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 We need to talk about your brother ~ Alistaspen

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MessageSujet: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeMer 23 Mar 2016 - 0:10



       
       Alistair & Aspen Wolstenholme
       He is my brother. He is my blood, and so is yours...

   
A
spen sentait encore bon le sable chaud et les vacances largement méritées alors qu’elle passait l’immense portail de fer forgé qui séparait la demeure des Wolsthenholme du reste du monde. Elle l’avait passé des centaines de fois, peut être même des milliers, ce portail, pour avancer sur le sentier de gravier clair, remontant jusqu’à l’immense porte d’entrée de la bâtisse qui les avait vu grandir, Calista, Lorcan et elle. Aspen avait sonné à l’entrée, puis avait passé la porte sans attendre : Docile, elle avait accepté de venir voir son père le lendemain de son retour de San José, malgré sa très courte nuit de la veille –merci Sacha-, et le décalage horaire. Elle avait tout juste eu le temps de se doucher ce matin et de se maquiller suffisamment pour avoir l’air présentable devant son paternel, puis avait marché jusqu’au quartier de son enfance : il n’y avait qu’une quinzaine de minutes entre son appartement et la maison, après tout.
Pour être tout à fait honnête, elle avait un peu hésité avant d’accepter de venir sans discuter : elle n’avait pas arrêté d’y penser, dans l’avion, retournant les quelques mots de ce SMS envoyé la veille de son départ par son père. Savait elle pour son frere. Savait elle … pour … son frère… Elle s’était demandé si Alistair s’inquiétait simplement de savoir si elle savait si Lorcan était en vie, puis l’évidence fut implacable, éclatante et douloureuse : d’une manière ou d’une autre, il avait découvert le pot aux roses. Comme elle. Comme Calista. Les deux sœurs avaient chacune eu une certaine réaction en découvrant la transmutance de Lorcan, mais finalement, elles s’y étaient habituées, d’une certaine manière. Mais leur père… elle avait beau l’aimer de tout son cœur, elle n’imaginait pas une seconde ce dernier accepter la nature de Lorcan avec résilience. A vrai dire, elle ne savait même pas dans quel état elle allait le retrouver, aujourd’hui.

- Daddy, je suis là !

Qu’elle avait crié à la volée dans le corridor, incapable de dire si son géniteur l’attendait dans le salon, la cuisine ou dans son bureau à l’étage. A défaut, la cadette s’avança jusqu’au salon pour s’y installer dans son fauteuil préféré, le plus moelleux, celui était en face de la fenêtre qui donnait sur la cour. Elle posa son sac au sol, pas trop loin, quand même, au cas où pour une raison quelconque, elle ait besoin d’une arme, et elle attendit. Son regard vagabondait sur les objets qui meublaient la pièce, songeant que peu de choses avaient changé depuis son départ du cocon familial : même canapé, même table basse, même meuble pour la télévision… Même les cadres au dessus de la cheminée remontaient à des années : un cliché de Calista dans sa tenue de jeune diplômée,  les jumeaux à peine majeurs pour leur bal de promo. Aspen aimait autant cette photo qu’elle la détestait, en voyant ses grosses joues de poupon et la coupe de cheveux improbables de Lorcan. Comme quoi, on s’améliorait vraiment en vieillissant, en réalité. Sans vraiment s’appesantir sur le sujet, Aspen songea qu’elle devrait peut être faire développer des photos plus récentes pour actualiser un peu la cheminée de son vieux père, mais quelque chose lui disait que ce dernier était peut-être en réalité plus nostalgique qu’autre chose.
Elle se redressa d’un bond en voyant son père apparaitre dans l’encadrement de la porte, effaçant spontanément les quelques mètres qui les effaçaient pour le rejoindre et le prendre rapidement dans ses bras. C’était là toute la complexité de la relation entre Aspen et son père : elle avait beau savoir que la conversation entre eux ne serait pas des plus agréables, mais elle avait quand même besoin de ce contact physique, d’une étreinte pour sentir son père, bien vivant, comme elle pouvait le faire avec Lorcan. D’une certaine manière, Alistair était un peu l’image que s’était faite sa fille de l’homme parfait, pendant très longtemps : Son père était fort, brillant, avec un sens de l’honneur et de la famille, un succès professionnel éclatant et une loyauté sans faille. Et puis, contrairement à tous les autres, son père ne l’avait jamais abandonné, jamais, ni même ne serait ce que déçu. Peut être l’avait elle trop idéalisé, trop longtemps, mais elle espérait vraiment que cela ne changerait jamais, quoi qu’il puisse lui dire aujourd’hui …
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WILDBIRD
     
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeJeu 31 Mar 2016 - 18:55


Dans la gigantesque bâtisse des Wolstenholme, il n’y avait pas un bruit. Seules les horloges tic-taquant au rythme des secondes brisaient le silence qui s’était installé dans la demeure de l’illustre famille. Même le bois des vieux escaliers ne grinçait pas, comme effrayé à l’idée de déranger le maître des lieux qui ne parlait plus que lorsqu’il se trouvait dans une situation qui l’y obligeait – et les dieux seuls savaient qu’il faisait de son mieux pour les éviter. A dire vrai, moins il voyait de monde, mieux il se portait, enfermé dans les pensées noires qui tournoyaient follement dans sa tête depuis une semaine déjà.
Assis dans le confortable fauteuil de cuir face à son bureau, les coudes posés contre le meuble et le front appuyé dans ses mains, Alistair tentait de calmer la tempête qui faisait rage au creux de son crâne. Depuis les attentats de la mairie, il s’était retrouvé plongé dans un trouble qu’il ne pensait jamais avoir à subir un jour. Déjà peu loquace d’ordinaire, il s’était d’autant plus renfermé sur lui-même qu’il ne pouvait parler à personne de ce qu’il avait appris ce soir-là, de cette révélation qui le hantait sans pitié depuis une poignée de jour, de cette plaie à vif qui en avait rouvert une autre, plus ancienne mais toujours aussi douloureuse.
Lorcan était un mutant ; de tous les drames qui pouvaient arriver dans sa vie, celui-ci était l’un des pires qu’il ait pu envisager. Lorsque Maebhe s’était révélée télépathe, il avait tenté, lutté avec toutes ses convictions de chasseur pour tenter de la délivrer de son abomination lorsqu’elle s’était éveillée. Mais il n’avait pas été assez fort pour l’aider, pas assez fort pour mettre fin à ses souffrances. Il l’avait laissée se débattre avec les voix qui la hantaient, ces voix qui devaient professer leur haine des gens comme elle en permanence. Elle avait dû être rappelée à sa condition bien plus d’une fois, et sûrement que ça l’avait aidée à poser le canon de son pistolet contre sa tempe avant d’appuyer sur la détente. Le trader était persuadé de pouvoir encore entendre la détonation qui avait retentit dans tout le manoir quasiment désert lorsqu’elle avait mis fin à ses jours – toute seule. Toute seule, parce qu’il avait été trop lâche pour l’assister dans ses derniers instants. Toute seule parce qu’il avait été trop lâche pour supporter la seule femme qu’il ait jamais aimée jusqu’au bout. Si la culpabilité ne l’avait jamais vraiment quitté, depuis quelques jours, c’était pire encore, comme si tous les mauvais souvenirs étaient remontés à la surface en même temps, empêchant ses pensées de s’enchaîner correctement et son formidable cerveau de fonctionner autrement qu’à plein régime, ressassant les mêmes choses encore et encore. Lorcan était un mutant – un mutant avec un donc particulièrement dangereux. Et il n’avait personne à qui en parler. Si le vieux chasseur était un homme plutôt secret en temps normal, cette fois, le fait de ne rien pouvoir dire lui pesait énormément. Il aurait voulu que Maebhe soit là, qu’elle le conseille, lui réponde et l’aide face à ce problème qui lui paraissait monstrueusement insurmontable. Ce n’était pas faute d’être allée la voir au cimetière comme il le faisait régulièrement, mais la seule réponse qu’il avait eue en retour, ça avait été le bruit du vent soufflant entre les tombes. Alors il s’en était retourné chez lui et s’était muré dans la solitude et un mutisme duquel il ne sortait que contraint et forcé. Il ne pouvait pas laisser tomber son travail aussi brusquement, mais il s’était malgré tout résigné à poser quelques jours de congé lorsqu’il avait réalisé qu’il était incapable de se pencher sur ses dossiers sans penser à son fils au bout de quelques minutes à peine. Alors il était resté seul, sans rien pour réussir à réellement lui changer les idées, dormant peu et mal. Il était d’autant plus préoccupé par la situation qu’il savait que les sœurs de Lorcan chercheraient à le joindre et à savoir ce qui lui était arrivé le soir de l’explosion. Calista serait certainement la première à lui casser du sucre sur le dos et à répéter inlassablement quel mauvais père il était, assurant au jeune homme qu’il était bien mieux sans son géniteur dans sa vie, mais Aspen … Aspen, elle, allait se retrouver entre deux feux. Entre son père et son jumeau. Entre le chasseur et le mutant.
D’ailleurs, la jeune femme n’avait jamais donné de vraie réponse à son message, envoyé quelques heures seulement après sa confrontation avec le cadet Wolstenholme. A la place, elle s’était contentée de lui annoncer qu’elle partait une semaine en vacances chez une amie. Il n’avait rien dit, encore trop en colère à ce moment pour vraiment se faire un avis sur le sujet qui ne soit pas biaisé par son ressentiment, mais maintenant que son coup de sang était passé, il réfléchissait – ou du moins tentait de réfléchir plus posément. Le fait que la jeune femme ne lui ait rien répondu était étrange. A dire vrai, qu’elle n’ait pas eu l’air de s’inquiéter pour son frère alors qu’il avait dû lui dire qu’il se rendait à la mairie était assez étonnant quand on voyait à quel point ils étaient soudés et s’inquiétaient perpétuellement l’un pour l’autre, qu’ils le montrent ouvertement ou non. Elle ne lui avait pas demandé de nouvelles de Lorcan ni ne lui en avait donné, alors qu’il était assez sûr qu’elle avait dû en fournir à leur aînée. Quelque chose clochait, et il ne savait pas encore quoi, mais il était certain que la réponse ne lui plairait pas. De toute façon, rien ne lui plaisait plus ces derniers temps, ni les mathématiques, ni l’idée de chasser – à dire vrai, cette option le révulsait pour la toute première fois depuis plus de trente ans. Il avait laissé ses armes au placard et sa calculatrice dans son tiroir, puis avait trouvé de quoi s’occuper en attendant que l’avion de sa fille n’atterrisse et qu’elle ne soit de retour en ville. Il lui avait envoyé un nouveau message la veille, la priant de bien vouloir rentrer à la maison. Il avait à lui parler, et le plus tôt serait le mieux. Certaines choses se devaient d’être mises au clair, que ça plaise à la jeune femme ou non.

Il était toujours dans la même position, le front appuyé contre ses mains, lorsqu’il entendit la porte d’entrée s’ouvrir et la voix d’Aspen retentir dans la grande maison, brisant le silence pour la première fois depuis les dernières trente-six heures où pas le moindre mot n’avait été prononcé entre ces murs. Alistair se laissa aller en arrière dans son fauteuil et massa ses tempes, tentant de reprendre pied dans la réalité, s’extrayant difficilement au tourbillon d’images et de sons qui ne laissait pas sa tête en paix. Il n’était pas sûr, au final, d’apprécier être dérangé dans sa retraite solitaire, mais il avait à parler à sa fille, et il n’avait plus l’envie ni le temps de laisser les choses se tasser – faire l’autruche, ça n’était pas son genre, et ça ne ferait malheureusement pas disparaître ses problèmes. Il se leva finalement et remit sa veste en place. Il avait tout fait pour maintenir les apparences, se forçant à ne pas lâcher prise et à continuer à vivre aussi normalement que possible. Il était toujours bien habillé et rasé de près, son costume impeccablement ajusté sur ses épaules. Seules ses joues creusées par un manque d’appétit flagrant et les cernes sous ses yeux témoignant de son manque de sommeil prouvaient que si physiquement il donnait le change, mentalement, c’était loin d’être aussi reluisant qu’il voulait le faire croire. Mais il fallait bien le connaître pour remarquer ces détails, et il savait déjà qu’Aspen lui ferait une remarque sur le sujet. Tant pis pour lui : il n’avait qu’à être plus fort et à ne pas se laisser abattre. Décidément, plus le temps passait, plus il réalisait qu’il n’avait rien du fier chasseur qu’on le pensait être. Il n’était qu’un homme seul qui pliait au moindre obstacle – du moins, c’était ainsi qu’il se voyait désormais.
Descendant l’escalier de bois qui grinça à peine sous ses chaussures cirées, il parvint jusqu’à la porte du salon et eut à peine le temps de la franchir que déjà Aspen bondissait presque hors de son fauteuil et s’avança vers lui à grandes enjambées. Il sentit les bras de la jeune femme se refermer autour de lui et, bien malgré lui, lui rendit son étreinte, fermant un instant ses yeux gris. Il avait l’impression d’avoir perdu deux enfants, et Aspen était la seule encore présente à ses côtés. Elle était la seule qui n’avait jamais failli, la seule avec laquelle il avait toujours été sincère ; et même s’il avait été tout aussi sévère avec elle qu’avec le reste de la fratrie, il avait également été plus complice avec la rouquine qu’avec son jumeau ou leur aînée. C’était comme ça, tout simplement ; c’était la relation qu’il entretenait avec elle et il ne l’aurait échangée pour rien au monde.
Ce câlin spontané ne dura qu’une petite poignée de secondes, et il en profita pour la détailler lorsqu’il finit par s’écarter. Elle avait bronzé – pas beaucoup, mais avec sa peau laiteuse, il était facile de le remarquer lorsqu’elle changeait de teint. Elle avait l’air un peu fatiguée aussi. Au moins, il n’était pas seul à manquer de sommeil. Mais il n’était pas d’humeur à lui demander comment s’étaient passées ses vacances, si elle avait apprécié la Californie et si elle avait pu se détendre loin de Radcliff. A la place, il planta son regard métallique dans le sien et dit d’une voix rendue rauque à force de ne pas être utilisée :

- Il faut que nous parlions.

D’un geste calme, il l’invita à retourner s’asseoir dans le fauteuil qu’elle venait de quitter, ou bien dans le sofa, peu importe. L’important était qu’elle s’assoit et qu’il puisse lui faire face. Lorsqu’elle eut pris place, il choisit un fauteuil à son tour et s’y cala, toujours aussi droit que d’ordinaire. Il n’y avait aucune façon de bien commencer cette conversation, aucun moyen de la rendre moins tendue, moins compliquée. Mais si jamais il s’avérait qu’Aspen n’était vraiment pas au courant pour Lorcan, il ne lui annoncerait pas de but en blanc la mutation de son jumeau. Mieux valait commencer par une question toute simple. Il aviserait ensuite en fonction des réponses de la jeune femme.

- As-tu eu des nouvelles de ton frère récemment ?
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeVen 1 Avr 2016 - 22:27



       
       Alistair & Aspen Wolstenholme
       He is my brother. He is my blood, and so is yours...

   
P
our être tout à fait honnête, elle s’attendait plus ou moins à le retrouver dans cet état. Pour autant, ça ne l’empêchait pas de sentir son cœur se serrer devant l’air exténué de son paternel. Alistair semblait avoir des valises sombres sous les yeux en guise de cernes, et sa fille avait bien l’impression qu’il avait pris dix ans d’un coup. Il était pale, caractéristique physique qu’il avait certes transmise à ses trois enfants, mais la blancheur pure de son visage semblait avoir terni dans un gris de cigarettes et manque de sommeil. Bien sur, il était toujours tiré à quatre épingles, mais Aspen connaissait bien son père, elle était faite du même bois : même dans la pire tourmente, elle ne se serait jamais relâchée physiquement, c’était le signal le plus flagrant à envoyer à un ennemi sur sa propre position de faiblesse. Aspen avait entendu toute son enfance et son adolescence durant qu’elle était bien la fille de son père. Elle avait énormément de ressemblance avec toutes les femmes du côté Wolstenholme de son arbre généalogique, et on ne cessait de répéter qu’elle n’était rien d’autre qu’une version féminine et plus gracieuse de son paternel. Aujourd’hui elle savait que ce n’était pas tout à fait faux, mais qu’ils n’étaient pas non plus tout à fait semblables. Disons qu’elle était celle qui se rapprochait le plus de l’image que se faisait les gens de son père, en façade tout le moins. A peine avait elle croisé son regard que, sans attendre, elle avait enlacé son père comme elle avait pu le faire des centaines de fois. Elle était bien la seule à se permettre de telle effusion avec Alistair, et elle ne se privait jamais de ce privilège relatif. Il ne lui fallut pas longtemps pour sentir toute la raideur dans le dos de ce dernier, signe qu’il n’avait pas du beaucoup dormir, et réfléchir beaucoup trop. Elle s’était décollée de lui un peu à contre cœur, résistant à l’envie de garder ses mains dans les siennes, alors qu’il prononçait ses mots qui ne voulaient jamais, au grand jamais, rien dire qui vaille. Ils fallaient qu’ils parlent, et Aspen n’était pas tout à fait sure d’être prête pour ça. Elle se contenta d’hocher la tête, se rabattant vers son très cher fauteuil confortable, repliant les jambes sous ses fesses en attendant que son père s’installe. Elle avait soudain l’impression d’être à nouveau une petite fille, que son père prend à part pour lui faire la morale.
Elle posa son sac à ses pieds, alors que la question de son père venait la cueillir comme la faux sur un épi de blé : son frère. Pas Lorcan, ou mon fils, ou son jumeau. Son frère. Aspen se passa la main dans son épaisse chevelure rousse pour ramener sa crinière en arrière, avant de répondre avec précaution à la question de celui qui se trouvait en face d’elle :

- J’ai eu de ses nouvelles avant de prendre l’avion, et il m’a envoyé quelques textos depuis que je suis revenue. Rien de très inhabituel.

Rien d’inhabituel, si ce n’était qu’il lui avait conjuré dans toutes les langues possibles de ne pas venir voir Alistair. Que c’était dangereux, que vu ce qu’il lui avait dit à lui, ce qu’il avait fait à Calista, elle risquait d’être la prochaine sur la liste, d’une manière ou d’une autre. Aspen voyait les choses autrement : elle n’était pas mutante, son père n’avait, au final, rien à lui reprocher. Et puis quand bien même, il tenait trop à elle pour toucher à un cheveu de sa tête. Et puis quand bien même, elle était plus apte à se défendre que son frère et sa sœur, quoi qu’ils puissent en dire. Elle soutenait le regard d’acier de son père, se demandant au final comment ça avait pu se passer entre lui et Lorcan : comment son frère s’était il trahi ? qu’avaient ils eu le temps d’échanger là-dessus ? Là encore, elle n’avait pas toutes les informations. Elle ne savait même pas si Lorcan avait dit à Alistair qu’elle savait, que Calista aussi, que des tas de gens savaient, mais n’avaient rien dit. Si c’était le cas, elle imaginait parfaitement le sentiment de trahison qu’il pouvait ressentir à ce moment elle : elle s’était retrouvée dans sa situation, quelques mois auparavant. Elle aussi n’avait pas pu se résoudre à tuer son frère. Elle posa ses bras sur les accoudoirs, penchant la tête légèrement sur le coté, comme on le ferait avec une poupée de porcelaine :

- Il s’est passé quelque chose ?

Bien sur qu’il s’était passé des choses, beaucoup, beaucoup trop au gout d’Aspen, mais elle avait besoin de l’entendre le lui dire de vive voix. Si son père l’interrogeait, elle ne lui dirait que la vérité. Mais pour jouer à son petit jeu de la manière la plus fair play possible, il fallait d’abord qu’il lui en explique les règles…


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WILDBIRD
     
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeDim 17 Avr 2016 - 2:48


Le père d’Alistair était un homme spécial. Le redoutable patriarche de la famille Wolstenholme avait été un soldat hors pair et, surtout, un impitoyable chasseur. Peut-être était-ce réellement par honneur et pour venger les victimes des crimes commis durant la Seconde Guerre Mondiale qu’il agissait de la sorte, ou bien peut-être était-ce par goût du sang qu’il canalisait comme il le pouvait ; toujours est-il qu’Alastor Wolstenholme avait son lot de morts laissés dans son sillage. Des nazis, bien entendu : après tout, il était hors de question de laisser ces monstres échapper à la justice et couler des jours heureux qu’ils ne méritaient pas. Au nom de l’humanité qu’ils avaient bafouée et aux noms des survivants à jamais traumatiser par les sévices subis entre leurs mains, il les avait traqués, inlassablement, devenant un tueur au cœur froid comme la glace. Il n’était pas un enfant de chœur, loin de là, mais poursuivre ces criminels semblait avoir encore durcit son jugement. Il avait développé des techniques de traque et de mise à mort absolument redoutable, et lorsqu’il avait trouvé pire menace pour l’humanité que les nazis en la personne des mutants, il avait perfectionné son savoir pour pouvoir mieux combattre ce nouvel adversaire. Lorsqu’il s’était marié et qu’il avait eu des héritiers en âge de comprendre ce qui était en jeu, il leur avait expliqué de quelque part, dans le noir, se cachaient des monstres qu’on aurait cru issu des rêves les plus affreux d’incroyables savants fous ; des créateurs de feu, des manipulateurs d’émotion, des êtres capables de contrôler les os ou bien de faire obéir quiconque d’une simple parole, voilà ce qui se terrait au cœur des villes et du monde civilisé. Alastor avait laissé le choix à ses enfants de suivre sa voie ou non, et Alistair avait écouté les enseignements de son père avec une attention religieuse. Il avait suivi ses entraînements et avait appris des plus grands chasseurs de la région ; il était tombé amoureux de sa femme alors qu’ils pourchassaient sans relâche les abominations qui hantaient le monde. Il avait accusé ce satané gène vicié de la lui avoir arrachée lorsqu’elle s’était tuée après la découverte de sa télépathie, et il n’avait jamais vu les mutants que comme quoi que ce soit d’autres que des horreurs, des aberrations ou bien des sous-hommes à abattre ou à réduire en esclavage pour les empêcher de faire trop de dégâts.
Et toute son éducation, toutes ses convictions, toutes ses certitudes avaient volé en éclats quelques jours plus tôt à peine lorsqu’il avait découvert que son propre fils était de cette engeance qu’il avait chassée et tuée avec dévotion et rigueur toute sa vie durant. Il était de ces êtres qu’il lui avait appris à haïr, de ces choses contre lesquelles il l’avait armé et avertis, ces choses qu’il avait appris à tuer à ses enfants. Si Lorcan et Calista n’avaient jamais fait couler de sang, leur plus jeune sœur, elle, avait participé à bien des missions et avait envoyé bien des mutants six pieds sous terre. Savait-elle seulement que son jumeau, sa moitié, son double était comme eux ? Savait-elle que tout ce que son père lui avait enseigné risquait de se retourner contre elle ? Le vieux chasseur n’en était pas sûr encore. Mais à force de tourner et retourner ses souvenirs, de ne plus penser qu’à ça et même d’en rêver la nuit lorsqu’il parvenait enfin à trouver le sommeil, il avait l’impression qu’on ne lui avait pas tout dit. Et puisque son aînée avait très clairement annoncé qu’elle ne voulait plus aucun contact avec lui depuis ce que le vaccin lui avait fait, il ne lui restait plus que sa cadette auprès de qui aller chercher les réponses qu’il souhaitait. Et puis, avec Aspen, il avait l’impression qu’il ne se heurterait pas à un mur de mensonges. Qu’elle lui fasse des cachoteries, c’était une chose, mais qu’elle lui mente ouvertement, il avait du mal à le concevoir.

Ses yeux gris rivés dans ceux de la jeune rousse, il la regarda s’installer dans son fauteuil et lui posa une question simple ; il ne s’attendait pas spécialement à un exposé détaillé de la part d’Aspen, et il n’en eut pas. Il n’eut qu’une réponse très simple, qu’elle ne développa pas davantage. Si les deux jumeaux s’étaient réellement parlé si peu depuis le retour de la cadette, il ne connaitrait pas la teneur de leurs échanges. Il aurait pourtant été curieux de savoir ce qu’avait pu dire Lorcan à sa sœur, car il doutait que le jeune homme soit resté silencieux quant à leur affrontement au cœur des ruines de l’hôtel de ville. Le trader posa les coudes sur ses cuisses et croisa ses doigts devant son visage, le dissimulant à moitié, rendant son regard cerné plus perçant encore. Il n’était pas certain qu’il y ait de bonne manière de révéler la vérité à la jeune femme. Il n’était pas sûr qu’il y ait quoi que ce soit qui ne la blesserait pas d’une certaine façon. Mais il fallait qu’elle sache, ou bien qu’elle se trahisse d’une manière ou d’une autre s’il s’avérait qu’elle était réellement au courant de la nature de son frère.

- Nous nous sommes vus lors du discours de la mairesse. Il m’a trouvé après la première explosion.

Il se revoyait encore faire un vol plané en arrière pour tomber lourdement sur le sol, un débris cognant contre son crâne et lui ouvrant le cuir chevelu, faisant couler sur son visage le sang dont Lorcan s’était servi pour lui montrer ce dont sa mutation était capable.

- Il y a eu un … accident.

Alistair ne voyait pas vraiment comment décrire ce moment fortuit où son bracelet avait sonné au contact de son propre fils. S’il n’y avait pas eu cette seconde bombe, ils auraient fui tous les deux et il n’aurait jamais rien su. Combien de temps encore aurait-il vécu dans l’ignorance ? Il n’en avait aucune idée, et il n’était pas certain de vouloir le savoir. Pas alors que le moment des révélations était venu. Il ne savait pas à quoi s’attendre vis-à-vis d’Aspen, ne pouvant prédire sa réaction face à ce qu’il allait lui dire puisqu’il n’avait aucune idée de ce qu’elle savait. D’une voix calme et maîtrisée, il annonça gravement :

- Ton frère est un mutant, Aspen.

Son regard froid comme l’acier se posa sur elle à nouveau. Il détailla son visage avec attention, des petites mimiques inconscientes agitant ses traits aux coups d’œil et aux tics nerveux qu’elle aurait pu avoir. Et puis, tout aussi calmement, il lui posa une nouvelle question.

- Est-ce que tu le savais ?
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeLun 18 Avr 2016 - 23:09



       
       Alistair & Aspen Wolstenholme
       He is my brother. He is my blood, and so is yours...

   
A
près un temps de réflexion, Aspen considérait de plus en plus sérieusement de reprendre un billet pour la Californie, prendre ses cliques et ses claques et dire à tout le monde d’aller voir ailleurs si elle y était. Elle était fatiguée, fatiguée des mensonges, des magouilles, des non dits qui faisaient pourrir les relations les plus précieuses et rancir les cœurs les plus tendres. Alors c’était ça qu’il fallait faire, laisser sécher son cœur comme une lanière de viande de bœuf salée, pour le rendre dur comme du béton ? Elle ne le voulait pas, et même si elle avait imaginé essayer un jour, elle n’y arriverait pas, de toute manière. Parce que c’était son essence même, à Aspen : elle s’inquiétait pour les gens. Sous ses grands airs, elle n’était rien d’autre qu’une espèce de boule dégoulinante d’affection et d’inquiétude, pour son frère, sa sœur. Son père aussi. Son père pour qui elle se démenait depuis la plus tendre enfance pour tendre, ne serait ce qu’un peu, vers la perfection qu’il semblait attendre d’eux, en toute simplicité. Pour Alistair, la médiocrité n’était pas toléré, pour aucun d’entre eux. Avec le temps, elle avait eu l’impression que cette pression s’était concentrée, lentement mais surement, sur elle : il avait abandonné de faire de Calista une chasseuse de terrain. Puis il avait laissé Lorcan lui filer entre les doigts, sans qu’il ne sache pourquoi dans un premier temps d’ailleurs. Alors sa poigne de fer s’était renfermée sur sa cadette, toujours fidèle au poste, toujours prompte à faire ses preuves pour les deux autres. Aspen avait mis les bouchées doubles depuis son retour en ville, sans se plaindre, en serrant les dents, gérant de front sa vie de chasseuse, d’héritière, sa vie professionnelle, au détriment de tout ce qui faisait son individualité. Aujourd’hui, elle était fatiguée, fatiguée de passer sa vie à la perdre pour voir la fierté dans les yeux de ceux qui lui en demandaient toujours plus, sans avoir toujours quoi que ce soit en échange …

Elle enfonça sa joue sur son poing fermé, fixant son père sans le regarder vraiment. Voilà pourquoi ni l’un ni l’autre ne lui avait répondu tout de suite ce jour là, alors qu’elle faisait les cent pas dans son bureau à guetter les nouvelles de tout le monde. Au final, elle s’était retrouvée à picoler chez Marius, s’était engueulée par texto avec Noeh et avait reçu le fameux texto fatidique de son frère. C’était il y avait à peine une semaine, et elle avait l’impression que c’était dans une autre vie. Alors elle ne dit rien, attendant la suite qui, elle le sentait, n’allait pas lui plaire, elle en était convaincue. Elle plissa le nez, sa mimique signature, quand il en arriva au fait : un accident. Evidemment, Lorcan en était de choc, ça ne pouvait pas donner grand-chose de bon, surtout en face de leur père. Le regard d’Aspen coula de celui de son père à ses mains, à son poignet gauche, et son cœur rata un battement : le bracelet anti mutant. Bien sur. Son frère était allé aider leur paternel, le gadget avait bippé, rideau, fin de l’histoire. C’était tellement, tellement bête de se faire avoir pour ça. Ils avaient réussi à dissimuler un don aussi terrible pendant des mois, et il était mis à jour à cause d’une connerie pareille. C’était déprimant, vraiment. Aspen se contenta de battre des cils et de serrer les mâchoires devant la grande révélation d’Alistair : Bravo, Papa, à six mois près, c’était la découverte du siècle. Dommage, Lorcan et elle avaient eu le temps de t’entamer et d’achever tout le cycle de l’acceptation : elle était passée par le déni, la colère, le chantage, pour enfin tendre à la conversation, puis à l’acceptation. Enfin presque, mais elle n’était pas loin. Elle savait depuis peu que Cali savait aussi. Pour une fois, c’était à Alistair d’avoir un train de retard. Elle soutint les deux balles qui replaçaient les iris de son géniteur, avant de lâcher, laconique :

- Je le sais depuis notre dernier anniversaire.

Six mois, donc, il n’allait pas avoir de mal à faire le calcul tout seul. Ils avaient réussi à passer au travers des mailles du filet pendant six longs mois, bon gré mal gré. Sans surprise, elle sentit bien que la réponse était un peu courte pour satisfaire totalement Alistair. Elle se redressa dont un peu, droite dans son canapé, croisant les mains sur ses genoux avant de reprendre calmement, tâchant de calquer le timbre de sa voix sur celle de son père :

- Pour être tout à fait honnête, Papa, on a discuté du fait de t’en parler plusieurs fois. Et puis il y a eu l’épisode avec Calista et … Nous avons considéré, lui et moi, qu’il était plus sage d’attendre un peu qu’il puisse faire ses preuves avant de t’exposer notre … Point de vue …

Nous, nous, nous … Elle était toute seule face à Alistair, et pourtant elle le savait, elle se battait pour deux. Face à son père, elle ne se désolidariserait pas de Lorcan. Ils étaient un tout, et ce serait à prendre ou à laisser, même pour celui qui les avait élevé pour devenir ce qu’ils étaient … Tout ce qu’ils étaient.



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WILDBIRD
     
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeDim 15 Mai 2016 - 17:22


S’il y avait une chose de sûre avec Alistair, c’est qu’il n’était pas du tout le genre d’homme à s’ouvrir facilement. Ce n’était pas spécialement par misanthropie qu’il était ainsi renfermé, mais plutôt par méfiance et par jugement. Il partait du principe que toute personne était potentiellement soit à surveiller soit à dédaigner jusqu’à ce qu’on lui prouve le contraire – ou au contraire qu’on confirme ses impressions premières. Et s’il savait bien qu’on ne jugeait pas un livre à sa couverture, il savait aussi que les apparences étaient moins trompeuses qu’on le croyait, et il serait moins prompt à juger une personne à la tenue impeccable que quelqu’un de mal fagoté ou à l’air négligé. Il était très strict avec lui-même et l’avait été avec ses enfants, tous les trois sans exception, les élevant dans une hygiène de vie rigoureuse que leur mère arrivait à contrebalancer avec la tendresse dont il n’avait jamais vraiment été capable de faire preuve. Lorsque Maebhe était morte, il avait dû se faire violence pour ne pas se laisser aller au chagrin ; il était malheureux, et elle lui manquerait toujours, mais il ne pouvait pas se permettre de chuter. Pas alors qu’il avait trois enfants à charge et une vie de chasse à continuer, pas alors qu’il s’était jeté à corps perdu dans le travail et la traque pour oublier qu’il était triste. Il fallut d’ailleurs qu’il révèle à sa descendance quelles étaient réellement les activités de leurs parents. Le suicide de son épouse le poussa à être d’autant plus exigeant avec eux, d’autant plus dur qu’il ne voulait plus prendre le risque qu’on lui cache quoi que ce soit qui puisse mener à une nouvelle tragédie du même genre. Au final, c’était l’exact contraire qu’il avait provoqué : sa fille aînée avait fini paralysée et infertile à cause de lui parce qu’il avait voulu l’empêcher de se faire tirer à vue par d’autres chasseurs qui n’auraient plus vu l’héritière Wolstenholme mais une transmutantes, pouvoir temporaire ou non. Lorcan, lui, était un cas encore plus compliqué ; depuis leur confrontation à la mairie, Alistair en avait perdu le peu de sommeil qu’il avait, ne sachant que penser ni quoi ressentir. C’était un mutant, au pouvoir particulièrement dangereux qui plus est, mais c’était son fils malgré tout, la chair de sa chair, et il n’arrivait pas à choisir entre ce que lui dictait son devoir et ce que lui hurlait son instinct de père. Aspen s’était éloignée elle aussi, mais de façon bien moins radicale que le reste de la fratrie, et en fin de compte, c’était elle qui était toujours restée fidèle au poste, qui venait lui demander des nouvelles et lui en donner, qui passait de temps en temps au manoir familial, bref : qui avait gardé le contact pour trois avec son géniteur. Pourtant, malgré tout ce qui avait pu se passer, tout ce qui avait pu arriver, quelque part, le trader faisait encore confiance à ses enfants.

Du moins, il leur faisait confiance jusqu’à ce que la grande rousse assise dans le fauteuil face à lui ne lui révèle qu’il était le dernier mis au courant de la mutation de Lorcan. Une subtile grimace glissa sur ses traits tandis qu’une fine ride de colère se dessinait au coin de son nez. S’il était trop fatigué moralement et physiquement pour entrer dans une rage noire, son agacement était clairement visible et se diffusait dans ses veines au rythme des pulsations d’un cœur qui s’était mis à battre comme un tambour de guerre. Aspen était au courant pour son jumeau depuis leur anniversaire. Ca faisait donc six mois, si très longs mois qu’ils avaient réussi à lui cacher ça, à lui mentir ouvertement et à le fuir plutôt que de l’affronter en face. Ca ne lui plaisait absolument pas, et il dû faire un bel effort de volonté pour ne pas simplement envoyer promener sa cadette. Mais se laisser aller n’aurait servi à rien sinon à perdre sa fille à son tour, et il refusait que ça arrive – quelque part au fond de lui, il ne voulait pas se résoudre à les perdre tous les trois.
Passant la main sur son visage, le trader inspira longuement et darda son regard d’acier dans celui de la jeune femme, toute la sévérité dont il était capable lisible dans ses prunelles grises.

- Et combien de temps au juste auriez-vous attendu ? Un mois de plus ? Un an de plus ? Si Lorcan ne fait jamais ses preuves, je serais resté dans l’ignorance jusque sur mon lit de mort ?

Malgré son ton calme, ses mots dégoulinaient de désapprobation. Il était fâché d’avoir été mis à l’écart d’une telle façon, tout en sachant pertinemment que ça avait été la réaction la plus logique à avoir. Calista, Lorcan et Aspen le connaissaient, après tout : ils l’avaient déjà entendu parler des transmutants maintes et maintes fois, l’avaient vu chasser, savaient à quel point il était intraitable et implacable dans sa quête de purification du génome humain. Alors cacher que son fils était l’un de ceux qu’il pourchassait si ardemment, ce n’était, au final, que la seule solution plausible qui avait dû s’imposer à eux. Se redressant dans le canapé, l’air aussi froid qu’une tombe, le cinquantenaire ne brisa pas un instant le contact visuel qu’il avait avec la petite dernière des Wolstenholme.

- Maintenant que je suis le dernier à avoir appris la nouvelle, je suppose que ni toi ni Calista ne me laisserez approcher de votre frère.

Les deux jeunes femmes pouvaient essayer tout ce qu’elles voulaient, si jamais il décidait qu’il voulait mettre la main sur son fils, il n’arrêterait pas avant de l’avoir retrouvé, et rien ni personne sur terre ou au ciel ne l’en empêcherait, pas même la chair de sa chair, pas même Aspen qui l’aimait encore et Calista qui le haïssait de tout son cœur.

- Quel est-il, votre point de vue sur la question, Aspen ?
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MessageSujet: Re: We need to talk about your brother ~ Alistaspen   We need to talk about your brother ~ Alistaspen Icon_minitimeJeu 19 Mai 2016 - 14:44



       
       Alistair & Aspen Wolstenholme
       He is my brother. He is my blood, and so is yours...

   
P
our tout dire, Aspen n’avait pas la moindre idée de ce que serait la réaction de son père à une telle révélation. Il pouvait aussi bien se mettre à vociférer que rester parfaitement stoïque et, pour être tout à fait honnête, elle ne savait pas ce qu’il était le pire des deux. S’il était impressionnant dans ses ires tempétueuses de géant, il était proprement terrifiant dans ses colères les plus froides. Elle le savait d’expérience, puisque chacun de ses trois enfants avait expérimenté l’une d’entre elles, à un moment ou à un autre de leur vie. Elle s’était préparée, au moins psychologiquement, à l’une comme à l’autre, sans se faire trop d’illusion sur le recul que pourrait prendre Alistair sur la situation : il ne chercherait pas à comprendre pourquoi ils ont fait ça, tout ce qu’il verrait, c’est le mensonge –par omission, certes, mais mensonge quand même- et le fait que ses descendants se soient ligués spontanément contre lui. Cela ne présageait absolument rien de bon pour elle. Malgré tout, elle soutint le regard polaire de son géniteur dans le sien, le dos bien droit, la posture impeccable, alors qu’elle venait puiser dans ses ressources les plus profondes la force de conserver une voix stable et pondérée, en dépit de son envie de hurler :

- Lorcan fera forcément ses preuves. Douter de lui n’est pas une option pour moi. Alors ça aurait pris le temps qu’il faudra, c’est tout.

Si seulement ça pouvait se terminer comme ça, sur un « c’est tout ». Sauf que c’est tout n’était pas une conclusion suffisante pour le patriarche des Wolstenholme, elle en était bien consciente. D’ailleurs, elle sentait tout le poids de sa réprobation et de sa déception dans son regard, ce qui était proprement insupportable pour la petite fille avide de reconnaissance et de fierté paternelle à l’intérieur d’elle. Elle dut refouler violemment la gamine en elle en lui promettant qu’elles iraient pleurer toutes les larmes de leur corps une fois hors de sa vue, et releva la tête vers Alistair à présent debout en face d’elle, tâchant de décrypter le moindre de ses faits et gestes. Il n’avait encore pas renversé la table basse de rage, et bon, on pouvait presque compter ça comme une victoire. Quand il reprit, elle ne répondit pas tout de suite. A vrai dire, elle n’en avait même pas encore parlé vraiment à Calista, et les plans de Lorcan étaient … Encore justes des idées lancées un peu comme ça, à la volée. De là à dire qu’ils avaient tous un super plan pour empêcher Alistair de lui mettre la main dessus, il y avait un monde. Mais elle finirait bien par trouver une solution. Elle n’avait pas le choix :

- Je pense qu’il vaut mieux pour vous deux que vous oubliez l’existence de l’autre quelques temps, pour le bien de tout le monde. Je n’ai pas envie de perdre un autre membre de ma famille à cause de Ca.

Ça, c’était comme ça qu’ils appelaient le génome transmutant depuis la mort de leur mère. Ça, c’était un peu comme lorsqu’on ne nomme pas une maladie. Un truc horrible, honteux, qui ne mérite pas d’avoir un vrai nom. Un truc que sa mère avait transmis à Lorcan, et qui mettait en péril toute la famille. Pas juste Lorcan. Si elle devait perdre son père dans cet affrontement, ce ne serait pas son frère qui gagnerait. Ce serait ce putain de gêne, encore. Elle voulait qu’il comprenne ça. Juste ça. Elle ne se leva pas, restant bien assise sur son fauteuil, la poitrine serrée, les poings tout autant, alors qu’Alistair lui assénait une ultime question. La vouvoyait il pour marquer son désaccord, ou pour avoir l’avis qu’elle partageait avec son frère ? Elle avait l’impression de ne même plus connaitre les règles du jeux auxquels ils jouaient :

- Je viens de te le dire, Papa. Laisse-le. Tu as vu ce qu’a fait le vaccin à Cali. Il n’est pas encore suffisamment perfectionné pour permettre aux gens de se guérir dans la dignité. Lorcan ne mérite pas de souffrir comme un chien juste parce qu’il a eu le malheur de naitre avec un gène qu’il n’a pas demandé. Si il est comme ça, ce n’est pas sa faute …

Et Alistair comprendrait très bien quelle était la fin de cette phrase en forme d’accusation. Ce n’était pas la faute de Lorcan. C’était la leur, celle des parents Wolstenholme, infoutus de faire des gamins normaux. Le sang ne s’était pas souillé à la génération de Lorcan. Il l’était bien avant, et ils étaient les seuls responsables des risques qu’ils avaient pris. Ce n’était pas à son jumeau de payer les pots cassés, et elle se battrait comme une lionne pour que cela n’arrive jamais…Quitte à devoir affronter le dernier héros de son enfance.
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