-grayman & elspeth-

Living with the dead again

Si Elspeth était allée assister à tout ça, ça n’avait pas été pour des raisons politiques. Le garage était juste... fermé. Il n’y aurait personne aujourd’hui, tout le monde serait trop avide de savoir qui allait gagner, qui serait en sécurité cette fois et qui ne le serait pas. Franchement, elle qui ne s’était jamais intéressée à tout ça, ne l’avait pas plus fait que d’habitude. Elle vivait peut-être ici mais, elle avait l’impression que tout ça ne la concernait pas. Si elle avait fini par aller écouter le discours, c’était juste parce qu’il n’y aurait absolument rien d’autre à faire à part restée cloîtrée chez elle et ça n’était pas trop son truc. Même la bibliothèque était fermée, elle ne pouvait même pas aller louer de quoi s’occuper.
Quand la première explosion retentit, elle était heureusement trop loin pour être blessée, en revanche, l’explosion la sonna quand même pas mal, ne fut-ce que par son souffle. La seconde, ce fut autre chose. Elle en avait été relativement éloignée mais, pas assez pour ne pas être blessée d’une façon ou d’une autre. Réellement sonnée cette fois, ses oreilles bourdonnaient et elle se rendait à peine compte de ce qui était arrivé, de ce qui venait de lui arriver. Ce n’est qu’après quelques minutes, quand elle tenta de se relever que la douleur remonta le long de sa jambe, l’obligeant à crier sans pouvoir s’en empêcher. Aussi sec, elle était retombée au sol. Elle ne s’était jamais rien cassé mais, elle avait la conviction que c’était pourtant bien le cas. Prenant conscience de ce qui venait d’avoir lieue ici et maintenant, elle s’inspecta, s’empêchant de trop regarder aux alentours. Les bruits lui parvenaient étouffés mais, elle entendait quand même. Après un rapide constat, elle saignait légèrement quelque part au front, un de ses doigts n’avait pas tout à fait l’allure qu’il aurait dû avoir -pas cassé, du moins, il n’en avait pas l’air-, sa jambe lui faisait un mal de chien et elle avait mal à l’épaule -sûrement le côté sur lequel elle était tombée.
Paniquant un instant, elle ferma les yeux, forçant ses paupières à rester bien fermées. Ça n’avait pas pu encore arriver... pas encore. Elle n’avait pas pu être blessée, c’était impossible. La panique finit par s’emparer d’elle malgré tout ses efforts et il lui fallut un moment, elle ne sut combien de temps, pour se ressaisir au moins un peu. Elle attrapa son téléphone pour appeler les urgences mais, le réseau était saturé, pas étonnant. Elle ne savait pas quoi faire, pas qui appeler. Son patron ? C’était son patron, précisément. Son père ? Elle ne pouvait pas s’y résoudre, de plus, elle n’avait même pas enregistré son numéro. Russell ? Il devait être débordé. Elle n’avait personne à joindre. Quelle part entre la douleur et la colère, elle se traîna contre un mur pour s’aider à se relever en prenant bien soin de ne pas poser son pied au sol, pour ne pas se faire mal davantage. Déjà rester debout, c’était douloureux, sans parler des vertiges et de ses oreilles toujours bourdonnantes.

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Living with the dead again

Absolument pas assurée sur ses jambes et ne pouvant même pas en poser une, Elspeth avait un mal infini pour garder l’équilibre et surtout à avancer. En fait, elle n’avait toujours pas réussi à avancer vraiment, tentant plus de ne pas tomber qu’autre chose. Elle sursauta d’ailleurs quand un bras entoura ses épaules. Un réflexe plus qu’autre chose, surtout maintenant. Elle dû relever la tête pour apercevoir celui qui lui venait en aide. Elle n’eut cependant ni le temps, ni l’attention de se demander quelle taille il faisait. Pour lui éviter de trop se baisser, elle passa son bras dans son dos et s’agrippa à son haut mais, ça ne l’empêcha pas d’être parfois soulevée. Il avait bien plus de force qu’elle et elle n’était pas vraiment tout à fait en état de se soucier de savoir si son pied allait toucher le sol ou non.
Elle finit par se laisser soulever, abandonnant la partie. Et, si sa jambe lui fit beaucoup de mal sur le moment, elle lui fut reconnaissante de ça, qui qu’il soit. Elle n’aimait pas vraiment être incapable de se débrouiller mais, les circonstances étaient exceptionnelles et son état pas vraiment brillant. Elle n’allait clairement pas cracher sur son aide.

- « Merci. »

La force de l’homme était impressionnante. Non pas qu’elle soit très lourde mais, il fallait réussir à porter quelqu’un, surtout qu’il avait l’air d’avoir été présent lui aussi quand tout avait explosé. Dire qu’elle ne comptait même pas venir à la base... Aucune chance qu’elle remette les pieds dans un truc pareil à moins qu’on l’y traîne de force. Heureusement, elle n’avait personne dont elle devait particulièrement s’inquiéter. Du moins, ça, c’était la version dont elle aurait aimé se contenter. La vérité, c’était qu’elle avait peur pour son père et espérait sincèrement qu’il allait bien. Même la mairesse, elle espérait qu’elle allait bien. Qui aurait cru qu’elle l’aurait rencontré avant tout ça en plus et pour parler de son père. Certaines choses étaient franchement étranges dans cette ville. Elle choisit finalement de se reconcentrer sur l’homme qui était en train de l’éloigner des cris et de l’horreur. Choquée, elle l’était, vraiment mais, elle ne pouvait pas se résoudre à regarder derrière ce géant. Elle ne voulait pas voir les morts, les autres blessés.

- « Vous n’avez rien de trop grave ? » La moindre des choses était de s’assurer qu’il allait bien lui aussi alors qu’il la portait. « Moi... C’est Elspeth... Fitzgerald. Au cas où. »

Prudent, ça ne l’était pas mais, on ne savait jamais. Elle n’avait aucune personne clairement définie comme contact dans son portefeuille ou dans son portable. Alors si elle devait..., perdre connaissance ou n’importe quoi de ce genre, autant qu’il sache au moins ça sur elle. Elle savait pourtant qu’elle aurait dû le faire mais, ça n’arrive qu’aux autres les tuiles après tout. Rien qu’aux autres. Foutaises. Les tuiles, elle les vivait depuis assez longtemps pour savoir que c’était faux. Elle avait juste été trop... quoi au juste ? Elle n’en savait rien.

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Portée par cet homme et malgré ses oreilles toujours bourdonnantes, Elspeth entendait les cris, voyait les gens passer à côté d’eux, les bousculer parfois, l’obligeant à retenir un cri de douleur en s’agrippant un peu plus fort à lui. Elle avait eu de la chance qu’il l’aide, ça n’était généralement pas ce qui se passait dans ce genre de cas. Chacun sauvait sa peau, ce qu’elle pouvait comprendre mais, il s’était arrêté pour l’aider. Elle garda donc son regard rivé sur le chemin qu’ils empruntaient pour ne pas devoir faire face à tout ça. C’était loin d’être courage mais, elle ne voulait pas voir ça.
Elle préféra se concentrer sur lui et sa santé, elle hocha donc la tête quand il lui dit qu’il allait bien. Elle l’espérait vraiment. Il était en train de la porter après tout, elle lui devait bien un minimum de considération.

- « Merci. Encore... »

Encore une fois, elle tenta tant bien que mal de rappeler les urgences, son téléphone toujours à la main mais, le réseau était toujours saturé.

- « Impossible d’appeler les urgences. J’ai essayé plusieurs fois. Je peux peut-être essayer de marcher... il n’y a plus tellement de gens ici. »

Elle essayait de ne pas trop bouger pour ne pas lui rendre la tâche plus difficile mais, ça la gênait. Elle savait qu’elle aurait mal, que ça compliquerait sérieusement le chemin. Els ne voulait juste pas qu’il se sente obligé de la porter. Après tout, ils ne se connaissaient même pas.
À sa question, elle fit non de la tête. Non seulement personne ne savait qu’elle était là mais, à part son patron qui n’était pas une baby-sitter, il n’y avait personne. Elle n’avait même pas le numéro de son père avec elle pour le prévenir. Et son oncle, oui, il devait clairement être occupé pour le moment. Elle espérait qu’il allait bien. Il fallait qu’il aille bien.

- « Personne. Mon oncle est sûrement submergé pour le moment et... je n’ai pas le numéro de mon père. »

Elle y avait pensé, bien sûr mais l’un avait autre chose à faire et l’autre... elle ne savait toujours pas quoi faire. Elle s’inquiétait vraiment pour eux sauf qu’elle ne pouvait pas les joindre maintenant et elle avait peur de ne pas avoir de réponse si elle appelait. Ça l’angoisserait à coup-sûr et elle n’avait pas besoin de ça.

- « Et vous, vous avez quelqu’un à qui dire que vous allez bien ? Enfin, c’est peut-être déjà fait... »

Franchement, elle ne savait pas trop quoi dire de plus. Par acquis de conscience, elle envoya un message à son oncle pour dire qu’elle allait bien -relativement- et qu’on l’emmenait à l’hôpital. Pour son père, il faudrait attendre qu’elle rentre chez elle. Elle n’avait pas mémorisé le numéro.

- « Comment vous faites ? Pour rester calme comme ça ? »

Si elle était calme, c’était parce qu’elle s’y efforçait, parce qu’elle gardait son regard ailleurs et parce qu’il l’était lui aussi. Aucune doute qu’elle aurait bien plus paniqué s’il ne restait pas aussi zen.

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À mesure qu’ils avançaient et s’éloignaient du lieu de l’explosion, Elspeth arrivait à refouler sa panique, ça n’avait rien d’évident mais, elle s’y employait, elle n’avait pas le choix de toute façon. Péter les plombs ne l’aiderait pas une seule seconde. Tout ce qu’elle pouvait espérer, c’était que les gens à qui elle tenait allaient bien. Pour le moment, elle ne pouvait pas le savoir et c’était assez frustrant. Il fallait cependant qu’elle fasse avec. Elle se rendit soudain compte que, maintenant que le couvre-feu n’existait plus, que la quarantaine était levée, elle pouvait partir mais... avec sa jambe, son travail au garage qu’elle appréciait vraiment, son oncle, ses quelques amis -s’ils l’étaient-, elle ne voulait pas partir. Pour elle-même, elle soupira. Tout se goupillait décidément mal dans sa vie.
Elle lui rendit son sourire. Pas vraiment rassurant cela dit avec le sang qu’elle avait sur le visage. Elle n’osait pas trop le frotter de peur de se refaire saigner ou quelque chose du genre. Elle n’avait pas pris vraiment le temps de se vérifier sous toutes les coutures. Malgré tout, elle écouta le conseil de Grayman et envoya un message à son oncle pour lui dire qu’elle avait été blessée mais qu’elle allait bien. Pas besoin de l’alarmer.

- « J’espère surtout qu’il va bien et qu’il n’arrêtera pas tout pour venir me voir. »

Elle espérait surtout qu’il allait, vraiment bien et c’était ça qui lui importait le plus finalement. Elle le lui avait d’ailleurs demandé, de lui donner des nouvelles. Mais oui, il marcherait. Même le réseau avait du mal à fonctionner vraiment de toute manière. Son message venait seulement de s’envoyer. Tout le monde devait être pendu à son portable à l’heure actuelle. Elle pouvait comprendre ça. En attendant, ça ne l’empêchait pas de compatir. Elle connaissait la solitude et, elle se rendait d’ailleurs compte que ça n’avait pas tellement changé en dehors de quelques rares exceptions. Elle aurait voulu en vouloir à son père mais, pas aujourd’hui, elle ne pouvait pas.

- « Je sais... »

Oui, on s’habituait à tout, elle ne le savait que trop bien d’ailleurs. Els aurait pourtant préféré ne pas savoir qu’on s’habituait à tout. La fuite par exemple, elle s’y était faite, elle avait même été toute prête à recommencer quand son père était venu frapper la première fois à sa porte.
Elle secoua finalement la tête légèrement histoire de ne pas trop bouger et soupira. Non, elle n’était pas folle de peur, elle se demandait d’ailleurs comment c’était possible. Elle aurait dû l’être mais, elle n’allait pas si mal. Peut-être que ça viendrait après, elle n’en savait rien.

- « Je ne sais pas. J’essaie de ne pas trop y penser. J’ai tout fait pour ne pas voir ce qui se passait. Ou alors ce sont les formations que j’ai suivies à l’hôpital qui jouent. En plus, paniquer ne m’aidera pas plus, au contraire. J’ai surtout peur d’entrer en état de choc à cause de ma jambe. »

Elle savait que c’était une possibilité, que si elle commençait à avoir froid et à trembler, ça risquait d’arriver. Personne n’était à l’abri de ça, pas même si ça n’était que le petit doigt. Et de doigt, elle en avait aussi un en mauvais état.

-grayman & elspeth-

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Une fois à l’hôpital, Elspeth savait que ça prendrait du temps. Elle n’aimait par particulièrement ça, comme beaucoup de gens et elle avait de bonnes raisons. En attendant, elle ne pourrait pas y couper. Sa jambe, son doigt, elle ne savait quoi d’autre encore, tout ça prendrait du temps à soigner, s’assurer qu’elle n’avait rien de plus aussi. Tous les dégâts n’étaient pas toujours bien visibles, malheureusement. Elle ne pouvait donc qu’espérer qu’il n’y avait rien de plus et attendre d’arriver. Sa tête ne lui tournait plus au moins, ses oreilles allaient mieux et elle ne ressentait pas d’étourdissement pour le moment. C’était pour ça qu’elle craignait l’état de choc d’ailleurs.
Fatalement, elle se demanda pourquoi Grayman bifurqua quand elle en parla. Elle s’assit comme elle put, retenant une grimace et tenta de remonter le tissu comme elle put. Elle avait une longue coupure, là om elle avait reçu des débris, probablement l’endroit où il y avait la fracture d’ailleurs. Elle le laissa retirer les morceaux de verre qu’elle n’avait pas pensé à enlever sur le coup tant la douleur dans sa jambe avait couvert tout le reste. Elle le regarda aussi démolir une pancarte, personne ne lui en tiendrait rigueur vu l’état de la ville en ce moment. Elle gémit en s’agrippant au banc quand il fixa les morceaux de bois sachant que c’était nécessaire même si douloureux.

- « C’est déjà beaucoup. »

Il l’avait déjà sortie de là-bas, Els n’allait certainement pas lui reprocher de lui avoir fait un peu mal pour la bonne cause. En revanche, elle pâlit quand il montra son doigt qui ne présentait pas du tout le bon angle. Alors oui, ça, ça allait faire mal, en effet. Elle ferma les yeux et attendit. Elle ne put retenir un cri, elle n’était pas habituée à la douleur, n’était pas insensible non plus et ça, ça faisait un mal de chien. Il lui fallut un petit moment avant de pouvoir tester s’il était bien remis. Aucun doute qu’ils s’en rechargeraient à l’hôpital mais, au moins, elle ne risquait pas que ça s’aggrave dans l’immédiat.
Elle l’aida un peu quand il la souleva à nouveau et cette fois s’agrippa à lui pour lui faciliter la tâche. Encore une fois, être soulevée avec une jambe douloureuse ne fut pas une partie de plaisir mais, c’était mieux que de l’utiliser d’empirer les choses.

- « Vous faites ça souvent ? Remettre des doigts en place ? »

L’idée même qu’un silence s’installe était insupportable pour le moment. Pourtant, elle avait l’habitude mais là, elle ne pouvait pas s’y résoudre, ils étaient assez loin pour ne plus tout entendre mais pas encore suffisamment. Elle aurait pu demander mille autres choses mais, la première chose qui lui était venue à ce moment-là, c’était ça. Il avait fait ça comme s’il savait s’y prendre. Elle n’aurait pas tenté elle-même, n’ayant pas assez confiance en elle ni en ce qu’elle avait appris sur les luxations. Une chose était sûre, discuter lui permettait encore pour le moment de ne pas penser.

- « Tant qu’à parler d’ailleurs, vous faites quoi dans la vie ? »

Discuter pour ne pas penser... Dire que ça n’avait jamais été son genre était un euphémisme mais, là, tout valait que de réfléchir et revivre ce qui avait eu lieu.

-grayman & elspeth-

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Elspeth avait bien conscience d’avoir accumulé les coups de chance depuis les deux explosions. Ne pas avoir été proche de la première explosion plus importante que la seconde, ne pas avoir été blessée davantage et avoir eu de l’aide de la part de Grayman. Il y avait de forte chance qu’elle soit toujours là-bas s’il ne l’avait pas aidée ou en tout cas, beaucoup moins proche de l’hôpital que maintenant. Elle était réaliste, elle n’aurait pas vraiment pu aller bien loin, la douleur l’aurait mise à terre bien avant. Son attelle de fortune faites, elle utilisa son foulard pour garder son doigts en place au moins en attendant d’arriver à l’hôpital, ce serait ça de pris aussi. Elle sourit presque en l’entendant parler de la remise en place de ses propres doigts, ça n’avait rien de franchement amusant ni de rassurant.

- « Soit vous avez pas de chance, soit vous êtes maladroit ou autre chose. En tout cas, j’vous plains, c’est pas super agréable. »

Faire la conversation, c’était tout ce qu’elle pouvait faire pour ne pas penser, pour ne pas voir les images qui tournaient dans sa tête, ne pas s’arrêter dessus. Car les images, elles arrivaient, c’était couru d’avance. On n’échappait pas à un truc comme ça, elle le savait, à une moindre échelle.

- « Je vois. J’suis un peu pareil que vous. Sauf que j’suis pas franchement douée avec les gens. »

Voyager, elle avait voyagé, c’est sûr mais, ça n’était ni amusant, ni même plaisant. Elle s’en serait bien passée d’ailleurs. Pareil avec les jobs miteux ou encore les changements d’écoles à répétitions Elle avait détesté en tout point cette vie qui ne lui avait rien apporté en dehors de la colère et de la hargne. Elle aimait beaucoup trop la vie pour encaisser ça et maintenant... maintenant elle aurait bien cherché à faire la même chose qu’avant. Fuir. Une chose qu’elle ne ferait pas à cause du peu d’attaches qu’elle avait commencé à se forger. Elle s’en serait presque voulue.

- « Je livre les journaux dans le centre-ville et je bosse dans un garage. Les formations à l’hosto c’est juste... comme ça. »

Juste pour aider si elle le pouvait et d’ailleurs, à mesure qu’ils avançaient, elle apercevait quelqu’un avachi au sol. La personne était mal en point mais avez l’air bien vivante. Elle tendit le cou pour essayer de mieux voir.

- « Arrêtez-vous. Y a quelqu’un là-bas. »

Sur le moment, quand l’explosion l’avait sonnée, elle avait juste pensé à se relever, à fuir mais, maintenant, alors qu’elle voyait quelqu’un mal en point, elle ne pouvait pas juste l’ignorer, elle voulait faire quelque chose. Aider elle aussi comme Grayman était en train de l’aider. Peut-être qu’elle pourrait faire quelque chose. Si la personne était là et encore vivante, elle devait même sûrement pouvoir l’aider. C’était peut-être naïf mais, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser comme ça. C’était un peu ce qui l’avait conditionné à suivre ces formations, aider. Elle n’aurait pas voulu en faire un métier mais, comme ça, à l’occasion, au cas où, elle le pouvait. Et là, elle pouvait précisément faire la différence. Peut-être.

-grayman & elspeth-

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Il n’était pas dans les habitudes d’Elspeth de faire la conversation mais, là, elle s’y efforçait un peu. Aussi bien à cause de ce qui se passait que parce que Grayman était en train de l’aider. Combien de temps serait-elle restée en bas de cette rue sinon ? Elle n’en avait pas la moindre idée. Elle regrettait même de ne pas pouvoir prévenir son père, c’était dire à quel point elle n’était pas tout à fait bien dans ses baskets. Elle lui reprochait énormément de chose mais, elle n’avait pas besoin de réaliser qu’elle l’aimait pour autant, c’était le cas. Lui pardonner, même avec tout ça, ça restait une toute autre chose.
Parler ne l’empêchait pas de détester la situation actuelle, bien loin de là. Si elle avait pu se passer de faire la conversation, elle l’aurait très probablement fait tant la chose était éloignée de ses habitudes. Quand elle disait qu’elle n’était pas douée avec les gens, c’était vrai. Au début, elle n’avait même absolument pas compris comment elle avait réussi à se faire des amis. Ceci dit, si Aspen n’avait pas alimenté la conversation pour deux au début, ça ne serait jamais arrivé.

- « Tant que c’est utile à quelqu’un un jour... »

Ça n’était pas pour rien qu’elle s’était lancée là-dedans après tout. Elle préférait que ça ne serve pas cependant, ça voulait dire que les gens allaient bien. Sauf que dans cette ville, elle finirait par en avoir besoin, tôt ou tard. La preuve. À mesure qu’ils s’approchaient, Els réfléchissait déjà à comment elle pourrait bien aider l’homme sauf que Grayman s’arrêta à trop grande distance.

- « Quoi ? Mais non, il est toujours en vie ! On peut l’aider ! »

Elle sentit les bras de Grayman la tenir plus fermement, comme pour l’empêcher de tomber ou de s’échapper tout simplement. À croire qu’il l’avait vu venir. Elle ne pouvait plus basculer, rien. Il la tenait fermement. Pendant un moment et après avoir arrêté de gesticuler, elle resta murée dans le silence. Elle n’arrivait pas à se faire à l’idée qu’il avait été effectivement condamné, qu’elle n’aurait rien pu faire. Combien de gens étaient morts ce soir ? Combien allaient encore mourir ? C’était vraiment la toute première fois qu’elle y pensait et elle aurait voulu ne pas le faire, à aucun moment. Grayman avait l’air de savoir de quoi il parlait mais, ça ne l’aidait pas pour autant à accepter. Elle aurait au moins pu essayer quelque chose, elle ne cessait pas de se le répéter.
Pendant encore un moment, elle resta silencieuse, ne prononçant pas un seul mot. Elle était crispée, tendue, pas à cause de la douleur -non pas qu’elle s’y était habituée- mais, à cause de tout ça. Finalement, elle se décida à parler à nouveau. Parce qu’il le fallait, parce que sinon, elle craquerait et qu’elle ne voulait pas.

- « Comment vous saviez ? » Elle avait été un peu plus froide qu’elle l’aurait voulu. Ça n’était pas sa faute pourtant. Au contraire. Elle soupira. « Désolé... je... »

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Si Elspeth s’en sortait bien jusqu’à maintenant, ça n’était plus le cas, pas avec cet homme qu’ils avaient laissé là alors qu’il était en train de mourir. Mourir seul... Elle ne l’aurait peut-être pas bien vécu mais, elle aurait au moins fait quelque chose. Combien d’autres gens étaient en train de mourir seuls eux aussi ? Combien était déjà mort ? Ces questions tournaient en boucle dans sa tête et elle se sentait mal. Pas parce qu’elle savait comment ce pauvre homme allait mourir ou peut-être. Elle n’en savait rien. Elle se sentait juste mal de... quoi au juste ? Avoir survécu ? Était-ce réellement sa faute ? Elle n’était pas responsable de leurs morts, alors pourquoi s’en voulait-elle soudainement ?
Bien plus calme et nettement plus silencieuse, elle écouta Grayman lui dire qu’il en avait déjà vu assez pour savoir qu’il n’y avait plus rien à faire. Ça ne la rassurait pas pour autant, ça ne l’aidait pas plus à aller mieux. Mais lui non plus n’y pouvait rien s’il y avait des morts. Elle n’avait pas le droit de lui en vouloir. Elle s’excusa donc mais, il enfonça le clou. Comme si elle avait besoin de ça.

- « Et vous êtes obligé d’insister sur la mort de ce pauvre gars ? J’ai compris, il va mourir et j’y peux rien. C’est pas comme si c’était la première fois que ça m’arrivait. J’ai saisi. »

Elle ne se rendit compte de ce qu’elle avait dit seulement après coup. Elle ne s’était jamais considérée responsable de la mort de sa mère. Qu’est-ce qu’elle aurait pu faire de toute façon alors que les médecins avaient été impuissants ? Mais, dans les deux cas, elle n’était pas là pour... soutenir ou quoi que ce soit. La solitude la dérangeait, la solitude et la mort. Elspeth avait peur de la mort depuis qu’on lui avait annoncé froidement que sa mère n’avait pas survécu. Paradoxalement, elle avait du mal à s’entourer.

- « Il faudra le dire à l’hôpital... qu’il y a un quelqu’un à récupérer là-bas... On lui doit bien ça. »

Elle essayait vraiment de ne pas en vouloir à Grayman, il ne faisait que la protéger en quelque sorte et s’assurer qu’elle arrive rapidement à l’hôpital. Elle ne pouvait que lui en être reconnaissante. Il aurait tout aussi bien pu passer à côté d’elle et la laisser se débrouiller. Il ne lui devait rien après tout et il n’avait même pas été blessé gravement. Sans s’encombrer d’elle, il aurait déjà pu rentrer chez lui.

- « Pourquoi vous m’avez aidé moi ? C’était pas les blessés qui manquaient là-bas... »

Comprendre, c’est tout ce qu’Elspeth pouvait essayer de faire. Comprendre pourquoi elle et pas quelqu’un d’autre. Il y avait eu des centaines de gens à l’hôtel de ville et sur cette place après tout. Les victimes ne manquaient pas. Pourtant, c’était elle qu’il avait aidé, elle qu’il gardait en sécurité. On ne pouvait pas dire qu’elle était habituée à ça d’ailleurs. Personne n’avait vraiment pris soin d’elle depuis des années. Il y avait bien eu Léda pendant quelques semaines et à leur façon, il y avait Aspen et même Altaïr qui n’était pourtant que son patron... Mais lui, il ne la connaissait pas, alors pourquoi ?