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 another one bites the dust. (eremon)

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MessageSujet: another one bites the dust. (eremon)   another one bites the dust. (eremon) Icon_minitimeDim 27 Mar 2016 - 18:48



– who will save you now –
LOEVEN ET EREMON / Tell the world I’ll survive, Tell the world I’m alive. I want you to know All is blacked out but continues to grow. I need you to see Nothing can change unless you believe. I won’t let it go, I’ll stick to the plan. Now we’re deep in the throws. I won't let it go, i'll fight til the end, and then you will know. – LES FRICTION.



Ce n’était sûrement pas la meilleure des idées qu’il ait eues — et il le savait. Mais les options lui manquaient. Il se refusait à mettre en danger des gens qui l’étaient suffisamment sans le voir cogner à leur porte. Refusait d’aller déranger ceux qui avaient d’autres chats à fouetter, et sûrement bien mieux à faire que de gérer les soucis qu’il amènerait assurément avec lui. Naturellement, son choix s’était porté vers la seule personne qui, à une époque, aurait tout donné pour le protéger. La réciproque était toujours vraie, c’était un fait ; mais l’inquiétude du cadet des Dickens résidait justement dans le fait que ce n’était pas elle qui était, cette fois, convoquée. La dévotion qu’il pouvait avoir envers son aîné n’était plus à prouver. Néanmoins, les dernières fois qu’il avait côtoyé Eremon, les choses avaient été plus compliquées qu’à leur tour. Les vieilles rancunes subsistaient, et la violence qui habitait désormais son frère laissait à Loeven un goût amer. Une part de lui peinait à reconnaître cet homme, ce qu’il avait représenté pour lui — et pour Lyanna. Pourtant, son autre moitié comprenait ce qu’il était devenu. Les souffrances qu’il avait traversées, les épreuves qui s’étaient dressées sur son chemin. Il lui semblait bien souvent n’avoir en sa possession qu’un dixième à peine des cartes de la vie d’Eremon. Avoir été mis sur le banc de touche, et ne pas pouvoir s’en plaindre — être la cause même de cette mise à l’écart. La fuite avait eu du bon : il ne s’était pas retrouvé trop proche d’Oswin, s’était préservé comme il avait pu. Mais il avait abandonné la seule famille qu’il lui restait. L’avait laissé s’empêtrer dans ses ennuis, et couler chaque fois plus profond, chaque fois plus vite et plus à pic. Son petit doigt lui soufflait qu’il aurait été normal qu’aujourd’hui, Eremon ne lui ouvre pas. Qu’il l’éconduise, proprement, en lui rappelant que lui n’avait pas été là quand il en avait eu besoin. Et alors, aurait-il seulement eu le droit de lui en tenir rigueur ?

Un temps, il lui sembla que le poids de leurs existences se laissait lourdement tomber sur ses épaules. La fatigue le submergea. Las, il se força néanmoins à maintenir l’allure, les mains dans le fond des poches. Que diable avaient-ils bien pu faire pour se traîner un tel karma ? Il lui semblait que jamais la vie ne les laisserait en paix. Que, chaque fois que quelque chose de positif semblait leur arrivée, il fallait qu’immédiatement une contrepartie des plus négatives ne prenne la suite. Impossible de profiter de l’amour doux qui s’était progressivement installé en son cœur. Impossible de savourer la moindre parcelle d’idylle sans que tout ne chavire et que le bateau ne coule. Foutu reflet qu’il semblait s’appliquer à reproduire, à calquer sur son aîné. Il était cependant bien moins à plaindre, et jamais l’idée de mettre son malheur sur une marche plus élevée que celle d’Eremon ne lui serait passé par la tête. La fatalité n’avait d’ailleurs rien d’une compétition, et la transformer en un vulgaire concours l’aurait d’ailleurs répugné bien davantage que le simple geste qui l’avait conduit là où il était aujourd’hui.

Tué. Il avait tué. Sans réfléchir, sans se soucier des conséquences de son acte. L’adrénaline avait pris le pas, l’instinct de protection s’était chargé de faire ce qui était le plus simple, le plus radical et le plus efficace : éliminer la menace, sans retour en arrière possible. Éliminer le danger, et faire en sorte que celui-ci ne puisse ni se relever, ni revenir se venger. Il avait tué. L’idée se frayait difficilement un chemin dans ses pensées. Il avait rassuré Rhaena du mieux qu’il avait pu. Lui avait assuré que ç’allait, et que ça irait. À dire vrai, il n’en était pas persuadé. Perdu, il avait l’impression de se faire chavirer par les images qui le hantaient — à lui en donner la nausée. Régulièrement, il croyait entendre à nouveau le craquement des os, sec et sinistre. Le moindre claquement se transformait, le moindre grincement épousait ce son atrocement familier. Une part de lui devenait folle — une part de lui basculait. Il aurait voulu être capable de fermer l’œil et de voir autre chose que ce corps sans vie qu’il avait laissé retomber à ses pieds. Sentir autre chose que des frissons le long de son échine, en repensant à son acte désespérément héroïque — désespérément mauvais. Mais impossible de s’en détacher. Impossible de tourner la page, impossible d’oublier. Il n’avait nul doute que le temps finirait par balayer bien des éléments du traumatisme. Mais jamais il n’effacerait complètement ce qui avait été fait. Jamais la page ne se tournerait entièrement, et jamais il ne pourrait oublier.

Et maintenant, tout était devenu compliqué. Il n’y avait plus nulle part où aller, nulle part où se réfugier. Impossible de retourner à son appartement comme si de rien n’était. Il n’y avait d’ailleurs pas remis les pieds, peu désireux de tomber nez à nez avec quelque hunter ou quelque officier de police chargé de l’enquête. Il n’y avait pas la moindre trace sur le cadavre, rien qui n’aurait pu permettre de remonter jusqu’à lui, au premier abord. Mais le crime avait été commis chez lui. Il serait le principal suspect, si l’on venait à comprendre que cet appartement était le sien. Fort heureusement, les papiers n’étaient pas à son nom, et il avait toujours tous ses papiers d’identité sur lui — par précaution. Les autres formulaires portant son nom était dissimulées dans un casier qu’il louait, et il s’était assuré de laisser le moins d’objets personnels possible traîner. Pas de photos, ni rien qui pût l’engager. Pourtant, il avait tout de même quelques bricoles auxquelles il tenait. Quelques trucs qu’il allait vouloir récupérer. Il allait avoir besoin de ses vêtements, besoin de récupérer de quoi vivre. Besoin de trouver un autre logement. De recommencer une autre vie, encore.

Et en attendant, il avait besoin d’un endroit où dormir. Il avait laissé ses pieds emmener sa carcasse épuisée jusqu’à l’appartement d’Eremon, sans lutter. Les épaules voûtées, il s’était arrêté quelques instants devant la porte sans frapper, emmuré dans ses réflexions. Lorsque finalement son poing s’abattit contre le battant, il sentit son cœur se mettre à battre douloureusement dans sa cage thoracique. Il avait fallu qu’il vienne ici. Fallu que ce soit vers son frère qu’il se tourne, naturellement, lorsque son esprit avait eu besoin de solutions simples et toutes données. La peur le tenait, sans qu’il ne l’explique réellement. Peut-être due au fait que leurs dernières rencontres avaient été plutôt houleuses. Peut-être.

Lorsque la porte s’ouvrit, ses yeux se posèrent sur son frère. Un sourire rapide, crispé et meurtri. « Hey. Désolé de te déranger. » Un raclement de gorge, un coup d’œil rapide dans le couloir. La peur d’être suivi, peur d’être entendu. Fallait qu’il se calme — fallait respirer. « J’ai besoin de quelque part où aller, et… L’fait est que t’es la première personne à qui j’ai pensé. » Les yeux avaient retrouvé ceux de son frère. La pression sur le point de le faire craquer, les nerfs à vif de l’écorché. Et, finalement, un léger rire, faux et crispé, désespéré et étranglé. « … J’ai b’soin qu’tu m’aides. Y a tout qui a merdé. » Il appréhendait la situation, la férocité du monde entier, et ce que demain lui réservait. Il appréhendait ce qui suivrait, ce qui le frapperait de plein fouet.

Et il lui semblait que désormais, à chaque seconde qui passait, il appréhendait la suivante comme si elle eût été la dernière.
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Daisy Moriarty
Daisy Moriarty

ADMIN - master of evolution
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SUR TH DEPUIS : 16/03/2015
MessageSujet: Re: another one bites the dust. (eremon)   another one bites the dust. (eremon) Icon_minitimeMar 24 Mai 2016 - 23:01

We’ve come as far, as we’re ever gonna get.
— loeven dickens & eremon dickens —
Into the night for us, we’re the only ones left. I bet you even know, where we could go. And when it all fucks up, you put your head in my hands It’s a souvenir for when you go. I’m in misery where you can seem as old as your omens. And the mother we share Will never keep your proud head from falling The way is long but you can make it easy on me. And the mother we share Will never keep our cold hearts from calling. — the mother we share.

Des années plus tôt, Eremon avait été fiancé à une femme qui était responsable de la mort de sa sœur cadette. Quelques mois plus tôt, il avait été celui qui avait trouvé le corps de sa petite amie, celui qu’on avait accusé du meurtre, histoire d’avoir une bonne raison de se servir de lui comme cobaye à l’élaboration d’un vaccin contre le gène mutant. Maintenant, il apprenait que la fille dont il avait cru s’enticher, était morte elle aussi, tuée lors d’expérimentations. Il avait eu plus de chance qu’elle apparemment. De la chance, la bonne blague. Il avait l’impression que sa vie toute entière était une malédiction. Qu’on en finisse avec lui, au lieu d’épargner sa vie, au bout d’un moment, ça ne pourrait que l’arranger. Parce qu’il commençait à sérieusement la détester, sa vie, alors que jamais rien n’allait comme il le voudrait. Il avait juste l’impression d’être le dénominateur commun aux morts de personnes qu’il avait aimé. C’était à se demander s’il ne ferait pas mieux de rester définitivement tout seul dans son coin, parce qu’il était vraiment une malédiction ambulante. Au moins, maintenant, il n’avait plus besoin de trainer dans les rues de Radcliff à la recherche de n’importe qui pouvant lui fournir une information même la plus minime. Astoria était morte alors ça n’en valait plus la peine. Plus rien n’en valait la peine sans doute. Eremon, avait l’impression d’avoir vraiment vu chaque parcelle de sa vie s’effriter devant ses yeux sans être capable de faire quoi que ce soit pour empêcher le drame. Il s’était accroché à chaque fois, à un petit truc un petit bout d’espoir qui lui avait permis de se relever et de continuer à avancer malgré toute la merde qu’il continuait d’accumuler. Mais aujourd’hui, il ne savait plus, il ne voyait plus trop à quoi s’accrocher. Au milieu de son désespoir, il lui restait bien Jeane. C’était peut-être la seule amie qui lui restait, la seule personne qui n’avait pas fini par le laisser tomber, alors que jour après jour, il devenait de plus en plus insupportable. Ouais, y avait Jeane. Mais vu qu’il était toxique, peut-être qu’il ferait mieux de se tenir loin d’elle, sans quoi, elle finirait par mourir elle aussi. Il avait cette impression à présent, ceux qui s’approchaient trop de lui finissaient par être tués. Loeven avait bien eu raison de partir et lui, il avait bien fait de semer son frère cadet la dernière fois qu’ils s’étaient vus, parce qu’inéluctablement, lui aussi, il était plus en sécurité loin de lui.

Il continuait sa vie sans grande motivation, le cœur complètement brisé et épuisé par cette vie qui n’en finissait pas de le pousser sans arrêt au fond du trou. Y avait même des moments, où il en arrivait à se demander ce qui le retenait de prendre une arme pour se tirer une balle dans le crâne. L’avantage c’était qu’il était aux Etats-Unis, le pays où se procurer une arme était aussi simple que d’aller acheter un paquet de céréale dans un supermarché. Il en avait envie des fois, d’en finir avec sa vie, que ça s’arrête enfin, parce qu’y avait de toute façon plus rien à faire de lui. Pourtant il continuait sa routine. Il se levait le matin – quand il arrivait à trouver un peu de sommeil au cours de la nuit – il allait bosser au bar, il rentrait chez lui. Il vivait plus ou moins comme un type normal, le type le plus blasé de la ville peut-être, mais un type normal. Peut-être bien qu’un jour ce serait trop et qu’il oserait en finir avec sa vie, peut-être que, par miracle, le vase n’était pas encore plein, mais c’était clair, qu’il en était pas loin de la goutte d’eau qui ferait déborder la vase. Il tenait bon sans vraiment savoir pourquoi, alors qu’y avait rien, absolument rien dans sa vie qui semblait en valoir la peine. Il avait déjà presque tout perdu et l ne voulait pas risqué ce qui lui restait. Au moins, il avait l’impression que plus le manque de motivation s’imposait à lui, moins la fureur incontrôlable qui coulait dans ses veines depuis son séjour dans les laboratoires des hunters, faisait surface. Fallait croire qu’il était même trop fatigué par sa vie pour être agacé. Il ne passait plus son temps dans les rues à s’attaquer à n’importe qui. Ça il l’avait fait pour retrouver Astoria, mais puisqu’elle était morte, ça ne servait plus à grand-chose. Il aurait pu, être énervé au point de chercher vengeance, mais ça n’avait jamais été son genre. Lyanna était morte et il n’avait rien fait. Talisa était morte et ça avait été la même chose. Astoria ne serait, de toute évidence, pas l’exception qui confirmerait pas règle. Non, comme les autres, Astoria n’aurait aucune justice, pas grâce à lui en tout cas. Parce que lui, il n’était qu’un pauvre type complètement amorphe qui ne faisait clairement plus grand-chose de sa vie et qu’il n’avait de toute façon, plus envie de faire quoi que ce soit.

C’était plus simple sans doute, de rester là à s’apitoyer sur son sort, plutôt que de trouver une bonne raison de se battre. Y avait eu une époque où il aurait pu le faire, se battre pour les choses en lesquelles il croyait, mais ça avait été une autre époque, un autre type. Ciaràn Borthwick. Un homme qui était mort depuis longtemps, remplacé par un Eremon Dickens complètement à la dérive. Les choses avaient tournées au drame tellement vite qu’il aurait presque pu se demander comment il en était arrivé là. Ça avait été un enchainement de mauvaise décision, dont la pire avait été de faire confiance à une femme qui ne le méritait pas. Il avait été idiot, complètement fou même et c’était toujours les autres qui finissaient par en payer les conséquences. Au moins, malgré son état dépressif, il ne passait pas ses journées en peignoir avachi dans son canapé à boire de la bière, c’était déjà ça.  Ouais, y avait des moments où il buvait un peu trop et sa consommation de cigarette avait clairement explosée ces derniers temps, mais, il s’efforçait d’être un peu présentable, histoire de pouvoir se regarder dans la glace sans se trouver complètement pitoyable et son appartement était complètement propre, parce que, quand bien même il n’était pas un grand maniaque, au contraire, il avait tendance à s’arranger pour s’occuper, histoire de rester le moins longtemps seul à rien faire d’autre que ruminer ses pensées les plus sombres. Alors, il pourrait passer pour ce type plein de TOC qui ne supportait pas qu’un truc ne soit pas à sa juste place, mais en vérité, c’était qu’il fallait mieux pour lui qu’il se concentre là-dessus que sur le reste. C’était le bordel dans sa vie, mais pas dans son appartement, c’était déjà ça. Il était devenu adepte de la lecture aussi, lui qui n’avait pas non plus été un grand fan de roman, il en mangeait plein en ce moment, encore un bon moyen de rester occupé. Il déposa celui qu’il était en train de lire quand on frappa à la porte, écrasant au passage sa clope dans le cendrier avant de laisser échapper un soupire, n’y avant aucune idée de qui pouvait venir le voir, ce n’était pas comme si sa liste d’ami était particulièrement longue. Y avait que Jeane en fait et y avait peu de chance pour qu’elle toque à sa porte à l’improviste. Il fit plutôt surpris de voir son frère à sa porte, mais il écouta, avant de simplement soupirer et de se pousser de devant la porte pour le laisser entrer. Il n’avait pas le courage d’opposer la moindre résistance, pas comme l’autre fois qu’ils s’étaient vus. La porte à peine refermée, il avait déjà tiré son paquet de clope de sa poche pour en allumer une nouvelle. « Alors, qu’est-c’qui t’arrive ? » Qu’il se contenta de demander, pas forcément, ni concerné comme l’aurait dû être un frère aîné face à de telles paroles de la part de son cadet. Dans le fond, y avait une partie de lui qui voulait lui répondre que lui aussi il avait eu besoin d’aide, des mois plus tôt, quand lui, il s’était contenté de se barrer.
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MessageSujet: Re: another one bites the dust. (eremon)   another one bites the dust. (eremon) Icon_minitimeLun 18 Juil 2016 - 8:10

Il aurait pu aller ailleurs. Trouver un motel, ou une chambre d’hôtel. Minimiser les risques, essayer de ne pas traîner ses ennuis jusque chez Eremon, et de ne pas lui en attirer plus que son frère ne pouvait déjà en avoir. Pourtant, sans qu’il ne se parvienne à se l’expliquer, la solitude l’effrayait. Il était peu probable qu’il ferme l’œil de la nuit, et il savait que d’être laissé pour lui-même, dans une minuscule chambre aux draps à usage unique, ne serait pas pour l’aider à calmer le fracas qui agitait le fond de son esprit. Il n’était pas certain que se présenter chez son frère soit une meilleure idée, d’autant plus lorsqu’il repensait à leur dernière entrevue. Mais Eremon était la seule famille qu’il lui restait — et à cet instant précis, c’était ce dont il avait besoin.

Besoin. Penser à lui avant de penser à son frère, c’était ce qui l’avait conduit face à cette porte. Peut-être, après tout, l’aîné des Dickens avait-il besoin, lui aussi, de se retrouver seul. Peut-être avait-il envie de rester tranquille, de vaquer à ses occupations sans avoir son cadet à gérer. Peut-être n’avait-il tout simplement pas envie de le voir, et ne le voudrait-il plus jamais. Toutes les hypothèses s’étaient dessinées dans l’esprit du mutant, à mesure qu’il avait réduit la distance le séparant de l’appartement de son aîné. Pourtant, rien n’y faisait : son altruisme était en train de s’estomper, et son besoin d’être égoïste reprenait le dessus. Un appel au secours, c’était tout ce qu’il faisait — et pour la première fois depuis son arrivée en ville, il lui semblait qu’il était en droit de penser à lui-même. Rhaena aurait sûrement été ravi de le voir, aurait sûrement tenté de le rassurer. Mais en avait-il seulement envie ? Les mots ne répareraient pas les os brisés — les phrases et les baisers n’y changeraient rien. Il avait tué. Et il n’avait pas besoin qu’on essaie de minimiser ce qu’il avait fait. Tout ce qu’il avait besoin, c’était d’un visage connu. D’un point de repère pour ne pas sombrer, d’une bouée pour le ramener des années en arrière, avant que tout ça n’arrive. Et si c’était le silence qui régnait entre Eremon et lui, il n’en serait que soulagé. Peut-être que dans le fond, parler ne lui importait pas vraiment — peut-être que dans le fond, tout ce qu’il lui fallait, c’était un modèle à retrouver.

Eremon s’écarte pour le laisser passer. Et il le voit, dans ses yeux, que ça a presque l’air de l’ennuyer de se faire ainsi alpaguer. Il le sent dans sa posture, l’entend dans sa voix, que la solitude serait mieux que des lamentations d’un frère qu’il n’a visiblement pas une folle envie de voir. Et ça verrouille le cœur sur le bord de se refermer. Les sourires furtifs et les rires étranglés disparaissent derrière une moue distante, bien que douloureuse, alors que la porte se referme derrière lui. « Mon appart’ est une scène de crime, et j’ai nulle part où dormir. » Pas besoin de s’étendre, dans la seconde : les faits sont là. « Et l’hôtel, c’est le premier endroit où on va aller me chercher. » De toute évidence, y aller est une mauvaise idée. Il ne lui avait pas fallu grand-chose pour comprendre qu’il avait vu juste, et que son aîné n’avait pas vraiment la tête à l’entendre se lamenter. Peut-être se trompait-il — tout ce qu’il savait, c’était que cet accueil était loin de celui qu’un frère aurait pu lui faire, quelques années auparavant. Impossible de revenir en arrière, et il le sait. Ni entre eux, ni pour tout ce qui s’est passé. Mais ce soir, ça n’a plus d’importance. Ce soir, il n’a même plus envie d’essayer de faire comme si de rien n’était. De toute manière, qu’est-ce que ça changerait ?
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