis pas fait pour ça. Je ne suis pas fait pour grand-chose, hein, j’ai juste tenté de l’oublier. Sans que ça ne fonctionne. Qu’est ce qu’ils sont, tous, à me faire croire que je suis moins stupide que ce que je pense ? Je me fais des illusions, et après j’oublie que ma place, elle se situe parmi les débiles et encore, chez les débiles, je suis sûr que je peux faire office de débile. Genre débinception. « DONC ce n'est pas de ta faute et arrête de grogner ou d'essayer de m'interrompre ou je te jure que de nous deux, je serai celui qui hurlera le plus fort, est-ce que c'est clair ? » Sa colère m’électrise, qui monte crescendo lorsqu’il m’inflige à son tour ce que je lui ai ordonné tout à l’heure. Pas le droit de l’interrompre, vraiment ? Hurler plus fort que moi, vraiment ? Il veut jouer à ce jeu là, VRAIMENT ? Je me redresse instinctivement, même si c’est tout à fait inutile puisque mon père est condamné à rester assis. « Ah ouais ? Parce que t’es à ton maximum, là ? » « C'est mon entreprise, Marius, mes affaires, pas les tiennes, c'est à moi de les gérer, un point c'est tout. Et d'ailleurs, qu'est ce que tu aurais pu faire, toi qui es si malin ? Venir hurler au scandale ? Insulter les flics qui m'ont passé les menottes ? Te jeter aux pieds du juge pour nous faire un caprice d'enfant en affirmant que « c'est pas mon papa le responsable » ? Grandis un peu, bon sang, grandis, Marius ! » Mes yeux s’écarquillent. C’est fou tout de même : on retombe si bien en terrain connu, cet échange de mépris, de reproche, de sarcasme de son côté, cet amas de colère immature et d’impulsivité provocante du mien, que je n’arrive pas à savoir si c’est rassurant ou déprimant. Dans tous les cas, la colère de mon père est de plus en plus palpable. Tangible. « Il n'y a rien que tu puisses faire pour m'aider, Marius. » « C’est c’que tu crois » Il a accepté quoi pour quoi ? J’ai du mal entendre, là. Il a accepté la prison ? Vraiment ? « Alors pour la dernière fois : tiens-toi loin de tout ça si tu ne veux pas d'ennuis. Je crois bien n'avoir rien oublié... C'est bon, tu es content ? »

Si je suis content ? Je le regarde en gardant le silence, les mots sur le bout des lèvres, prêt à les lui cracher à la gueule. Il sait ce que je vais dire de toute manière. Il le sait très bien parce que je ne vais même pas essayer de faire original. Je m’approche, détruis la distance entre nous, pour planter mes poings sur la table dans un vacarme des plus charmants. J’aime le métal. J’aime aussi ce petit côté clochette avec ses menottes. Ca fait pittoresque. Je le regarde droit dans les yeux en me penchant sur la table pour me rapprocher encore plus de lui. Et j’en profite pour articuler correctement, avec application, en détachant bien les mots. « Fuck off. » Je m’écarte avec brusquerie. « Tu m’entends Papa ? Va te faire foutre. Non, je ne suis pas content. Parce que tu n’as pas changé, au final. Je ne sais pas à quoi tu joues, mais tu t’entends ? J’ai l’impression d’avoir quatorze ans. Retourne jouer dans ta chambre Marius, tu es trop con pour savoir de quoi on parle, va plutôt jouer avec tes legos. J’ai peut être pas ton intelligence, j’ai peut être pas ton charisme, j’ai peut être pas ton petit regard péteux, mais il y a une chose que j’ai, en l’occurrence, c’est la vérité de mon côté. Ce que j’aurai pu faire ? Déjà, peut être t’épargner la lourde tâche de falsifier les documents. C’est toi qui m’as appris ça : quand on fait une connerie, on assume, on en subit les conséquences. C’est moi qui devrais être à ta place. T’es peut être un enfoiré, t’es peut être un meurtrier, t’es peut être un menteur, mais cette fois, c’est moi qui ai merdé, tu m’entends ? Et il est hors de question que tu m’écartes de l’équation pour la stupide raison que j’ai un cœur de merde. Je veux pas de traitement de faveur parce que je suis ton fils, je veux pas de traitement de faveur parce que je suis malade, tu m’entends ? Je veux juste que tu te comportes… » Je m’arrête. De parler et de bouger, parce qu’au milieu de tout ça je me suis bien sûr remis à faire des allers-retours. Comme toujours. Je m’arrête parce que je me rends compte de l’énormité que je m’apprête à dire. Je veux juste qu’il se comporte normalement ? Mais chez lui, de toute évidence, c’est ça, la normalité. « Je ne suis pas généticien. Je ne suis pas PDG. Je ne suis pas surdoué, je ne suis pas un petit fucking génie comme toi. Je ne suis pas violoniste, je ne suis pas architecte, je ne suis pas mafioso, je ne suis pas avocat, je ne suis pas grand-chose. J’aimerais être un grand mathématicien, ça oui. Un handballeur professionnel, aussi, accessoirement. Je me contenterais peut être d’être un père qui vaut l’coup, ou un copain, ou un ami. Je veux bien être juste un trentenaire, ça ouais. Mais s’il y a bien une chose que je refuse d’être un jour, c’est d’être le fils à papa qui a laissé son père aller en prison pour une erreur qu’il a commise alors qu’il était supposé être suffisamment adulte pour connecter ses neurones. » Je persiste à le regarder dans les yeux. « Je suis pas un handicapé, Papa. Je ne suis même plus un gosse. Alors regarde moi en face et essaye de me convaincre que tu as ta part de responsabilité dans cette affaire, je veux bien voir ça, je suis toujours curieux de voir à quel point un homme peut être de mauvaise foi. Et je profiterai du bruit de fond pour trier tous les duplicatas que j’ai en ma possession et qui vont me permettre de rétablir la vérité. »

Ah ben voilà. Ca c’est un Marius qui reste calme. A croire que j’ai franchi un cap et que je suis au-delà de la colère. Ou que je suis juste blessé. Vraiment. Ca c’est un Marius qui parle sur un ton posé, avec aplomb, qui se tient droit et qui articule au lieu de beugler comme un bœuf ce qu’il a sur le cœur. Je ne l’aime pas vraiment ce Marius, parce qu’il ne me ressemble pas. Mais putain, qu’est ce qu’il fait adulte, ce Marius. On dirait presque qu’il vient de se prendre une balle à bout portant.

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Hippolyte Caesar
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeVen 2 Sep 2016 - 14:04

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Dans l'esprit d'Hippolyte, il ne pouvait y avoir pire comme punition que le fait d'être en prison sans savoir quand les autorités le laisseraient sortir. Mais il avait finalement trouvé pire. Bien pire. Se retrouver enchaîné face à Marius, et être dans l'incapacité de lui mettre une claque à chaque fois qu'il hurlait ou disait une ânerie. Ce qui aurait fait beaucoup de claques, étant donné qu'il hurlait déjà comme un idiot alors que son père tirait tranquillement sur la cigarette qu'il avait entre les lèvres. Oh ce genre de hurlement, il y était habitué, depuis le temps ! Il faisait presque parti du bruit ambiant, comme le bourdonnement désagréable d'une mouche qu'on aurait bien volontiers écrasé dans la paume de sa main. Marius pourrait bien lui faire la guerre autant qu'il le voudrait, il ne changerait pas son père d'un iota sur le sujet : à raison de près de deux paquets de cigarettes par jour, celui ou celle qui arriverait à le faire arrêter n'était pas né.

Avec le calme et la froideur qui le caractérisaient, Hippolyte commença à éplucher et répondre à toutes les questions de Marius une par une. Il y avait toujours cette acidité dans ses mots, ce sarcasme injuste et désagréable qui semblait s'inviter quand il n'était pas le bienvenu mais surtout, le Français espérait bien couper court à cette conversation le plus vite possible. Aussi, lorsque Marius recommença à faire sa mauvaise tête, affirmant que leurs deux cas étaient différents, son père laissa échapper un rire méprisant en haussant les sourcils.

« Tu aurais bien plus d'années devant toi si tu arrêtais de jouer les idiots, Marius. Si tu veux jouer à ce jeu-là, on verra bien lequel de nous deux enterrera l'autre le premier... Et je ne te prends pas pour un handicapé. Juste pour un parfait imbécile. »

Voilà. La délicatesse, c'était pour les faibles, et Hippolyte le démontrait une fois de plus. Il avait beau avoir « accepté » la décision de Marius, il ne l'approuvait pas. Il avait toujours du mal à se faire à l'idée que son fils mourrait dans les mois à venir de sa malformation cardiaque, tout ça parce qu'il avait trop peur de se soigner mais surtout parce qu'il ne s'estimait pas assez pour se sentir le droit de passer sur le billard et avoir une seconde chance. Bon sang qu'il était bête, mais bête ! Capable de prouesses mathématiques qui en faisaient un surdoué, mais incapable de voir sa propre détresse et de tenter quoi que ce soit pour y remédier ! Tirant à nouveau sur sa cigarette pour ne pas serrer les poings de frustration, Hippolyte poursuivit, ignorant par la même occasion la raillerie de Marius. S'il était à son maximum... Oh le naïf... Il était pourtant habitué à l'attitude de son père, mais il semblait avoir oublié qu'en général, Hippolyte hurlait moins fort mais frappait davantage, avec des mots puissants et incisifs. Alors non, clairement, il n'était pas à son maximum, loin de là, même. Il n'en était même qu'à l'échauffement. Tout ce qu'il voulait, au fond, c'était que Marius le laisse gérer cette affaire, qu'il n'aille pas inutilement stresser son cœur pour rien et... Et qu'il lui fasse confiance, tout simplement.

Hippolyte se rendait à présent compte à quel point le manque de confiance de Marius à son égard pouvait être blessant. Il aurait aimé que son fils lui dise simplement « ok, papa, tu vas gérer, j'ai confiance en toi », mais au lieu de cela, il avait droit aux reproches, aux hurlements... Marius ne le laisserait pas gérer cette affaire seul, c'était maintenant une certitude, sauf qu'il semblait s'obstiner à ne pas comprendre pourquoi son père tenait à le laisser à l'écart de tout ça. Ce n'était pas qu'Hippolyte n'avait pas besoin de l'aide de son fils, mais plutôt qu'il n'en voulait pas. Il détestait voir ses échecs mis sous le nez de quelqu'un d'autre, tout comme il avait pris la fâcheuse et délicate habitude de toujours tout gérer et régler lui-même. En réalité... Ce n'était pas pour rabaisser Marius ou parce qu'il le pensait incapable de l'aider, qu'Hippolyte le repoussait. C'est parce qu'il ne voulait pas monter cette vulnérabilité à son fils, il ne voulait pas briser plus encore cette sculpture de son père qu'il avait hissée sur un piédestal, il ne voulait pas... Il ne voulait pas le décevoir à nouveau. Tout ce qu'il voulait, c'était régler cette histoire au plus vite, même s'il devait pour cela se tenir à carreaux en prison quand tout son être lui hurlait de s'enfuir au plus vite. Aussi, quand Marius vint planter ses poings dans la table, son père releva la tête, pas le moins du monde impressionné. Un regard sombre, qui vint croiser les iris déterminé de son fils. Bon sang qu'il lui ressemblait... Cette volonté de fer, cette ténacité, cette prestance qu'il prétendait ne pas avoir... Ils se ressemblaient bien trop pour leur propre bien. A ceci près qu'Hippolyte était un menteur et un meurtrier, tandis que Marius voulait simplement que justice soit faite.

« Que je comporte comment ? Comme un adulte ? Comme un père ? Il fut une époque, Marius, où je t'aurais laisser pourrir en prison pour te donner une leçon. Et ça, ça n'a rien d'une attitude normale pour un père qui se soucie de son fils. Je ne te laisserais pas prendre ma place, est-ce que c'est clair ? Je resterai ici le temps qu'il faudra, et tu resteras bien sagement en dehors de tout ça. La vérité, c'est que toute cette histoire découle des mes erreurs, mais que falsifier un ou deux documents va bien plus vite que raconter toute l'histoire à une audience qui, de toute manière, ne cherche qu'un coupable à enfermer le plus vite possible. »

Quelque part, Hippolyte aurait aimé que Marius continue à hurler, qu'il gesticule, qu'il brasse de l'air inutilement... Parce que ce Marius là, il savait le gérer, lui répondre, le dominer... Le Marius arborant fièrement le patronyme Caesar, en revanche... Il avait beau le voir se dessiner depuis quelques mois, il n'arrivait pas à se faire à ce calme, à cette détermination et à ce regard qui, plutôt que de le fuir, affrontait le sien. Il n'aimait pas ce Marius là, parce qu'il avait raison.

« Non Marius. Tu n'es rien de tout ça. Tu n'es qu'un idiot incapable de voir ses propres réussites, qui ne voit que ses échecs, qui voit en son entourage ce qu'il n'a pas pu accomplir et... Oh qu'importe, de toute manière, tu ne m'écoutes pas. »

Les menottes cliquetèrent alors qu'Hippolyte serrait les poings, sentant la colère et l'impuissance le gagner. Il détestait cette résignation, tout comme il détestait ce besoin qu'avait Marius d'encore plus mettre sa vie entre parenthèses pour vivre pour et à travers les autres. Bon sang, avait-il vraiment besoin de vivre pour son frère, pour ses enfants, pour son imbécile de père ? Ne pouvait-il pas simplement vivre pour lui-même et s'estimer ne serait-ce qu'un peu ? Alors, fixant toujours Marius sans ciller, il la lui servit sur un plateau d'argent, sa belle excuse sans queue ni tête, qui n'avait de sens que pour lui et sa culpabilité.

« Ce que tu n'as pas l'air de comprendre, c'est que toute cette histoire ne démarre pas à la signature malheureuse d'un document qui n'aurait jamais dû atterrir entre tes mains. Le scientifique qui est venu te voir pour avoir l'autorisation de pratiquer des tests pour sa formule me faisait la guerre depuis plusieurs mois déjà pour obtenir mon aval, ce que je ne lui ai jamais donné, car je savais, au vue de ses résultats, que cette expérience serait vouée à l'échec. Il a profité de ma convalescence et de ton arrivée pour arranger les choses, et j'imagine qu'il t'a dit que j'étais d'accord avec son projet ? Que je l'approuvais ? Et qu'il t'a bassiné de données génétiques pour noyer le poisson ? »

Il le connaissait bien, l'enfant de catin qui avait usé de l'inexpérience de Marius pour parvenir à ses fins. S'il avait su que les choses dégénéreraient ainsi, Hippolyte l'aurait probablement renvoyé bien plus tôt.

« En réalité, ce document n'aurait jamais été signé si j'avais été en pleine possession de mes moyens, sain d'esprit et aux commandes de l'entreprise. Or, j'étais amnésique. Et pourquoi cela ? Parce que ta mère m'a poignardé et empoisonné. Et tu vas me demander pourquoi elle a fait ça ? Parce que, pour une raison qui m'échappe toujours, je me suis retrouvé doté du pouvoir de traverser la matière pendant quelques semaines. Je soupçonne quelqu'un d'avoir créé une sorte de... Contre vaccin, une formule qui permettrait à un individu lambda de développer les mêmes capacités qu'un mutant, d'être à l'origine de tout ça. Qui plus est, si ta mère est aux abonnés absents depuis quelques mois, c'est parce qu'elle a appris l'existence d'Ileana, et donc de ma tromperie il y a... Plus de vingt ans. C'était un argument supplémentaire, je suppose, pour opter pour le meurtre et non la vaccination. »

Hippolyte passa certains détails sous silence, à commencer par Lily. Il n'ajouta pas qu'elle était la sœur de Marius, afin de ne pas déclencher une énième crise diplomatique, pas plus qu'il ne précisa avoir lui-même tenté de mettre fin à ses jours lorsqu'il s'était découvert mutant. Inutile que Marius le traite de cinglé pour avoir tenté de se tirer une balle dans le crâne, laquelle était aller se ficher dans le mur comme si ses os avaient été faits de vapeur.

« Alors je récapitule. J'ai trompé ta mère, ai développé une mutation sortie de nulle pas, ce qui l'a conduite à me poignarder, j'ai perdu la mémoire, t'ai laissé les rênes de mon entreprise avec naïveté, et t'ai laissé signer un document qui met toute mon entreprise en péril et, plus important encore, ta vie. Ose me dire à présent que tout ceci n'est pas ma faute. »

Bancale. Cette excuse était bancale. Et surtout, elle reflétait avec une clarté aveuglante la culpabilité d'Hippolyte, son besoin de se repentir, son incapacité à accepter qu'il était non seulement le plus mauvais père qui soit mais aussi un bien piètre mari. S'il s'était vu de l'extérieur, il se serait traité d'imbécile et d'incapable. Mais pour l'heure, il ne visait qu'une chose : régler sa dette auprès de la société et apporter son aide dans la guérison du pauvre homme qui s'était retrouvé malgré lui dans la peau d'une créature bleutée et assoiffée de sang.

« Et, au risque de me répéter, mon emprisonnement est la condition pour que je puisse garder ma place au sein de l'enquête... Pour que je puisse leur apporter mon aide quant à l'élaboration d'un remède. C'est tout à ton honneur de vouloir rétablir la vérité, Marius. Mais elle te nuirait plus qu'autre chose, et nuirait tout autant à l'affaire. J'ai l'impression que tu ne t'en rends pas compte... »

Ou qu'il ne l'écoutait pas... Ou que son choix était fait, qu'il comptait bien, d'une manière ou d'une autre, faire sortir son père pour prendre sa place. Mais combien de temps Marius tiendrait-il entouré des pires criminels qui soit ? Le calme était revenu des deux côtés, pas un mot plus haut que l'autre ni un haussement de ton... Mais chez les Caesar, c'était rarement bon signe. C'était plutôt le genre de trêve qui annonçait un raz de marée sans précédent, le calme avant la tempête... Le silence avant l'Apocalypse.
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeMar 6 Sep 2016 - 23:12

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Il me prend pour un foutu handicapé. Je le lis dans ses yeux, je crois le lire dans ses yeux, mais que je le lise ou que je me contente de le croire, je le vois. Il me prend pour un handicapé, pour un poupon fragile qui peut s’écrouler à chaque instant. Et ma montre qui hurle à mon poignet est une preuve qu’il n’a pas tout à fait tort. Sauf que… je me souviens du regard de mon entraîneur, lorsque le médecin nous a annoncés les résultats des analyses, des examens, des scanners, de tout ce qu’ils ont pu me faire pour tenter de comprendre ce que j’avais. Lui aussi, il m’a vu comme un handicapé du jour au lendemain. Pire : il avait pitié de moi. Je suis passé du prodige à la poupée de porcelaine en moins de temps qu’il n’en faut pour dire putain. Et là, dans les yeux de mon père, ces deux billes noires qui me méprisent, qui me fixent sans émotions, qui me sondent, qui attendent que je me calme, là, je suis certain de la voir, cette pitié, je suis certain de le voir, ce jugement. Il me voit comme un handicapé. Comment ça, je lui reproche exactement ce que lui m’a reproché à l’hôpital ? Mais qu’il aille se faire foutre, qu’il arrête de raconter de la merde, ce n’est en rien, en rien du tout comparable, et toute la mauvaise foi du monde est condensée dans mes pensées et dans mes mots lorsque je le lui affirme dans une éloquence digne d’un crabe injustement arraché de son rocher. « Tu aurais bien plus d'années devant toi si tu arrêtais de jouer les idiots, Marius. Si tu veux jouer à ce jeu-là, on verra bien lequel de nous deux enterrera l'autre le premier... Et je ne te prends pas pour un handicapé. Juste pour un parfait imbécile. » Je serre les dents, me retenant difficilement de partir au quart de tour. Et de renchérir.

Mais… pourquoi est ce que je me retiens, au juste ? Ma montre, mon poignet, mon cœur, mon rythme cardiaque, la prison, l’hôpital, mon père, moi, mon avenir. Son avenir. Compromis par ma faute. Voilà, peut être, pourquoi je me retiens de renchérir alors que je n’ai qu’une envie, c’est de lui hurler, de lui cracher à la gueule à quel point je n’en ai rien foutre des années qu’il me reste, rien à foutre qu’elles se comptent sur les doigts d’une main, et encore sur les doigts de la main gauche de Yoda. Rien de tout ceci n’est de ta faute. Il n’aurait pas pu trouver pire comme approche pour répondre. Son entreprise, ses affaires… mais qu’est ce qu’il croit ? Que je vais vraiment lui dire ah, oh, okay, vraiment désolé, j’ai cru que j’avais le droit de me sentir concerné, tiens voilà un sandwich à la guacamole, fais coucou à tes copains, fais pas trop tomber la savonnette et n’embête pas tes petits camarades, bisous Papa ? C’est vraiment ce qu’il croit ? Parce que… qu’il soit à son minimum ou moi à mon maximum, s’il y a bien une chose dont je suis actuellement certain, c’est qu’on est aussi buté l’un que l’autre. C’est bon, tu es content ? J’ai tellement de chose à lui hurler en réponse à cette provocation aussi gratuite que douloureuse qu’une fois encore, je me retiens. Mais pas pour laisser couler. Non. Pas vraiment. Je m’approche, je fais hurler la table lorsque mes poings s’y abattent pour me rapprocher de lui. Qu’il aille se faire foutre. Mais alors, vraiment. Et violemment si possible. Qu’il se la ferme, qu’il aille se faire foutre s’il pense que je vais abandonner là, s’il pense que je vais filer la queue entre les jambes parce que ce sont ses affaires et pas les miennes. Excuse de merde. Comme si ça avait un jour suffit pour me faire taire et me faire partir. Et maintenant plus que jamais, ça ne suffit pas. Ca ne suffira pas, ça ne suffira jamais plus. Il m’entend ? Je n’ai pas quatorze ans, je ne suis pas un handicapé, je peux gérer, je peux rectifier le tir, je peux assumer les conséquences de ma connerie de petit imbécile qui s’est cru capable, sans savoir trop comment, d’assumer la responsabilité d’un PDG alors qu’il ne sait même pas lasser ses chaussures tout seul. Je ne veux pas de traitement de faveur, je ne veux rien de tout ça, je veux juste qu’il se comporte… « Que je comporte comment ? Comme un adulte ? Comme un père ? » Mes épaules menacent de s’abaisser, comme un gamin pris en faute. Mais mes yeux sont là pour continuer à lancer des éclairs et à le fixer d’un regard noir. Je crache un « Normalement » qui veut tout et rien dire à la fois, alors qu’il m’assène quelques vérités pour bien attiser les flammes de ma colère. « […] Je resterai ici le temps qu'il faudra, et tu resteras bien sagement en dehors de tout ça. » « SAGEMENT ? » « … que toute cette histoire découle des mes erreurs, mais que falsifier un ou deux documents va bien plus vite que raconter toute l'histoire à une audience qui, de toute manière, ne cherche qu'un coupable à enfermer le plus vite possible. » Il faut que je me calme. Vraiment. Mais… mais c’est… compliqué. Surtout face à mon père. Surtout face à lui, face à son calme, face à son ton acerbe, face à son regard. Il faut que je me calme.

Ce qui est loin, très loin d’être aussi facile qu’il n’y paraît. Je me concentre sur ce que je dis, je me concentre sur ce que je ne suis pas. Sur ce que je suis. Pas un généticien comme lui, pas un PDG comme lui. Pas un violoniste comme Moira, pas un avocat comme Martial, pas une architecte comme Aspen. Je n’ai pas fait d’études, juste ce qu’il fallait pour faire plaisir à mon frère et à mes entraîneurs, je n’ai jamais fait de vrai travail, pas depuis que j’ai quitté le monde du handball. Je ne suis pas intelligent, pas brillant, pas grand-chose. Mais surtout, je refuse d’être un fils à papa et, et j’insiste, je le répète, je ne suis pas un handicapé. A ton avis, Papa, pourquoi est ce que j’ai voulu à ce point cacher ma malformation, hein ? Ce n’est pas pour vos beaux yeux, c’est encore moins pour les miens. C’est juste parce que j’ai honte, et que je ne veux pas me prendre cette honte encore plus dans la gueule devant des considérations muées par la pitié. Je ne suis pas un handicapé, je ne suis pas un gosse : je n’ai aucune excuse. Alors qu’il me laisse assumer. Merde.

Je suis calme lorsque je finis par me taire et à le convier d’un ton cassant à trouver quelque chose à répondre à tout ça. Je sais qu’il va trouver, il n’est pas Hippolyte Caesar pour rien, mais… mais je sais aussi que pour une fois, ma position est inattaquable pour la simple raison que j’ai raison et que lui, il a tort. « Non Marius. Tu n'es rien de tout ça. Tu n'es qu'un idiot incapable de voir ses propres réussites, qui ne voit que ses échecs, qui voit en son entourage ce qu'il n'a pas pu accomplir et... Oh qu'importe, de toute manière, tu ne m'écoutes pas. » Je ricane. « En effet, je t’écoute pas. » Mes réussites ? La bonne blague : il n’y en a aucune. Strictement aucune. Celles que j’aurais pu avoir, elles m’ont été volées par un cœur défaillant. Et celles que j’ai poursuivies, je les ai réduites à néant. Franchement, à vingt-sept ans, qu’est ce que j’ai réussi ? Strictement rien.

J’inspire à fond en reculant d’un pas. Et en détachant mon regard du sien tout en croisant les bras. Calme, Marius, calme. Il faut que je reste dans cet état, c’est le bon pour discuter d’adulte à adulte avec cet homme qui à défaut de véritablement m’élever, m’a au moins nourri. Et étouffé de son ombre pendant plus de vingt ans. Etouffé d’une ombre que je ne suis même pas digne de piétiner. C’est à pleurer. « Ce que tu n'as pas l'air de comprendre, c'est que toute cette histoire ne démarre pas à la signature malheureuse d'un document qui n'aurait jamais dû atterrir entre tes mains. » Je le fixe à nouveau, sans sourciller. Vas-y, éclate toi à essayer de me convaincre, mais ce scientifique, il m’a peut être, éventuellement, potentiellement dit que tu étais d’accord, c’est au final moi, uniquement moi, toujours moi, qui ai signé cette foutue autorisation. « Et qu'il t'a bassiné de données génétiques pour noyer le poisson ? » Je serre les dents en détournant le regard. C’est dingue la façon qu’à mon père d’énoncer des hypothèses comme si c’était des certitudes. Comme si je n’étais pas foutu capable de lire un dossier sans me faire avoir par le premier opportuniste venu. « J’ai lu le dossier. » Malgré moi, je viens d’articuler une pitoyable tentative de défense et de justification. J’ai lu le dossier, je n’ai juste pas réussi à démêler dans la prose imbuvable de l’imbécile les tenants et les aboutissants du projet, je n’ai plus que retenir son j’imagine que vous ne comprenez rien. C’est vrai que j’ai tendance à oublier que vous n’êtes pas votre père. Ce n’est pas de votre faute, mais il sera si déçu lorsqu’il reviendra de voir que ces recherches ont pris du retard, il misait gros dessus… enfin… ce n’est pas de votre faute… qui a forcément touché la corde sensible et m’a fait réagir sur le coup.

Mais ça, bien sûr, il est hors de question que mon père l’apprenne. Déjà, qu’il me sache que je suis un imbécile, c’était pas obligé, mais si en plus il faut qu’il découvre à quel point c’est facile de me faire signer des conneries, juste ne me comparant avec lui et en me rappelant à quel point je suis une déception… « En réalité, ce document n'aurait jamais été signé si j'avais été en pleine possession de mes moyens, sain d'esprit et aux commandes de l'entreprise ». Je le sais, ça. Je le sais. Mes mains se crispent sur mes bras, mes ongles se plantent dans ma peau. Tant mieux si je m’esquinte jusqu’au sang, si ça peut me permettre de rester calme devant ce nouvel aveu de ma connerie profonde. Sain d’esprit. Parce que lui aussi, il se rend compte à quel point me donner procuration était une aberration. Je n’aurais jamais du jouer avec sa mémoire, je n’aurais jamais dû céder à la tentation de me créer un père artificiel, une confiance artificielle, un passé artificiel. Je n’aurais jamais dû tenter de croire Martial lorsqu’il me disait que je n’étais pas bête. « Or, j'étais amnésique. » « Je sais. » Pour peu, que je le sais. « Et pourquoi cela ? Parce que ta mère m'a poignardé et empoisonné. Et tu vas me demander pourquoi elle a fait ça ? Parce que, pour une raison qui m'échappe toujours, je me suis retrouvé doté du pouvoir de traverser la matière pendant quelques semaines. Je soupçonne quelqu'un d'avoir créé une sorte de... contre vaccin, une formule qui permettrait à un individu lambda de développer les mêmes capacités qu'un mutant, d'être à l'origine de tout ça. Qui plus est, si ta mère est aux abonnés absents depuis quelques mois, c'est parce qu'elle a appris l'existence d'Ileana, et donc de ma tromperie il y a... Plus de vingt ans. C'était un argument supplémentaire, je suppose, pour opter pour le meurtre et non la vaccination. » Je ferme les yeux une fraction de seconde. Une fraction infime. Pour les planter dans les siens dès que je parviens à les rouvrir. « Tu te fous de ma gueule, là, non ? » Ah…

Ah ah… Ah ah ah… Mon hilarité pourrait être sans limite si je n’étais pas aussi sérieux à cet instant alors que mon père, ce génie, mon idole, l’une des personnes si ce n’est la personne la plus intelligente que je puisse connaître tente de justifier sa culpabilité en remontant à… à une infidélité d’il y a vingt ans ? Sérieusement ?. Ose me dire à présent que tout ceci n'est pas ma faute. J’écarquille les yeux. « Pardon ? » Il est sérieux, là ? Il m’invite réellement à démolir son excuse bidon ? « Et, au risque de me répéter, mon emprisonnement est la condition pour que je puisse garder ma place au sein de l'enquête... Pour que je puisse leur apporter mon aide quant à l'élaboration d'un remède. C'est tout à ton honneur de vouloir rétablir la vérité, Marius. Mais elle te nuirait plus qu'autre chose, et nuirait tout autant à l'affaire. J'ai l'impression que tu ne t'en rends pas compte... » Je me détache brutalement du mur, à l’instant même où il remet encore une fois en doute ma lucidité.

Je suis quelqu’un de très lucide, contrairement à ce que les gens pourraient être amenés à croire en voyant mon comportement et mes conneries. Je suis quelqu’un de plus lucide qu’il n’y parait, ou du moins j’ai l’impression de l’être. Parce que je me dis que pour comprendre à sept ans qu’on n’existe définitivement plus aux yeux de sa mère, pour se rendre compte à huit ans qu’on est méprisé par son père, voué à n’être qu’une déception sans nom pendant un bon bout de temps, pour avoir la lucidité de choisir de se creuser sa propre vie et d’envoyer en l’air tous ses efforts, pour avoir la lucidité de se rendre compte qu’on est un poison pour pas mal de gens à commencer par ceux qui font l’erreur de s’approcher trop près – coucou Astrid -, il faut avoir quand même les yeux grands ouverts. Je crois. Dans tous les cas… non, je ne me rends pas bien compte en quoi cette affaire me nuira plus que mon cœur. « Qu’est ce que j’ai à perdre ? » Je lâche d’un coup, après une minute, une toute petite minute de silence et de déambulation dans la pièce. « Je suis très sérieux. Ca peut me nuire ? Oh, misère, ça peut même me foutre un casier judiciaire, quelle horreur… » Je singe l’affliction et la plus grande désolation avant de basculer dans l’acerbe, un ton qui ne me va pas bien au teint, pourtant. « Papa, c’est toi qui ne t’en rends pas bien compte : j’ai quoi devant moi ? Trois ? Quatre ans ? Maximum ? Les médecins les plus optimistes applaudiront le jour de ma trentaine. » Je commence à perdre légèrement ce contrôle si durement acquis. Mais je ne le perds pas comme d’habitude. Ma voix est étrangement mesurée lorsqu’elle reprend des forces et perd toute modulation autre que… l’agacement. « En quoi ça peut me nuire, hein ? Je n’ai pas de boulot. Pas de situation stable. Pas de famille. » Je compte sur mes doigts tout ce que je n’ai pas. « Pas d’avenir ! » J’hausse le ton de manière conséquente pour le mettre en garde dans un « Et je t’INTERDIS de me parler d’opération. » Je le regarde droit dans les yeux. « Ton droit de regard, tu le conserveras, parce que non seulement tu seras blanchi, mais en plus, tu es le seul et l’unique vrai PDG de Caesar Pharmaceutics. Si je vais en prison, ce sera parce que je l’aurais mérité et parce que tu seras bien plus utile en dehors de ce trou à rats que dans ce déguisement orange, ridicule. » Si je m’interromps, c’est juste pour faire le point sur ce que j’ai dit et sur ce que je n’ai pas encore dit. Et pour respirer, aussi. « Si tu restes là, Caesar Pharmaceutics va plonger, moi j’aurais sur la conscience tous les dégâts que cette créature a causé. Toi, à l’extérieur, tu peux faire bien plus que moi. Et moi à l’intérieur, non seulement je ne serai plus dans tes pattes, mais en plus je ferai la seule chose que je peux faire pour déculpabiliser un peu ! Et je serai là où je dois être ! Et tu seras là où tu dois être. » J’ai les mains qui tremblent lorsque je me rapproche à nouveau de la table et surtout de mon père. Agité, tout mon être est agité, jusque dans mes yeux qui hurlent autant leur fureur que leur désarroi. « Je ne te demande PAS ton avis. » Mon index le pointe, d’un mouvement rageur. « Je t’impose ce qui va être et tu n’as PAS le CHOIX. » Ma décision est prise. Forcément. « Et l’effet papillon c’est bien joli, mais aux dernières nouvelles, c’est pas parce qu’un imbécile couche avec une japonaise que des créatures bleues popent vingt ans plus tard. Ca ne marche pas comme ça, sinon je ne lirai plus jamais les Schtroumpfs de la même manière. Et ne me parle PLUS de Lily, ne me parle PLUS de Maman, n’essaye plus jamais de tenter de me faire gober une explication aussi RIDICULE sinon je te jure que je t’écrase la tête contre cette table jusqu’à ce que tu me supplies d’arrêter. »

S’il me demande de répéter, il peut aller se faire foutre, parce que j’en suis tout à fait incapable. Alors j’espère que le message est passé. Vraiment. Et mon cœur aussi.

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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeDim 11 Sep 2016 - 18:53

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



La prison avait quelque chose de profondément ennuyeux, pour quelqu'un de désespérément attaché à son travail comme Hippolyte. C'était une succession de journées sans saveur, sans challenge, sans l'impression le soir, au moment de se coucher, qu'il avait accompli quelque chose de bien, de juste... C'était une raison de plus pour tourner en rond, se poser des questions, s'interroger sur ses erreurs et ses maigres réussites... Mais c'était en tous points préférable à cinq minutes passées en compagnie d'un Marius bondissant, gesticulant, articulant des absurdités avec un calme beaucoup trop semblable à celui de son père pour qu'il ne fasse pas grincer les dents d'Hippolyte. Quelque part, il savait pertinemment que Marius était dans le vrai, qu'il avait raison de vouloir que justice soit faite, mais il n'aimait pas cette idée, et il refusait en bloc de le laisser prendre sa place. C'était à lui de protéger Marius, à lui de remettre les choses en ordre, à lui de corriger le tir. Et Marius pourrait bien tempêter ou menacer tant qu'il voudrait, son père ne changerait pas d'avis.

Il sentait la tension s'installer dans la pièce, tout comme il sentait chaque fibre de son corps se tendre à l'extrême dès que la montre de Marius grimpait les échelons vers un rythme bien trop élevé pour le cœur d'un individu au repos. Enfin... Repos, tout était relatif. C'était tout de même assez paradoxal, quelque part. Pendant des années, Hippolyte s'était évertuait à faire de ses fils des hommes, à les responsabiliser le plus rapidement possible et à les pousser à grandir plus vite qu'ils n'auraient dû. Dès leur plus jeune âge, ils avaient appris à se débrouiller sans leurs parents derrière pour les couver, et ce n'était que maintenant, alors que Marius avait 27 ans et une vie autonome que son père cherchait à le materner, à l'envelopper dans une couverture et à l'enfermer dans un écrin de verre ou ni le stress, ni les aléas du quotidien ne viendraient fragiliser davantage son pauvre cœur. Chaque mot que hurlait Marius lui passait au dessus, chaque remarque, chaque grognement également. Hippolyte campait sur ses positions, persuadé de faire ce qui était le mieux pour son fils.

« Oui. Sagement, Marius. A peu près l'opposé de ce que tu fais actuellement », glissa-t-il avait de reprendre.

Si Marius avait l'habitude de provoquer son père, c'était bien parce qu'il en était le digne fils. Hippolyte cherchait à attiser l'agacement de Marius pour le pousser à faire ce qu'il faisait si bien, à savoir hurler et perdre ses moyens. Car alors il aurait su le gérer, appréhender ses réactions... Il aurait su le canaliser pour finalement ressortir gagnant de leur petite conversation. Or... Marius semblait avoir fait des progrès spectaculaires dans sa capacité à gérer sa colère. Elle était palpable, l'entourant comme une aura de noirceur menaçante, mais elle était maîtrisée, calculée, et Hippolyte détestait voir cela chez quelqu'un d'autre que lui. Il détestait l'aisance avec laquelle Marius démontait ses arguments, les mettant en pièces avec une minutie qui ne lui ressemblait pas, lui répliquant qu'il ne l'écoutait pas mais attendait plutôt une excuse valable pour tout ce bazar. Rendu amer, Hippolyte laissa échapper un ricanement lorsque Marius affirma avoir lu le dossier.

« Tu l'as lu, certes, mais l'as-tu seulement compris ? Je suppose que pour toi, c'est un alignement de lettres et de mots qui n'ont aucun sens... Tu n'es pas généticien, ni pharmacien, ni biologiste, Marius. Alors arrête de me faire croire que tu as signé ce document en toute connaissance de cause. »

Pourtant, Hippolyte aurait adoré que l'un de ses fils se passionne pour les sciences, la biochimie, la pharmacologie... Il aurait aimé que l'un d'eux suivent sa voie pour reprendre plus tard l'entreprise. Seulement, s'il était fier de la carrière d'avocat de Martial, il ne pouvait pas en dire autant de Marius. Quelque part, il aurait éprouvé de la fierté en le voyant monter sur un podium olympique... Qu'il approuve ou non son choix de carrière, il aurait vu son fils se hisser au plus haut dans une discipline, et alors il aurait été fier de lui. Seulement voilà. Ce n'était pas le cas. Et malgré tout ce qu'il pouvait affirmer, Hippolyte n'arrivait pas à être fier de ce que Marius faisait de sa vie. Il n'arrivait pas à accepter un tel gâchis de potentiel, de voir ce brillant esprit mathématique ruiné par un mental d'âne bâté. De la fierté, il en éprouverait le jour où Marius accepterait de se voir meilleur qu'il ne le pensait. Si ce jour arrivait avant qu'il ne passe l'arme à gauche, évidemment.

Soupirant, Hippolyte se lança dans ses explications. Et plus il parlait, plus il se rendait compte de l'absurdité de son discours, du ridicule de la chose, appuyé par les interventions de Marius, qui semblait lui aussi trouver tout cela invraisemblable. Mais son père ne se dégonfla pas, resta parfaitement stoïque jusqu'au bout, et appuyant le fait que son emprisonnement était essentiel à l'enquête. Une fois ses explications terminées, il fixa Marius avec un mélange de détermination et de lassitude dans le regard. Il s'attendait au pire, et il ne fut pas déçu. Ses poings se serrèrent en même temps que ses mâchoires, tandis qu'il luttait pour ne pas hurler à Marius de cesser de lui répéter qu'il n'avait plus que quelques années à vivre. Il ne voulait pas y penser, il ne voulait pas voir que bientôt, il lui faudrait se résoudre à l'idée que son fils mourrait bien avant lui. Mais plus que tout, c'est lorsque Marius affirma ne pas avoir de famille qu'Hippolyte se sentit réellement blessé. Il se sentit blessé car au delà d'avoir envie de répliquer à Marius qu'il avait son frère, Samuel et Adaline, il se sentait personnellement visé.

« Ton frère serait ravi d'apprendre que tu n'as pas de famille... Samuel et Adaline également... Quel dommage, moi qui voulais tenter de t'offrir un semblant de famille une fois sorti d'ici, je ne vais finalement pas me fatiguer, puisque ça n'a aucune importance pour toi. »

L'aigreur de la blessure, le dégoût du rejet... C'était un juste retour de bâton, mais Hippolyte avait du mal à s'y faire. Pas d'avenir... Marius ne se voyait aucun avenir, était-ce pour cela que la perspective de la prison ne l'effrayait pas ? L'interdiction hurlée à plein poumons le fit réagir au quart de tour. Il se raidit, les poings serrés, et ne dû son contrôle qu'au claquement sec des menottes contre l'anneau métallique qui l'enchaînait à la table. Instinctivement, la gardienne se rapprocha, posa une main sur l'épaule de Marius et lui intima poliment mais fermement de reculer. Elle avait beau ne pas comprendre un mot de ce qu'ils se disaient, elle était depuis plusieurs minutes extrêmement vigilante, du fait de la tension qui régnait dans la pièce. Ne perdant pas Marius du regard, Hippolyte restait attentif à chaque mot prononcé, prêt à les renvoyer à son fils avec la puissance d'un boulet de canon. Mais il attendit, patiemment, sagement, qu'il ait fini son petit monologue de justicier, il attendit que Marius lui prouve qu'il était aussi illogique qu'inconscient, et lorsqu'il eut fini... Son père éclata de rire. Nerveusement, ironiquement, à tel point que la gardienne dévisagea le prisonnier, puis Marius, sans comprendre.

« Marius, tu es définitivement une source intarissable d'illogique et de bêtise. Et je crois que je ne m'y ferais jamais. N'est ce pas toi qui, l'autre jour, m'a fermement dit que je n'avais rien à lui interdire ? Que je n'avais pas le droit de lui imposer un choix, raisonnable, qui plus est ? Tu te permets, toi, de m'interdire des choses ? Mais pour qui te prends-tu, bon sang ? »

Il n'y avait ni rage, ni colère, dans ses mots. Rien qu'un calme effroyable teinté d'un insupportable amusement.

« Tu penses peut-être que du haut de tes vingt-sept ans tu vas refaire le monde, imposer tes décisions ? La vérité, c'est que tu ne sais strictement rien, Marius. Tu ne sais pas comment marche le monde, tu vis entouré d'innocence et de créatures féeriques, tu penses le monde bien meilleur et juste qu'il ne l'est... Je ne te reparlerai pas d'opération, parce que je sais tenir mes promesses. En revanche, si ton petit discours a quelque chose de touchant dans l'importance que tu me prêtes dans la bonne marche de mon entreprise, tu te fourvoies totalement. Et il est hors de question que je te laisse plus longtemps m'imposer TES petits choix d'enfant capricieux. Les choses resteront telles qu'elles sont, car c'est comme cela qu'elles doivent être, est-ce que c'est clair ? »

A mesure qu'il parlait, l'ironie avait quitté ses traits et sa voix, laissant place à nouveau à la froideur et l'agressivité.

« Moi non plus, je ne te demande pas ton avis. Je fais ce qui me semble être juste, je me plie pour une fois dans ma vie à une décision de justice, sans chercher à influencer qui que ce soit avec ma réputation ou de l'argent. Je t'épargne tes dernières années en prison, et tu te trompes si tu penses que je vais me lever, échanger avec toi cette affreuse tenue orange et ressortir d'ici comme si c'était normal... Comme s'il était normal pour un père de laisser son fils croupir en prison. Pour une fois dans ma vie, laisse-moi assumer ma part de responsabilité dans cette histoire. »

Lassé, il se passa une main sur le visage et se pinça l'arrête du nez. Il n'aimait pas ce qui allait suivre... On non il n'aimait pas...

« Je ne te demande pas d'accepter Ileana. Pas plus que je ne te demande de te faire opérer. Je te demande simplement de me faire confiance. Juste une fois. Comprends-moi bien. Tu sais aussi bien que moi que le monde des affaires est redoutable. En ce moment, je suis sûre que la plupart de mes associés se frottent les mains à l'idée que je finisse mes jours ici. Si je sors maintenant, ils vont ajouter « a fait envoyer son fils en prison à sa place » à la liste des reproches que me font mes actionnaires. Alors que si je reste ici et aide à la découverte d'un remède pour le malheureux qui a terrorisé la ville, je ressortirai blanchit et avec l'appui de ces mêmes actionnaires... C'est toute une façon de penser tordue à laquelle je ne peux pas échapper... En revanche... »

Oh que non, il n'allait pas aimer la suite... Il n'aimait pas ce qu'il s'apprêtait à proposer à Marius. Il aurait préféré le laisser en dehors de cette affaire.

« Est-ce que tu accepterais de m'aider à accélérer un peu les choses ? Travailler avec Poppy et les ingénieurs des laboratoires pour qu'un remède soit découvert plus rapidement, me tenir régulièrement au courant de l'avancée de l'affaire... A deux, peut-être que nous arriverons à résoudre rapidement cette histoire, et personne n'aura à rester en prison... »

Et si Marius refusait cette alternative... Et bien tant pis pour lui. Hippolyte n'était pas disposé à faire la moindre concession supplémentaire. Il lui en coûtait déjà suffisamment comme ça.
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeSam 24 Sep 2016 - 18:21

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Ma colère est complètement à mon image : binaire. Il n’y a pas de semi-colère chez moi. Il y a la colère franche, celle qui explose en un rien de temps, celle qui se vocalise par des hurlements, par des mouvements agités, par des allers-et-retours dans la pièce sans que je ne m’octroie la moindre pause et il y a la colère froide, glaciale. Celle dans laquelle je bascule sans même m’en rendre compte, celle qui me fait devenir mon père, devenir adulte, devenir intimidant, aussi. Parce que je crois que je commence à peine à me rendre compte que lorsque ma colère passe un cap, je deviens mon père, je deviens si pleinement un Caesar, que j’en délaisse mes réactions de gamin, mes attitudes de gamin, mes mimiques de gamin, mes caprices de gamin. Je m’entends parler, comme si ce n’était pas moi qui prononçais ces mots. Depuis quand est-ce que j’articule à ce point mes insultes ? Depuis quand est-ce que j’articule à ce point ce que je sais être vrai, ce que je sais être exact, ce que je sais être désespérément indéniable ? Depuis que ma colère a franchi un cap et que pour une fois, j’ai l’esprit clair comme de l’eau de source. Je sais où on en est, je sais où je vais, et surtout, je sais où je ne veux pas aller. Ce que je ne veux pas devenir. J’inspire profondément tout en refusant d’écouter ce qu’il peut avoir à me répondre. Bien sûr que je ne l’écoute pas, parce qu’il ne dit que des conneries : ma vie est ponctuée d’échecs, et mes rares réussites n’en étaient que dans la décadence ou les mauvais choix. Ce que je n’ai pas l’air de comprendre, c’est que la signature que j’ai faite, je l’ai apposée à un document que m’a présenté un charlatan qui a voulu profiter de ma connerie et de mon arrogance ? Oh, mais je le comprends, je ne le comprends que trop bien. Le plus triste était certainement que je l’ai lu, ce document, je l’ai lu, ce dossier. Avec attention. Ou presque. Je n’ai juste pas tout compris parce que bien trop de termes m’échappaient, les parties et les touts, les détails comme les généralités. Les seules choses qui me parlaient, c’étaient les chiffres, des chiffres et des statistiques qui m’apparaissaient comme étant prometteurs, promettant des miracles qu’on me présentait puisque j’étais incapable de les anticiper. Et le point culminant, assurément… vous n’êtes pas votre père. « Tu l'as lu, certes, mais l'as-tu seulement compris ? Je suppose que pour toi, c'est un alignement de lettres et de mots qui n'ont aucun sens... Tu n'es pas généticien, ni pharmacien, ni biologiste, Marius. Alors arrête de me faire croire que tu as signé ce document en toute connaissance de cause. » Je fixe ses rétines, avec tout l’aplomb que je peux rassembler. Je ne suis pas généticien, je ne suis pas pharmacien, ni biologiste, et je le sais, je le sais même très bien. « Ne pas être tout ça ne m’empêche pas d’être responsable de ce que je signe en ton nom, Papa. Sauf si tu me considères comme étant intellectuellement limité, suffisamment du moins pour que je sois jugé irresponsable de mes actes en raison de troubles mentaux ? Est-ce que je dois aller chercher la camisole, du coup, suivre les gens messieurs en blanc, et hop, plus aucun problème en prévision puisque de toute manière, je ne peux pas répondre de mes actes ? Comprendre ce que je signe et signer sont deux actions bien distinctes, ne fais pas l’erreur de faire un raccourci stupide sous prétexte que tu ne veux pas accepter que ton fils est imbécile doublé de… » … c’est con, j’étais bien lancé, mais impossible de trouver le mot qui convienne le mieux à ce que j’essaye de dire. A la description que je peux avoir de moi. Je ne suis pas qu’un imbécile. Je suis le genre de mec qui s’est inventé une vie, qui s’est inventé des capacités, qui a cru pouvoir berner le monde et se berner lui-même. « Un imbécile doublé d’un imposteur » je finis par cracher, parce que c’est le mieux que je puisse trouver. Un menteur.

Je suis un menteur, je suis un foutu menteur. Et un imposteur. Je suis un imposteur. Je ne mérite ni ma place, ni mon nom, ni mon sang, je ne mérite ni mon frère, ni mon père, ni la chance que j’ai de ne pas être en prison alors que tout me désigne comme l’un des principaux responsables de ce carnage.  

Qu’est ce qu’il n’arrive pas à comprendre là dedans, hein ? Pourquoi est ce qu’il s’acharne à dire que c’est de sa faute et pas la mienne ? Ses explications, à mes yeux, à mes oreilles, ne tiennent pas la route. Rien ne tient la route, parce que je suis déjà convaincu de ma version de l’histoire. Qui est la bonne, de toute manière. Je ne vois pas les choses autrement. Il se fout de ma gueule, c’est évident. Brandir mon irresponsabilité, ça aurait pu passer, mais remonter à vingt ans, lorsqu’il a couché avec une autre et qu’il a eu cette connasse qui prétend être ma demi-sœur, ça pourrait être un gag s’il n’était pas aussi sérieux. Là, ça en devient flippant. Il se fout de ma gueule, je ne vois pas d’autre solution. Et son argument sur blablabla, j’ai un droit de regard, blablabla, la vérité te nuira, blablabla… je me détache du mur auquel j’étais adossé, je prends miraculeusement le temps de bouger et de respirer avant de commencer à répondre. Et à démonter ses arguments. Sans me démonter, moi. Je n’ai rien à perdre, strictement rien. J’ai trois années devant moi, certainement pas plus. Mon cœur va finir par lâcher. J’ai trois années devant moi. J’ai pas boulot, pas d’avenir, pas de famille, rien, rien du tout. « Ton frère serait ravi d'apprendre que tu n'as pas de famille... Samuel et Adaline également... Quel dommage, moi qui voulais tenter de t'offrir un semblant de famille une fois sorti d'ici, je ne vais finalement pas me fatiguer, puisque ça n'a aucune importance pour toi. » Je serre les dents, je serre les poings, j’enfonce dans mes paumes mon ongle pour éviter de lui mettre mon poing dans la figure. « Je ne vois pas comment tu pourras m’offrir un semblant de famille quand tu es trop occupé à te faire incarcérer à ma place. » je réponds, sur le même ton acide.

Je n’ai pas d’avenir, et s’il me parle encore une fois d’opération, je lui promets que je vais le massacrer. L’opération n’est pas une solution, c’est un sursis, c’est une petite mort, c’est une connerie qui me laissera peut être en vie mais clairement diminué, encore plus que maintenant. Et de ça, il n’est pas question. Et la gardienne a beau me faire reculer, ça ne va pas me dissuader de continuer, maintenant que je suis lancé. Je ne lui demande pas son avis, je ne lui laisse pas le choix, je lui interdis de s’élever contre ma décision : à quel moment exactement j’ai cessé d’avoir pour lui la déférence qu’un fils à pour son père ? L’année de mes quatorze ans, je crois. Ou lorsqu’il m’a tiré dessus. Oui, lorsqu’il m’a tiré dessus. « Marius, tu es définitivement une source intarissable d'illogique et de bêtise. Et je crois que je ne m'y ferais jamais. N'est ce pas toi qui, l'autre jour, m'a fermement dit que je n'avais rien à t’interdire ? Que je n'avais pas le droit de t’imposer un choix, raisonnable, qui plus est ? Tu te permets, toi, de m'interdire des choses ? Mais pour qui te prends-tu, bon sang ? » Pour qui je me prends ? C’est une excellente question. « Tu penses peut-être que du haut de tes vingt-sept ans tu vas refaire le monde, imposer tes décisions ? La vérité, c'est que tu ne sais strictement rien, Marius. […] Et il est hors de question que je te laisse plus longtemps m'imposer TES petits choix d'enfant capricieux. Les choses resteront telles qu'elles sont, car c'est comme cela qu'elles doivent être, est-ce que c'est clair ? » Je mords les joues jusqu’au sang pour m’empêcher de lui hurler à quel point je refuse d’obtempérer, à quel point je refuse d’acquiescer à ses propos, à quel point je refuse de plier le genou, je refuse de dire amen à ce qu’il me bave. Irresponsable, enfant capricieux, créatures féériques, pour qui est ce que je me prends ? Il donne lui-même les réponses, ou alors il me donne les réponses qu’il veut à ses propres questions. « Moi non plus, je ne te demande pas ton avis. » Cette fois, je craque. « J’EN AI RIEN A FAIRE QUE TU NE ME DEMANDES PAS MON AVIS ! » Une nouvelle fois, la gardienne s’interpose, se place entre moi et mon père pendant qu’il me demande, encore une fois, de le laisser assumer une part de responsabilité totalement inexistante. On m’interdit de crier, on me met en garde : la prochaine fois que ça dérape, je sors. « Je ne te demande pas d'accepter Ileana. » « Encore heureux. » « Alors que si je reste ici et aide à la découverte d'un remède pour le malheureux qui a terrorisé la ville, je ressortirai blanchit et avec l'appui de ces mêmes actionnaires... C'est toute une façon de penser tordue à laquelle je ne peux pas échapper... En revanche... » Je contiens ma colère comme je peux, en jetant un regard à la femme qui reste à coté de moi, attentive non pas à ce qui se dit, mais à ce qui se fait. Il faut que je reste calme. « En revanche ? » Je siffle entre mes dents. « Est-ce que tu accepterais de m'aider à accélérer un peu les choses ? Travailler avec Poppy et les ingénieurs des laboratoires pour qu'un remède soit découvert plus rapidement, me tenir régulièrement au courant de l'avancée de l'affaire... A deux, peut-être que nous arriverons à résoudre rapidement cette histoire, et personne n'aura à rester en prison... » J’écarquille les yeux. « Tu te fous de ma gueule ? » Je regarde la gardienne de prison. « Il se fout de ma gueule. » L’anglais est cassant d’un accent français à couper au couteau mais il est là, bel et bien là. Je me tourne à nouveau vers mon père. « Tu te fous vraiment de ma gueule, là, en fait. » Je n’ai pas le droit de l’approcher. C’est bien dommage. « Non mais c’est même pas une question. Tu te fous vraiment de ma gueule, et tu le fais sans aucune honte, en pensant que je vais gober tout ça et dire oui Papa, bien sûr Papa, merci Papa ? » Il se moque de moi. « Non, parce que si tu attends que ça, je peux le dire, hein. Mais là, moi aussi je serai en train de me foutre joyeusement de ta tronche. » Qu’est ce que je raconte ? Je n’en sais rien. Mais je suis en colère, je n’ai pas le droit de crier, ni de l’approcher pour lui cracher dessus, alors j’essaye de gérer comme je peux. « Je crois qu’il y a eu un quiproquo à un moment. C’est pas parce que tu es déguisé en Casimir que tu dois me prendre pour un demeuré ou un gosse de six ans. » Il faudrait peut être que je songe à me la fermer. Peut être. Dommage que ça ne soit pas ma spécialité. Vraiment. « Tu m’as demandé pour qui je me prenais. Je vais te le dire, tiens, ça te fera une belle jambe. » Il ne va pas aimer. Mais moi non plus je n’aime pas ce qu’il me dit, alors on sera quitte. Je repasse au français pour l’occasion. « Je me prends pour le mec sur qui tu t’es permis de tirer de sang froid. Je me prends pour ton gosse, celui que tu as méprisé pendant des années, celui dont tu as voulu contrôler sa vie au millimètre près. Je me prends pour celui qui a fini à l’hôpital avec une hémorragie interne et externe, qui a été à un cheveu de crever. Je me prends pour celui qui t’a plus ou moins pardonné pour ça. » J’enlève ma veste, je la jette par terre pour mieux soulever mon tee-shirt et lui exposer mes deux larges cicatrices qui ne disparaîtront jamais. « Tu les vois, ces deux là ? Regarde les bien. Et écoute ce que j’ai à te dire. Oui, je me permets de t’interdire des choses. J’estime en avoir gagné le droit. Douloureusement. J’estime avoir gagné le droit de pouvoir faire ce que je veux de ma vie, ET de pouvoir exiger faire ce que je veux de la tienne lorsque tu te mets en tête de te mêler de MES affaires. » Ca ne va pas passer, bien sûr. « Ta proposition, tu peux te la foutre dans le cul, Papa, parce que je crois que tu n’as pas bien compris un truc : je pense avoir prouvé par A+B que je suis incapable de gérer une entreprise, incapable de comprendre quoique ce soit à la génétique, à la pharmacologie et à ses conneries. C’est toi qui devrais être dans des labos. Je ne veux plus rien avoir à faire avec ton entreprise, tu m’entends. Je veux être à ma place, et que tu sois à la tienne. » Il ne faut pas que je lui laisse le temps de caser le moindre mot. « Et oui, je veux aider à accélérer les choses, oui je veux que la justice suive son cours. C’est exactement ce que je veux. Alors les documents iront sur dans les mains d’un avocat, tu n’as pas le choix. Celui qui a le moins de marge de manœuvre, dans l’affaire, c’est toi, Papa, comprends le bien. N’essaye même pas de te croire capable de me battre, parce que je te jure que s’il le faut, je déploierai tous les moyens du monde non seulement pour te faire sortir de là, mais en plus pour te faire bien chier. »


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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeDim 25 Sep 2016 - 22:39

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Fusillant Marius du regard, Hippolyte peinait de plus en plus à contenir sa colère, à se retenir de mettre une gifle bien sentie à son fils, à lui dire de filer dans sa chambre... Marius n'avait plus treize ans, Marius n'était plus un enfant... Marius était un adulte, que son père ne voulait pas voir assumer ses responsabilités. Quelque part, par son attitude et son travail, Hippolyte n'avait pas vu ses enfants grandir. Il les avait vu courir sans se souvenir de les avoir vu faire leurs premiers pas, les avait envoyé au collège sans se rappeler qu'ils avaient été des bambins au jardin d'enfants, mais surtout, il les avait réprimandé pour leurs échecs sans avoir jamais voulu voir leurs réussites. En colère, lassé, il ne pu que lâcher d'un ton acide alors qu'un sourire mauvais se peignait sur ses lèvres :

« Alors ? L'imbécile en perd son latin ? A quoi bon me triturer les méninges si tu trouves les réponses à ma place, Marius... Il me suffirait de dire que tu es plus bête que la moyenne, et personne ne viendrait me contredire, puisque tu joues ce rôle à merveille... »

Mais sans attendre, Marius acheva sa phrase, surprenant son père à tel point qu'il en resta muet, les yeux écarquillés. Un imposteur... Un menteur... Hippolyte avait envie de lui répliquer que c'était faux, mais il n'aurait fait qu'accentuer le mensonge sur lequel reposait une grande partie de la vie de Marius. Sa mutation dissimulée, sa malformation cardiaque cachée... Des souvenirs qu'il s'était inventé avec son père pour offrir un semblant de stabilité à leur relation, ces responsabilités qu'il avait accepté d'endosser alors que tout ce qui touchait aux laboratoires de son père lui donnait envie de vomir. Le Marius enjoué, le Marius intrépide, impulsif, souriant... C'était ça, la véritable imposture, celle qui dissimulait sa noirceur, son mal-être et ce déficit de confiance en soi qu'il traînait comme un boulet derrière lui. Qui donc pouvait se vanter de véritablement connaître Marius ? Martial ? A une époque, cette affirmation se serait imposée d'elle-même, mais maintenant ? Hippolyte voyait le malaise de Marius sans être capable de le comprendre ou le partager, il n'était pas apte à dialoguer avec lui, tout en ayant conscience que son fils devait généralement masquer aux autres ce qu'il lui réservait. Il se contenta donc d'un regard tout aussi glacial sans rien ajouter d'autre. Il commençait à en avoir assez d'être assit, assez de sentir des fourmis dans ses jambes et de sentir ses mains menottées le démanger. Seulement, à sarcasme lancé, sarcasme relancé.

« C'est vrai que si tu étais derrière les barreaux, le résultat ne serait pas du tout le même, brillant, bravo Marius ! »

Hippolyte avait l'habitude d'avoir affaire à des gens têtus, bornés, butés, des actionnaires tatillons qui voulaient le bras quand on leur donnait un doigt, ou les associés qui étaient prêt à tout pour céder leur place... Mais ils se heurtaient tous à plus têtu qu'eux en la personne d'Hippolyte. Seulement, lui-même devant s'avouer vaincu face à Marius. Il n'avait encore jamais qui que ce soit d'aussi sourd, aveugle et buté que lui ! Et lorsqu'il se mit à hurler, Hippolyte eut le réflexe de se lever d'un bond, geste avorté par le cliquetis des chaînes et le mouvement de la gardienne qui vint les séparer.

« Toujours le même vocabulaire primitif... Renouvelle-toi un peu, Marius ! Tu n'en as peut-être « rien à foutre » que je ne te demande pas ton avis, mais il est de même pour moi. Nous n'allons pas aller loin avec ça. »

Mais alors qu'il se calmait, las de dialogue de sourd et désireux d'en finir au plus vite, il proposa à Marius ce qui lui semblait être la meilleure alternative possible. Et elle lui coûtait, cette alternative, aussi espérait-il que son fils coopérerait sans discuter. S'il avait eu affaire à Martial, les choses se seraient sûrement déroulées comme il l'entendait. Mais Marius n'était pas Martial, Marius dictait sa propre conduite, allait délibérément à contre sens de ce que son père voulait et savait plus facilement dire non que oui. Il ne pouvait nier qu'il s'y attendait, mais un minuscule espoir perdurait, celui de voir Marius accepter, le laisser gérer ces quelques semaines supplémentaires en prison et pouvoir lui dire qu'il lui était redevable une fois qu'il serait sortit. Il aurait aimé que tout se passe ainsi... mais Marius en avait décidé autrement, et cette question martelée dans un anglais à l'accent approximatif arracha une grimace à son père. S'il se foutait de sa gueule ? Pas un seul instant. Parce qu'Hippolyte ne plaisantait pas, encore moins dans de telles circonstances. Alors il le laissa parler, ses poings se serrant jusqu'à en être douloureux à mesure que Marius hurlait. Il était habitué à l'entendre vociférer, habitué à faire abstractions des injures pour ne retenir que les mots qui pourraient lui servir d'arme afin de le faire taire. Mais il n'était absolument pas préparé à voir son fils jeter sa veste à terre pour mieux soulever son t-shirt et exposer à ses yeux et ceux de la gardienne de balafre blanchâtre qui marqueraient à vie son abdomen. Instinctivement, Hippolyte détourna le regard, ignorant l'avertissement de Marius qui voulait que l'image se grave à jamais dans son esprit. Il ne voulait pas les voir, ces cicatrices, il ne voulait pas revivre encore une fois cette pluvieuse journées de juin, sous la forme de flash brillants et désagréable, il ne voulait pas entendre à nouveau ce coup de feu ni sentir le corps de son fils s'affaisser entre ses mains. Il ne comprenait pas comment Marius pouvait envisager un seul instant de le pardonner, quand lui-même n'émettait même pas l'hypothèse d'un jour pouvoir accepter ce qu'il avait fait. Il avait tiré sur son propre fils, avec l'intention évidente de le tuer. Il n'avait pas hésité. Il avait simplement tiré.

Lorsque enfin Marius se tut, Hippolyte soupira et se laissa aller contre le dossier de sa chaise, jetant à son fils un regard si triste et las qu'il sembla prendre une dizaine d'années d'un coup.

« J'en ai marre, Marius. J'en ai assez d'avoir constamment le sentiment de me battre contre toi. Quoi que je fasse, que je choisisse blanc, noir ou gris, tu trouveras toujours le moyen de me hurler que je suis un monstre qui cherche à te briser. C'est donc si difficile pour toi de comprendre ça ? C'est une aberration que de me pardonner pour ce que je t'ai fais. Bon sang, Marius, j'ai bien faillis te tuer, tu l'as dit toi même ! Aucun père digne de ce nom ne ferait ça. Et aucun père n'irait accepter que son fils aille en prison. J'ai accepté ta décision, j'ai accepté que tu mènes ta vie comme tu l'entends, mais il est hors de question que je te laisse finir tes jours ici. Ma culpabilité va au delà de ce qu'un être humain normalement constitué peut supporter. Si je te laisse prendre ma place, ce sera pire encore. Je préfère te savoir en sécurité dehors qu'entre ses murs, entouré de voyous. Je n'ai pas l'impression que tu comprennes... Ou que tu cherches à comprendre. J'encoure bien plus d'années de prison pour ces cicatrices que tu arbores que pour un malheureux document signé, et il me suffirait d'un aveu ou d'une copie de la vidéo surveillance de mon bureau pour rétablir la vérité. C'est ça que tu souhaites ? La vérité et la justice ne sont pas forcément aussi belles que tu sembles le croire. »

Il se redressa alors, soupirant une fois de plus en posant ses coudes sur la surface métallique de la table. Les menottes cliquetèrent pendant ce court temps de silence, puis il repris.

« Ne te méprends pas, Marius. Tes intentions sont louables, s'il s'agit de restaurer la vérité, mais si c'est uniquement pour m'emmerder, je te prierais de bien vouloir trouver une autre manière pour le faire. Je t'ai tiré dessus de sang froid et je le regrette, merci de me le rappeler, j'avais peur d'oublier. En revanche, si je n'ai pu prendre cette balle à ta place, laisse-moi la prendre en restant ici le temps qu'il faudra. De toute manière, je serai dehors dans quelques semaines. J'en ai assez de me battre, Marius. Quoi que je dise, tu feras toujours le contraire. Et je sais pertinemment qu'une fois sorti d'ici, tu vas t'empresser de trouver un moyen de me faire sortir. Je n'ai rien en ma possession qui puisse te faire changer d'avis ou t'empêcher d'échanger nos places. Qu'est ce que tu attends moi ? Ma bénédiction ? Navré mais tu ne l'auras pas pour cela. Je n'ai peut-être pas signé le document que tu brandis comme un étendard à ton absence d'instinct de survie, mais j'ai suffisamment de responsabilité dans cette histoire pour faire un bon coupable. Je ne te demande pas d'attendre des années, seulement des semaines, c'est si compliqué que ça ? »

La colère s'était effondrée comme un soufflé, balayée par une lassitude vieille de deux décennies. Comme si un déclic s'était fait dans son esprit, Hippolyte se rendait compte qu'il n'avait plus envie de se battre avec Marius, qu'il était las de tout cela, et qu'en définitive, chacune de leur disputes ou conversations s'achevait sur un énième désaccord qu'ils ne parvenaient pas à régler. Marius avait plus de cartes en mains que son père, mais celui-ci refusait de lui donner raison. S'il sortait de prison plus tôt que prévu, ce serait contre son gré et certainement pas avec la complicité de son fils.

« Fais comme bon te semble, de toute manière, que je dise amen à ce que tu fais ou cherche à m'y opposer, tu n'en feras qu'à ta tête. Alors amuse-toi donc à te perdre dans des dérives juridiques dans les prochains jours, mais sache une chose. Si tu remets un pied dans cette prison en tant que détenu, ne compte pas sur moi pour t'y laisser plus d'une nuit. »

Des relations, il en avait plus qu'il n'en fallait pour faire sortir son fils en un rien de temps, mais l'idée même de le voir enfiler une tenue de détenu en sachant qu'il n'avait voulu que rendre service le rendait malade.
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Marius Caesar
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeJeu 6 Oct 2016 - 23:42

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Il ne me comprend pas. Il ne comprend rien. Il n’a jamais rien compris. Et moi non plus. Je ne suis rien de ce qu’il aurait voulu que je sois, je le sais, putain, je le sais. J’ai envie de graver dans ma chair que je le sais. J’ai envie de raturer sur mon bras, sur ma main, sur mon front que je ne suis rien, que je ne vaux rien. Il ne comprend pas que je ne suis qu’un bon à rien et que s’il refuse d’accepter que je dois subir les conséquences de mes conneries, surtout lorsqu’elles me forcent à avoir sur la conscience des destructions, des morts, un père en prison et des centaines de milliers de dollars de perte. Il ne voit pas que rien ne pourra être pire que de ne rien faire. Il ne… je n’arrive pas à trouver mes mots, je n’arrive pas à décrire ce que je suis. Je suis un imbécile, oui, mais surtout un imbécile doublé de… de… le mot m’échappe, refuse de se concrétiser devant moi comme pour accentuer ma frustration à ne pas s’avoir m’exprimer avec la même acidité que l’homme face à moi. Je ne suis qu’un imbécile, vraiment. Mais je suis aussi… j’ai envie de frapper quelqu’un. Et l’acidité de mon père ne m’aide en rien. « Alors ? L'imbécile en perd son latin ? A quoi bon me triturer les méninges si tu trouves les réponses à ma place, Marius... Il me suffirait de dire que tu es plus bête que la moyenne, et personne ne viendrait me contredire, puisque tu joues ce rôle à merveille... » Je joue ce rôle à merveille ? Mais je ne le joue pas, ce rôle, je le suis, je le suis tellement que je suis incapable de ne pas l’être. C’est le rôle d’un PDG que j’ai joué, c’est le rôle d’un fils respectable que j’ai joué, c’est le rôle d’un ami loyal que je joue, c’est le rôle d’un petit ami responsable que j’ai joué, c’est… je suis un menteur. C’est ça le mot que je cherchais. Je suis un menteur, je suis un imposteur, je suis le mec richissime qui ne mérite rien de ce qu’il a et qui fout tout en l’air ce qu’il n’était pas supposé avoir. Combien de fois est ce que mon père a pu nous répéter que tout ce qu’on devait avoir, c’était ce qu’on avait mérité ? Combien de fois est ce que mon père a pu nous répéter que notre fortune, il l’avait bâtie à la sueur de son front, à la hauteur de son intelligence, combien de fois est ce qu’il a pu me dire à moi que j’avais de la chance d’être un Caesar, sans quoi j’aurais fini dans un caniveau, à la hauteur de mes compétences intellectuelles, que je n’étais qu’un petit ingrat, un cancre et un paresseux, que le darwinisme aurait rejeté en une poignée d’années si je n’avais pas été à ce point privilégié ? Je suis un menteur, un imposteur.

Et même si je viens à peine de poser un mot sur ce que je suis, j’en ai conscience depuis des années. Hors de question que je rajoute à ça un qualificatif encore indéterminé désignant le gosse dont le père sauve la mise. Un fils à papa, en gros. Je refuse d’être un fils à papa, je refuse d’être un privilégié, je refuse d’être une erreur de la nature qui ne survit que parce qu’on le surprotège, d’une manière ou d’une autre. Et ma colère, proportionnellement aux conneries que peut me sortir mon père, enfle et enfle encore, jusqu’à muter en une chose monstrueuse et déstabilisante de calme. Un imposteur. Qui est le vrai Marius, où est le vrai Marius ? Il est celui dont on a honte, il est celui qu’on ne supporte pas, il est celui qui afflige, qui désespère, qui horripile, il est aussi celui qui parle lentement, d’une voix cassante, qui veut prendre ses responsabilités et faire entrer dans le crâne de son père qu’il n’a plus que quelques années à vivre et qu’il n’en a rien à faire de les passer en prison si ça peut permettre à son père d’en sortir. Et à la justice d’être rendue, d’une manière certainement très tordue. « C'est vrai que si tu étais derrière les barreaux, le résultat ne serait pas du tout le même, brillant, bravo Marius ! » Je serre les dents pour l’ignorer, comme je peux, pour laisser passer, le laisser dégueuler ses sarcasmes et son poison, pour ne pas surenchérir et me lancer dans un combat que je sais perdu d’avance. Tenter de rivaliser en éloquence avec mon père revient à creuser sa propre tombe, je ne le sais que trop bien. D’ailleurs, je n’essaye même plus.

Je ne m’y hasarde que lorsqu’il me pousse à bout, je ne m’engage la tête baissée dans la défaite que lorsque je perds toute lucidité, que lorsqu’il a suffisamment agité le drapeau rouge pour que j’en oublie toute précaution. Comme là, lorsque je cesse de me mordre les joues pour me contraindre au silence, comme là, lorsque mes ongles ont trop meurtri les paumes de mes mains pour que ça soit encore suffisamment efficace pour contenir ma frustration. Je hurle, je hurle, je craque, la gardienne de prison s’interpose pour m’ordonner de garder mon calme, de le retrouver plutôt, si je ne veux pas qu’on m’éjecte d’ici et qu’on m’interdise de le revoir. Le cliquetis des chaînes attire mon regard, mon père s’est levé, sans parvenir à achever son mouvement, au plus grand plaisir de mon sourire revanchard qui contraste avec mes yeux furieux. « Toujours le même vocabulaire primitif... Renouvelle-toi un peu, Marius ! Tu n'en as peut-être « rien à foutre » que je ne te demande pas ton avis, mais il est de même pour moi. Nous n'allons pas aller loin avec ça. » Je dois me concentrer pour garder la mâchoire fermée si je ne veux pas hurler lorsque je réponds dans un sifflement un « On ne va jamais bien loin de toute manière, je te rappelle » aussi défaitiste que pessimiste. On ne va jamais loin, parce qu’on ne sait pas se parler, on ne sait pas éviter les sujets explosifs, parce qu’on persiste à faire tous les deux les pires choix qu’il soit.

Comme là, lorsqu’il me propose dans une connerie sans nom, sans aucune cohérence avec le reste, avec le discours qu’il me tient depuis une éternité comme quoi je ne suis qu’un putain de bon à rien, lorsqu’il me propose de retourner dans ses locaux pour travailler avec sa secrétaire et ses ingénieurs.

Il se fout de ma gueule. Vraiment. Je n’ai aucun doute à ce sujet, et si je prends le temps de demander son avis à une gardienne dépassée, c’est bien pour mettre en avant à quel point mon père est un beau salopard qui prend son pied lorsqu’il m’écrase. Il se fout de ma gueule. Comment est ce que j’ai pu un jour croire, et croire à nouveau, et m’obstiner à croire encore que la situation pourrait changer entre nous ? Il se fout de moi, comme il s’est toujours foutu de moi. Je suis en colère, encore, de plus en plus. J’ai à chaque fois l’impression d’atteindre mon maximum et à chaque fois, il me force à me rendre compte que je peux repousser mes limites. J’en ai les mains qui tremblent. De colère. Pour qui je me prends au juste ? Je ne pensais pas un jour faire ça, mais c’est la colère irrationnelle qui me porte, cette colère née de la frustration d’avoir les mains liées par ma propre irresponsabilité, par ma propre incapacité d’être un Caesar digne de ce nom, cette colère née de la déception que je persiste à causer à tout le monde parce que je ne sais pas faire quoique ce soit d’autre. Pour qui je me prends ? Jamais je n’aurais pensé réutiliser le plus grand traumatisme de ma vie contre celui qui me l’a causé, tout comme je n’oserai jamais balancer à ma mère que c’est une garce qui a réduit à néant l’homme que j’aurais pu être et qui n’a laissé qu’un gosse terrifié perdu dans une coquille d’adulte. J’ai la conscience aigue que je suis brisé par l’indifférence de ma mère et que rien ni personne ne pourra recoller les morceaux. Et j’ai la conscience aigue que je suis détruit par mon père, et que ces deux cicatrices qui marquent mon torse ne risqueront pas de se soigner un jour, que je pourrai juste me contenter de les ignorer.

Jamais je n’aurais pensé me servir de ça contre lui et pourtant me voilà torse nu, à les pointer du doigt pour mieux revendiquer le droit de lui interdire ce que je veux. Ce droit, je l’ai gagné. Ce droit, je l’ai payé au prix fort. Ce droit, il n’a pas le droit de me l’enlever. Il détourne le regard, je crache un « REGARDE LES ESPECE DE LÂCHE ! » qui menace d’exploser dans ma gueule. Il ne va pas apprécier, il va me le faire payer mais ma respiration rapide, ma poitrine qui se soulève avec exagération, mes mains qui tremblent et qui tremblent encore lorsque mon tee-shirt retombe pour mieux cacher mes deux cicatrices, mon cœur qui est à la limite d’accélérer brutalement, tout mon organisme est dans un tel état de tension que je n’en ai plus rien à faire de ce que mon père peut ou peut ne pas apprécier. Il n’a pas le choix. Point final.

Et ce serait bien que la discussion s’arrête là. Parce que je doute qu’elle puisse sincèrement reprendre sans que tout ne dégénère encore plus. Si c’est possible. Je cherche ses pupilles, alors que j’ouvre et je ferme mes poings pour mieux les calmer. Activité inutile : le regard que pose mon père sur moi lorsqu’il se laisse aller contre le dossier de la chaise douche mon agitation. Brutalement. « J'en ai marre, Marius. » Ah oui ? « Ah ouais ? » J'en ai assez d'avoir constamment le sentiment de me battre contre toi. Quoi que je fasse, que je choisisse blanc, noir ou gris, tu trouveras toujours le moyen de me hurler que je suis un monstre qui cherche à te briser. C'est donc si difficile pour toi de comprendre ça ? C'est une aberration que de me pardonner pour ce que je t'ai fait. Bon sang, Marius, j'ai bien failli te tuer, tu l'as dit toi même ! Aucun père digne de ce nom ne ferait ça. Et aucun père n'irait accepter que son fils aille en prison. » Je secoue la tête, serrant les dents. Ma colère a été douchée. Efficacement. Et pourtant, la voilà de retour. « Ca n’a rien à voir. » Ca n’a rien à voir : entre lui pardonner et le laisser se prendre des coups à ma place, il y a un monde. Il ne peut pas se pardonner, et bien que grand bien lui fasse. Mais… « J'ai accepté ta décision, j'ai accepté que tu mènes ta vie comme tu l'entends, mais il est hors de question que je te laisse finir tes jours ici. Ma culpabilité va au delà de ce qu'un être humain normalement constitué peut supporter. Si je te laisse prendre ma place, ce sera pire encore. Je préfère te savoir en sécurité dehors qu'entre ses murs, entouré de voyous. Je n'ai pas l'impression que tu comprennes... Ou que tu cherches à comprendre. » Je secoue la tête avec bien trop de virulence : « Y’a rien à comprendre, c’est que des conneries. Les voyous, je peux les gérer, j’en suis un tu te souviens ? » Ce n’est qu’une bravade sans intérêt, juste parce que je suis incapable de la laisser parler sans avoir l’impression de perdre et de me faire avoir, alors il faut que je parle pour tenir et résister. « J'encoure bien plus d'années de prison pour ces cicatrices que tu arbores que pour un malheureux document signé, et il me suffirait d'un aveu ou d'une copie de la vidéo surveillance de mon bureau pour rétablir la vérité. » Je cesse de bouger, brutalement. Je passe d’un état ouvertement agité d’un hyperactif en colère au calme le plus total, sans état intermédiaire. « Pardon ? » « C'est ça que tu souhaites ? La vérité et la justice ne sont pas forcément aussi belles que tu sembles le croire. » « Pardon ? » La vérité et la justice sont belles, c’est la réalité qui est moche. Mon bras droit, au poignet brisé il y a plus de quatre mois, se plie contre mon ventre, comme pour cacher les deux cicatrices que j’ai pourtant exposées et mises en avant un peu plus tôt. « Non, t’as pas le droit, c’est pas ce que je voulais ! Tu comprends rien ! C’est pas ce… » Je n’arrive pas à terminer ma phrase.

Tu es stupide, Marius. Tu le savais bien, pourtant : tu ne peux pas gagner contre ton père. Il te mettra toujours KO, quoique tu fasses. Il t’a toujours mis KO, il a toujours eu le dessus sur toi. Ma lèvre s’esquinte, sous mes dents, lorsque je la mords pour me faire taire. « Ne te méprends pas, Marius. Tes intentions sont louables, s'il s'agit de restaurer la vérité, mais si c'est uniquement pour m'emmerder,… » Je ne veux plus l’écouter. Je veux plaquer mes mains contre mes oreilles, je veux partir, je veux disparaître, je veux que tout se passe comme prévu pour une fois, je veux que mon père cède, je veux qu’il me laisse avoir raison, je veux qu’il me laisse gagner, je ne veux pas l’entendre me dire qu’il m’a tiré dessus de sang froid, le reconnaître et s’en vouloir, je ne veux pas qu’il en ait assez de se battre, je ne veux pas qu’il me considère comme un gamin, je ne veux pas qu’il me considère comme un adulte, je ne veux pas qu’il me considère comme un handicapé, je veux qu’il soit fier de moi, un jour, mais je ne sais plus comment m’y prendre. « Je n'ai peut-être pas signé le document que tu brandis comme un étendard à ton absence d'instinct de survie, mais j'ai suffisamment de responsabilité dans cette histoire pour faire un bon coupable. Je ne te demande pas d'attendre des années, seulement des semaines, c'est si compliqué que ça ? » Oui, c’est trop compliqué. La patience et moi, nous sommes fâchés, très fâchés.

Je veux tout. Tout de suite. Je veux tout, à l’instant où je le désire, parce que je sais que si j’attends, tout disparaîtra et plus rien ne sera à moi. Si je lui accorde quelques semaines, ce seront des semaines de trop. Si je lui accorde quelques semaines, ce seront des semaines de plus en prison, pour lui, des semaines de moins avec lui, des semaines de moins dans ma vie. Le temps est inestimable : je n’ai pas le temps d’attendre. Je n’ai plus le temps d’attendre. Je ne veux pas attendre. Je secoue la tête, me refusant à parler. Parce que si je parle, je crie.

Ou je pleure. Et ça… Il me suffirait d'un aveu d'une copie de la vidéo surveillance de mon bureau pour rétablir la vérité… Je ne veux pas l’imaginer. Je ne veux pas le concevoir. Jamais, pas à un seul instant, je n’ai voulu voir mon père au tribunal pour avoir tiré sur son fils. « Fais comme bon te semble, de toute manière, que je dise amen à ce que tu fais ou cherche à m'y opposer, tu n'en feras qu'à ta tête. Alors amuse-toi donc à te perdre dans des dérives juridiques dans les prochains jours, mais sache une chose. Si tu remets un pied dans cette prison en tant que détenu, ne compte pas sur moi pour t'y laisser plus d'une nuit. » Et il tiendra sa promesse, j’imagine. Ou pas. Il ne la tiendra pas. Je déglutis comme je peux.

Pour mieux laisser une seconde s’écouler. Peut être deux. Peut être trois. L’atmosphère libérée brusquement de toute tension me broie les oreilles, presse sur mes tympans pour mieux m’oppresser par le vide créé. J’en profite pour me tourner vers la gardienne. « Encore dix minutes. Et je reste calme. C’est possible ? » Dix minutes avec elle qui s’éloigne. Dix minutes presque seul avec lui, c’est tout ce que je réclame. Pas beaucoup plus. Je ne demande rien de plus. « S’il vous plaît » Elle recule d’un pas, mais tout son regard me fait comprendre qu’au moindre dérapage, elle me met dehors. Vraiment. Avec une amende. Très certainement. Elle recule encore, je me retourne vers mon père. Fatigué. Il est vieux, il me parait si vieux que je n’ai presque plus la foi de crier. « Je ne veux pas que tu payes pour mes conneries. Je ne veux même pas que tu payes pour celles qui m’impliquent. Tu me reproches de ne pas comprendre, mais c’est toi qui ne comprends pas, Papa. Bien sûr que je vais faire comme je veux. Bien sûr que je ne veux pas attendre. Tu le sais bien, je ne suis qu’un gosse impatient. Tu ne veux pas me voir aller en prison ? Et bien moi, je ne supporte pas de te savoir ici. Et je supporte encore moins de savoir que tu me l’as volontairement caché. » J’ai le cerveau qui carbure à toute vitesse, sans trop savoir comment il arrive encore à tourbillonner de la sorte. Je ne veux pas qu’il paye pour mes conneries. Pas une seule seconde de plus. « Je te déteste, tu sais. Je te déteste lorsque tu persistes à voir les autres comme des pions sur un jeu d’échecs et que tu persistes à vouloir me contrôler. » Comme un peu plus tôt, je suis étrangement calme. Mais pas la faute à la colère, cette fois, la faute à mes neurones qui s’activent, à ma réflexion en arrière-plan qui refuse de s’apaiser et qui monopolise tout ce que je suis. « Mais tu ne peux pas. Tu ne peux pas tout contrôler, tu ne peux pas tout maîtriser, tu ne peux pas tout diriger. J’en suis la preuve. » D’une pichenette sur la joue, je le provoque. « J’ai demandé dix minutes à cette bonne femme. Dix minutes, c’est ce qui va me suffire pour te faire comprendre une chose : tu n’es pas fait pour être en prison, Papa, parce que tu ne peux pas supporter ne avoir le contrôle du reste. Dix minutes, c’est amplement suffisant pour que tu réapprennes que je suis une cause et que tenter de te prendre des coups à ma place, et bien… ça ne va rien rattraper, ça ne va rien effacer du passé, c’est juste ridicule, c’est juste… c’est juste que ce n’est pas ce que je veux. » Pas une pichenette cette fois, une petite gifle. J’ai envie de mourir, parce que si mon père n’avait pas ces menottes, je serai en train de me liquéfier de terreur, malgré mes vingt-sept ans et ma continuelle impertinence. Je veux mourir. Je vais mourir. Je veux qu’il réapprenne à me détester, finalement : c’était plus simple lorsqu’il n’essayait pas de se rattraper, au moins il prenait soin de lui, il ne s’embarquait pas dans une culpabilité et une prise de conscience qui le guidaient en prison.

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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeDim 9 Oct 2016 - 23:04

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Hippolyte et Marius ne s'étaient jamais compris. C'était une constatation triste et pathétique, pour un père et un fils, mais il n'avaient jamais été en mesure de se mettre à la place de l'autre, et ne le seraient probablement jamais. Paradoxalement, malgré leurs ressemblances, ils échouaient perpétuellement dans leur dialogue, préférant les hurlements, le déni et le rejet de l'autre plutôt que l'écoute. Seulement, c'était plus fort que lui, Hippolyte ne pouvait accepter que lui et Marius se tournent à nouveau le dos. Encore moins maintenant qu'il savait que son fils n'avait peut-être qu'un ou deux ans à vivre. Cet acharnement tenait peut-être aussi au fait que jamais Hippolyte n'était parvenu à pleinement contrôler Marius. Malgré la peur qu'il lui inspirait, la terreur qui se lisait parfois dans ses yeux, Marius lui tenait tête, l'envoyait bouler, faisait l'inverse de ce qu'il lui disait pour lui prouver que quoi qu'il fasse, il n'était pas une chose, un objet, un contrat que son père pourrait modeler et réécrire à sa guise. Pendant longtemps, Hippolyte avait usé de son acidité et de sa répartie pour faire sortir son fils de ses gonds, pour le pousser à rendre les armes ou commettre une erreur qui lui permettrait de l'emporter, mais alors qu'il lui crachait son venin... Marius resta de marbre. Seules ses mâchoires se crispèrent et ses poings se serrèrent, mais pas un mot ne franchit ses lèvres, et Hippolyte compris qu'il perdait pied, qu'il avait face à lui un Marius irrémédiablement changé, qu'il connaissait et comprenait encore moins... Un Marius qu'il ne serait jamais plus en mesure de manipuler. Tout ce que son fils eut à lui offrir fut une constatation à la fois triste et évidente : jamais aucune de leur discussion n'allait plus loin que « tu me déçois » et « vas te faire foutre ». Deux phrases qui, à elles seules, traduisaient un « tu ne m'écoutes pas quand je te dis que je ne t'en veux pas, m'inquiète pour toi » ou tout autre sollicitude qui, verbalisée, aurait de toute manière eut tendance à sonner faux pour l'un comme pour l'autre.

Ce n'est finalement qu'avec lassitude et résignation, en proposant à Marius un marché qui ne lui plaisait pas plus qu'à lui, qu'Hippolyte parvint à le faire exploser, et ce d'une manière dont il se serait bien passé. Tout comme il aurait préféré ne plus jamais les voir, ces cicatrices qui barrait l'abdomen de Marius. Une ligne blanchâtre, droite et froide, qui surplombait sa jumelle, plus épaisse et dentelée, là où la balle avait perforé sa chair. Une balle qu'il avait tiré, lui, son propre père, à bout portant et sans le moindre état d'âme. Un geste déraisonné qui le hantait jour et nuit, qu'il regrettait autant que s'il avait véritablement tué Marius. Il n'en avait pas encore conscience, mais Hippolyte savait au fond de lui que ce n'était pas le bref sursaut de conscience qui l'avait poussé à ne pas viser le cœur, qui avait sauvé Marius. C'était sa mutation, uniquement sa mutation, la chose pour laquelle il l'aurait envoyé au cimetière en croyant bien faire. Sans sa mutation, Marius serait mort, et Hippolyte n'arrivait pas à se sortir de la tête que l'avoir sauvé de sa tentative de suicide ne suffisait pas à racheter une telle erreur. Rien n'y suffirait plus jamais. A quel moment s'était-il dit qu'il méritai encore de regarder Marius dans les yeux ? Victoire avait tenté de le tuer alors qu'il était à l'autre bout du monde, Hippolyte avait été incapable de le voir, et voilà qu'il tentait lui aussi de punir Marius pour une erreur qui n'était pas la sienne mais celle de ses parents. Quel être humain normalement constitué pardonnerait ce genre de faute ? Le visage résolument tourné sur le côté, il cracha quelques mots entre ses dents serrés.

« Tu peux bien hurler tant que tu le souhaites, Marius, me traiter de lâche si tu veux, je ne regarderai pas. Qui est le plus lâche de nous deux ? Celui qui refuse de regarder, ou celui qui s'en sert comme arme et bouclier ? »

Mais il en avait marre. Il était las et, appuyé contre le dossier de sa chaise, il sentait son énergie et ses forces l'abandonner. A quoi bon se battre, puisqu'il ne pouvait gagner ? La victoire aurait toujours un goût amer, et Marius ne le laisserait pas gagner cette fois. Seulement, sa notion de la justice était bancale, elle allait dans son sens mais absolument pas l'autre.

« Qu'est ce qui n'a rien à voir, Marius ? Signer un document dangereux et tirer sur son enfant, ce sont deux fautes qui encourent la prison. A ceci près que le poids que l'on a sur la conscience n'est pas le même... »

L'affaire malaria, par exemple, lui avait longtemps posé des problèmes de conscience, mais le sujet avait fini par lui passer au dessus, et de l'eau avait coulé sous les ponts depuis. Avoir tiré sur Marius, en revanche... Il savait d'avance que sur son lit de mort, il continuerait à s'excuser. Si tant est que Marius soit encore là pour voir ça. Levant les yeux au ciel, Hippolyte soupira.

« Tu n'es pas un voyou, Marius, tu te prends pour l'un d'eux. Et je sais très bien que ce que tu appelles gérer se résumera en bagarres et mise à l'isolement pour t'imposer. »

Il n'avait pas besoin d'ajouter quoi que ce soit, Marius savait pertinemment comment son père gérait les simples d'esprit, les gens ambitieux ou encore les bagarreurs. En leur faisant miroiter le Paradis, en leur disant ce qu'ils avaient envie d'entendre, et en leur rappelant que quoi qu'ils fassent, c'était lui qui avait le plus gros QI dans l'assistance. Un détenu n'était pas si différent de n'importe quel actionnaire de son entreprise, si ce n'est qu'il n'avait pas l'argent pour se blanchir.

Jouant cartes sur table, Hippolyte avoua à Marius avoir gardé la vidéo surveillance de son bureau le 2 juin. Il avait même plusieurs copies de l'enregistrement, tout en ayant été incapable de le revoir depuis. Seulement, s'il le fallait, il avait toutes les preuves accablantes de sa culpabilité, et Marius semblait à la fois démuni et pris au dépourvu.

« Si je n'ai pas le droit de rétablir cette vérité, explique-moi pourquoi toi tu l'aurais, ce droit ? »

Puis il fini par conclure son petit exposé déprimant en jurant à Marius qu'il était hors de question qu'un Caesar reste en prison si ce n'était pas lui. Fatigué, las, Hippolyte l'était. Contrarié, également. Mais il haussa un sourcil en voyant Marius se tourner vers la gardienne pour... Demander poliment à rester ? En ajoutant un s'il vous plaît ? Sachant que l'ironie n'était clairement pas à l'ordre du jour, Hippolyte résista à la tentation de dire qu'il allait probablement neiger, si Marius commençait à faire preuve de politesse. Il resta d'autant plus silencieux que malgré l'insolence, les propos de son fils le touchèrent. Il le touchèrent plus qu'il ne l'aurait cru, lorsqu'il admit détester le savoir en prison, à tel point que lorsque Marius lui lâcha qu'il le détestait lui, Hippolyte en fut pour la première fois de sa vie peiné, comme si son fils lui avait donné un objet rare d'une valeur inestimable avant de le lui retirer tout aussi brutalement. Alors il soupira, se dissimulant derrière la sécheresse de son ton et un retour brutal et inattendu à l'anglais.

« Je sais, tu me l'as suffisamment rabâché... »

Mais Marius poursuivait déjà, sans se préoccuper de ce que son père pouvait bien dire ou tenter de dire. Il était la preuve que jamais Hippolyte ne pourrait tout contrôler, et ses poings serrés étaient la personnification de sa frustration. Hippolyte ouvrit la bouche, prêt à répliquer, mais Marius lui cloua le bec d'un geste qui laissa son père sans voix, les yeux écarquillés sous l'effet de l'incompréhension. Marius venait lui mettre une pichenette... Jamais encore il n'avait osé faire un geste de ce genre, jamais il n'avait ridiculisé son père ainsi... Et Hippolyte était certain qu'il n'avait fait cela que parce qu'il le savait solidement attaché à la table. Bien sûr qu'être en prison n'effacerait pas le passé ! Mais ça limiterait les dégâts, ça ralentirait pour un temps les lignes qui ne cessaient de s'accumuler sur l'ardoise des erreurs qu'Hippolyte avait pu commettre avec Marius en 27 ans. Ça lui donnerait l'impression, pour une fois, de lui épargner le pire. Bouillonnant de rage et de frustration, Hippolyte s'apprêtait à démonter point par point le brillant exposé bancal de son fils, lorsque celui-ci le fit taire plus aisément encore qu'avec la pichenette. Aussi pitoyable et indolore soit-elle, cette gifle restait honteuse, déshonorante... Le père dominé par le fils et ça, Hippolyte ne pouvait le tolérer. Dans un geste aussi instinctif que violent, il asséna un grand coup de tête dans le nez ou la mâchoire de Marius – à vrai dire il n'était pas vraiment en mesure de viser – et se leva d'un bond, retenu seulement par les menottes qui crissèrent en le maintenant à moitié redressé.

« Si je n'étais pas menotté, Marius, crois-moi, tu ramperais déjà à terre en me suppliant de ne pas t'en mettre une à mon tour ! Essaye donc de recommencer, et crois-moi, ils auront une bonne raison de m'enfermer ! Tu es idiot, bien trop orgueilleux pour ce qui es en mesure d'accomplir, et sans la moindre ambition réaliste ! Je ne suis pas fais pour être en prison, c'est un fait... Mais toi non plus, tu n'es pas fait pour y être... Tu es un hyperactif, être enfermé dans 8m² aura raison de tes nerfs avant même que le mois soit passé... J'ai bien plus ma place ici parce que je suis un criminel, Marius, la prison je m'y suis préparé le jour où ta mère m'a mis un revolver entre les mains en me demandant de tirer sur le mutant que j'avais en face de moi... »

Alors qu'il déversait une colère provoquée exclusivement par le geste déplacé de Marius, la gardienne s'était précipitée pour écarter le jeune homme et lui éviter d'autres blessures. D'un geste d'une rare violence, elle attrapa Hippolyte par la nuque et le plaqua contre le métal de la table, l'assommant pratiquement au passage. Il se mordit la lèvre en chutant, crachotant du sang en secouant la tête.

« Trois jours d'isolement, Caesar, ça vous f'ra ptet' réfléchir à votre comportement... »

Grognant en se débattant, Hippolyte parvint à articuler quelques mots à moitié étouffés par la main massive de la gardienne.

« Laissez-moi... Juste... Terminer... »

De mauvaise grâce, elle le laissa se redresser, détacha ses menottes de la table et les rattacha dans son dos.

« Tu as raison, Marius, je n'aime pas ne pas avoir le contrôle. Mais ici, il y a une chose que je contrôle : Toi, dehors, en liberté. Tu es une cause, et c'est bien pour ça que je me bats pour toi en étant ici, que tu le veuilles ou non. Ça n'effacera rien, c'est vrai, ce n'est pas ce que tu veux, c'est vrai aussi... Mais je ne te demande pas ton avis. Maintenant, fais comme bon te semble, fais-moi sortir d'ici si tu t'en crois capable, mais tu ne prendras pas ma place. Je te l'ai déjà dit, de nous deux, je suis le plus têtu... »

Repoussant la chaise, la gardienne le tira en arrière pour l'emmener vers les cellules d'isolement, mais se tourna vers Marius avant d'ouvrir la porte.

« Restez là deux minutes, on va faire venir le médecin pour qu'il voit vot' blessure... Z'avez bien du mérite de venir voir un trou du cul pareil, mon p'tit... »

Grognant de plus belle, Hippolyte la fusilla du regard en crachant au sol le sang qui lui maculait les lèvres. Depuis quand craquait-il à ce point ? Depuis quand était-il à ce point sujet à la colère et aux accès de violence ? Depuis quand... Etait-il à ce point désespéré que plus rien ne semblait pouvoir l'arrêter ?
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MessageSujet: Re: I fuck up everything but let me explain | Hipporius   I fuck up everything but let me explain | Hipporius Icon_minitimeSam 22 Oct 2016 - 14:46

I fuck up everything but let me explain
Hippolyte & Marius



Je ne suis pas le mec le plus intelligent du monde, je pense me l’avoir prouvé à de nombreuses reprises. Je ne suis ni le mec le plus intelligent du monde, ni celui qui apprend le plus durablement de ses erreurs. Pendant des années j’ai attaqué mon père de front, alors même que je savais que c’était inutile. Pendant des années j’ai maintenu peu ou prou la même stratégie de singe hurlant et gesticulant avec ma mère pour la sortir de son indifférence, sans grand succès à chaque fois. Je devais croire que je l’aurais à l’usure ou qu’un matin, par miracle, elle déciderait de se rendre compte qu’elle avait deux fils pas qu’un seul. Je ne suis pas l’exemple le plus éloquent de celui qui apprend de ses erreurs, donc. Rien d’étonnant, en partant de là, à ce que je m’obstine à ce point à provoquer des rencontres avec mon père depuis maintenant bien trop de mois. Six ans de silence, huit mois de retrouvailles et je suis à nouveau ce gosse têtu qui refusait de comprendre et le non, et l’échec. Mais rien de plus affligeant non plus à me voir continuer bêtement à penser que les choses vont peut être changer un jour.

Je ne pense pas être particulièrement optimiste. Je ne pense pas non plus être particulièrement tourné vers l’avenir, encore moins depuis que mon cœur trace sa dernière ligne droite. Et pourtant, je suis là, à hurler, à supplier, à tenter de paraître bien plus assuré que je ne le suis vraiment. Et pourtant, je suis là, à canaliser ma colère pour la rendre dévastatrice, à tenter de changer les choses, de forcer le tragique de notre situation, l’inévitable tournure que prend cette discussion. Et pourtant, je sors tous mes atouts pour lui faire ouvrir les yeux sur ma détresse et sur sa connerie, je tente par tous les moyens de prendre l’ascendant sur lui. Qu’il me regarde, putain, qu’il regarde ces cicatrices qu’il m’a infligées, à défaut de pouvoir voir celles qui sont dans mon esprit et dans ma confiance en moi. Il m’a détruit, autant que ma mère : ça ne sert plus à rien de tenter de me protéger maintenant. Plus à rien. C’est trop tard. Tout ce que je veux de lui, c’est qu’il me laisse assumer mes conneries ; voilà tout. Tout ce que je veux, c’est qu’il arrête de se comporter en lâche, sinon je ne vais plus avoir de courage à mon tour. « Tu peux bien hurler tant que tu le souhaites, Marius, me traiter de lâche si tu veux, je ne regarderai pas. Qui est le plus lâche de nous deux ? Celui qui refuse de regarder, ou celui qui s'en sert comme arme et bouclier ? » Je sens des larmes poindre, m’irriter la rétine par leur salinité. Qui est le plus lâche de nous deux ? Actuellement lui. Dans quelques minutes, dans quelques jours, dans quelques mois, ce sera moi. Et il n’y a pas longtemps, c’était moi, le plus lâche. « Dur de départager, entre un suicidaire et un père infanticide. » Je me débats comme je peux face à lui, répondant à l’acidité par l’acidité, à la violence par la violence, à la colère par la colère, au sarcasme par le sarcasme. Toujours moins fort, toujours avec un temps de retard, mais toujours présent. Toujours à attaquer.

Comme je peux. Ne pas se rendre, ne jamais se rendre, ne pas lâcher prise, ne jamais lâcher prise. Je secoue la tête, lorsque les mots me font défaut, je serre les poings, lorsque les seules réponses que j’aimerais lui donner, ce sont des coups de poing et des coups de pied, des larmes pour seules pierres jetées, quand tout le reste m’abandonne. Je n’ai rien de comparable avec mon père, parce que je ne suis pas aussi brillant et aussi incisif que lui. Trop bête, trop stupide, trop impulsif, pas assez à la hauteur. Et lui, enchaîné, enchevêtré dans la tenue d’un criminel, qui continue à me surplomber sans même en avoir conscience. Ca n’a rien à voir, qu’il ait failli me tuer. Il ne peut peut-être pas se pardonner, mais moi je n’arrive pas lui en vouloir vraiment. Chacun son problème ; ce n’est pas une raison pour… « Qu'est ce qui n'a rien à voir, Marius ? Signer un document dangereux et tirer sur son enfant, ce sont deux fautes qui encourent la prison. A ceci près que le poids que l'on a sur la conscience n'est pas le même... » Je serre les dents à m’en faire mal. Tirer sur son enfant. Amusant de voir que c’est moi qui agite les braises et c’est moi, encore une fois, qui me prend l’incendie dans la gueule et qui n’a qu’une envie : se plaindre de ce qu’il vient de provoquer.

Il ne comprend pas. Il ne comprend jamais rien. Je ne voyais pas les choses comme ça, et je refuse plus que jamais la possibilité que la vérité sur ces deux cicatrices émergent un jour en justice. Parce que, comme il le dit si bien, s’il est en prison pour un simple papier, je refuse de savoir ce qui pourrait lui arriver si… Les voyous, en prison, je peux les gérer. La prison en elle-même, je suis sûr de pouvoir la gérer. Je n’ai plus que quelques années à vivre, quelques mois si je pousse mon cœur à bout et que je cesse de prendre ces médicaments qui font désormais partie de mon quotidien. Tout ça, je peux éventuellement gérer. Mais savoir mon père, ce géant, cet exemple, cet idole, en prison à cause de moi, ça… « Si je n'ai pas le droit de rétablir cette vérité, explique-moi pourquoi toi tu l'aurais, ce droit ? » Pourquoi ? « Parce que je veux pas… parce que c’est…. » J’arrête de parler devant la vacuité de ma défense. Ce que je m’apprêtais à répondre ? Des justifications d’enfant. D’un gosse perdu, qui n’a qu’une envie : se réfugier dans des bras protecteurs, qui n’a qu’un besoin : que le monde se remette à tourner rond, que le maelstrom de destructions cesse et qu’il puisse recommencer à vivre de manière insouciante parce qu’il sait que d’autres veillent à ce que tout se passe bien. Pourquoi est ce que moi j’aurais le droit de rétablir la vérité et par ce biais la réputation de mon père, et lui non ? Parce que je le veux, point final. Parce que je veux que la réalité se plie à mes caprices, parce que je veux que les méchants finissent en prison, et que les papa soient préservés, parce que je veux qu’il y ait le moins de dommages possibles et que je veux bien être le bouc émissaire, parce que j’ai été le bouc émissaire de mes parents pendant plus de vingt ans, et que je me suis suffisamment habitué à ce rôle pour interdire à mon père que l’on inverse nos places. Je serre les poings, je serre les dents, je cherche à le fixer pour me raccrocher à quelque chose et ne pas sombrer.

Ne pas retomber dans la colère d’un enfant qui ne sait plus quoi faire d’autre que crier, lorsque toutes ses stratégies se sont heurtées à des murs. Je suis celui qui est debout, je suis celui qui a les mains libres, je suis celui qui a tous les pouvoirs, je suis celui qui a la plus grande marge de manœuvre. Alors pourquoi est ce que j’ai l’impression qu’encore une fois, c’est mon père qui sort vainqueur, qu’encore une fois, c’est lui qui maîtrise ma vie, qui maîtrise mes choix, qui maîtrise tout l’échiquier jusqu’au moindre pion abandonné sur le côté ? Le contrôle. La grande marotte du grand Hippolyte Caesar. Et ce qui a toujours échappé au petit Marius. Le contrôle. De lui-même, et des autres. Ma frustration et ma colère, mon désespoir et cette envie de me rouler par terre en hurlant à l’injustice, tout s’envole lorsque je me souviens de ça. Le contrôle. Mon père recherche la maîtrise la plus complète de son environnement, de tout ce qu’il fait, de tout ce qu’il impacte et de tout ce qui l’impacte. Le contrôle, la maîtrise, deux choses qu’il n’a pas lorsque ça me concerne, lorsque je rentre dans l’équation, parce qu’il n’a jamais réussi à me mâter autrement qu’en utilisant carotte et bâton pour faire avancer l’animal réticent. Je me calme instantanément, dans une politesse mesurée, dans dix minutes, dix petites minutes de réclamées. Je te déteste. Depuis combien de temps ne le lui ai-je pas dit ? Je le déteste, et ce n’est pas compliqué de lui expliquer pourquoi. « Je sais, tu me l'as suffisamment rabâché... » Peut être. Mais là,… mon calme n’est qu’un contraste avec mes pensées qui voltigent entre hypothèses et idées, même si en définitive, je ne me fie qu’à mon intuition la plus profonde, celle qui parvient à se frayer un chemin jusqu’à mon épiderme pour mieux me laisser à fleur de peau. Le contrôle. Si je lui enlève son précieux contrôle, si je lui fais comprendre que je ne souffrirai plus d’aucune limite tant qu’il ne sera pas sorti de prison, peut être que ça le motivera à sortir son cul d’ici. Peut être. une pichenette, je me liquéfie intérieurement lorsque je ne peux pas m’empêcher de noter sa réaction. Mon père est sans voix, moi je lutte pour poursuivre, pour conserver ce contrôle que je lui ôte, pour ne pas laisser mon naturel et le Marius terrifié reprendre le dessus. J’ai envie de vomir, je veux mourir : il ne laissera jamais passer ça. Ni de moi, ni de quiconque. Mais surtout pas de la part de son fils.

Une gifle, une petite gifle, humiliante. La coup me prend au dépourvu dans un cri de surprise, dans un mélange entre la douleur et la satisfaction la plus masochiste. Mon père a réagi, comme je m’y attendais, mais plus brutalement encore. « Si je n'étais pas menotté, Marius, crois-moi, tu ramperais déjà à terre en me suppliant de ne pas t'en mettre une à mon tour ! Essaye donc de recommencer, et crois-moi, ils auront une bonne raison de m'enfermer ! Tu es idiot, bien trop orgueilleux pour ce qui es en mesure d'accomplir, et sans la moindre ambition réaliste ! Je ne suis pas fais pour être en prison, c'est un fait... Mais toi non plus, tu n'es pas fait pour y être... Tu es un hyperactif, être enfermé dans 8m² aura raison de tes nerfs avant même que le mois soit passé... J'ai bien plus ma place ici parce que je suis un criminel, Marius, la prison je m'y suis préparé le jour où ta mère m'a mis un revolver entre les mains en me demandant de tirer sur le mutant que j'avais en face de moi... » J’ai une main monopolisée par mon nez, d’où perlent des petites gouttes de sang. Je n’arrive pas à comprendre ce qu’il me dit parce que tout ce que je vois, c’est qu’il m’a frappé, tout ce que je vois, c’est qu’il a réagi, tout ce que je vois, c’est qu’il est toujours là, tout ce que je vois, c’est que… Je ne suis pas fait pour être en prison. J’ignore le reste, j’ignore tout le reste dans un « SI TU N’ES PAS FAIT POUR Y ÊTRE, ALORS POURQUOI TU T’OBSTINES TANT A VOULOIR Y RESTER ! » duquel suinte une détresse qui me fait horreur. « POURQUOI EST-CE QUE… LÂCHEZ LE ! » Mon cri, dirigé vers mon père, s’est réorienté vers la gardienne de prison qui vient de frapper mon père.

Je n’ai même pas le temps de la frapper qu’on me retient par les épaules, mon bracelet hurlant un rythme cardiaque trop élevé. Je n’ai même pas le temps de me débattre qu’on me plaque contre le mur pour m’immobiliser, qu’on écarte mon père. Lorsque la poigne se desserre un peu, que je joue des épaules pour me dresser face à mon père, je me rends compte du ridicule de la situation.

Deux Caesar en prison, deux Caesar qui doivent se faire maîtriser par le personnel parce qu’ils sont incapables de dialoguer calmement. Et qu’ils sont incapables de la moindre constance ni cohérence. « Tu as raison, Marius, je n'aime pas ne pas avoir le contrôle. Mais ici, il y a une chose que je contrôle : Toi, dehors, en liberté. » J’ai une moue de mépris et de désaccord. « Tu ne me contrôles pas. » Je hais l’idée qu’il puisse avoir, qu’il croie avoir, sur moi la moindre emprise. « Tu es une cause, et c'est bien pour ça que je me bats pour toi en étant ici, que tu le veuilles ou non. Ça n'effacera rien, c'est vrai, ce n'est pas ce que tu veux, c'est vrai aussi... Mais je ne te demande pas ton avis. Maintenant, fais comme bon te semble, fais-moi sortir d'ici si tu t'en crois capable, mais tu ne prendras pas ma place. Je te l'ai déjà dit, de nous deux, je suis le plus têtu... » Je secoue la tête, à défaut de pouvoir faire le moindre pas en avant : les mains qui tiennent mes épaules et mes bras veillent au grain, se resserrent au moindre geste pour avorter mon mouvement. « Tu n’es pas le plus têtu. Tu es le plus vieux. C’est tout. Et tu n’es qu’un putain de connard qui refuse d’écouter. Comme moi. On va pas jouer au plus têtu, Papa. » Je tente de forcer le passage, on me plaque contre le mur lorsqu’ils font sortir mon père.

« Ce n’est pas une question de jouer au plus têtu, c’est une question de jouer au plus con. Et à ce jeu là, tu ne peux pas gagner contre moi. »


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