i. êtes-vous originaire de radcliff ?
  Complètement et totalement, ma famille est établie à Radcliff depuis plusieurs générations et peu nombreux sont ceux qui en ont bougé. Il y a bien mon cousin Roney, mais ne le mentionnez jamais devant son père, il ne se remet pas du fait qu'il ait voulu intégrer une école d'art à New York. A part lui, tout le monde est là et je n'ai pas vraiment l'intention de partir. Le temps que le poste est toujours l'endroit où je souhaite passer mes journées, je ne vois pas pourquoi cela changerait !

  ii. avez-vous déjà eu affaire à un ou plusieurs hunters ?
  Fort heureusement, non, que ce soit comme policier ou comme mutant. Elle préfère s'en tenir la plus éloignée possible. Bien sûr, elle adorerait mettre la main sur certains d'entre eux pour leur faire comprendre une chose ou deux, chaque article sur une de leurs exactions lui retourne l'estomac, mais elle n'a absolument pas vocation à faire justice elle-même. Si on pouvait juste l'oublier et si elle pouvait ne jamais avoir à en pourchasser, cela l'arrangerait fortement.

  iii. utilisez-vous beaucoup votre don ?
  Enormément, et cela risque de me jouer des tours un jour. Mais je n'ai vraiment aucune envie de me brider. M'empêcher de me téléporter serait comme tenter de ne pas marcher, boire ou respirer pendant plusieurs jours. Ce que certains jugent "anormal" est juste une partie de moi, de ce que je suis, de ce que je peux faire. Je m'en sers quasiment à chaque déplacement que j'effectue seule (pour les autres, je possède une voiture), sur certaines enquêtes pour prendre un avantage (déloyal, diraient certains) sur les criminels ... Je marche quand même, je ne pousse pas le vice jusqu'à me téléporter jusqu'au frigo si j'ai envie d'une bière, il ne faudrait tout de même pas pousser Alaric dans la fosse aux clowns.

  iv. pensez-vous que les mesures mise en place par le gouvernement sont suffisante ?
  Très clairement, absolument pas. J'ai beau faire partie des forces de l'ordre et m'en remettre à la justice pour quasiment tout, la question de notre protection est une exception. Si je me pensais en sécurité, jamais je n'aurais demandé à ce que mon dossier soit trafiqué après le dépistage. Il est des choses contre lesquelles nous sommes impuissants, et cette "organisation" en est une.

Aouch ! Eh, ne bouge pas. Se mordant l’intérieur de la joue, June leva les yeux vers le plafond pour retenir une larme de douleur. Quelle débile. Franchement, elle se serait donné des gifles. L’anesthésie ne faisait pas encore effet et les points qu’on était en train de lui faire était une torture. Elle l’avait mérité en même temps, cela lui apprendrait à se balader sur les toits pour tenter de maîtriser un peu mieux sa téléportation en urgence. Et sur un jour de congé, en plus. Cela s’était produit au milieu de la nuit et maintenant, elle se faisait recoudre dans le service des urgences en serrant les dents pour ne pas passer pour une mauviette. C’était ce stupide chat qui lui avait fait véritablement peur, pour le coup, et l’avait totalement empêchée de se concentrer. Elle savait pertinemment qu’elle serait cependant de nouveau en vadrouille la nuit suivante, manquant de se rompre le coup de nouveau. En même temps, il n’y avait pas de quoi écrire à la famille : elle s’était rattrapée in extremis à une gouttière, il n’y avait que sa cuisse droite qui avait eu le temps d’attraper un bout de métal au passage avant qu’elle ne se téléporte au sol. Le hurlement qui était monté, elle était parvenue à l’étouffer, mais s’était copieusement insultée en silence. Les fesses sur le bitume, elle avait extirpé son portable de sa poche en se mordant la langue. Elle aurait tout aussi bien pu aller à l’hôpital en un clin d’oeil mais, ne sachant pas si elle pourrait marcher, mieux valait éviter un maximum de questions. Et elle était donc là, à se tenir aux bords de la table d’examen, pendant que son infirmier « préféré » se moquait gentiment d’elle en la recousant. Alors, tu ne veux pas me raconter comment tu t’es fait ça ? Je te l’ai dit, si je te révélais mon secret, je devrais te tuer. Ce serait dommage, non ? Ce n’était pas si éloigné que cela de la vérité, mais le temps qu’il pensait qu’elle parlait de travail, tout irait bien. Tout de suite … on ne se demande pas pourquoi tu es toujours célibataire. C’était un coup bas, auquel elle répondit par un haussement de sourcils. Si lui aussi s’y mettait, elle n’était pas sortie de l’auberge. Développe ton propos ? Il finit par sectionner le fil et se redresser, pour lui adresser un clin d’oeil : Certainement pas. Si j’ai appris une chose dans mon métier, c’est de ne jamais contrarier une femme avec une arme. Sage décision, commenta-t-elle en se relevant.

Poser le pied par terre la fit grimacer, mais elle n’en tint pas compte. Monsieur infirmier était en train de lui expliquer que la douleur serait rapidement dissipée, ce dont elle ne doutait pas. Et dans le cas contraire, il lui suffirait de serrer les dents, de prendre du paracétamol et on n’y verrait que du feu. Quelques minutes après, elle avait signé une décharge et était dehors. Relevant le col de sa veste en cuir, elle haussa les épaules. Quelle abrutie. Mais cela ne l’empêcherait pas de recommencer. Il fallait qu’elle maîtrise cette capacité dans tous ses aspects. C’était un peu comme une commande freinage d’urgence, obligatoire donc. Faisant un pas en direction des stations de taxis, elle secoua la tête en lâchant une bordée de jurons. Non, elle ne tiendrait pas le trajet retour. June traîna donc sa patte folle un peu plus loin, dans une ruelle, pour disparaître en toute quiétude. Et atterrir directement sur son lit. Sourire satisfait, elle se renversa et fixa le plafond. La précision, c’était ok. Fatiguée, blessée, c’était ok. Mais dans l’urgence, non, toujours pas. Et franchement, se faire renverser par une voiture quand on pouvait disparaître en deux secondes, c’était hors de question. Cela devrait cependant attendre un petit peu. Il ne lui restait que quelques heures avant de devoir retourner au poste, où poireauterait d’ailleurs au moins une demi-heure son cher et tendre … coéquipier. Elle avait besoin de sommeil réparateur. Et s’il n’était pas content … eh bien c’était le même prix.


Et trois … deux … Oh et non. Habillée, lavée, son café à la main, miss Steadworthy avait les yeux rivés sur l’horloge de sa cuisine. Elle avait déjà vingt minutes de retard. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres alors qu’elle imaginait Alaric tourner en rond, sans doute en l’insultant (pas à voix haute). Ou feindre la plus totale indifférence, mais bouillir intérieurement. Parfois elle s’en voulait. Si leurs débuts avaient été chaotiques, il était vite revenu sur ses idées arrêtées sur elle. Et cela faisait trois ans qu’ils faisaient de l’excellent boulot tous les deux. Et à vrai dire, même si elle adorait le faire enrager autant qu’il appréciait la taquiner, elle n’imaginait pas avoir un autre partenaire. Il était doué, c’était plus que clair même si elle ne lui faisait jamais le moindre compliment, histoire qu’il ne prenne pas la grosse tête. Allez, encore une minute ou deux, et il serait mûr. Reposant sa tasse, elle s’étira, attrapa sa veste et se téléporta. Elle n’habitait pas loin du poste, donc tout le monde pensait qu’elle venait à pied, ce qui lui arrivait d’ailleurs, parfois, histoire que personne ne dise qu’on ne l’avait pas croisée sur le chemin. En réalité, elle se matérialisait dans un local à poubelles, dans la cour de l’immeuble voisin où il n’y avait jamais personne. Sortant, elle retint une grimace. Elle y était allée un peu fort, cette fois-ci, elle devait bien le reconnaître. Ce fut donc boitant légèrement qu’elle se présenta au poste. Saluant la secrétaire et l’agent qui discutait avec elle, elle passa rapidement son chemin, mâchoires serrées. La journée n’allait être très longue et elle n’allait même pas pouvoir savourer l’état dans lequel se trouverait miser Carmichael. Haussant une épaule comme simple réponse aux plaisanteries qui s’élevèrent (à savoir si elle avait fait des folies de son corps la nuit dernière, ce genre de choses), elle gagna rapidement son bureau. Elle avait aperçu Alaric. Dans deux minutes il débarquerait. Dans deux minutes, sa journée commencerait. Fermant les yeux, elle profita de ces dernières secondes de répit. Et après … que le show commence !