Sujet: it's time to act like an adult (pv Poppy) Ven 22 Avr 2016 - 1:08
It's time to act like an adult
Poppy & Marius
Je n’ai jamais travaillé. Ni même aimé travailler. Et j’aurais bien du mal à savoir si je n’ai jamais aimé travailler parce que c’était trop fatiguant, parce que c’était un moyen facile d’entre en conflit avec mon père ou parce que c’était juste inintéressant. Dans tous les cas… il a été rapidement clair que le hand était ma vie, que les affaires, la médecine, le droit, que tout ça ne m’intéressait pas le moins du monde et que tout ce que je demandais c’était de passer le restant de mes jours dans une salle de sport, un terrain ou en extérieur à courir et rien de plus. Mes quelques années à la fac se sont résumés à des soirées étudiantes, quelques partiels non validés, beaucoup de rattrapages, de cours séchés, de fric dépensé pour du vent et d’engueulades avec mon père à ce sujet. J’aurais bien du mal à dire quels cours j’ai pu suivre qui n’étaient pas en rapport avec le sport et ce qu’on exigeait de moi pour une carrière sportive donc… tout ça pour dire que je n’ai rien à faire là.
Et pourtant… l’ascenseur escalade les étages dans une lenteur angoissante, mes mains moites lissent sans interruption ma veste de costume bien trop ajustée par mon tailleur, mon anxiété va croissante et autant vous dire que toutes les insultes que je connais, je me les suis déjà lancé. Les chiffres cèdent la place à des nombres, les nombres à une destination, j’inspire lentement en m’adossant au miroir qui couvre la moitié d’une des parois de la boite de conserve, histoire de ne pas me regarder. Je n’ai rien à faire là. Je ne lui dois rien, je n’ai rien à prouver depuis des années, je ne suis pas un homme d’affaire et je n’ai jamais voulu le devenir. Je n’ai donc rien à faire là. Et je suis mort de trouille à l’idée de faire une connerie. Parce que c’est évident, hein : je suis en train de faire une connerie. Martial devrait être là, à ma place. Martial devrait reprendre en main Caesar Pharmaceutics. Martial ne risque pas de faire des erreurs irrécupérables, Martial est suffisamment intelligent pour parfaitement remplacer Papa, Martial est… Martial est absent. Et j’ai décidé de venir, j’ai décidé de maintenir l’entreprise à flots, j’ai décidé de la défendre contre les requins qui ont inévitablement surgi lorsqu’ils ont senti le sang de mon père. Maintenant que je suis là, il faut que j’assume. Une inspiration. L’ascenseur. Une expiration, les portes s’ouvrent et je décide d’oublier le doute qui m’étrangle, cette petite voix qui me chuchote que je ne suis qu’un incapable et que même si je veux bien faire, je vais faire pire que mieux. Il ne faut pas que je doute, il ne faut pas que je flanche. Il ne faut même pas que je tremble une seule seconde. Les hommes dans la vaste salle de réunion, la plupart me connaissent depuis mon enfance. Ils connaissent le mépris que me porte mon père, ils connaissent mes insultes, ils connaissent ma nullité, ils connaissent tout de moi. Et ils ont intérêt à se souvenir de mon nom, de mon obstination. Une inspiration. Je n’ai pas prévenu la secrétaire de mon père. Je n’ai même pas prévenu mon père. J’ai juste conscience que si je ne fais rien aujourd’hui… Caesar Pharmaceutics va échapper à son fondateur, et qu’il en est hors de question. J’ai juste arraché à mon père, à force de mensonges et de relations bâtie de toute pièce, une procuration. Par ce qu’il faut un Caesar décisionnaire, il faut une main de fer, il faut… il faut que je fasse illusion pendant un mois minimum. Juste un petit mois. Juste pour que rien n’ose détruire le travail d’une vie. Il faut que je sois assuré, inatteignable, il faut que je devienne mon père plus que jamais, il faut que… j’ouvre la porte dans un claquement, faisant sursauter les gros lards. « Bonjour. Je crois qu’il est l’heure de commencer. » En quelques pas, je rejoins le fauteuil où mon père régnait en maître lorsque Michel me trainait dans les couloirs. Il n’est pas là, aujourd’hui, je le remplace avec une boule d’émotions que je broie dans mon poids serré. Nonchalance, illusion. Mes yeux esquivent les directeurs financiers, les représentants des autres entreprises. Puis se posent sur chacun d’eux avec l’aplomb et la fureur glacée de mon père.
Ouais, toi, là, regarde-moi dans les yeux. Fais dans ton froc. J’ai vingt-sept ans, je ne connais rien aux affaires, rien à la finance, je suis la déception des Caesar mais… mais je pose sur la table la procuration signée de la main de mon père. Leur stupeur passée, je les sens prêt à prendre la parole pour me ridiculiser, m’humilier, me virer de là et me faire comprendre que puisque j’ai toujours clamé mon désintérêt pour l’entreprise, puisque j’ai toujours hurlé ma rébellion, alors que je retourne jouer à la baballe parce qu’il n’y a que là-bas que je vaux quelque chose. Hors de question : je leur coupe l’herbe sous le pied en plaquant mes paumes sur la table, me penchant vers eux sans m’asseoir. « Comme vous le savez, Hippolyte Caesar a été victime d’une attaque. Ses jours ne sont plus en danger Mensonge. L’enquête poursuit son cours pour déterminer les causes et le responsable de l’attaque, Mensonge. Et pendant toute la durée de son absence, je suis à la tête de Caesar Pharmaceutics. » Vérité issue d’un mensonge. Mon regard croise les yeux de Weston, la secrétaire de mon père, la seule qui pourrait éventuellement détruire tout ce que je suis en train de construire. J’aurais peut-être dû la prévenir. Mais maintenant c’est trop tard. Je repose mon regard sur la meuf qui… qui fait je ne sais pas quoi. Je crois qu’elle est à la tête du département de recherche et développement. Je crois. En fait je n’en sais rien, j’invente, j’improvise. Au moins, ma petite introduction les a calmés. A croire qu’avec mon anxiété transformée en ton sec et mes yeux qui les lancent des éclairs pour mieux masquer mes doutes, ils ont vu le fantôme d’Hippolyte Caesar. La bonne blague. Je pourrais presque l’entendre siffler d’une voix acide dans mon dos un sarcastique pour qui tu te prends, Marius ? Ce n’est pas un jeu qui manque de me déstabiliser. « Bon et ben… on commence ? » Je me mords la langue. « Je veux dire, vous allez rester muet où on a oublié de me prévenir que vous avez fait vœu de silence ? Toi, là…, dont j’ignore complètement les responsabilités, la fonction, le nom et la couleur du caleçon, … en dehors de l’absence de mon père, quel est l’ordre du jour ? »
Deux heures de réunion, deux heures de fatigue, de tension, d’écoute attentive et d’illusion. Je suis complètement dépassé. Vraiment. La seule chose que j’ai pour moi, c’est de savoir lire des chiffres et d’avoir vaguement pu suivre les données des rapports qu’on m’a filé. Et ils l’ont bien compris, les bâtards, parce qu’ils en ont joués. Des requins, des charognards, prêts à se jeter sur l’héritage d’Hippolyte Caesar à la moindre faiblesse. Et moi, je suis un chaton qui s’est jeté au milieu des hyènes dans l’espoir de les tenir en respect. Je me passe une main sur le visage. Qu’est-ce que je fous là, bordel, exactement ? « Weston ? » Au moins je connais son nom. Le conseil d’administration se casse, je retiens la secrétaire de mon père. Avachi dans le fauteuil, j’ébouriffe mes cheveux, que j’ai tenté de discipliner devant la glace ce matin. Mes doigts glissent à mon cou, desserrent la cravate. J’aurais dû m’en douter, j’ai dû faire pire que mieux. « Ferme la porte. » Je me mords la lèvre. J’ai envie de justifier ma présence, j’ai envie d’être certain qu’elle comprenne pourquoi je fais ça mais… mais je lui ai fait suffisamment de doigts d’honneur, j’ai suffisamment hurlé à mon père que je le détestais pour qu’elle ne me croie pas. Alors autant ne pas lui demander son avis. Parce que je sais bien ce qu’il se passe dans sa tête : elle doit être en train de me juger, de me détruire, de se moquer de moi ou, au mieux, de se faire la remarque que je n’ai vraiment rien de mon père, que je ne suis qu’un gosse pourri gâté qui joue au businessman en profitant de l’absence de Papa. J’ai envie de lui demander si je viens de sauver l’entreprise ou de l’achever. J’ai envie de lui demander si j’ai bien fait illusion. J’ai envie de… « Je sais ce que tu penses de moi. Mais le fait est que cette procuration… » Je fais glisser le papier dans sa direction. Un duplicata, hein, l’original est en sécurité chez moi histoire que personne ne le fasse disparaître, pas même mon père. « … me confie tous les pouvoirs décisionnaires de mon père. Donc tu vas devoir faire avec. Et m’expliquer les dossiers en cours. » Je me mords la lèvre, encore. « Et me présenter les gus qui étaient là. Les seuls noms que je leur connais, c’est gros lard et pétasse donc ça ne m’avance pas à grand-chose. »
Dernière édition par Marius Caesar le Lun 2 Mai 2016 - 23:27, édité 1 fois
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Sujet: Re: it's time to act like an adult (pv Poppy) Jeu 28 Avr 2016 - 2:18
it's time to act like an adult
— marius & poppy —
« Can you imagine a time when the truth ran free ? The birth of a song, the death of a dream. Closer to the edge... This never ending story Paid for with pride and fate. We all fall short of glory, Lost in our fate. no, I will never forget. I will never regret. I will live my life. » w/ 30secondstomars.
La réunion commence et Poppy est dans tous ses états. Les administrateurs présents se prennent déjà le bec sur des sujets pas très importants. La Weston n'est que l'assistante du directeur, elle ne peut absolument rien faire pour les rappeler à l'ordre alors, elle les laisse faire et s'occupe en silence de quelques dossiers dans un coin de la pièce. C'est le mieux qu'elle puisse faire dans une telle situation. Et prier pour que son patron se remette vite et qu'il reprenne le contrôle. En attendant, elle fait son possible pour limiter les dégâts même si le Caesar lui a dit de prendre congé avant son attaque. Elle a pris sur elle de revenir, de s'assurer d'garder un oeil sur la compagnie. Elle ne pourrait jamais prendre congé de toute façon, elle aime son boulot. Elle aime s'assurer que tout est en ordre. Puis ça lui change les idées de bûcher sur un problème d'organisation. La porte s'ouvre d'un coup et elle n'y fait pas vraiment attention mais bientôt toute la pièce semble captivée par le nouveau venu. La musicienne lève le nez de ses papiers et aperçoit Marius venir s'installer à la place habituelle de son père. Prenant la parole, il annonce comme ça, sur le coup qu'il prend en charge Caesar Pharmaceutics. Le temps de l'absence de son paternel.
Poppy fronce les sourcils et abandonne ses dossiers pour croiser les bras sur sa poitrine. Elle ne comprend pas. Personne ne lui en a parlé. Elle déteste ne pas être mise au courant. Et surtout, elle ne comprend pas pourquoi soudain le fils rebelle veut s'impliquer. Il a toujours clairement assuré qu'il ne travaillerait jamais pour la compagnie. C'est un sportif, pas un homme d'affaires. Les autres membres de la réunion semblent autant surpris qu'elle mais personne ne proteste et bientôt la réunion continue avec Marius pour superviser maladroitement le tout. Poppy reste en retrait tout ce temps-là. Tant qu'on ne lui adresse pas la parole, elle ne s'en mêle pas. Les dossiers défilent et elle passe son temps à observer comment Marius s'en sort avec tout ça. Il est visiblement dépassé mais il ne fait pas d'erreur monumentale. Autrement, elle serait intervenue. Une fois les affaires mises en ordre, Poppy a véritablement hâte de se lever et partir. Aller travailler tranquillement à son bureau et de ne plus se faire déranger. Sauf que ce n'est pas dans les plans du jeune homme qui l'interpelle. Poppy se retourne et l'observe en silence pendant que le reste des personnes présentes quittent la salle. « Ferme la porte. » Elle grince des dents. Elle n'aime vraiment pas recevoir un ordre ainsi. Surtout venant de Marius. Il est un peu plus jeune qu'elle. Il n'y connait rien à la compagnie. Il n'a pas d'ordres à lui donner mais elle s'exécute malgré tout.
Fermer une porte, ce n'est pas bien compliqué, elle ne va pas protester pour ça. Elle revient ensuite vers lui et s'arrête face à lui. « Je sais ce que tu penses de moi. Mais le fait est que cette procuration… » Elle jette un coup d'oeil au papier qu'il fait glisser vers elle. Tout paraît en règle... un document qui explique qu'il prend tout en charge de façon intérim. La blonde fronce les sourcils. Elle connaît la réputation de Marius, a fait l'objet de nombreuses de ses grossièretés pour absolument aucune raison sauf le fait de travailler pour son père... Quel idiot a pensé que ce serait une bonne idée de confier la compagnie à ce grand gamin ? Elle ne finit même pas de lire la procuration et relève le nez sur le jeune homme qui prend ses aises à la grande table de réunion. « … me confie tous les pouvoirs décisionnaires de mon père. Donc tu vas devoir faire avec. Et m’expliquer les dossiers en cours. Et me présenter les gus qui étaient là. Les seuls noms que je leur connais, c’est gros lard et pétasse donc ça ne m’avance pas à grand-chose. » Parfois, elle se demande vraiment ce qui a pu se passer pour que Marius finisse aussi mal élevé que ça. Il se croit vraiment tout permis, c'est pas croyable.
Poppy soupire. Secoue la tête de gauche à droite avec exaspération. « Tu es conscient que si tu veux remplacer ton père, faut travailler et au moins connaître le nom des gens du conseil. Un minimum. » Pas agir avec autant de nonchalance et d'irrespect. Il faut savoir se tenir. Certes, Hippolyte n'est pas le plus facile des patrons mais au moins, il prend l'entreprise au sérieux et ça se voit. Marius, elle n'en est pas si certaine. « Est-ce que tu fais ça pour agacer ton père ? Parce que si c'est ça, tu peux passer ton chemin. Je connais assez bien les dossiers et les gens de la compagnie pour m'occuper de ses tâches en attendant. » C'est moi qui était là pour le sauver. C'est moi qui a appelé les secours. Et toi t'étais où ? En train de t'amuser avec ta dernière conquête ? Poppy se pince les lèvres. Ce n'est pas le temps de se disputer avec lui. S'il tient vraiment à aider la compagnie de son père, elle se fera un plaisir de l'aider mais si ce n'est encore qu'une de ses gamineries, elle ne veut pas en prendre partie. Il n'aura qu'à s'arranger tout seul. « Le gros lard, c'était Albert Johnson, un partenaire pharmaceutique qu'il faut garder à l'oeil. Ton père ne l'aime pas beaucoup. » Alors moi non plus... « La connasse... c'est une autre histoire. Maria Campbell. Elle est la directrice du département des avancements technologiques. Elle, c'est ta meilleure amie, tu as compris ? Sans elle et son brillant cerveau, la compagnie aurait bien de la difficulté à s'en remettre. Alors ne l'appelle plus connasse. » À la limite, Poppy est prête à endurer les conneries de Marius mais elle espère seulement qu'il saura se tenir devant les autres.
Se sacrifier pour la cause... c'est ce qu'elle sait faire de mieux. « Y'a beaucoup d'autres noms à retenir. Je t'enverrai un dossier avec la liste de toutes les personnes importantes avec leur photo et un bref résumé. » C'est pas comme si elle n'a que ça à faire... Sur ses quelques mots, elle se penche sur la longue table et survole quelques dossiers. Elle capte quelques mots, quelques situations en ignorant totalement Marius de l'autre côté. Elle ne sait pas quand quoi elle s'embarque à devoir travailler avec lui le temps que son père se remette mais elle n'a pas trop le choix. Après une longue minute de silence, elle lève les yeux sur le blond et l'observe un instant sans rien dire. Elle meurt d'envie de lui demander comment va Hippolyte. Elle voudrait lui rendre visite plus souvent mais avec toutes les emmerdes qui se présente ici, elle n'a pas eu le temps. Sans parler de Dante qui est revenu lui bouffer la plupart de ses temps libres en l'obligeant à obéir à ses moindres désirs. « Est-ce qu'Hippolyte va bien ? Il se souvient de ce qui s'est passé ? » Elle se rend compte qu'elle n'a pas vraiment eu l'occasion de parler à Marius sauf quand il passait en coup de vent devant elle pour aller engueuler son père. Elle n'a donc pas eu l'occasion de se renseigner sur ce qui se passe depuis l'attaque. « Il a dit que tu devais faire attention. Tu n'as pas eu d'ennuis, j'espère. » Elle a beau ne pas être la plus grande fan de Marius. De le trouver immature et insolent, elle ne lui souhaite pas de mal. Elle ne le déteste pas, elle se porte mieux quand il ne vient pas lui faire des doigts d'honneur gratuitement. Pour rien au monde elle ne voudrait qu'il lui arrive la même chose qu'à son père. Hippolyte avait l'air très inquiet pour lui et son frère quand il se vidait de son sang. Alors d'une certaine manière, elle se fait un devoir de s'assurer que rien n'arrive au jeune homme.
Dernière édition par Poppy Weston le Sam 21 Mai 2016 - 1:03, édité 1 fois
Marius Caesar
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Sujet: Re: it's time to act like an adult (pv Poppy) Lun 2 Mai 2016 - 23:26
It's time to act like an adult
Poppy & Marius
Je n’ai rien à faire ici. Et je le sais. Pourtant, je m’impose, pourtant je me revêts de cette assurance factice qui trompe tout le monde. Pourtant aussi, je souris légèrement, je deviens mon père dans la plus parfaite imitation, pourtant je fais illusion. J’espère juste faire assez illusion pour ne pas tout réduire à néant par mon incapacité, pour ne pas tout détruire en tentant de bien faire. La réunion commence, la réunion s’étend, je continue à faire illusion. Comme je peux. Avec l’énergie du désespoir. Chaque intervention est une preuve supplémentaire que je suis dépassé, vraiment. Que même si je tente de bien faire… je me raccroche aux chiffres, je me raccroche aux nombres, je me raccroche aux zéros et à ce que mon frère m’a toujours dit sans parvenir à m’en convaincre : tu n’es pas idiot, Marius. Je ne suis peut être pas idiot, mais je me sens stupide. Angoissé. Et lorsque la réunion se termine, lorsque je congédie le conseil d’administration, c’est une migraine qui s’étire sur mes tempes, c’est une douleur qui me prend au côté et me force à m’asseoir. Un peu plus et je déboutonnerais ma chemise pour avoir un aperçu de mon torse. Un peu plus, et je serais déjà en train de m’enfuir, de partir courir alors que tous les médecins me le déconseillent ; un peu plus et je serais déjà dans une salle de sport à frapper dans un sac de sable jusqu’à m’écrouler d’épuisement. Mais non.
Mais non, il faut que je la retienne. Pour savoir. Pour comprendre. Pour progresser. Parce que je me suis foutu comme un idiot dans cette merde jusqu’au cou et qu’il est hors de question que je n’assume pas la responsabilité de mes choix. J’ai décidé de faire signer cette procuration à mon père, il est hors de question que j’agisse comme un gamin capricieux et que je la jette au loin sous prétexte que c’est trop dur, que c’est trop lourd. J’assume. Et c’est ce qui me retient aussi de quêter chez Poppy le moindre réconfort, de lui demander à quel point c’était désastreux. Il est temps d’agir comme un adulte. Il est temps de prendre mes responsabilités. Je sais très bien ce qu’elle pense de moi et je sais aussi que tenter de la faire changer d’avis, ce serait contredire des mois de comportement insultant de ma part. En même temps… c’est trop tard et je ne regrette pas le côté puéril de mes provocations. J’ai de quoi en vouloir à mon père. Mais aujourd’hui… elle ne peut pas me jeter. La procuration que je glisse dans sa direction, et qu’elle récupère, est incontestable et de ce qu’il y a de plus réglementaire. En quelques phrases, je remets les choses dans leur contexte. Mon assurance, je la tiens de mon père. Mon franc-parler… de mon père encore. Je lui ressemble plus, bien plus que ce que je ne l’accepterai jamais. Et dans ce bâtiment, c’est pire encore. Dès que je mets un pied ici, je deviens le fils de mon père. Le fils qui le hait, le fils qui lu fait honte. Mais son fils. Jusque dans ses mimiques, jusque dans son attitude. Son arrogance. « Tu es conscient que si tu veux remplacer ton père, faut travailler et au moins connaître le nom des gens du conseil. Un minimum. Est-ce que tu fais ça pour agacer ton père ? » Je l’interromps, tente de la couper dans un murmure sifflé entre mes deux. « N’essaye même pas d’aller sur ce terrain. » « Parce que si c'est ça, tu peux passer ton chemin. Je connais assez bien les dossiers et les gens de la compagnie pour m'occuper de ses tâches en attendant. » Oh non… ce n’est pas une bonne idée de dégringoler sur ce terrain là. Mon poing se crispe, dans une impulsivité qui rompt totalement l’illusion qui pourrait subsister. Lorsque je pose un pied dans l’immeuble, c’est pour embrasser mon héritage. Mais il suffit que l’on me provoque pour que cet héritage, justement, se fissure sous ma véritable nature. « Blablablabla, cause toujours tu m’intéresses » Mes coudes s’appuient sur la table. Je fixe Poppy. « Mes raisons ne concernent que moi. Tous les pouvoirs décisionnaires, ça inclut aussi le droit de te virer, donc je te conseille de garder en mémoire que tu as parfois le droit de te taire, aussi. »
Je la vois pincer les lèvres mais il est hors de question que ce soit moi qui baisse les yeux. Et malgré mon bavardage notoire, malgré mon incapacité à me taire et mon hyperactivité, je me contrains au calme pour mieux attendre les réponses à mes questions. Ça prendra le temps que ça prendra, mais elle m’obéira et on aidera Caesar Pharmaceutics à s’en sortir. Ou alors je la virerai et j’essayerai de faire les choses du mieux que je pourrai. « Le gros lard, c'était Albert Johnson, un partenaire pharmaceutique qu'il faut garder à l'oeil. Ton père ne l'aime pas beaucoup. » Okay, donc ce mec sera mon meilleur ami. Ou voudra l’être en se basant sur mon animosité affichée pour mon père. A garder à l’œil et à foutre dans ma poche. « La connasse... c'est une autre histoire. Maria Campbell. Elle est la directrice du département des avancements technologiques. Elle, c'est ta meilleure amie, tu as compris ? Sans elle et son brillant cerveau, la compagnie aurait bien de la difficulté à s'en remettre. Alors ne l'appelle plus connasse. » Okay. J’acquiesce lentement. Maria Campbell = Connasse, ça me va bien. « À la base, j’avais proposé pétasse mais connaisse, je note, ça sonne bien aussi. » Je lui fais un petit sourire moqueur, provoquant. Forcé. Elle ne me prend pas au sérieux, sans grand surprise. « Y'a beaucoup d'autres noms à retenir. Je t'enverrai un dossier avec la liste de toutes les personnes importantes avec leur photo et un bref résumé. » J’hausse les épaules, avant de faire pivoter le siège et de me lever, histoire de me dégourdir les jambes, mains enfoncées dans mes poches. J’entendrais presque la voix cinglante de mon père. Tiens toi bien, ne mets pas les mains tes poches, va te coiffer, tiens toi bien, regarde moi quand je te parle. Je sors une main, pour la passer sur mon visage et la laisser retomber et tapoter ma cuisse. Du coin de l’œil, j’observe Poppy faire comme si je n’existais pas. C’est marrant, j’ai comme une impression de déjà-vu. Sauf que… et bien comme d’habitude… « Qu’est-ce.. » « Est-ce qu'Hippolyte va bien ? Il se souvient de ce qui s'est passé ? » L’emploi du prénom me fait l’effet d’une gifle. Sonné, je m’immobilise dans mes cent-pas, je me contente juste de la regarder. « Pardon ? » « Il a dit que tu devais faire attention. Tu n'as pas eu d'ennuis, j'espère. »
Je lève les yeux au ciel. « C’est ça, et il t’a dit aussi de me border le soir et de venir me chanter des comptines ? » Mon sarcasme n’a rien à faire là, je sais. Mais… mais c’est la fatigue qui parle, la tension et… et c’est complètement contre-productif. Si je veux vraiment changer, si je veux commencer à devenir le fils que j’ai peint à mon père, il faut que je commencer maintenant. Et maintenant ça passe par… par cesser de parler avant de réfléchir. « Désolé, fais pas attention à ce que je dis, je suis fatigué. » Ma main quitte ma cuisse, ébouriffe machinalement mes mèches blondes, dégringole dans ma barbe. « Les médecins essayent encore d’identifier le poison, donc… tant que ce ne sera pas fait, il ne sortira pas. Il ne va pas bien, Poppy. » Ma voix se craquèle, je m’enfuis de l’autre côté de la salle de réunion, vers la machine à café que j’active dans des mouvements automatiques. D’ailleurs, par réflexe, je prépare une deuxième tasse. La machine fait un bruit assourdissant, je m’appuie à la table pour tourner le dos au café et regarder la secrétaire de mon père. Plutôt mignonne. Mais j’ai pas le cœur à ça. « Je ne veux pas que Caesar Pharmaceutics tombe. C’est un empire. Un empire que je méprise, un empire que j’ai essayé de faire s’écrouler plus d’une fois. » Mes yeux glissent le long des murs, montent vers le plafond, dérapent en direction du couloir pour traverser la salle et se planter sur les larges vitres qui nous montrent Radcliff. « Mais c’est son empire. L’œuvre de sa vie, bien plus que moi. J’imagine que théoriquement, ce sont les enfants d’un homme qui sont sa plus grande réussite, qui montrent quel homme il était… il est. Mais quand tu me regardes, tu ne vois pas mon père. Tu ne vois que ses échecs. Alors que cette entreprise… » Mes mains appuyées à la table la quittent pour désigner d’un geste large la salle de réunion, comme une métonymie du bâtiment et de l’entreprise. « Je ne veux pas que mon père se souvienne un jour de qui il est et qu’il ne trouve que des ruines. Que tu me croies ou non, j’en ai rien à foutre. » Je récupère les deux cafés, reviens vers le bureau de mon père et en fais glisser un en direction de la secrétaire. « J’en ai même rien à carrer que tu me détestes, en fait, désolé pour ta sensibilité ou ton ego. Tout ce que je veux, c’est faire des doigts d’honneur aux bâtards qui voudront en profiter pour saper les actions de la boite, tout ce que je veux, c’est cracher aux visages des petits fils de pute qui essayeront d’atteindre mon père en sabrant les fondations de l’entreprise. » Je la regarde, plus sérieux que jamais. « Du coup, tu es avec moi ou contre moi ? »
Sujet: Re: it's time to act like an adult (pv Poppy) Ven 20 Mai 2016 - 2:06
it's time to act like an adult
— marius & poppy —
« Can you imagine a time when the truth ran free ? The birth of a song, the death of a dream. Closer to the edge... This never ending story Paid for with pride and fate. We all fall short of glory, Lost in our fate. no, I will never forget. I will never regret. I will live my life. » w/ 30secondstomars.
Ce qu'elle a pu lui faire pour qu'il soit si immature avec elle ? Ce sera toujours un mystère aux yeux de la Weston. C'est probablement simplement le fait d'être l'employée fidèle de son père et une façon de plus de montrer à quel point ils ne sont pas sur le même terrain lui et le quinquagénaire. La pauvre Poppy ne voit pas en quoi cela peut la concerner mais après avoir reçu un nombre incalculable de doigts d'honneur de la part du blond, elle a arrêté de se poser des questions. Ses raisons sont les siennes, elle ne va certainement pas lui courir après pour avoir des explications ou des excuses. « Blablablabla, cause toujours tu m’intéresses. Mes raisons ne concernent que moi. Tous les pouvoirs décisionnaires, ça inclut aussi le droit de te virer, donc je te conseille de garder en mémoire que tu as parfois le droit de te taire, aussi. » Poppy l'observe de la tête aux pieds. Pour qui il se prend de lui parler comme ça ? Elle ne cherchait pas à l'insulter, elle voulait juste être certaine qu'il prend toute cette histoire au sérieux. Heureusement pour lui, pour elle, Poppy n'est pas du genre à s'emporter pour un rien. En réalité, elle s'emporte rarement. Elle n'est pas du genre à laisser la rage se distiller dans ses veines. C'est qu'elle a une tête sur les épaules la Poppy, et qu'elle ne laisse pas ses émotions prendre le dessus. Bien qu'impulsive, ça ne fait pas d'elle une jeune femme susceptible. « T'es pas obligé d'être désagréable, Marius. » La jolie blonde essaie ensuite de lui résumer rapidement la situation alors que Marius se met à faire les cents pas. Évidemment, comme elle s'y attend, il lance une ou deux répliques totalement immatures pour rester avec le caractère du gamin difficile mais Poppy ne s'y attarde pas.
S'il veut rire à ce genre d'insultes, il est le seul. Peut-être que c'est elle qui n'a pas de sens de l'humour ? Pour tout ce qu'elle en sait. Elle ne voit simplement pas l'intérêt qu'il a à continuer de jouer le mec vexant. Elle s'attarde ensuite aux dossiers sans prêter plus attention au jeune homme pour finalement demander comment va Hippolyte. La question semble prendre de court Marius qui s'enfuit aussitôt vers la machine à café. La jolie blonde reste patiente, ne cherche pas à brusquer son vis-à-vis. Elle sait qu'il a une relation difficile avec son père bien qu'elle n'en connaît pas les détails mais il lui paraît alors évident que malgré tous excès, le fils rebelle tient à son père. Il se permet bien sûr une réplique pleine d'ironie avant de faire les cafés. « C’est ça, et il t’a dit aussi de me border le soir et de venir me chanter des comptines ? » Contre toutes attentes, les paroles du jeune homme étirent les lèvres de Poppy en un léger sourire. S'imaginer en train de border Marius, un grand garçon d'à peine deux en plus jeune qu'elle lui paraît être une vision des plus farfelues. Sans parler de lui chanter une comptine. Elle mourrait de honte si ça devait arriver. Heureusement, ce n'est pas de sans qu'Hippolyte parlait quand il a demandé à la jeune secrétaire de prévenir Marius et son frère. Bien vite, et pour la plus grande surprise de la Weston, le jeune homme se reprend. « Désolé, fais pas attention à ce que je dis, je suis fatigué. Les médecins essayent encore d’identifier le poison, donc… tant que ce ne sera pas fait, il ne sortira pas. Il ne va pas bien, Poppy. » Tout de suite, Poppy perd son sourire.
Elle déteste savoir son patron entre la vie et la mort... pas seulement parce que c'est son patron. Ce qu'elle prend pour de l'admiration depuis de nombreuses semaines déjà ressemble de plus en plus à un béguin. Évidemment, elle essaie de se convaincre du contraire mais au final, de se dire qu'il a failli mourir ne l'aide pas à passer à autre chose. Au contraire, elle ne cesse de se dire que si elle ne l'avait pas trouvé, il serait mort. Et ne plus l'avoir dans sa vie le Caesar, c'était une pensée infiniment désagréable. « Je ne veux pas que Caesar Pharmaceutics tombe. C’est un empire. Un empire que je méprise, un empire que j’ai essayé de faire s’écrouler plus d’une fois. » Après il s'étonnait un peu plus tôt pourquoi elle lui demandait s'il prenait ça au sérieux. Tout ce qu'il lui dit là, elle en est parfaitement consciente. « Mais c’est son empire. L’œuvre de sa vie, bien plus que moi. J’imagine que théoriquement, ce sont les enfants d’un homme qui sont sa plus grande réussite, qui montrent quel homme il était… il est. Mais quand tu me regardes, tu ne vois pas mon père. Tu ne vois que ses échecs. Alors que cette entreprise… Je ne veux pas que mon père se souvienne un jour de qui il est et qu’il ne trouve que des ruines. Que tu me croies ou non, j’en ai rien à foutre. » Oui elle le croit. Elle a bien conscience que même s'il n'a jamais rien voulu savoir de l'entreprise, ça ne veut pas dire qu'il peut changer. Qu'il peut vouloir sauver ce qu'il en reste pendant que son père est à l'hôpital.
Et contrairement à ce qu'il peut penser d'elle, elle ne le juge pas. C'est vrai, elle n'aime pas se faire envoyer des doigts d'honneur sans raison et qu'elle le trouve irrespectueux pour ça mais elle n'est pas rancunière. S'il est la pour les raisons qu'il avance, les bonnes raisons, elle fiche pas mal du passé. « J’en ai même rien à carrer que tu me détestes, en fait, désolé pour ta sensibilité ou ton ego. Tout ce que je veux, c’est faire des doigts d’honneur aux bâtards qui voudront en profiter pour saper les actions de la boite, tout ce que je veux, c’est cracher aux visages des petits fils de pute qui essayeront d’atteindre mon père en sabrant les fondations de l’entreprise. Du coup, tu es avec moi ou contre moi ? » Le vocabulaire... coloré du jeune homme vient un peu perturber la Weston mais elle essaie de ne rien en laisser paraître. De toute façon, tel père, tel fils. Il n'était pas rare qu'Hippolyte utilise ce genre de - jolis - mots pour discuter d'un sujet qui le dérange dans l'entreprise. Au fond, ils se ressemblent plus qu'ils ne peuvent le croire les deux hommes et au moins ainsi, Poppy n'en sera que moins dépayser. « J'aime pas me faire insulter, me faire prendre pour une conne comme toute personne normalement constituée. Je ne veux pas voir l'entreprise se faire bouffer par des requins non plus. » Elle marque une pause pour attraper le café qu'il lui tend. Avant de croiser son regard sérieux et de le fixer sans ciller. « Merci...Écoute je ne te déteste pas, ok. Contrairement à ce que tu penses, je ne suis vraiment pas ton ennemie, Marius. Je suis avec toi, la question ne se pose même pas. » Elle porte la tasse à ses lèvres et souffle sur le liquide brûlant sans le quitter des yeux.
Elle est sérieuse elle aussi. Le passé, c'est derrière eux elle n'y pense même plus. Il n'a même pas besoin de s'excuser de la manière odieuse qu'il la traitait, elle s'en fiche tant qu'ils peuvent avancer. Quelque part, elle sait que ce sera peut-être difficile au début car elle devra s'habituer aux frasques du jeune homme mais elle se doute que ça ne pourra jamais être pire que son père. Poppy et les deux hommes Caesar, à force, elle en aura de l'expérience avec cette famille... « C'est sûr que ce serait plus facile si tu pouvais oublier les doigts d'honneur. C'est pas très agréable. » Elle lui dit gentiment, sans provocation aucune se permettant même un timide sourire. Elle veut seulement avoir une conversation censée avec lui pour une fois. « Et... et je sais que c'est pas mes affaires mais je tiens seulement à te dire que quand j'ai trouvé ton père, tout ce qu'il faisait, c'était parler de toi. De ton frère. Alors j'étais sérieuse quand je te disais de faire attention tantôt. Tu fais ce que tu veux de cette information, je pensais seulement que tu devais le savoir. » Poppy ne sait pas si elle doit lui dire tout ce qu'Hippolyte a pu lui confier pendant qu'il croyait mourir. Qu'il était désolé, qu'il aurait voulu lui donner autre chose que du mépris. Mais bon vu la façon dont il a réagi plus tôt, elle n'ose pas continuer. Maintenant que son patron est plus ou moins tiré d'affaires, il pourra régler la question avec lui... s'il retrouve la mémoire. « Oh et voici mon numéro de portable, si tu as besoin d'aide, une question sur l'entreprise ou quoi que ce soit. » Sur ce, elle attrape un papier et un crayon pour inscrire son numéro sur le bout de papier et le tend ensuite à Marius.
Marius Caesar
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Sujet: Re: it's time to act like an adult (pv Poppy) Sam 28 Mai 2016 - 23:25
It's time to act like an adult
Poppy & Marius
Je suis typiquement le genre de mec qu’on ne peut physiquement pas supporter plus de dix minutes. Et je le sais. En même temps… en général, les gens me trouvent sympas cinq minutes, puis de plus en plus fatiguant ou lourd, au fur et à mesure que je parle, que je raconte des conneries, au fur et à mesure qu’ils se rendent compte que derrière les boucles blondes, il y a une stupidité à faire pâlir de jalousie le plus con des candidats de téléréalité. Ce qui n’est pas peu dire. Bref, je sais que je suis typiquement le genre de mec qui agace par ses manières, par ses propos, par son vocabulaire, par son agitation. Et… et alors ? Et alors, je m’y suis fait, par la force des choses, parce que je suis incapable de changer suffisamment mon caractère pour devenir quelqu’un d’autre. Et que cette illusion que je me suis mis en tête de maintenir face à mon père est trop pénible pour que j’aie réellement envie de jouer à ça H24 avec tout le monde. Donc que Poppy ne puisse pas me sacquer ou qu’elle me déteste carrément : je n’en ai strictement rien à faire. C’est son problème, pas le mien, j’ai trop d’autres choses à penser. Le seul truc que j’exige qu’elle comprenne, c’est qu’aussi con, immature, irresponsable et décevant que je puisse être, légalement, je suis actuellement le remplaçant de mon père et elle va devoir faire avec. « T'es pas obligé d'être désagréable, Marius. » J’hausse un sourcil. « J’suis pas obligé mais j’en ai pas l’interdiction non plus » je crache entre mes dents, incapable de la laisser avoir le dernier mot là-dessus. Qu’elle n’essaye pas de jouer à ce petit jeu, j’ai des années d’expérience et de lutte face à mon père derrière moi, ce n’est pas elle qui va me faire céder, pas elle ni son petit air pincé et mécontent.
Dans tous les cas, j’ai ce que je veux parce qu’elle me décrit brièvement les principaux crétins que je vais devoir gérer. J’ai pas besoin de dissertation pour comprendre que Bebert va potentiellement vouloir être mon allié et que Campbell va être ma pire ennemie et non ma meilleure amie. C’est bien simple : il faut que je parte du principe que ceux qui détestent mon père vont vouloir m’avoir dans leur poche et que ceux qui l’adorent… doivent me mépriser, me détester et vouloir me faire tomber. D’autres noms à retenir, photo, résumé, dossier… le simple fait de devoir bosser et bouquiner autre chose qu’un comics ou un livre de maths me donne envie de vomir et je compense en me dégourdissant les jambes. Mais qu’est ce que je fous là, hein ? Je débarque, je prends mes aises, j’essaye d’être une pâle copie de mon paternel, je me vautre dans ma connerie et mon incapacité, je… j’ai juste tellement envie de rentrer me réfugier dans mon appart’ pour jouer aux legos que je me demande pourquoi je ne le fais pas. De toute manière, décevoir une énième fois mon père ne devrait pas me chagriner, j’en ai l’habitude. Mais… mais toujours ce mais. Il faut que je me tienne à ma décision. Que j’assume, que j’aille jusqu’au bout. Ce n’est pas parce que je suis habitué à l’échec que j’aime ça, ce n’est pas parce que j’ai l’habitude d’échouer que je vais lâcher prise à la moindre difficulté. Je n’ai rien à foutre là : soit. Je n’ai aucune formation et encore moins l’intellect pour gérer une entreprise : soit. Mais je peux simuler. Et Weston, puisqu’elle a un peu d’expérience avec les Caesar… puisque de toute évidence, elle apprécie suffisamment mon père pour oser l’appeler par son prénom… il faut que j’agisse comme un adulte, responsable, que je mette de côté et mon immaturité, et ma susceptibilité, il faut que je commence dès maintenant à me comporter comme celui que je suis supposé être. Supposé… Désolé, ce n’est pas que ça m’écorche la gueule, c’est que ça sonne trop vrai pour être vrai. Si je suis désolé ? Bien sûr que je le suis. Mais… je ne sais pas trop. Est-ce que mon père s’excuse comme ça pour ses moindres sautes d’humeur ? Est-ce que mon père… Le bruit de la machine à café a le mérite d’occuper suffisamment mes pensées pour que j’arrive à faire un peu le point. Miracle. Il ne va pas bien. Oh que non, mon père ne va pas bien. Je prends sur moi pour lui expliquer pourquoi est ce que je m’amuse à jouer au pingouin. Mon père me l’a dit lui-même : je suis son plus gros échec. Il est hors de question que je perde cette place d’honneur en faveur de son empire, de cette abomination financière qui m’a volée mon père, ou plutôt qui lui a servi de refuge face à mon hyperactivité provocante et insultante ; je ne sais pas trop. Et je n’en ai strictement rien à carrer que Poppy me déteste ou autre, je n’en ai rien à carrer que les actionnaires me détestent : la seule chose que je veux, c’est que mon père m’aime un peu. Quelque chose dans le genre. Alors, Weston ? Je suis sérieux, très sérieux. Es-tu avec ou contre moi ? « J'aime pas me faire insulter, me faire prendre pour une conne comme toute personne normalement constituée. Je ne veux pas voir l'entreprise se faire bouffer par des requins non plus. » Je lui tends une tasse de café. Et je la regarde dans les yeux sans ciller, sans flancher. « Merci...Écoute je ne te déteste pas, ok. Contrairement à ce que tu penses, je ne suis vraiment pas ton ennemie, Marius. Je suis avec toi, la question ne se pose même pas. » J’hausse les épaules. Il faut croire que ça va devenir un running gag, ce je ne te déteste pas auquel j’ai du mal à croire. « C'est sûr que ce serait plus facile si tu pouvais oublier les doigts d'honneur. C'est pas très agréable. » A nouveau, j’hausse les épaules en jouant avec ma tasse de café, pas vraiment décidé à la boire. « Comme tu veux. » Je réfléchis. Ce qui me fait taire, miraculeusement. « Et... et je sais que c'est pas mes affaires mais je tiens seulement à te dire que quand j'ai trouvé ton père, tout ce qu'il faisait, c'était parler de toi. De ton frère. Alors j'étais sérieuse quand je te disais de faire attention tantôt. Tu fais ce que tu veux de cette information, je pensais seulement que tu devais le savoir. » Un frisson, je ferme les yeux. Quand j’ai trouvé ton père. L’angoisse qui m’a saisi lorsque l’hôpital m’a appelé me frapper à nouveau de plein fouet. L’angoisse et la panique de le voir mourir, de le sentir mourir, de le sentir faire un arrêt cardiaque, de le voir faire un arrêt cardiaque. Je n’ai pas envie de parler de ça même si je meurs d’envie de savoir très exactement ce que mon père a pu lui dire. Et en même temps, j’ai peur de savoir ce qu’il a pu… « Oh et voici mon numéro de portable, si tu as besoin d'aide, une question sur l'entreprise ou quoi que ce soit. » Son mouvement, son changement de sujet me permet de me raccrocher à un changement de conversation, je secoue la tête pour tirer une chaise, m’y asseoir et vider ma tasse de café d’une seule traite avant d’attraper le morceau de papier qu’elle me tend. Numéro de téléphone : c’est chouette, ce sont des chiffres, ça je connais. Et puis… « C’est marrant, en général, quand une fille me donne son numéro, c’est pas pour répondre à mes questions sur la gestion d’une entreprise… » J’ai un petit sourire narquois, symbole du vrai Marius, symbole aussi de ma tentative de retrouver un peu de stabilité, de me raccrocher à quelque chose de connu et de tangible. Je plie le papier, le fous dans ma poche avant de me mordre la lèvre. Et de me relever. Marius, incapable de rester posé plus d’une minute. Ça a toujours eu le don d’énerver mon père. Lui, capable de rester assis des heures à un bureau ou dans un fauteuil avec ses journaux à la con, moi, avec ce besoin constant de me dégourdir les jambes, de me dépenser, d’évacuer ma nervosité… j’attrape l’un des rapports qu’on m’a filé au début de la réunion et qu’ils ont commenté avec un sourire narquois en voyant bien que je ne captais pas grand-chose. « Bon, explique moi la routine de Papa… enfin… de mon père, quoi. Il y a dix ans, il avait toujours une putain de réunion tous les mardi matin, pendant toute la matinée, c’est toujours le cas ? » Je le sais, parce que j’avais tenté de l’appeler après avoir réussi à changer pour la énième fois sa sonnerie et le ridiculiser en réunion. J’ai du tester pas mal de trucs, des bandes sons de vidéos pornos à des génériques de pub en passant par des chansons bien débiles.
Est-ce que ça va être ça pendant des mois ? Est-ce que mes seules connaissances de l’entreprise viennent principalement des observations que j’ai pu faire quand j’étais encore mineur pour emmerder de la meilleure façon possible mon paternel ? Mon soupir est foutrement éloquent. « C’est quoi ce contrat ? Je veux dire… » Je feuillette les feuilles du rapport, pas du contrat, sans beaucoup plus les comprendre que tout à l’heure. « Tu comprends un peu ce qu’il y a écrit dessus ? Tout le côté chimie et médecine, je sais que je peux laisser tomber, mais au niveau des comparaisons de coût de production et des essais cliniques et tout,… » Je me concentre sur les nombres. « Ca n’a pas l’air très au point, non ? Niveau ratio, facteurs de risque, tout ça… » Je soupire, encore. Sans cesser de déambuler dans la salle de réunion. « Qu’est ce qu’il fait, Papa, dans ce genre de situation ? Il se pose, il potasse ça et il annote de remarques intelligentes j’imagine ? » Personnellement, la seule chose que ça m’inspire, c’est un mec au bout d’une corde donc…