- CLEM ! CLEM BORDEL DE MERDE OUVRE CETTE PORTE !

Dhan avait couru comme un dératé le paté de maisons séparant la sienne de celle des Stevens, explosant probablement tous ses records du 300 mètres, et de loin. Et pourtant, il était dans l’équipe d’Athlétisme depuis le début de l’année. Il était en train de lire tranquillement une bande dessinée quand sa mère lui avait crié de descendre, qu’il y avait quelqu’un au téléphone pour lui, et qu’ensuite il faudrait venir diner. L’adolescent avait descendu les escaliers quatre à quatre, persuadé que c’était sa petite amie qui l’invitait à manger chez elle, ce qu’elle faisait de temps en temps. En réalité, c’est la voix grave et clairement angoissé du père de cette dernière qui le cueillit au bout du fil : il connaissait l’homme depuis des années, mais pour autant, ils n’en étaient pas encore à tailler la bavette au téléphone pour parler baseball. S’il l’appelait, c’était forcément qu’il se passait quelque chose avec Clementine. Monsieur Cooper confirma ses craintes : Clem’ s’était enfermée dans sa salle de bain depuis des heures, et ne voulait plus en sortir. Pire encore, il n’entendait plus personne dernière la porte fermée à clé depuis plusieurs minutes. Dhan n’avait même pas pris de le temps de raccrocher le téléphone qu’il claquait la porte de chez lui pour courir jusqu’à la maison de Clem : il en était sur, il en était certain qu’il se passait quelque chose. Elle avait été morose toute la journée, avait à peine réagi quand il lui avait ramené des cookies faits par maman Stevens au lycée, un pauvre sourire sur le visage. Pire, il l’avait vu passer la main au travers de son casier sans faire exprès et devenir pâle comme un linge avant de fuir, la tête baissée, sans même lui donner rendez vous à la fin des cours. Il savait que ce jour là était un peu spécial, mais de là à la pousser à faire quelque chose de dramatique … Non, il ne voulait pas y croire. Et pourtant elle était là, derrière cette fichue porte contre laquelle il tambourinait comme un dément :

- CLEM, JE VAIS DEFONCER LA PORTE, J’EN AI RIEN A FOUTRE.

Joignant le geste à la parole, il se mit à foncer comme un buffle contre la porte, l’épaule en avant, dans l’espoir de faire sauter le pauvre verrou qui le séparait de sa petite amie. La douleur le lança rapidement dans le bras, mais il s’y remit une seconde fois, une troisième, jusqu’à ce qu’à la quatrième, la porte cède sous son poids et sa force : il trébucha et se rattrapa in extrémis, baissant les yeux sur une Clementine en larmes, tremblante, une lame à la main. Ses yeux cherchèrent nerveusement une trace de sang, une plaie, n’importe quoi, mais rien. Cela ne pouvait signifier qu’une chose : sa mutation l’avait protégé contre elle-même. A bout de souffle, Dhan soupira profondément, avant de tomber à genoux en face d’elle :

- Clem … Clem, regarde moi s’il te plait. Lève la tête, regarde moi je t’en prie…

Doucement, il se rapprocha d’elle, et attrapa délicatement la lame pour la jeter loin derrière lui, liant dans la foulée ses doigts aux siens, tremblants :

- Espèce… Espèce d’idiote … Tu n’as quand même pas pu … Sérieusement… Pu penser à faire ça ? Clem’, comment je vivrai sans toi ? Tu y as pensé ? Comment ton père vivrait ? Je t’en supplie, ne fais plus jamais ça ? Jamais tu m’entends ? Mon dieu …

Il avait eu peur, si peur, qu’il  la serra tellement fort contre lui qu’il craint, après, de lui avoir fait mal. Mais il avait besoin de la sentir là, contre lui, son cœur battant contre le sien, sa chaleur contre la sienne. Elle était vivante, contrairement à tout ce que sa tarée de mère avait pu en dire, Clem’ était vivante et plus jamais il ne la laisserait tenter de se faire du mal, il se le jura sur tous les saints, embrassant chaque centimètre du visage mouillé de l’adolescente pour mêler ses larmes aux siennes…




- Mes félicitations Monsieur et Madame Stevens, l’appartement est à vous. Je vous laisse les clés.

Dhan remercia calmement l’agent immobilier qui lui tendait les clés de leur tout nouvel appartement, en plein centre ville de Radcliff, avant de le regarder disparaitre dans le hall d’entrée. Ils étaient propriétaires, ça y était, de leur appartement à eux. Il n’était pas hyper grand, ils n’avaient pas encore les meubles, mais les copains de la caserne avaient promis de les aider à emménager dès le lendemain, alors ce n’était pas très très grave. Dhan fit sauter les clés dans sa paume, avant de chercher dans la poche de son jean un petit porte clé tressé brésilien, qu’il attacha tout de suite au trousseau, pour la chance, bien sur, avant de se tourner vers Clem, les yeux brillants de joie et de facétie.

- Tu connais la tradition, Meu amor, je te prie donc de bien t’accrocher.

Sans attendre de réponse de Clem, ou pire, une réprimande, il faucha les jambes de cette dernière pour la prendre dans ses bras façon mariée, et se mit à courir dans les escaliers comme un fou, la tête de Clem frolant parfois dangereusement les murs jusqu’au 7eme étage, devant la porte de Leur appart’, le leur, pour de vrai. Avec une dextérité peu commune pour un abruti de la sorte, il réussit à garder sa brunette dans les bras tout en faisant tourner la clé dans la serrure, ouvrant la porte d’un coup de pied expert. Il baissa le regard dans celui de Clementine, un sourire idiot sur les lèvres, avant de lui voler les siennes une seconde tout en passant le pas de la porte, ne la lachant qu’une fois arrivé dans le salon vide, et encore, uniquement pour la serre contre lui pour contempler la vue avec elle :

- On va être bien ici, super bien même …