– she said 'kiss me, it'll heal', but it won't forget –

REESE ET ÅRON / And I don't mind you keepin' me On pins and needles. If I could stick to you, And you stick me too. Don't break, Don't break my heart, And I won't break your heart-shaped glasses. Little girl, little girl, You should close your eyes. That blue is getting me high, and making me low. – MARILYN MANSON.

« Et puis même qu’après, Jason il m’a poussée dans la piscine ! » « Noooon. Il a pas fait ça ? » « Si ! » Et qu’elle remet les bretelles de son sac à dos bien en place sur ses épaules, la gamine, ses bouclettes brunes humides rebondissant sur son t-shirt blanc, ses petits doigts tenant toujours les lanières. « J’aurais pu tomber et me faire très mal, mais j’ai sauté le plus loin possible pour pas me cogner contre le bord. Et Anna a fâché Jason super fort, il a dû sortir de la piscine et il a plus eu le droit d’y aller de l’après-midi entier ! » « C’est bien fait pour lui, tu crois pas ? Il avait qu’à pas te pousser. Ç’aurait pu être très dangereux. » Elle opine du chef, la petite, alors que sa mère lui jette un regard bienveillant, dévissant le capuchon en plastique de la petite compote. « Tiens. » Evey lâche son sac et s’en saisit, commençant à vider son goûter fruité. « Heureusement y a juste mon petit doigt de pied qui a frotté au fond de la piscine. Ça saignait quand même un peu mais Geoffrey m’a mis un pansement en sortant de la piscine. » « Quel homme, ce Geoffrey – mais on dit quoi ? » « Merci maman ! » Un sourire en coin, une main qui attrape rapidement un élastique dans la poche du petit sac. L’enfant ralentit par réflexe en voyant les mains s’approcher de ses cheveux, et s’arrête finalement pour se les laisser nouer, savourant son goûter. Elle rentrait toujours affamée et épuisée de ses journées au centre aéré — mais également ravie. C’était la première année qu’elle pouvait se permettre cette activité estivale en sachant qu’elle serait toujours là la semaine suivante, et elle s’en donnait à cœur joie. Cette année, ses amis du centre étaient aussi ceux de l’école ; et pour la première fois, la petite se sentait en terrain connu et familier.

« Voilà, monkey. » « Merci ! On peut aller au parc, dis ? » « T’as déjà passé la journée à courir, tu crois pas que ça suffit ? Donne-moi ton sac, tiens. » La petite obtempère, passant sa compote d’une main à l’autre, avant de terminer de la vider. Elle récupère le capuchon dans la main de sa mère, rebouche le petit contenant et court jusqu’à la poubelle la plus proche, sous un regard avisé. Mais alors qu’elle va pour revenir dans la direction opposée, elle se fige. Quelque chose a attiré son regard, un peu plus loin — et soudain, impossible de contrôler la joie qui l’assaille. « ÅROOOOOOOOOOOOOON ! » Elle sautille sur place une fraction de secondes avant de se lancer en courant vers la silhouette blonde dressée un peu plus loin. Le regard de sa mère a suivi le sien, mais pas la joie. Et Reese a senti ses dents grincer, son cœur écorcher un battement et sa colère monter. Qu’est-ce qu’il foutait ici, celui-là ?

Pourtant, impossible de détourner la route. Impossible de faire comme si de rien n’était, et de faire croire à Evey qu’elle se trompait. La gamine avait déjà sauté au cou du géant en bonne et due forme, sans se soucier un seul instant du reste du monde. Et sa mère s’empressait de la rejoindre, bien qu’ostensiblement frustrée de cette apparition. Mais il avait bien joué son coup, le bougre. Après trop d’fois à s’faire repousser, le voilà qui décidait de se pointer quand y avait Evey. Quelle lâcheté.