“ Fate be changed, look inside, mend the bond torn by pride ”

Elle a vu sa famille se déchirer. Elle a vu sa petite soeur partir loin d'eux et elle n'a rien fait. La pire erreur de sa vie. Trop occupée à suivre ses études. Trop centrée sur elle-même. Son père est fier, sa mère aussi. Elle a réussi ses études avec brio. Elle est leur fille parfaite, celle qui ne fait aucune erreur et qui leur obéit aux doigts et à l'oeil. Mais quelque part, elle se demande où est sa soeur. Sans Alice, la famille est brisée et ne sera jamais complète. La blonde avait eu beau se voiler la face toutes ses années, ses parents tentant le plus possible de ne jamais aborder le prénom d'Alice. Quand l'aînée posait des questions, on lui disait de se taire, de ne pas se préoccuper de toute cela. Que sa soeur était peut-être morte à l'autre bout du monde pour tout ce qu'ils en savaient. Oh, et pourtant, ils savaient. Et au bout d'un moment, la jeune femme en avait eu assez. Assez d'être l'enfant modèle, celle qui n'a pas suivi sa passion de la musique pour faire ses études en biologie comme papa et maman lui avait ordonné. À se présenter à la messe tous les dimanches vêtues de ses plus beaux habits. Pour en arriver où au juste ? Avec un mal de vivre, regrettant tous ses choix jusqu'à maintenant ou bien son inaction face à la famille qui se désintégrait lentement. Non, comme Alice, la jolie blonde en avait assez. Elle venait de recevoir son diplôme et ses parents étaient dans le salon en train de l'encadrer et l'afficher fièrement sur le mur. Poppy, elle, elle était dans sa chambre en train de faire ses valises. Elle ne savait pas où elle allait aller, par où commencer mais ce qu'elle savait c'était qu'elle comptait bien retrouver Alice et essayer de voir sa famille enfin unie. Naïve, elle croyait qu'elle pouvait changer les choses. Rêveuse aussi. Elle regardait ses tiroirs et ne comptaient emporter que quelques vêtements. Elle avait entendu ses parents parler de leur tante, et de Radcliff. Elle savait que sa soeur était là-bas. Ils le savaient aussi et ne faisaient rien pour la ramener et retrouver une famille unie... Retrouver - comme s'ils l'avaient été un jour... Ils jubilaient ses parents. Ils pensaient qu'elle avait trouvé un boulot déjà et que c'était là-bas qu'elle partait ce soir.

Pourtant ce n'était qu'un mensonge. Elle avait pas trouvé de boulot, pas d'appartement. Elle partait avec le peu d'économies qu'elle avait. Poppy termina de faire sa valise et descendit rejoindre ses parents. « Voilà ton billet d'avion, ma belle. Appelle-nous dès que tu arrives. » La Weston sourit à sa mère avant de l'embrasser et de la serrer dans ses bras. Elle avait jamais quitté la Californie. Elle partait vers l'inconnu et elle avait peur. Elle ne pouvait pas le nier. Cependant, elle ne regrettait pas sa décision. La blonde prit le billet d'avion et sourit à ses parents. « Merci. Et toi, sois sage, fait pas de bêtises, surtout. » Ajouta-t-elle en tournant le regard vers le cadet de la famille. Elle était triste de partir, triste de se séparer de ses parents et de son frère, ceux qui étaient absolument tout pour elle. Mais elle ne pouvait plus vivre sans Alice, juste le vide omniprésent qu'elle avait laissé. Elle embrassa son petit frère sur le front et attrapa ses bagages, sa mère sur les talons pour la raccompagner jusqu'à la porte alors qu'elle suivait son père qui avait accepté de l'accompagner juste pour ce soir. Depuis le divorce de ses parents quand son père était parti, elle avait essayé de les réunir mais c'était plus compliqué que prévu et elle avait fini par se contenter d'une soirée comme aujourd'hui. Au moins, les aurevoirs s'étaient bien passés et elle embarqua dans la voiture avec son père qui la conduisait à l'aéroport. Dans un dernier regard, elle quitta la maison familial pour n'y revenir que les jours de Noël... Et Radcliff attendait, là-bas à l'autre bout du monde. Poppy pleine d'espoir de retrouver sa soeur.

“ I lost myself, is it better not said, Now I'm closer to the edge ”

À peine cinq heures de sommeil, c'était souvent suffisant à la jolie blonde pour passer une journée entière à travailler et se divertir. Mais là, elle était épuisée. Elle gémissait, s'efforçait de garder les yeux ouverts alors que la soirée était bien avancée. Combien d'heures était-elle assise ainsi, sur ce tabouret inconfortable dans le coin de la pièce ? Elle ne les comptait plus, trop concentrée sur les cordes de sa guitare qu'elle grattait depuis trop longtemps maintenant. Parce que le bout de ses doigts étaient irrités, lui faisaient atrocement mal. Elle avait pratiquement l'impression de s'être arraché les ongles. La Weston voulait arrêter ce supplice. Jouer de la guitare... elle n'aurait jamais cru que sa passion première aurait pu ainsi devenir un jour une torture. Les notes s'échappaient de l'instrument dans une mélodie agréable alors que la musicienne souffrait en silence. Malgré la fatigue, elle continuait de jouer sans s'arrêter, sans faiblir et sans faire aucune fausse note. Le pire dans cette histoire, c'était qu'elle ne jouait pour personne. Dante s'était absenté depuis plusieurs minutes maintenant mais il lui avait ordonné de ne pas arrêter. Alors, elle continuait. Elle n'avait aucun contrôle sur son propre corps. De temps à autre, elle levait le nez sur le tableau que le mutant était en train de peindre et qu'il venait de délaisser pour prendre une pause, ou elle ne savait quoi. Elle entendait dans son sac à main son portable sonner mais elle ne pouvait pas aller répondre. Elle laissait ses pensées s'évader quelques secondes, tout de suite ramenée sur Terre par la douleur qui lui tordait les doigts. La musique continuait de remplir la pièce et celles adjacentes.

De jolies notes qui s'élevaient dans l'air mais qui agressaient pourtant Poppy. La musique, c'était son échappatoire, et sa guitare, sa meilleure amie. Le mutant avait su corrompre jusqu'à sa passion, la seule chose qui arrivait à lui donner le sourire. Après un certain temps, elle entendit des pas approcher. Elle priait que ce soit Dante, qu'il la libère de cette malsaine emprise qu'il avait sur elle. Que pour ce soir, elle puisse entrer chez elle. Se glisser dans un bain chaud et de laisser ses muscles se détendre après avoir été crispés aussi longtemps. Et ses mains... Ses mains, elle voulait seulement se les couper pour ne plus avoir à endurer tout cela. Dante ne pourrait plus lui demander de nettoyer sa demeure. Il ne pourrait plus lui demander de jouer pendant des heures pour lui. Il ne pourrait plus rien lui demander qu'elle ne pouvait faire sans ses mains. Poppy tourna les yeux vers les bruits de pas s'approchant et vit apparaître le mutant. Presque soulagée, pleine d'espoir qu'il allait la laisser partir. Elle ouvrit les lèvres dans une tentative de se plaindre, de lui faire entendre raison et lui avouer qu'elle n'en pouvait plus, mais il la devança. « Tais-toi et continue de jouer. » Comme si quelqu'un d'autre s'infiltrait dans chaque parcelles de son cerveau, elle se vit rester impuissante devant le don du peintre. Aucun son ne quitta ses lèvres, suspendues dans un effort vain. Et sans qu'elle n'ait aucun contrôle, ses bras se mirent à jouer plus frénétiquement alors que tout ce qu'elle désirait, c'était de s'effondrer sur le sol. Elle se tut. Elle continua à jouer. Et ce, jusqu'à se que le mutant se lasse enfin de sa présence et la laisse filer.

“ Save me from the ghosts and shadows Before they eat my soul ”

Le mal de tête qui la suivait partout depuis quelques jours avait décidé de repointer le bout de son nez alors qu'elle essayait de remplir le dossier de la prochaine rencontre. Son patron ne lui avait pas demandé mais elle s'y prenait d'avance. Elle préférait prévenir que guérir. Il lui donnait un ordre et souvent, elle s'en était déjà chargé. C'était le cas ce soir même si se concentrer devenait difficile. Parce qu'elle s'était cogné la tête durement quand le mutant qui l'avait pourchassée la semaine précédente avait tenté de l'envoyer se fracasser contre un mur. Quand elle y repensait, elle tremblait. Parce qu'elle se doutait parfaitement de qui avait pu envoyer ce mutant sur son dos. Le Alvarez n'aimait probablement pas voir la jeune humaine l'avoir délaissé pour son nouveau job. Un job dans lequel elle se jetait corps et âme, lui permettait au moins d'oublier le danger qui rôdait dehors. Heureusement, elle était encore en vie malgré la tentative sur sa vie. Parce que son patron l'avait sauvée. Par chance, elle avait été en chemin pour le rejoindre quand le mutant s'en était pris à elle. Ainsi, le Caesar était tombé sur la scène et avait fait explosé la tête du transmutant. Ses pensées revenaient toujours vers cette scène sanglante qui lui donnait toujours autant la nausée.

Installée à son bureau, elle n'entendit pas les pas dans son dos approcher. Le dossier prenait toute son attention et elle sursauta quand elle vit une arme à feu atterrir sur ses papiers devant elle. Poppy leva le nez pour croiser le regard d'Hippolyte. Elle sentit une vague chaleur imprégner ses joues. Depuis qu'il lui avait sauvé la vie, c'était plus fort qu'elle, son corps et ses pensées se déréglaient. Pour éviter son regard, elle baissa les yeux sur l'arme à feu et afficha un air perplexe. « Vous désirez que je vous nettoie votre arme, monsieur ? » Dit-elle en s'appuyant sur le dossier de sa chaise et ancrant de nouveau ses yeux clairs dans les siens. Elle était son assistante certes, mais pas une experte en matière d'armes. Certainement, il connaissait quelqu'un de plus qualifié. Sûrement, son dossier actuel était plus pressant... « Pas mon arme, la tienne. Suis-moi, j'vais t'apprendre à tirer. J'pourrais pas toujours être là pour te sortir du pétrin. » Sur le coup, Poppy ne savait pas si c'était une bonne idée mais en même temps, depuis qu'elle avait été agressée, sachant pertinemment que ce n'était qu'une question de temps avant que Dante n'envoie quelqu'un d'autre l'achever. Sans un mot, Poppy se contenta de sauter sur ses pieds et de le suivre en attrapant l'arme maladroitement. Une fois dehors, le duo s'éloigna des bureaux pour ne pas être déranger, s'enfonçant dans une clairière à l'autre bout de la ville où ils pourraient tirer en paix.

Tout le trajet, la blonde le passa en silence, le regard rivé sur son Ipad faisant mine d'étudier d'autres dossiers. Parce qu'elle avait le béguin pour le quinquagénaire et elle ne comprenait toujours pas comment c'était possible. Alors, elle préférait se taire plutôt que de risquer de dire des conneries. Et comme ça, peut-être qu'elle aurait l'air de l'assistante qui prenait son travail très au sérieux. Sur place, elle leva l'arme. Il lui parla de cran de sûreté, de viseur, de cibles et de distance. Elle finit par tendre les bras et de viser avec le pistolet vers un arbre. Le Caesar sembla exaspéré aussitôt. Apparement, elle était meilleure assistante qu'apprentie. « C'est pas comme ça qu'il faut l'tenir. » Il s'approcha et attrapa ses mains dans les siennes pour la positionner convenablement. S'il ne l'avait pas vu rougir ses derniers temps, cette fois, ce serait inévitable. La Weston voulait bien essayer de se convaincre que de tomber pour le patron était la pire idée du monde mais elle n'y pouvait rien. D'abord parce qu'il avait l'âge d'être son père, ensuite parce qu'il était marié et clairement fou  de sa femme. Qu'il avait des enfants... Bref, les raisons ne manquaient pas. Son coeur se mit pourtant à s'affoler dans sa poitrine. Alors, elle tira et espérait qu'elle atteindrait sa cible pour l'impressionner. Râté...

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