i. êtes-vous originaire de radcliff ?
      Megan vient du Nord des Etats Unis et n'a que depuis très peu de temps posé ses valises à Radcliff, une ville qu'elle ne connaissait même pas avant d'y habiter. D'ailleurs, si elle se retrouve ici, ce n'est pas vraiment par choix personnel, mais pour son travail. Elle n'aime pas vraiment cette ville qu'elle trouve dangereuse. Elle a l'impression qu'ici, c'est la loi de la jungle et a déjà été spectatrices d'événements violents.

      ii. avez-vous déjà eu affaire à un ou plusieurs hunters ?
      Elle n'a aucune idée de ce qui se trame vraiment ici. Elle a bien compris que les personnes étaient étranges parfois ici, les trouvant paranos même. Elle a déjà eu affaire à des Hunters oui, mais sans savoir qui ils étaient. Elle a juste voulu venir en aide à un pauvre type qui se faisait courser par un homme et une femme qui semblaient remontés contre lui. Elle a bien tenté de s'interposer, mais l'un l'a très facilement calmé en l'assommant. A son réveil, il ne restait plus que quelques petites tâches de sang sur le macadam près d'elle, mais plus aucune autre trace des trois individus. Elle ne sait toujours pas qu'en réalité, il s'agissait de la traque d'un mutant par deux chasseurs.

      iii. utilisez-vous beaucoup votre don ?
      Son don, bien qu'elle n'en ai aucunement conscience, elle l'utilise quotidiennement sans s'en rendre compte. Ce n'est en rien un pouvoir offensif, elle le sent à peine. C'est juste comme un pressentiment, lorsqu'on lui ment, elle a le devine. Et elle ne se trompe jamais dans cet exercice.

      iv. pensez-vous que les mesures mise en place par le gouvernement sont suffisante ?
      Pour elle, cette ville est en ébullition, et elle n'y comprend rien. Elle vient d'une ville sereine où il n'y avait qu'elle pour avoir affaire à la justice plusieurs fois dans l'année pour des broutilles. Megan a l'impression qu'à Radcliff, tout est sous tension, que tout peut exploser d'un moment à un autre, sans comprendre pourquoi. Elle n'est pas là depuis assez longtemps pour savoir ce qui se passe réellement ici, et ça la perturbe.

- Il va bien, ne vous en faites pas.
Je crois que, depuis toujours, j'ai comme un don pour deviner si les personnes mentent ou non. Et dans son cas, à lui, ce crétin de chirurgien, je savais qu'il cachait quelque chose. Ma mère, cette menteuse sans précédent, avait dû lui demander de nous mentir à mes sœurs et moi-même. En effet, notre unique frère était malade. Très malade, je le sentais. Et lui, dans sa blouse blanche, nous racontait des salades qui visiblement, semblaient contenter tout le monde. Le regard noir, je fulminais.
- Merci docteur, vraiment, sourit l'ainée.
Cette famille m'agaçait. Entre une mère menteuse, un père quasi absent, une grande sœur représentant le stéréotype même de la pompom girl américaine, et une cadette bisounours, je n'en pouvais plus. Il ne me restait que mon frère qui, depuis quelques mois, se renfermait sur lui-même, sans doute à cause de la maladie. De quoi souffrait-il ? Comment pouvais-je le savoir, alors que maman-je-ne-veux-pas-choquer-mes-pauvres-enfants nous cachait la vérité. Je crois que c'est grâce à elle que j'ai appris à discerner le vrai du faux. D'aussi longtemps que je me souvienne, c'est dans ses paroles que j'ai eu pour les premières fois ce ressenti désagréable. J'ai eu du mal à identifier la provenance de ce malaise. Aujourd'hui, je suis contente d'avoir eu comme professeur une mère aussi assidue dans le mensonge pour pouvoir le discerner chez n'importe quel individu.
- Vous voyez mes princesses, tout va pour le mieux dans le meilleur des monde !
Candide de Voltaire. Je levais les yeux au ciel, sachant très bien qu'elle disait ça pour m'embêter, moi la littéraire qui était capable de relier n'importe quelle citation à son œuvre. Surtout une œuvre Française, un pays et une culture dont elle m'avait transmit la passion. La seule chose venant d'elle dont j'étais fière, d'ailleurs. Elle me lança d'ailleurs un sourire forcé avant de prendre son ainée dans ses bras, celle qui faisait de longues études médicales -que j'imaginais payée par les parents pour qu'elle y soit acceptée, d'ailleurs-, alors qu'elle peinait encore à connaître la table du 7 par cœur. Voilà. Ça vous donne une brève idée de ce que je pensais de ma famille, à l'époque. De ce que j'en pense toujours, d'ailleurs.


- Tu n'as pas idée comme tu m'as manqué ! dis-je à mon Jules en Russe, venu passer un an en Amérique pour ses études.
- Mon cœur, il faudrait que l'on parle de mon départ, tu sais.
Il n'y avait même pas besoin d'en parler. Je savais très bien ce qu'il allait me demander. J'avais envie de l'épouser, là, tout de suite. Qu'on fasse le tour du monde ensemble, qu'on achète une maison en France, qu'on finisse nos jours ensemble. Je respirais, je vivais cet homme tellement je l'aimais. Et je savais qu'il m'aimait aussi, ce pourquoi il m'avait demandé de partir avec lui en Russie. Oui mais voilà, mon frère est malade, et le sachant entouré d'hypocrites égoïstes, je ne pouvais le laisser seul. Lui dire non a été la première chose que j'ai regretté. Longtemps. Très longtemps. Jusqu'à son départ, j'avais fait mon propre chemin sans encombres, bien que mes relations familiales soient houleuses et que j'ai eu quelques histoires judiciaires. Jamais je n'avais regretté mes choix, mes actes, mes paroles. De le voir partir lui, premier amour, ma première passion, fut un grand déchirement pour moi. Et après lui, je ne voulais plus vivre ça.

Mais me connaissant, les ennuis ne sont jamais bien loin. D'ailleurs, un soir, alors que je rentrais du bureau, un homme ayant sûrement plus d'alcool dans le sang que l'inverse, percuta ma voiture sur l'avant, écrasant une bonne partie de mon véhicule inutilisable à présent. Tout aurait pu bien se terminer, s'il n'avait pas sorti la phrase qui tue:
- Encore une femme au volant, ça !
Ni une, ni deux, je lui sautais dessus. Ce sont des passants qui, alertés par les insultes furibondes d'une femme faisant une tête de moins que celui qu'elle agressait, appelèrent la police. C'est là qu'Isaac fit son entrée dans ma vie. Alors que je m'étais promis de ne plus aimer comme j'avais aimé le Russe de ma vie, il sut faire renaître en moi cette passion que j'avais ressenti pour ancien petit ami. Quatre ans plus tard, je portais son nom.



La nuit tombait tandis que je m’époumonais à prendre en chasse un couple aux traits fermés qui eux même semblaient chasser un troisième individu. J'étais à bout de souffle alors qu'ils semblaient bien entrainés. Et alors qu'ils finirent par remarquer ma présence à un angle de rue, l'homme du binôme se retourna vers moi avec rapidité, ce qui me fit stopper net. En quelques secondes, il avait fondu sur moi et me plaqua au sol avec une facilité déconcertante. Le temps de quelques instants, l'homme qui tentait de fuir les deux individus se retourna, interpellé par le cri qui m'avait échappé lorsque ma tête toucha le macadam. Quelques secondes, mais ce laps de temps réduit suffit à ce que l'on se reconnaisse l'un l'autre. Isaac.

Je m'éveillais d'un bond. Ce rêve -ou plutôt ce cauchemar- me revenait souvent à l'esprit la nuit depuis quelques jours. Depuis que j'avais tenté de m'opposer à une chasse à l'homme, en fait. Et allez savoir pourquoi, mon ex-mari prenait toujours la place de celui qui se faisait traquer. Un soupire m'échappa. Puis un second. Le premier, pour cette incompréhension que je vivais face à cette ville si étrange qui me mettait mal à l'aise. J'avais l'impression qu'il s'y passait des choses dans l'ombre, des choses que l'on tentait de cacher bien que tout le monde soit au courant. Tout le monde, sauf moi. Le second, pour avoir une fois encore rêvé d'Isaac. Il était difficile pour moi de faire la part des choses. Je ne savais pas être raisonnable, en fait. Mon amour pour cet homme avait été si grand que depuis notre rupture, je me sentais obligée de le détester, pour éviter de souffrir. Et aussi parce que je ne savais remplacer un sentiment passionné que par...un sentiment tout aussi fort. Alors, en effet, je n'avais aucune envie de revoir Isaac. Et pourtant...


- Alors ma chérie, comment ça se passe, à Radcliff ?
- Tu sais bien qu'aucune ville n'a de valeur à mes yeux sans ta présence !
Je ris, elle aussi. Il s'agissait de ma plus vieille amie, celle en qui j'avais le plus confiance, en qui jamais je n'avais eu aucun doute, et qui m'avait toujours soutenue. Après mon divorce, d'ailleurs, c'est avec elle que j'avais vécu, ce qui avait encore plus resserré nos liens.
- Comment ça se passe dans ton nouveau bureau ?
- Ecoute, je pense leur avoir fait un peu peur au début, mais je crois qu'ils s'habituent à mon caractère, donc je pense que c'est en bonne voie !
- Et le reste ? J'ai eu l'impression que tu avais une petite voix ces derniers temps quand je t'avais au téléphone...
Elle paraissait inquiète, et je savais qu'elle l'était vraiment. Moi qui était d'habitude si intouchable, si intrépide avec la vie, si motivée par mon travail, si sociable, si...
- Tu sais quoi ? Je pense que je vais passer te voir dans quelques temps ! Voir ton appartement, tout ça...
Ca y est. J'y étais. Je mettais enfin le doigt dessus. Ces cauchemars, cette déprime. Il ne s'agissait pas que de mon déménagement, de cette nouvelle ville pourtant bien étrange à elle seule. Non. Plus encore, cela faisait un an que je n'étais plus avec Isaac. Et dans quelques jours, ça fera exactement 365 jours que nous aurons signé les papiers.
- Ça fait déjà un an... murmurais-je.
- Je sais ma grande, je sais...
Quel con. Je le détestais de me manquer. Si j'avais su, à l'approche de nos un an de séparation, qu'il vivait lui aussi à Radcliff...