protect me

— lliago & atlas —

Maybe we're victims of fate. Remember when we'd celebrate. We'd drink and get high until late, and now we're all alone. Protect me from what I want. Protège-moi, protège-moi.

Le jour se lève. Un jour nouveau pour le scientifique, dont le sourire laisse naïvement transparaitre l’euphorie qui l'habite. C’est un sentiment sincère qui lui retourne l’estomac, un niveau d'allégresse écrasé durant plusieurs décennies par la peur cruelle d’un futur trouble et infini. Enfin, le puit sans fond de son existence a été comblé, et tout autour de lui semble plus flamboyant, plus vif. Plus intéressant. Le docteur Kirk s'est administré le vaccin ; soudainement, sa vie s’esquisse devant ses yeux, et prend tout son sens. Se projeter dans l’avenir lui était interdit, mais à présent il le sait, il le croit ; il va vieillir. Il va pouvoir s’offrir pleinement à Lliago sans orage. Sans crainte de n’être un jour qu’un enfant auprès de lui. Lui qui retenait tout sentiment à son égard a envie de sortir toutes voiles dehors, d’amarrer sur son coeur de britannique à lunettes. Il s’est longtemps demandé quel goût ont ses lèvres, et si sa peau est aussi douce qu’elle le parait. Déjà lorsqu’ils étaient ensemble à la faculté, il humectait silencieusement le délicat parfum qui émanait de son cou, admirait la coloration si finement dorée de ses yeux. À présent il rêve de plonger dans sa chevelure, de rester pendu à ses lèvres durant des heures. Cela fait des mois, des années qu’il le désire. Qu’il savourait les instants passés à ses côtés, et la douce illusion de pouvoir évoluer aussi bien que le chercheur en psychologie de l'enfance sur le plan physique. Il est aujourd’hui persuadé qu’il le peut, et songe à peine au pacte terrible qu’il a commis avec les hunters pour assouvir son fantasme. Les remords viendront plus tard ; pour l’heure il n’y a de place dans son crâne blond que pour l'excitation. Il a envie de connaître la mort depuis si longtemps. Être capable de l’affronter le laisse dans la contemplation candide des jours qu’il lui reste, et qu’il souhaite peindre à l’aide du pinceau de Lliago.

Il sonne à sa porte plus nerveux que jamais. Lancaste l’accueille, et automatiquement ses iris myosotis se posent sur ses lèvres. Il les désire tant. Fruits défendus à l’époque de sa propre adolescence, Atlas peut à présent affirmer son sa bisexualité sans peur. Reste à convaincre l'empathe, probablement aussi dépassé qu’il l’est par ses sentiments. ‘Lliago.’ murmure-t-il tendrement. Kirk approche une main de sa joue, et bondit soudainement sur ses lippes, ignorant la porte grande ouverte derrière eux. C’est la première fois qu’il embrasse un homme, et plus que jamais il se sent libre. Après plusieurs minutes passées à mêler leurs langues, il recule de quelques pas, presque honteux du baiser qu’il vient de lui dérober. ‘Je me suis administré le vaccin. Je l’ai fait pour nous.’ Il lui prend doucement la main. Un geste dont il rêvait depuis bien trop longtemps. Le voile tombe enfin. ‘Tu es libre ? On devrait fêter ça, et en profiter pour t’aider à maîtriser ton don.'

il a passé la pire semaine de sa vie. son lit trône désormais dans son salon, le plus loin possible des murs. il ne peut plus supporter les émotions de sa voisine dont la cuisine est adjacente à sa chambre. alors il a élu domicile dans son salon, là où presque aucun sentiment ne l’envahit autre que celui de peur et de désespoir qui l’habite lui. en plus atlas n’a pas donné signe de vie depuis plusieurs jours, le seul qui semblait pouvoir lui tenir compagnie sans le faire souffrir de trop s’en est allé, l’a abandonné à son sort. il angoisse à l’idée de devoir ouvrir la porte aux livreurs qui lui rapportent ses repas commandés sur internet, à l’idée de devoir chercher son courrier. sa vie est devenue un enfer et soudainement il comprend mieux le désespoir de certains enfants. il a pourtant conscience des bons côtés de son don. une fois maîtrisé, il pourrait enfin cerner avec exactitude les émotions de ses patients. un atout indéniable dans la profession. pourtant il sait qu’il ne pourra pas assumer ses capacités au risque de se faire assassiner aussi sec. c’est triste, d’avoir peur de qui l’on est parce que les autres nous regardent avec un regard effarouché. il remue sa cuillère dans son café tout en corrigeant les copies des premiers examens blancs de l’année. son stylo rouge souligne, raye, trace avec aisance sur le papier, et il sait qu’il a fait le bon choix, qu’il a choisi la bonne carrière et qu’avec sa mutation, il pourra aider encore plus de gens. a commencer par atlas ; s’il daigne bien remontrer le bout de son nez. lliago n’est pas idiot, il sait que la raison de son absence doit être valable. mais tout de même.

finalement lorsque le scientifique veut bien toquer à sa porte, c’est tout sourire qu’il lui annonce je me suis administré le vaccin. je l’ai fait pour nous. lliago arque un sourcil, sourit doucement mais ne dit rien. lorsqu’il lui prend la main, il est submergé par l’euphorie que son collègue ressent ; la joie, le soulagement, l’optimiste, le renouveau. lliago serre les dents, ferme les yeux, se concentre sur cette douce vague qui le prend, le noie. mais ce n’est pas si déplaisant, un peu de bonheur après avoir passé une semaine à broyer du noir. tu es libre ? on devrait fêter ça, et en profiter pour t’aider à maîtriser ton don. il grimace c’est peut être un peu trop tôt, tu ne crois pas ? il n’est pas sorti depuis deux semaines, tous les contacts qu’il a eu avec l’espèce humaine se sont révélés catastrophiques. seul atlas semble avoir la capacité de l’approcher ; peut-être grâce à la constance et la plénitude de ses émotions ? et tu te sens bien ? pas d’effets secondaires ? une vague de doute vient prendre lliago alors qu’elle ternit un peu l’enthousiasme de son aîné. il l’a fait pour eux. il ne peut s’empêcher d’être amer à cette déclaration, il s’est juré de ne pas commettre cette erreur. james serait et resterait le seul qui l’aura berné. lliago ne veut pas d’une relation sérieuse. mais il n’est pas d’humeur à ruiner l’humeur de son ami et se contente donc de lancer un c’est cool qu’il espère convaincant. heureusement que c’est lui l’empathe, tiens.