not a fairy tail  

On ne sait pas vraiment ce qu'Aloys fait là. A dire vrai… il a autant de bonnes que de mauvaises raisons d'être au coeur de cette fête foraine, à commencer par cette incapacité qu'il a depuis des années à s'intégrer autant aux foules qu'aux époques qu'il traverse sans sourciller outre mesure. C'est un vieillard dans le corps d'un jeune homme qui a les yeux qui pétillent devant les lumières et les animations de la place. Il n'a jamais fréquenté, en seize décennies, de places comme celle-ci, côtoyant davantage musée et galerie d'art que cirques et forains. Il découvre l'ensemble, fronce les sourcils devant les manèges, s'interroge face aux attractions qui emportent les gens plus haut que raison et qui les font virevolter comme des marionnettes au bout de fils joueurs. Et se retrouve au pied d'une de ces grandes roues sans savoir comment et encore moins pourquoi, un baton de barbe-à-papa entamé et loin d'être achevé en main, les yeux d'Aloys tentent de suivre les mouvements circulaires, programmés mais aléatoires pour son âme déroutée, des gens qui hurlent de joie ou de terreur : Aloys ne sait pas vraiment. L'important, c'est principalement leur sourire ravi lorsqu'ils redescendent, jambes flageolantes, de leur siège où ils étaient saucissonnés. C'est la quatrième fournée qu'il voit passer et Aloys a terminé sa barbe-à-papa. Il est hypnotisé par le mouvement et même s'il brûle d'envie de parcourir le reste de la fête foraine pour découvrir davantage et s'imaginer un peu plus, en frissonnant de terreur, monter dans l'un de ces engins monstrueux, il ne parvient pas à détacher son regard de l'ensemble. Et les techniciens commencent d'ailleurs à s'amuser de sa fascination. « Vous voulez essayer ? » La voix le fait sursauter.

Et Aloys se retrouve attaché à un siège sans avoir osé dire non à la proposition mais se demandant aussi s'il va y survivre. Il n'a pas le vertige, n'angoisse pas nécessairement face à l'inconnu mais là… il appréhende. Oui, appréhender est le verbe exact pour décrire cette petite boule au creux de son estomac. Mais les voilà déjà qui partent dans le ciel, Aloys qui hurle en riant aux éclats et… Plus rien. Le manège se bloque brutalement, les sièges se stabilisent, en hauteur, le hurlement d'Aloys s'éteint et la fête tourne au drame. En dessous, plusieurs mètres en dessous… c'est la panique. Et dans les yeux d'Aloys, c'est l'incompréhension. Et la panique. Et le médecin qui se réveille, l'homme qui a connu les guerres, l'homme qui est mort et qui est revenu à la vie des dizaines de fois. La ceinture de sécurité se détache, ses mains se crispent sur les accoudoirs. Et d'une voix tremblotante, il regarde ceux qui l'entourent : « Excusez-moi… je ne suis pas très familier de ce genre d'amusements, mais j'ai bien l'impression qu'il y a un aléa… Est-ce bien sûr de déverrouiller de cette manière ce qui nous protège en théorie des accidents fâcheux ? » Pas qu'Aloys les craigne particulièrement, ces accidents, puisqu'il est immort… Ah. C'est vrai. Il ne l'est plus à présent.

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Le karma était une petite chose bien vicieuse avec une tendance presque maladive à vous tendre une bonne carotte bien juteuse avant de vous envoyer un grand coup de pelle en plein visage. Alfie aurait eu quelques mots à dire avec l’incarnation de la Chance si elle avait existé, mais à défaut d’avoir une personne physique à laquelle s’adresser, le tatoué ne pouvait que s’en prendre à une entité inconnue au derrière de laquelle il aurait volontiers mis son pied.
Il aurait pourtant dû passer une bonne soirée. Maintenant qu’il pouvait se promener en paix sans avoir à couvrir le moindre centimètre carré de sa peau pour être certain qu’il ne ferait de mal à personne sans le vouloir, il avait décidé de participer à la grande fête foraine annuelle de Radcliff. Natif de la ville, ça faisait déjà plusieurs années qu’il n’avait pas pu se joindre aux festivités à cause de sa mutation, et cela lui avait assez pesé. Il comptait bien rattraper toutes ces années de frustration, même s’il devait le faire tout seul. N’ayant pas vraiment beaucoup d’amis, il s’était résigné très vite à y aller en solitaire, et finalement, il ne s’en portait pas plus mal. Il avait pu faire son petit parcours, regarder les attractions de plus près, et il s’était même autorisé une tasse de vin chaud épicé et un beignet pour l’aider à braver la foule et le froid de l’hiver. Sa veste en cuir râpé sur le dos, il avait vagabondé ça et là, jusqu’à arriver face à un grand manège à sensation. Il l’avait regardé tournoyer à toute vitesse et écouté les participants hurler de peur et d’excitation, rendus groggys par l’adrénaline qui devait couler à flots dans leurs veines. Peut-être avait-il regardé un peu trop attentivement, ou peut-être avait-il sourit sans s’en rendre compte ; toujours est-il que le jeune homme qui s’occupait de ramener des participants l’avait repéré et s’était mis en tête de le faire monter. Le vacciné avait d’abord refusé poliment, mais, petit à petit, il avait fini par se laisser tenter. Après tout, ça ne durerait que quelques minutes, rien de bien affriolant, et ça l’amuserait assez de tenter ça pour la première fois.
Un instant plus tard, il était attaché dans un siège aux côtés de trois inconnus. Une fois toutes les rangées remplies, la machine se mit en marche. Alfie se prit au jeu très rapidement, riant et hurlant avec les autres. Le manège tournait, et tournait, et tournait … et du coin de l’œil, tout à coup, l’ancien junkie vit ce qui ressemblait à une explosion illuminer la fête. Sa bonne humeur redescendit rapidement, mais ce ne fut que lorsque son siège s’arrêta à quelques mètres au-dessus du sol qu’il put réellement prendre conscience que quelque chose n’allait pas du tout. Sous ses pieds, il vit une foule en panique se mettre à fuir en hurlant en direction des sorties les plus proches. Une autre explosion retentit, et en se retournant, Alfie parvint à voir de gigantesques flammes commencer à dévorer les attractions centrales. Il ne faisait aucun doute qu’elles ne tarderaient pas à se répandre et à tout carboniser sur leur passage. Il fallait qu’il parte de là, et vite. Oui mais voilà : il était actuellement suspendu dans le vide, l’opérateur du manège aux abonnés absents. Seul point un tant soit peu positif à son malheur : sa ceinture s’était déverrouillée. Il était donc libre de ses mouvements – et libre aussi de tomber droit vers sa mort au moindre geste mal calculé. Il n’avait pas vraiment le vertige, mais il n’était pas un grand fan des hauteurs, surtout lorsqu’elles risquaient de le tuer s’il avait le malheur de se pencher un peu trop. Une voix sur sa droite le fit sortir de ses pensées. Il tourna la tête vers un homme à l’air à peine plus jeune que lui. Il fut un peu surpris de la qualité de son langage, surtout dans ces circonstances, mais il secoua la tête pour lui répondre.

- Non, c’est pas sûr du tout. Mais ça vaut mieux que d’attendre ici que le feu vienne nous cueillir.

Il regarda autour de lui. A côté de l’inconnu se trouvait une jeune femme aux cheveux clairs, et à sa gauche à lui une jeune femme qui avait visiblement l’air de paniquer. Alfie ne pouvait pas spécialement lui en vouloir, lui qui n’en menait pas large non plus. Il allait falloir trouver un moyen de descendre et de faire descendre toutes les personnes encore piégées.

- Il faudrait … il faudrait pouvoir retourner au sol et réactiver la machine.

Ca n’allait certainement pas être une partie de plaisir. Mais des vies étaient en jeu, dont la sienne, et il ne comptait certainement pas y mettre un terme ce soir. Il priait simplement pour ne pas faire de crise d’épilepsie maintenant, parce qu’elle lui serait très certainement fatale.

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Je tiens le bras d'Alejandro. Je suis tellement fière qu'on puisse faire une vraie sortie ensemble comme ça. C'est juste tout ce que je voulais, en plus de l'entraînement qu'il me donne. Je veux être digne de lui, aussi forte que lui. C'est une sale obsession, je le sais parfaitement, ça me hante depuis des années d'avoir un frère avec qui je n'ai rien partagé avant mes 20 ans. Aujourd'hui je suis juste avec lui, j'ai réussi tout ce que je voulais alors je profite et on a le droit de s'offrir un peu de bon temps. Je suis ravie de tout cela. Je mange de la barbapapa, je ris avec mon frère et on s'amuse dans des manèges. Je n'avais ni goûté de telles sucreries, ni fait autant de manèges, même vu, chez moi on a un manège qui marche manuellement, on doit pousser et faire tourner une manivelle pour que les enfants tournent dessus, sinon il aurait été pillé et volé et qu'on n'aurait plus rien eu. Mais on ne payait pas aussi cher les tous, ici tout semble beaucoup plus cher, avec 4 dollars, je voulais presque nourrir ma famille pour deux jours, ici c'est le prix pour avoir de sacrés sensations fortes. Je ne me plains pas, je gagne bien ma vie, je m'en sors bien, je vis chez mon frère, pour le moment tant que les services de l'émigration  ne m'auront pas retrouvé, tout pourra aller pour le mieux. Je ne pourrais pas vivre dans la sécurité précaire indéfiniment, je le sais. Un jour ou l'autre on me dénoncera, on m'aura et je devrais partir. Fuir ? Je verrais je suppose, je suis jeune et j'ai de bonnes ressources. Et j'ai un frère maintenant, je suis persuadée qu'il ne me laisserait pas tomber, je crois qu'on commence à former une véritable équipe. C'est tout ce que je voulais. Enfin bon, profitons de l'instant présent, je me régale avec un taux de sucre beaucoup trop élevé mais c'est parfait. On avance doucement en riant, en voyant que tout semble vraiment sympa. Mais lorsque je vois ce manège, je m'arrête. Je regarde les gens dans l'attraction qui crient. J'en frissonne, bon sang, ils sont dingues ici, je veux ça moi aussi. Je lance un regard à mon frère qui lui semble résigné, je crois que je ne l'aurais pas sur ce coup, il ne me suivra pas. Ce n'est pas grave je peux parfaitement y aller toute seule et il peut m'encourager. Je lui fais un grand sourire. «  tu vas voir ta sœur est une vraie guerrière ! » je ris et je prend 5 dollars dans mon jean, oui c'est toujours aussi cher et je file dans la queue. Al' m'attend. J'ai de la chance, le prochain tour est le mien, mon cœur bat fort. Allez, ça va être géniale, mon premier grand manège. Je me sens comme une gamine. Je vais m'installer, je suis à coté d'une femme un peu plus âgée, elle est magnifique et je me dis aussi qu'il faudrait que je trouve une femme à mon frère, j'ai l'impression qu'il ne sait plus trop s'y prendre avec les femmes, je peux comprendre  mais bon. Je lui fais un léger sourire. Je regarde mon frère a lors qu'on referme nos sécurités, je lui fais un coucou et c'est parti.

Je ne vois plus rien, je suis morte de rire. Cela bouge dans tous les sens, je m'accroche, je tente de lâcher mes mains, mais à ce moment là, il se passe quelque chose. Alors que mon cœur s'emballait, il le fait juste un peu plus. Un bruit d'explosion. Je déglutis, je n'arrive pas vraiment à voir les choses. Je sens rapidement une odeur de brûler, je ne vois plus Al, je ne panique pas... la machine s'arrête assez vite. On aurait sûrement dû pouvoir descendre, je ne sais pas, seulement rien. Je tente de soulever la ceinture mécanique qui ne bouge pas. Cela semble être la même chose pour ma voisine. Bordel ! Je tente de rester calme, comme Alejandro me l'a appris, ne pas paniquer pour rien. Je vois que les deux hommes à coté eux peuvent remonter les sécurités, je force encore, toujours rien. Bon sang, on ne peut pas rester ici alors qu'on voit tout le monde partir en courant, c'est une explosion qu'il y a eu... pas n'importe quoi. J'entends la fille à coté de moi paniquer. Je tends ma main à la jeune brune à coté de moi. « hey, ça va aller d'accord ? On va trouver un moyen de nous délivrer du manège » je tente de lui montrer un sourire, ce qui n'est pas évident, on se sent affreusement coincée quand même. « je m'appelle Rosa et vous ? » je tente de la faire de détendre, discuter semble être une bonne idée ? Je tourne ma tête de l'autre coté vers un homme. Deux même, ils ont leur ceinture déverrouillée eux. « Vous avez une idée de comment descendre ? Il n'y a pas d'échelle de secours prévue ? » j'en sais rien, il suffit que je monte la première fois dans un truc comme ça pour qu'il se passe quelque chose, ce n'est pas de chance.

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Aloys n’est guère familier avec tout cela, mais il a regardé le manège tourner pendant suffisamment de minutes pour comprendre qu’il y a un problème. Et qu’il n’est pas très sûr de détacher de cette manière sa ceinture de sécurité alors que le support est amovible et qu’à tout moment l’ensemble peut reprendre son cycle. Pourtant, il se redresse, avec un manque assurance si flagrant qu’il se demande pourquoi il ne reste pas plutôt assis. Peut être parce que la jeune femme à quelques sièges de lui panique, peut être aussi parce qu’il faut bien trouver une solution à ce problème. Aloys a la surprise de voir qu’il conserve malgré tout son sang froid. Le chirurgien n’opère peut être plus, il reste un homme qui a appris à agir sous pression et à sauver des vies alors que les secondes se faufilent et disparaissent, plus sensibles et plus fragiles que des respirations. Sa main se pose sur un siège, il se glisse vers le suivant. Puis vers le suivant. - Non, c’est pas sûr du tout. Mais ça vaut mieux que d’attendre ici que le feu vienne nous cueillir. Son attention se tourne vers celui qui a parlé et qui est libre, lui aussi, détaché de son harnais. Le feu, quel feu ? Le regard d’Aloys glisse vers le bas et la foule en panique qui s’agite de partout. Et vers le brasier incontrôlé. Aloys écarquille les yeux. Le feu, c’est vrai, il n’y avait pas pensé. Il n’a jamais aimé mourir à cause du feu même si ça ne l’a pas empêché de se jeter dans un brasier pour sauver un homme, une cinquantaine d’années plus tôt. - Il faudrait … il faudrait pouvoir retourner au sol et réactiver la machine. Retourner au sol ? Les sourcils d’Aloys se troublent d’appréhension. Il s’accroche aux sièges, essaye de tourner sur lui-même. Il n’est guère sportif et encore moins adroit lorsqu’il s’agit d’escalade. Une troisième voix se mêle à la réflexion.

« hey, ça va aller d'accord ? On va trouver un moyen de nous délivrer du manège » Un sourire s’étire sur les lèvres d’Aloys qui est à présent juste à côté des deux jeunes femmes. « Oui, vous avez tout à fait raison Mademoiselle, on va trouver un moyen, il ne faut pas paniquer. » « je m'appelle Rosa et vous ? » Aloys se rassoit, tentant de faire le moins de geste brusque pour ne pas amplifier davantage les oscillations de l’ensemble. « Aloys. » Il est médecin, il devrait savoir rassurer les personnes, offrir un visage calme et confiant. C’est ce qu’il fait, d’ailleurs. Sa voix douce invite à la confiance, son léger sourire, au calme. « Vous avez une idée de comment descendre ? Il n'y a pas d'échelle de secours prévue ? » Elle ne s’adresse pas à Aloys, il hésite pendant une seconde à intervenir de peur de déranger ou de mettre mal à l’aise. Mais la chaleur des flammes qui, sans les atteindre pour le moment, fait onduler l’air à plusieurs mètres de là le fait passer outre sa timidité. « Quelle est exactement la priorité ? Faire en sorte que vous puissiez sortir de sièges ou que nous essayions de remettre en marche ce manège ? Est-ce que… l’un d’entre vous est un mutant ? Malheureusement, mon aptitude m’a été ôtée il y a peu. »

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Alfie regardait tour à tour ses camarades d’infortune et le vide sous ses pieds. Il n’avait pas particulièrement envie de voir ce qui pourrait arriver s’il avait le malheur de glisser malencontreusement, plus aucune protection ne le retenant maintenant que sa ceinture s’était détachée. Au moins, il pourrait tenter de jouer les acrobates plutôt que de rester accroché à son siège comme les deux jeunes femmes bloquées avec eux. Il n’avait aucune idée de la manière dont elles pourraient être décoincées de leur prison de métal. En tout cas, il doutait que ça puisse se faire depuis leur perchoir. Il allait falloir descendre et actionner le manège pour les faire atterrir en douceur, puis déclencher le mécanisme qui les laisserait sortir – le tout avant que l’incendie ne les rattrape. De là où il était, le vacciné avait une vue somptueuse sur les flammes dévorant tout sur leur passage. Combien de personnes étaient prises au piège alors qu’elles s’attendaient à passer une bonne soirée ? Il espérait que les pertes ne seraient pas trop lourdes, à défaut de prier pour l’impossible, à savoir pas de morts du tout.
Il tourna la tête lorsqu’il entendit les trois inconnus se présenter les uns les autres, et celui qui se faisait appeler Aloys se tourna vers lui. Il lui trouvait un air étonnamment doux et un regard sage malgré l’urgence de la situation. Quelque part, il en fut rassuré. Au moins, il savait que cet homme ne paniquerait pas bêtement en les mettant encore plus en danger tous les quatre.

- Alfie …

Il regarda autour de lui une fois encore, lorsque la mention d’une mutation lui fit redresser la tête avec surprise. L’un d’entre eux était-il mutant ? Si oui, ça serait une aubaine – tant que la mutation en question pouvait leur permettre de descendre. La sienne n’aurait été d’aucune utilité. Visiblement, Aloys avait été vacciné lui aussi, sa tournure de phrase laissant peu de place au doute. Et la demoiselle à la peau sombre, Margo, n’avait pas l’air d’être mutante du tout. Il ne restait plus que Rosa, mais à en juger par son expression, elle n’avait pas de pouvoir sous la main qui puisse les téléporter hors de danger. Le tatoué haussa les épaules.

- J’en ai plus non plus, et de toute façon elle aurait pas aidé.

Il réfléchissait, observant les possibilités qui s’offraient à eux. Attendre de l’aide était hors de question : ils auraient le temps de mourir cuits à point bien avant que les secours ne les atteignent. Et de toute façon, même si les flammes n’arrivaient pas à les brûler, elles fragiliseraient la structure de l’attraction qui finirait par s’écrouler sur elle-même, les entrainant dans sa chute. La seule solution, c’était de jouer aux acrobates et de descendre en s’accrochant à ce qu’ils pouvaient. Il se tourna vers Aloys.

- Je crois qu’il va falloir y aller sans filet …

Il souleva sa ceinture, se tenant d’une main à son siège pour ne pas risquer tomber, puis, doucement, commença à se redresser. Il ne faisait pas un geste plus vite que l’autre, trop inquiet de la chute mortelle qui l’attendait s’il avait le malheur de se montrer trop rapide. Rassemblant son courage et ses forces, il se mit à califourchon sur les fauteuils, faisant face à la grande tige de métal qui le mènerait au reste de la charpente de fer et de boulons. Il se tourna vers l’autre vacciné.

- Si vous arrivez en bas avant moi, soyez gentil, attendez que je sois descendu avant de remettre la machinerie en marche.

Il se tourna ensuite vers les deux captives.

- On va réenclencher la console … On fait vite, promis.

Il leur adressa un pauvre sourire qui se voulait rassurant, puis se mit à avancer, toujours à califourchon. Il y avait bien longtemps qu’il n’avait pas senti de telles décharges d’adrénaline le parcourir.
Il espérait simplement qu’elles ne déclencheraient pas une crise d’épilepsie alors qu’il était suspendu à vingt mètres au-dessus du sol.

Spoiler:

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C'est dingue la vie. Il y a quelques minutes je me trouvais avec mon frère, je lui tenais le bras, je dévorais une barbapapa, on passait du temps tous les deux et j'étais ravie de le rattraper. Maintenant je me retrouve coincée dans un manège en hauteur et  on voit clairement que la fête foraine est en train de s'embraser. Je suppose que l'on va trouver un moyen de sortir de là, la fête foraine ne doit pas être totalement vide. Il doit bien y avoir quelqu'un non ? Je ne suis pas le genre de fille qui panique, je suis plutôt calme et je tente de relativiser. Peut-être que sur terre à ce moment-là il y a une situation largement pire. Et puis on pourrait être morts comme c'est sûrement le cas de certaines personnes qui se trouvaient près de l'explosion qu'on a entendu. Je ne vois plus mon frère, je suppose qu'il s'est mis à l'abris ou alors qu'il aide des gens, j'espère qu'il va bien, je crois que c'est plutôt de ne pas le voir qui m'angoisse. Mais ce n'est pas le moment Al est bien plus fort que moi, il s'en sort forcément.

Ce que je tente de faire c'est rassurer la fille à coté de moi, elle, elle panique contrairement aux autres. Je peux comprendre cela ne doit pas être très agréable si on ale vertige ou tout un tas de trucs phobiques. Mes phobies ne vont pas parties de celles qui pourraient être là. Je n'ai pas le vertiges, je n'ai pas peur d'être bloquée, j'aimerais certes que cela s'ouvre et que l'on puisse vite sortir mais cela ne semble pas possible alors on va juste réfléchir à un plan. Résumons tout le monde semble se présenter. Je ne les connais pas, qui me dit qu'il n'y a pas un mutants dans le coin ? Déjà ce Aloys est vacciné, très bien, pourtant je sens qu'il est plutôt pro-mutant ou en tout cas pas contre, il ne semble pas heureux de cette perte. J'observe, les autres ne parlent pas de dons qui puissent aider, je suppose donc qu'ils sont vaccinés, hunter ou humain. Parfait je crois. Je préfère largement. On a donc Margot la fille qui panique, Alfie le métisse et le fameux Aloys. Je les regarde et j'hésite deux secondes, ok je vais être sympas et pas méfiante, après tout on est toutes les deux coincées et ils sont notre seule carte de sortie sans brûler. "Rosa" je suppose qu'on peut faire attention à mon accent hispanique que je déteste mais là j'ai autre chose à penser qu'à faire attention qu'on ne l'entende pas. " vous prenez un gros risque à descendre comme ça, faîtes attention que le métal ne chauffe pas, on sent la chaleur des flammes arriver de plus en plus " Je ne sais pas si remettre le manège en route est une bonne idée. " Par contre, je doute qu'on puisse le remettre en route, il doit y avoir des débris dans le moteur, du moins c'est une hypothèse, c'est l'anarchie en bas, si c'est le cas ça risque d'exploser. Regardez s'il n'y a pas un bouton de commande des ceintures, on se débrouillera après je crois que c'est une meilleure alternative pour tenter de ne pas finir en bouillie. " je tente de les regarder mais avec ce truc qui me colle au dossier par les épaules, je me sens prisonnière c'est trop frustrant bordel, je ne peux rien faire et je déteste dépendre des gens, surtout que je ne sais même pas si mon frère va bien en bas. " faites attention à vous " c'est tout ce que je peux dire, ils semblent courageux en tout cas pour vouloir sauver deux inconnues. Je tends ma main à Margo et je lui souris, je serre ses doigts doucement pour la rassurer. " ça va aller tu vas voir, ils vont y arriver " il paraît qu'être positif attire les choses positives, allez espérons que ça marche.

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Aloys est timide, introverti, dans son mode et totalement en décalage avec le reste de la population. Aloys fait souvent des remarques peu pertinentes, il s’intéresse à des choses inintéressantes, n’est pas de ce temps, pas de cette époque, frappe systématiquement trois fois, puis deux, puis trois avant d’entrer dans une pièce et a des manières désuètes lorsqu’il évolue en société. Aloys a de nombreuses défauts et manies mais il y a bien une chose qu’on ne peut lui reprocher : il cède rarement à la panique, réfléchissant avec une lucidité et un sang-froid auxquels on ne s’attend généralement pas venant de lui. Il ne panique pas, donc, il va au plus direct et au plus pratique après quelques présentations sommaires. Il tente d’ailleurs de bien mémoriser les noms des autres infortunés. Rosa, Margo, Alfie. Un petit sourire simple qui se veut rassurant, il cherche à définir quelle est la priorité, s’interdisant la fatalité, conservant son calme et une vision claire de la chose… aussi claire, du moins, que lui permet sa compréhension sommaire de telles attractions. Alors il propose le plus simple : peut être qu’il y a dans leur petit groupe d’autres personnes ayant, comme lui, quelque habileté particulière leur permettant de s’en sortir sans dommage ? Une première réponse, négative, de la jeune appelée Margo. « J'aurais adoré pouvoir me téléporter, là, maintenant, tout de suite. Malheureusement, la seule aptitude que je possède, c'est celle de flipper comme une gamine. » La main d’Aloys se pose sur l’épaule de la jeune femme. « C’est tout à fait normal d’avoir peur dans ce genre de situation. En fait, le contraire est bien plus étonnant. » Un sourire, complice. Il se tourne vers l’autre homme qui répond à son tour par la négative. - J’en ai plus non plus, et de toute façon elle aurait pas aidé. Je n’en ai plus non plus. Aloys est étonné de rencontré un autre… vacciné ? Oui, c’est le terme adéquat. La dernière, enfin, ne répond pas. Aloys s’en étonne, il fronce même les sourcils mais il n’ose pas réfléchir davantage à ce propos : si elle ne veut pas en parler, il ne sera pas celui qui l’y forcera, voilà qui est certain.

- Je crois qu’il va falloir y aller sans filet… Si vous arrivez en bas avant moi, soyez gentil, attendez que je sois descendu avant de remettre la machinerie en marche. On va réenclencher la console … On fait vite, promis. Aloys refuse de trembler. Ne disait-il pas à Margo qu’il était normal d’avoir peur ? Il n’a pas peur du vide, non, loin de là. Il n’a juste jamais fait d’escalade, n’a jamais été réellement sportif et il sait que tomber signera sa mort. Sa mort. Il comprend pleinement, brutalement, à quel point il est déroutant d’être mortel. " vous prenez un gros risque à descendre comme ça, faîtes attention que le métal ne chauffe pas, on sent la chaleur des flammes arriver de plus en plus. Par contre, je doute qu'on puisse le remettre en route, il doit y avoir des débris dans le moteur, du moins c'est une hypothèse, c'est l'anarchie en bas, si c'est le cas ça risque d'exploser. Regardez s'il n'y a pas un bouton de commande des ceintures, on se débrouillera après je crois que c'est une meilleure alternative pour tenter de ne pas finir en bouillie. " Son regard virevolte entre la jeune femme et l’autre homme. Il a peur, voilà qui est certain. Non pas de mourir, ou plutôt pas uniquement de mourir, mais il a peur aussi de ne pas être à la hauteur. Il sauve les gens sur des tables d’opération ou avec des médicaments, des vaccins, des attelles. La dernière fois qu’il a essayé d’en sauver sans sa blouse de médecin, aucun n’en a réchappé et lui, l’immortel, ne s’en est sorti que de justesse. Une goutte de sueur chatouille ses tempes lorsqu’elle dégringole ses cheveux pour tomber dans sa nuque. A son tour, il attrape le siège et, les mains tremblantes, s’agrippe à ce qu’il peut trouver. « Ne vous en faites pas, tout sera réglé dans les minutes à venir, j’en suis certain. C’est une bonne idée de chercher à déverrouiller les sièges, mais faites bien attention à vous aussi. » Sa voix n’est plus qu’un filet d’air.

Lentement, il parvient à la hauteur de l’autre vacciné, tente de ne pas faire d’erreurs, se surprend à regretter sa mutation qui lui aurait permis de sauter, tout simplement. Un temps interminable, ils vont toucher terre. Et le pied d’Aloys dérape, ne le laissant suspendu qu’à une main, à trois mètres du sol.