Chaque bouffée d'air lui brûlait l’œsophage. La belle ignorait où elle était, ou ce qu'il se passait, tout ce qu'elle savait c'est qu'à chaque fois qu'elle tentait de reprendre son souffle, elle avait l'impression qu'on la marquait au fer rouge. Roos avait l'impression d'être coincée dans un mauvais rêve ; l'un de ces désagréables cauchemars, où l'on ne peut rien faire. Où l'on veut prendre ses jambes à son cou, mais rien ne répond. Elle fût saisie d'une quinte de toux, qui la plia en deux. Chacun des muscles de son corps lui crièrent d'arrêter. Pourquoi avait-elle si mal ? La mutante revenait peu à peu à elle, se réveillant de ce mauvais rêve avec la désagréable sensation qu'elle y était encore. Quand s'était-elle endormie ? Et où ? Elle n'avait aucun souvenir d'être rentrée chez elle, encore moins d'avoir quitté la fête des fondateurs. La fête des fondateurs. A cette image, la belle ouvrit violemment les deux yeux, reprenant conscience d'un coup.

Autour d'elle, un brasier fumant. Une scène chaotique qui lui arracha un soupir de choqué. Tous les souvenirs lui revinrent d'un coup : les préparatif, l'attente sur les marches de l'hôtel de ville et surtout, l'explosion. Violente, destructrice. Le souffle l'avait fait voler quelques mètres plus loin, avec les décombres de la bâtisse en flamme. Un gémissent s'échappa de la barrière de ses lèvres. La rousse était belle et bien coincée dans un mauvais rêve, coincée sous les morceaux fumants de la mairie. Autour d'elle, des cris, des pleurs, des plaintes. Elle n'était pas seule. Une pensée qui, étrangement, la rassura un peu. Non, elle n'était pas heureuse de savoir tout ces pauvres gens ensevelit sous les décombres ; mais si la moitié de la ville était prisonnière, la belle avait peut-être plus de chance d'être secourue. Elle décida cependant de ne pas attendre les secours -qui ne viendrait peut-être jamais. La belle toussa à nouveau, tentant de nettoyer ses poumons encrassés par la fumée et les cendres. Son corps émis une nouvelle plainte ; elle avait l'impression d'avoir été complètement aplatit par les décombres. Doucement, Roos tâcha de relever la tête pour estimer l'étendu des dégâts. Elle avait été projeté contre le mur du bâtiment voisin, épargnée par le plus gros des projectiles. Sur son corps, quelques débris qu'elle estima facile à balayer. Ses jambes semblaient ne pas avoir subi trop de dégâts, seulement une méchante plaie ouverte qui lui traversait le tibia. Elle avait la paume gauche ouverte, surement à cause des éclats de verre qui chevauchaient le sol. Rien de bien grave, jusqu'à ce que son regard s'attarde sur son bras droit : c'était de là que venait la douleur lancinante. Un énorme bloc de béton était posé contre le mur, sur son bras coincé jusqu'au dessus du coude. Incapable de se relever, la belle paniquée tâcha d'envisager les différentes options. La première était une bien mauvaise idée : elle essaya de tirer son bras de tout les côté, mais aucun résultat, à part le cri de douleur qui s'échappa de sa bouche. La deuxième option était d'attendre sagement les secours, ils ne devraient pas tarder. Les images du film 127 heures lui revinrent en mémoire, accélérant son souffle à l'idée de devoir perdre son bras. Non, non ; elle n'était pas coincée dans le désert, quelqu'un allait bien venir la chercher. Comme en écho à ses pensées, des bruits de pas se firent entendre au milieu des décombres fumants, brisant les morceaux vitres étalées sur la route.  « Aid- » Le cri resta coincée dans la gorge endoloris de Roos, qui gémit de douleur. Elle toussota, avala sa salive, et réessaya.  « Aidez-moi ! » lâcha-t-elle de sa voix rauque, encore polluée par les cendre, étouffée par les bruits chaotiques de la ville en feu.  « Par ici, s'il vous plait ! Venez m'aider ! »  

L'esprit pratique de la belle lui permettait d'apprécier la scène chaotique sous ses yeux sans céder à la panique totale. Roos était une personne calme, réfléchie, qualités précieuses surtout en moment de crise. Elle savait qu'il ne servait à rien de céder à la terreur, de pleurer, crier et attendre de se faire secourir. Comme durant la plupart de son enfance, et adolescence, la belle allait se débrouiller toute seule. Son regard s'évada à nouveau vers le bloc de granit assit sur son bras. Presque toute seule. Malgré les cris et les plaintes qui lui parvenaient, personne ne semblait se trouver à proximité d'elle. Les souvenirs étaient encore flous, mais elle se rappelait avoir attendu sagement sur les imposantes marches au pied de la mairie. Comme d'habitude, elle observait à l'écart les festivités, plutôt que d'y prendre part ; la belle ne s'était jamais vraiment sentie concernée par ces beuveries. Elle n'avait jamais aimé le goût de l'alcool. Elle était sortie, dans l'espoir de s'imprégner un petit peu de l'esprit festif de cette journée si spéciale. Peut-être allait-elle tomber sur Viktor ? Pourtant, regarder les habitants marcher en zig-zag n'avait fait que renforcer ce sentiment d'être étrangère, n'importe où elle allait. Roos avait même dans l'idée de rentrer chez elle, décidée à reprendre le chemin de son appartement ; puis l'explosion l'avait envoyer voler.

Les pas se rapprochèrent et la silhouette d'un jeune homme, apparemment indemne, se dessina devant elle. La mutante entama de dégager les gravas amassés sur son corps en attendant qu'il arrive à son niveau. Du dos de la main, elle poussa les petits morceaux de granits et autres bouts de verres qui juchait ses vêtements, qui avait entaillé légèrement sa peau à plusieurs endroits. La belle sentit une goutte de sang rouler le long de sa tempe, descendre contre sa joue droite. D'un mouvement de tête, elle tâcha de l'essuyer contre son épaule quand l'homme arrive à son niveau. Roos s'apprêta à parler, mais fut couper par son "sauveur".  « Je peux vous aider. Mais je n'ai pas l'habitude de faire ce genre de choses gratuitement. » Un silence, la jeune Bristow se contenta de le fixer, un mélange de surprise et de dédain sur le visage. Elle voulu répondre, mais ne trouva pas de réponse suffisamment cynique. Si sa main n'était pas coincée sous un bloc de granit, elle aura surement fini sa course sur le visage de l'inconnu. Au bout de quelques secondes, le jeune homme se rattrapa pourtant. « Je rigole. » Il n'y avait eu aucune forme d'humour dans cette présentation hâtive, Roos en était persuadée. Mais elle était en bien mauvaise position, elle ne pouvait pas se permettre le luxe d'attendre un sauveur moins agaçant. Malgré tout, c'était plus fort qu'elle, la réplique, acerbe, vola toute seule. « Hilarant. » Roos souria, d'un sourire tellement faux qu'il était clair que le jeune homme ne pouvait pas se tromper : elle se fichait clairement de lui. « Okay, je ne suis pas médecin, mais la jambe, ça devrait aller. » Malgré le sang qui coulait toujours doucement le long de son mollet, la belle lui faisait confiance ; l'urgence n'était pas là. « Ce n'est pas la jambe qui m'inquiète .. » souffla-t-elle, plus sèchement qu'elle ne l'aurait voulu. « Le problème, ça va être le bras. Vous pouvez bouger les doigts ? » La main coincée sous le débris, elle doutait pouvoir y arriver. Pourtant, son index réussit à remuer dans l'espace entre le sol et la roche ; non sans lui arracher un gémissement plaintif. Roos hocha doucement la tête. « Oui, j'y arrive ! J'ai essayé de sortir mon bras, mais le bloc est trop lourd. » Et la douleur, trop insoutenable. Mais ça, Roos était trop fière pour l'admettre ; elle prendrait sur elle. « Vous ne voulez pas essayer de le basculer ? »  

Pour une fois qu'elle sortait de son petit appartement étriqué, il avait fallut qu'elle se retrouve victime d'un accident. Roos se maudit en silence. Elle qui avait voulu faire un effort, tâcher de se sociabiliser un peu comme lui répétait souvent sa sœur, voila ce qu'elle récoltait : un bras bloqué sous la pierre, et probablement un vilain choc à la tête. Elle remercierait Anika plus tard. Pour l'instant, elle devait trouver un moyen de sortir de là, et de trouver du secours. L'homme venu à sa rescousse était un bon commencement : ensemble, ils allaient pouvoir se dégager des ruines fumantes et menaçantes. « Vous savez qu'être un peu moins froide avec le type qui essaie de vous sauver la vie, ça peut être cool aussi. » Pas faux. Mais Roos était du genre irrécupérable, ne pouvant s'empêcher de se plaindre ou de faire des commentaires désagréables. Un côté de sa personnalité qui ressortait tout particulièrement quand la belle se sentait en danger, mécanisme de défense naturelle de ce petit bout de femme. Au lieu de s'excuser, ou au mieux de se taire, la belle continua.  « C'est noté pour la prochaine fois où je me retrouverais coincée sous un bloc de granit. » Elle tâcha de dire ça de manière naturelle, pour sauver les meubles, mais la réplique sortit plus sarcastique qu'elle ne l'aurait voulu. La belle jura silencieusement, s'énervant contre elle même, contre les terroristes, contre architecte qui avait conçu l'hôtel de ville, contre le monde entier.  Elle aurait décidément dû rester chez elle.

L'homme venu à sa rescousse tenta de la rassurer. Ça allait aller, lui assurait-il. Rien n'était moins sur, pensa la rousse, préférant garder ses commentaires pour elle, peu désireuse de se mettre son sauveur à dos. Il estima rapidement les dégâts et en vint aux même conclusions que Roos, la priorité étant son bras. A cette idée, la belle s'inquiéta soudainement : comment allait-elle avec un bras cassé ? Allait-elle pouvoir travailler correctement ? Surement pas la priorité du moment, pourtant, le travail de la belle représentait la majeure partie de sa vie ; sans ça, elle serait laissée à son sort, plongée dans ses mauvaises pensées. Mais chaque chose en son temps, il fallait encore qu'elle sorte de là saine et sauve. La belle questionna le jeune homme, lui demandant si il pouvait la dégager. Réponse, comme elle s'y attendait, comique. « J'espère bien y arriver, ma virilité en prendrait un coup sinon. » Elle était vraiment tombée sur un petit marrant. Mais la rousse avait retenu la leçon, et se contenta de rouler les yeux au ciel en espérant qu'il ne le remarque pas. Une fois qu'elle serait dégager, elle aurait tout le loisir de lui envoyer des piques. L'inconnu se baissa, et entama de faire bouger la pierre ; Roos tâcha de retenir les gémissements plaintifs, mais en laisser échapper quelques-uns. Chaque fois que le débris bougeait, il écrasait un peu plus le bras brisé de la belle. Finalement, dans un soupir de soulagement, le bloc alla s'écraser à côté de la mutante ; elle était libre. La rousse ramena vivement son bras meurtrie contre sa poitrine, lui arrachant une autre plainte. « Vous pouvez vous relever ? » Il lui tendit une main pour l'aider à s'extirper des débris, qu'elle s'empressa de refuser. « Ne me touchez p- » souffla-t-elle en entamant de se redresser. Pourtant, dès qu'elle tâcha de s’asseoir correctement contre le mur -trop vite-, sa tête lui tourna et elle perdit l'équilibre, s'écrasant de justesse contre le sol jonché de verre brisé. La jeune Bristow avait décidément dû prendre un mauvais coup sur la tête lors de l'impact. Elle ferma vivement les yeux, tâchant de reprendre ses esprits. Plus doucement cette fois, elle s'appuya sur sa main valide pour s’asseoir correctement, ramenant ses jambes contre. Roos avala sa salive, avant de rouvrir les yeux, tâchant de retrouver contenance. « Ne me touchez pas, s'il vous plait. » finit-elle, encore secouée par son handicap.

Roos avait toujours mis un point d'honneur sur son indépendance : toute sa vie, elle s'était débrouillée toute seule, refusant l'aide de ses parents, de ses amis, de personne. Elle n'aimait pas être redevable, et encore moins faire se retrouver à faire la charité. C'était pour cela qu'elle avait payer ses études toute seule, et c'était aussi pour cela qu'elle détestait être malade. Ce sentiment de faiblesse, d'impuissance, c'était tout ce que la rousse détestait. Elle n'aimait pas être assistée, détestait devoir compter sur quelqu'un d'autre. Aussi, la situation actuelle se rapprochait plus du cauchemar, pour la belle qui se rendit compte qu'elle ne pourrait probablement pas sortir de ce brasier toute seule. Elle aurait voulu renvoyer l'homme, lui dire de la laisser toute seule ; son bras à présent dégagé, elle n'avait plus besoin de lui. Du moins, c'est ce dont elle essayait de se convaincre, alors que la douleur qui lui compressait le crâne lui arracha une grimace de douleur. La chute avait certainement due être brusque. La belle n'était pas médecin, mais sa formation -et les nombreuses séries hospitalière qu'elle regardait- suffisait à lui faire deviner rapidement sa condition. Vu la douleur, et les vertiges, il s'agissait peut-être d'une commotion cérébrale légère. Et ces mots n'avaient rien de rassurants. C'est d'ailleurs pour ça qu'elle n'avait pas envoyer balader son sauveur, maintenant qu'elle était libre, la belle avait peur, peur d'être laissé seule dans ces ruines fumantes. Elle avait beau se convaincre qu'elle pouvait s'en sortir toute seule -comme d'habitude-, qu'elle n'avait pas besoin de lui. Mais la simple idée de le voir s'éloigner en vitesse lui glaça le sang. Pourtant, elle allait devoir faire un effort ; le jeune homme commençait à perdre patiente. Face à son refus, il s'accroupit à sa hauteur alors qu'elle acheva de se redresser correctement. « Il faut sortir de là et vous n’avez pas franchement l’air de pouvoir bouger toute seule. Je veux juste vous aider, je vous le promets. » Il avait raison. Les ruines fumantes menaçaient de s'écrouler sur eux à tout moment, de temps à autre les blocs bancals encore attaché à l'hôtel de ville roulaient le long des murs détruits, s’écriant dans un bruit glacial contre le sol. Le jeune homme lui adressa pourtant un sourire léger avant de continuer de la rassurer, geste qui apaisa quelque peu la jeune femme. La belle n'avait pas peur de lui -c'était peut-être un connard, mais il n'avait pas l'air d'un connard méchant-, tant qu'il ne savait pas pour sa mutation, tout devrait se dérouler sans bavure. Mais pour cela, il fallait que garde ses mains pour lui, loin de la peau noircie par les cendres de la jeune femme. Car l'effet de sa dernière injection s'était dissipé dans la journée, elle l'avait senti ; elle attendait la prochaine course pour empocher un peu d'argent et se payer le remède tant convoité. « Je n'ai pas peur de vous. » souffla-t-elle finalement, le ton fier qu'elle utilisait toujours quand quelque chose ne lui plaisait pas. « Mais je ne veux pas qu'on me touche, c'est tout. Je peux me relever toute seule. » Elle aurait voulu conclure par "je n'ai pas besoin de vous", mais ça aurait été signer son arrêt de mort. Il n'en aurait pas fallut plus au jeune homme pour partir sans un mot. « Vous savez que techniquement je ne suis pas obligé d’attendre votre approbation pour vous attraper et vous sortir de là, je le fais par politesse, mais j’ai pas l’intention de crever ce soir, donc, on va pas y passer la nuit. » Roos lui lança un regard assassin, suffisant -elle l'espérait- à garder l'inconnu à distance. Mais pour toute réponse, bornée comme elle était, elle s'attela à se relever toute seule. Son bras cassé contre sa poitrine, elle tâcha d'abord de s'accroupir -fermant les yeux pour ignorer le monde qui tournait autour d'elle-, avant d’attraper un bloc de béton à côté d'elle et de s'en servir pour se hisser sur ses jambes. Elle rouvrit les yeux, exténuée et essoufflée par cet effort qui lui avait parut inhumain. Roos avait beau paraître frêle, elle n'en était pas moins coriace. Elle releva un regard presque triomphant vers son sauver, comme elle avait relevé un défi informulé. « Vous voyez, je suis parfaitement capable de boug- » Mais la belle avait gagné trop d'assurance. Un pas vers le jeune homme suffit à lui faire perdre l'équilibre, et elle tomba d'un coup sur ses genoux, le regard paniqué. La belle jura silencieusement.

Roos voulait se battre, elle le voulait vraiment. Pourtant, le coup qu'elle avait reçu sur la tête l'avait trop assommé pour qu'elle se débrouille toute seule. Elle aurait décidément besoin de l'aide de grossier inconnu. Certes, elle n'était pas la plus aimable des demoiselles en détresse, mais elle n'était pas non plus tombée sur le plus vaillant des princes charmant. Le regard méprisant, il l'avait mis au défi de se relever toute seule et elle avait échouée. A genoux sur le sol, elle aperçut trop tard le jeune homme qui s'élançait vers elle pour la rattraper. Elle voulut l'éviter, mais c'était trop tard. La pression de sa main sur sa nuque lui fit l'effet d'une brûlure, toucher auquel elle était bien trop peu habituée. Roos serra les dents. Elle savait que trop bien ce qui allait arriver. Le temps que son pouvoir se réveille et se serait reparti. Le regard apeuré, son souffle s’accéléra soudain à la simple idée d'être saisie d'une prémonition. Grâce au NH24, ce n'était plus aussi invivable qu'avant ; pourtant, la puissance nouvelle dont elle avait écopée rendait les choses d'autant plus insoutenables. Une seconde, puis deux. Encore une et elle se sentit partir. Son souffle s'échappa et elle ferma vivement les yeux.

A sa plus grande surprise, elle les rouvrit et rien n'avait changé. Son sauver était toujours face à elle, sûrement en train de débiter une énième connerie. Le monde était toujours en feu, et les bâtiments menaçaient de s'effondrer. Confuse, elle reporta son attention sur l'homme qui roulait les yeux au ciel. Que racontait-il elle semblait être incapable de se concentrer assez pour trouver du sens à ses mots ; à la place, un murmure distant, feutré. Puis un bruit sourd déchirant l'air pesant de Radcliff. Roos pensa d'abord à un coup de tonnerre, pourtant, rien à l'horizon. C'est quelques secondes plus tard, quand l'énorme bloc de béton vint s'écraser sur le corps de l'homme à ses côtés qu'elle comprit. Le temps de crier et c'était terminé.

La belle rouvrit les yeux brusquement, reprenant son souffle. « -pourrez me détester si vous voulez par la suite, c’est pas mon problème. » Il ne lui fallut que quelques secondes pour comprendre. « Je suis vraiment désolée pour ça. » souffla-t-elle vivement, avant d'envoyer violemment ses deux pieds dans la poitrine de l'homme accroupis en face d'elle. Son sauveur se retrouva propulser en arrière, quelques mètres suffisant pour l'épargner de son sort. Elle se dépêcha de ramper en arrière à son tour, et de se rouler en boule. Le bruit sourd, puis l'impact. L'énorme bloc de béton qui venait se détacher du mur croulant se trouvait maintenant entre les deux survivants. Le souffle court, le regard de Roos refusait de se détacher de la pierre à quelque centimètres de son visage. « Tout vas bien ? » lâcha-t-elle finalement, lançant un regard inquisiteur de l'autre côté du bloc.

Roos n'utilisait pas son pouvoir, elle le maudissait. Elle détestait la sensation d'être projeté ailleurs, arrachée à la réalité et obligée d'assister à ces visions d'horreur. Elle souffrait chaque fois un peu plus en assistant à une nouvelle mort, un nouvel accident ; à chaque fois, c'était une petite part d'elle qui se détruisait, une part de son innocence et de sa candeur. Elle était loin, la joyeuse Roos, l'enfant joviale et souriante. Elle avait depuis longtemps perdu son optimisme, exposé trop longtemps aux pires scénarios possibles. Exposée à la mort, et au chagrin. Maintenant, il n'y avait plus que de la rancœur, et de la tristesse. Il lui arrivait même de ne plus réagir à ses visions, assistant aux plus violentes scènes sans broncher. Habitée à ces visions funestes. Et elle détestait ce changement qui s'était opéré en elle, inconsciemment. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour décider que son pouvoir était une malédiction, pour le bannir de sa vie quotidienne peu importait les sacrifices à faire. Pourtant, malgré tous ces efforts, elle était encore victime de ces projections, pour le meilleur et pour le pire ; et cette fois-ci, pour le meilleur. C'était l'une de ces rares fois où elle était heureuse de ne pas avoir réfréné une vision. Son sauver y aurait laissé la vie, et elle n'en serait elle-même pas sortie indemne, probablement. Le souffle court, elle avait bien du mal à réaliser ce qui venait de se passer sous ses yeux ébahis. Son cœur battait tellement fort contre sa poitrine qu'elle n'entendait plus que ça ; son regard fixé sur le bloc de béton en face d'elle, elle ne pouvait détourner les yeux. Au bout de quelques secondes, elle s'assura finalement que son sauveur allait bien. « Ouais, ouais, ça va et vous ? » souffla-t-il finalement, encore secoué par ce qu'il venait de se passer. « Encore en vie. C'est le principal. » lança-t-il, sa voix rauque encore douloureuse à cause de la fumée, sur un ton faussement optimiste. Il s'en était fallu de peu, mais il fallait se dépêcher. Ce ne serait pas le seul morceau de l'hôtel de ville à se détacher. Il fallait qu’ils trouvent refuge quelque part de plus sécurisé. Roos entendit son sauveur se relever difficilement, puis les blocs en face d'elle commencèrent à bouger, dévoilant finalement le visage de l'homme. La mutante souffla de soulagement en apercevant l’inconnu en un seul morceau, rassurée par sa présence. Décidément, elle n'aurait pas survécu longtemps sans l'aide miraculeuse du jeune homme. « Je sais pas comment vous avez fait ça, mais merci. » lança-t-il en se rapprochant de la rousse. La jeune Bristow se redressa comme elle put, gardant son bras cassé contre sa poitrine pour éviter de trop le bouger. La blessure la lança, mais elle réussit pourtant à sourire, seule réponse aux remerciements de l'homme. Le soulagement laissa place à la panique, Roos espérait qu'il ne lui pose pas plus de question. Elle ne voulait pas s'expliquer, pas question de dévoiler son pouvoir. Depuis qu'elle fréquentait Uprising, elle trouvait que beaucoup trop de personnes étaient au courant. « Faut qu’on bouge de là avant que le reste s’effondre. » Elle acquiesça vivement, ne bougeant pas cette fois-ci lorsque son sauveur se baissa pour l’attraper. Après tout, elle n'avait plus d'autre solution. Elle fut malgré tout touchée en voyant que l'homme s'appliquer pour ne pas effleurer sa peau. Il la souleva sans problème, la portant dans ses bras avant de s'éloigner des débris qui avait failli les ensevelir. « Merci. » souffla finalement Roos au bout de quelques seconde de silence. Un merci sincère, réel cette fois-ci. Un merci, pour pas seulement pour la porter ainsi, mais pour tous les efforts qu'il avait fait depuis le début.

L'homme la déposa sur un banc épargné par l'explosion, à quelques mètres de l'accident de la mutante. « Va falloir aller à l’hôpital.» No shit, pensa Roos, qui tenait maladroitement son bras blessé. Mais c'était fini les remarques désagréables, vu la situation elle ne pouvait pas se permettre. Un coup d’œil rapide sur sa jambe, le sang coulait toujours abondamment se la coupure sur sa cuisse. Doucement, la mutante enleva son chandail tant bien que mal, ne pouvant retenir un gémissement de douleur en ôtant sa manche droite ; elle pressa ensuite le tissu contre sa jambe avec sa main valide. Elle releva le regard vers son sauveur qui cherchait activement un moyen de transport, il n'allait pas la porter à pied jusqu'à l'hôpital. « Je m'appelle Roos, au fait.» lâcha-t-elle finalement, désireuse de connaître l'identité de son sauver. Elle balaya la scène apocalyptique du regard, alors qu'à quelques mètres de là un nouveau bloc de béton atterri sur le sol dans un bruit sourd. Il fallait qu'ils s'en aillent, et vite. « Je pense qu'il faut contourner les ruines, retourner vers l'hôtel de ville. Peut-être que les secours sont déjà arrivés là-bas.» lança-t-elle finalement, peu désireuse de s'approcher à nouveau de l'hôtel de ville, mais elle ne voyait pas d'autres moyens.

Le froid mordant de ce mois de novembre lui faisait regretter d’être partie ainsi. Habituée aux hivers glacials canadiens, elle n’avait pas pris peur devant cet fin d’automne, et pourtant ; entre la nuit et ses blessures, la belle commençait à grelotter. Pourtant, devant le sang qui s’écoulait sans s’arrêter de sa jambe, elle décida de défaire son chandail pour tenter de stopper le saignement. Sa peau usuellement albâtre devait parfaite translucide, la perte de sang et le froid n’arrangeant pas sa mine pâle. Elle tremblait maintenant, malgré tout ses efforts pour ne pas paraître affectée par les bourrasques gelées. son sauveur du se rendre compte de cela puisque quelques secondes après, il lui tendit sa veste. « Merci, c’est gentil. » lança-t-elle vivement. En temps normal, elle aurait volontiers refusé. Elle détestait inspirer la pitié, et préférait généralement se débrouiller par elle-même. Mais elle n’avait plus le choix, dans sa condition il aurait été stupide de refuser un tel service. L’agacement envers son sauveur laissa place à de la sympathie. Il était loin, l’homme qui sous-entendait une contrepartie pour lui sauver la vie. Pendant qu’il sillonnait les alentours du regard, Roos releva un regard timide vers cet homme qui l’aidait. Un mince sourire s’étira sur ses traits ; cela faisait longtemps que quelqu’un ne s’était pas donné autant de mal pour elle. Elle qui se murait dans la solitude et la tristesse, condamnée par son pouvoir, elle s’étonnait de ressentir de l’affection pour cet inconnu qui restait à ces côtés. Car après tout, il irait bien plus vite en la laissant derrière, il aurait très bien pu sauver sa vie et prévenir les secours en passant. A cette pensée, la rousse décida de se présenter. Elle souhaitait briser l’anonymat. Elle voulait placer un nom sur ces traits qui l’agaçaient autant qu’ils lui réchauffaient le coeur. Alvin, répondit-il. Roos se surpris à aimer ce nom, qui avait quelque chose de simple, et d’original.

Suivant les conseils de sa victime, Alvin décida de contourner l’hôtel de ville, de retrouver le centre-ville et, ils espéraient tout les deux, les secours. Quelques secondes plus tard, ses pieds décollaient du sol et Roos se retrouva à nouveau dans les bras de cet homme qui n’était plus si inconnu. Encore une fois, il tâcha de se pas la toucher ce qu’elle apprécia silencieusement, d’un mince sourire attendrit. Finalement, quand ils ne racontaient pas de conneries, le jeune homme n’était pas si désagréable. Une pensée qui fut suivit d’une remarque d’Alvin, qui confirma ce qu’elle s’imaginait. Elle voulu rouler les yeux au ciel, mais se retînt ; elle se forcerait à ne pas être désagréable, au moins pour paraitre reconnaissante. C’était le moins qu’elle puisse faire. Le se contenta de lui lancer un regard vide d’expression, non sans égarer son regard sur les bras qui portaient au dessus du sol. Elle remercia silencieusement ces fameuses heures. Lentement, mais surement, ils contournèrent l’hôtel de ville en ruine, tâchant d’éviter les passages les plus dangereux. A plusieurs reprises, Roos hésita à glisser sa main contre la peau du jeune homme, pour s’assurer que l’accident arrivé plus tôt ne se reproduirait pas. Mais, apeurée par ce qu’elle pourrait voir et la puissance nouvelle - causée par le sérum- de ses visions, elle se ravisa. La belle ressentait de plus en plus la morsure du froid, se réfugiant un peu plus contre Alvin, tirant son manteau contre elle. Son chandail était à présent trempé de sang, et l’écoulement ne semblait pas vouloir se stopper. Elle serra les dents. « J’espère que je ne suis pas trop lourde. » souffla-t-elle finalement après plusieurs minutes de silence, brisant l’atmosphère pesante qui s’était instaurée. Elle aurait aimé être l’une de ces personne qui trouvait quelque chose à dire, qui savait toujours mettre à l’aise les autres ; pourtant, elle n’avait jamais compris comment faire, peinant à trouver les mots pour faire la conversation. « Je peux peut-être marcher maintenant … » Elle-même n’était pas convaincue, mais elle était prête à essayer pour soulager son sauveur. Pourtant, elle aperçu les lueurs rouges et bleues qui reflétaient contre un mur en ruine à quelques mètres d’eux. « Par ici ! » souffla-t-elle en voulant pointer la direction au dessus de l’épaule du jeune homme. Elle se ravisa pourtant quand la douleur lui déchira le bras. Quelques mètres encore, et elle serait prise en charge.

Roos n’avait surement jamais été aussi heureuse d’apercevoir les lueurs bleues et rouges d’une ambulance. A peine son regard avait croisé le gyrophare criard qu’une large sourire vint s’étirer sur ses traits épuisés. Un soulagement. Elle ignorait si Alvin aurait pu la porter encore longtemps, elle avait beau avoir la ligne, elle avait malgré tout une taille honorable pour une fille de sa carrure. Et malgré le fait que son sauveur mentionne ses heures passés en salle de sport, il n’aurait pas pu continuer ainsi toute la nuit. Elle avait eu beau proposer de marcher, elle doutait de sa capacité à tenir debout après l’incident survenu plus tôt. Et puis il fallait la dire que la douleur lui déchirait le crâne presqu’autant que l’épaule. La belle s’était surement blessé lors du choc contre le mur. Elle soufflait enfin, rien qu’à l’idée de trouver refuge au chaud dans l’ambulance. En apercevant les lumières à son tour, Alvin appela les secours et se hâta vers les rues animées. Autour d’eux, de nombreux blessés avait trouvés refuge auprès des ambulances, incapable d’avancer plus loin à cause des gravas. Alvin se dépêcha d’approcher le brancard que lui présentait les secours, déposant délicatement la jeune mutante. La rousse réprima un gémissement de douleur alors qu’elle tâcha de placer son bras du mieux possible. « On est arrivé. » lui souffla-t-il finalement, un léger sourire au visage. Roos lui répondit avec la même expression, encore secouée par les événement, mais tellement reconnaissante de ce qu’avait fait le jeune homme. « Merci. » lança la belle, sincère. « Pour tout. Sans toi je serais surement coincée là-bas, à attendre bêtement. Merci beaucoup. » Elle le répéta avec une certaine innocence, peu habituée à un tel acte d’altruisme de la part de quelqu’un.  Cela faisait longtemps qu’elle avait perdu foi en l’être humain. La main de son sauveur vint se perdre dans l’une des poches de la veste, toujours sur ses épaules ; il en sortit un bout de papier et un stylo, et se hâta d’y écrire son numéro. Un sourire mi-gêné, mi-touchée s’étira sur le visage de Roos quand elle comprit se qu’il faisait. « C’est mon numéro, si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas. C’est un peu mon boulot de faire un peu ce que les gens ont besoin que je fasse. » La mutante souleva un sourcil, peu convaincue par la tournure qu’avait pris la phrase du jeune homme. « Très bien, ça ne sonne pas du tout bizarre dis comme ça. » souffla-t-elle, ne pouvant se retenir face à une telle situation. Pourtant, son intonation n’avait rien de méchant, elle le charmait gentiment, sourire malin au visage. « Ou, tu peux appeler, juste pour prendre un verre, c’est cool aussi. » ajouta-t-il en haussant les épaules. Une idée qui, étonnamment, charma la jeune femme. Le même sourire candide que quelques secondes plus tôt déforma les traits tirés de la jeune femme. Elle acquiesça, doucement, l’air enfantin. Alvin lui annonça finalement qu’il devait partir ; Roos savait pertinemment qu’il n’avait plus aucune raison de restée, pourtant, une part d’elle-même fut déçu par cette déclaration. « Va, je suis entre de bonne main maintenant. Enfin j’espère. » fit-elle ironiquement, en ignorant le regard assassin que lui lançant l’équipe médicale, qui commençait à s’impatienter. Il lui proposa de garder sa veste, la belle tremblait encore malgré la couverture de survies qu’on avait jeté sur ses épaules. « Merci encore. A bientôt. » Elle observa son sauveur s’éloigner, le fixant alors que les ambulanciers commençaient à s’activer autour d’elle.