i. comment êtes-vous entré parmi les hunters?
S'il n'a rejoint le groupe des Hunter que depuis deux ans, en s'installant à Radcliff, Sean n'était pas novice ni même naïf concernant les mutants. En effet, son père policier et d'autres membres de leur poste partaient souvent soulager la ville de quelques mutants dès que l'occasion se présentait. Haine cultivée au long des années, il n'a jamais trouvé d'autres motivations que la colère que pouvait leur porter son père, et le caractère anormal qu'on prêtait à ces êtres dotés de pouvoirs surnaturels. Né dans une famille catholique et très pratiquante, les mutants ont toujours été perçus comme des erreurs de la nature dans la famille Whelan. L'entrée dans les rangs du groupe se sont fait par le biais d'un ancien collègue de son père officiant à Radcliff.

ii. avez-vous déjà effectué votre devoir de chasseur ?
Il se souvient encore du visage du premier mutant qu'il a tué. Il se souvient encore de l'horreur qui noua ses tripes, et de cet air terrifié qu'il présenta face à un homme qui demandait pardon. Pardon à qui, pourquoi ? Il s'était pétrifié, et son père l'avait remis en marche. Plus tard, il lui raconta comment lui même avait tremblé la première fois qu'il avait effectué une chasse aux côtés d'un de ses amis. Sean avait vingt-deux ans quand il tua son premier mutant, et si le nombre ne fit qu'augmenter, sa main cessa de trembler, on ne peut pas non plus lui conférer un long tableau de chasse.

iii. les mesures du traité de protection des mutants vous font-elles peur ?
Sean ne comprend pas pourquoi le gouvernement continue sa protection envers les transmutants. Ne comprend pas pourquoi des lois sont édictés pour eux, et contre les citoyens qui ne font qu'exprimer leurs droits et leur mécontentement, leurs peurs face à des personnes contre nature. S'il a peur du traité ? Oui, Sean en a peur. Peur que le gouvernement continue dans son laxisme, continue de se cacher les yeux et leurs oreilles et ne se rende pas compte du danger que représentent les mutants. Combien de familles détruites, de pseudos accident dus aux mutants faudra-t-il placer sur les bras des citoyens pour que le gouvernement se rende enfin compte de la bête noire que sont ces personnes.

iv. que pensez-vous de l'élection récente de thaddeus lancaster à la tête du comté ?
Aux yeux du jeune homme, Thaddeus Lancaster est ce qu'il pouvait arriver de mieux à une ville comme Radcliff. Si certains voient ses discours comme un véritable danger, les prennent avec crainte, Sean ne peut que lui donner raison et soutenir ses mots. Si des hommes comme Lancaster pouvaient se lever dans tout le pays alors la cause anti-mutante pourrait prendre un nouveau tournant, et l'on pourrait commencer à prendre la mesure du danger que représentent ces personnes.

(2014) Il ne grimpa pas directement les marches des escaliers, mais s'accorda un détour par la cuisine. Là, il n'offrit aucune attention aux pensées qui cherchaient pourtant à faire sens, qui défilaient à une vitesse qui lui en aurait presque fait tourner la tête mais qu'il ne se sentait pas encore le courage de trier. Elles étaient cancéreuses ces idées, et les laisser faire leur chemin, les laisser l'envahir marqueraient un point de non retour, il le savait. Il le savait comme il était conscient qu'elles étaient déjà là, en lui, et ne lui ficheraient maintenant plus la paix. Déjà présentes mais pas encore acceptées, elles stagnaient à grand bruit dans chaque coin de son crâne, et lui aurait beau hurler, cogner les murs et se meurtrir les jointures, elles ne le quitteraient pas pour autant. Sean ouvrit la porte de son frigidaire, resta lèvres closes et yeux dans le vague sans détailler le contenu. Se secoua et tendit finalement la main vers une bière, qu'il décapsula et porta à ses lèvres. Trop froide, elle le fit grincer des dents. L'alcool ne parvenait pas à dissimuler le goût âcre qui nouait sa gorge, l'alcool ne parvenait pas à dénouer l'énervement et le trouble qui l'empêchait de tenir sur ses deux jambes. Des bruits de pas, légers comme le sont ceux des femmes, le sortir de sa torpeur.  Niamh, en robe de nuit sombre, marquant le contraste avec sa peau si blanche, avançait vers lui avec ce léger sourire en coin. Qu'elle était douce, elle qui pourtant conservait des souvenirs farouches. Ses lèvres embrassèrent le coin des siennes, et manquant du naturel dont il faisait preuve auprès d'elle, elle fronça les sourcils. « tout va bien ? » sa voix ne l'effleura pas comme une caresse et fit bouillir un peu plus son sang. Serrant ses mâchoires, il détourna les yeux, détourna la tête et les talons pour faire quelques pas de côté, s'appuyer contre la table et porter une nouvelle fois le goulot à ses lèvres. « tout va bien. » répéta-t-il sur un ton d'automate. Rien n'allait. « c'est juste le boulot. » il leva machinalement les yeux au ciel, haussa les épaules pour lui montrer plus que pour ne le dire que tout cela relevait de la routine, qu'elle n'avait pas à s'en soucier plus longtemps, et qu'il ne se sentait de toute façon pas le cœur à en dire plus. « Retourne te coucher, je te rejoins dans quelques minutes. » Il agita sa bière, juste le temps de la finir. Quand elle disparu dans les couloirs, que ses pas de chat dansèrent dans les escaliers, et qu'enfin le silence reprit ses droits dans la cuisine, Sean sentit le poids des pensées néfastes alourdir ses épaules. Qu'avait-il dit ? Que Niamh était des leurs. Qu'il faisait un beau pantin à ses côtés, lui le tueur de mutant, lui qui les détestait si fort qu'il en aurait noircit son cœur. Ah qu'il avait ri en découvrant ses dents barbouillées de sang. Ah qu'il avait ri avant qu'il ne l'abatte une heure plus tôt, dernière vengeance qu'il avait craché au visage du policier. Il la connaissait, connaissait Niamh et ses habitudes, Niamh et ses sourires, ses œillades et ses courbes, le roux de ses cheveux qui l'avait fait hoqueter dans un nouveau mouvement de douleur. Il la connaissait car elle était l'une des leurs, le grand amour d'un chasseur, incapable de remarquer qu'une de ces anormales dormait dans son lit. Et quel est son pouvoir, alors ? Avait-il répondu d'un ton brusque, d'une voix trop énervée pour laisser transparaître la moindre ironie. Il ne le croyait pas, mais déjà avait échoué à le lui dire. C'est une ensorceleuse, de celles dont les émotions se transmettent, qui joue des humeurs. Il n'en avait pas cru un mot. L'avait fait taire pour ne pas en apprendre plus, mais le doute était déjà là. Nouvelle gorgée, la colère le rattrapa et le brûla. La bière se brisa sur le mur, et Sean s'entailla la peau de petits bouts de verre. Niamh était de nouveau là, et il l'arrêta d'un mouvement de main ; un accident, la fatigue, n'importe quelle excuse pour la voir disparaître de nouveau, les sourcils froncés.