i. comment êtes-vous entré parmi les hunters?
Certains disent qu'on t'a formaté. Que si ton père n'avait pas été chasseur, jamais tu ne le serais devenu à ton tour. Que ce n'est pas vraiment ton combat, après tout, que tu es simplement né dedans... Mais c'est entièrement faux. Tu ne vas pas mentir, le fait que ton père t'ait tout appris, t'ait éduqué pour devenir un bon hunter, n'est pas sans avoir aidé à ta transformation, et tu en es tout à fait conscient. Tu lui es d'ailleurs très reconnaissant car tu lui dois la plupart de tes acquis... Mais cette flamme dans ton regard, cette fierté que tu ressens après la mission accomplie, cette hargne à les combattre, cela ne vient pas que de lui. Cela vient de toi, de ton désir le plus fort et le plus inconscient aussi. Cela fait bien longtemps que tu ne fais plus cela pour faire plaisir à ton père. Ce sont tes convictions profondes. C'est en quelque sorte inné chez toi. Même dans tes rêves, tu les poursuis encore et tu leur fais la peau... Alors, oui, tu es bel et bien né pour être un chasseur. Avec, ou sans l'aide de ton père.

   ii. avez-vous déjà effectué votre devoir de chasseur ?
Bien sûr que tu l'as fait. On t'a mis une arme à la main alors que tu savais à peine marcher... Donc forcément, tu es un type plutôt précoce, qui n'a jamais eu peur de se salir les mains. Est-ce que cela fait de toi un sociopathe ? Tu ne penses pas. Après tout, c'est ton devoir de protéger ton espèce. Tu ne fais que ce qui doit être fait. Et tant pis si cela transgresse les dix commandements... Tu es sûr que quelque part, tuer un monstre n'est pas aussi grave que tuer un homme. C'est pas pour rien que dans la mythologie on nomme les valeureux guerriers qui se dressent contre diverses créatures "des héros". De toute façon, t'as jamais foutu les pieds dans une église, ni dans un cours de littérature grecque. Tu t'en fous complètement de justifier tes actes, et c'est pas aujourd'hui que cela va changer. Eeet non, tu ne t'es pas découvert une conscience de dernière minute, désolé !

   iii. les mesures du traité de protection des mutants vous font-elles peur ?
Tu ne crains pas la loi, puisque tu ES la loi. Tu sais comment la faire respecter... mais aussi comment ne pas te faire prendre si tu en viens à la contourner. Alors, craindre quelques décrets, très peu pour toi. Tu ne réponds que de la Constitution américaine, et ce n'est pas un traité ratifié par un président en quête d'électeurs qui fera loi.

   iv. que pensez-vous de l'élection récente de thaddeus lancaster à la tête du comté ?
Si l'on en croit ce que l'on dit sur lui, c'est une très bonne chose qu'il soit un homme influent sur la politique de Radcliff. Ton père le respecte et tu en fais autant. Reste à voir si sa politique sera efficace ou non. Si elle peut amener les gens à comprendre que les mutants ne sont pas une espèce digne d'exister, c'est tant mieux.

►MY OWN WORST ENEMY; I try to get some sleep her arms are over me, I’m staring at the walls they're closing in on me. This sun bleeds through the blinds that washes over me... Today’s the day I tell myself to set me free.

I wanna fly awaaaaay, change my wayyyy... Tu donnes en un coup sec sur le haut du vieux radio réveil pourrave qui te sert de pendule et l'entend grésiller un instant avant de s'éteindre, plongeant de nouveau la petite chambre dans le silence. Te fendant d'un soupir de lassitude, tu t'extrais de la chaleur de tes draps sans attendre pour rejoindre la cuisine où trône encore ta tasse de café à moitié pleine de la veille à côté de tes dossiers restés ouverts. Tu ne te souviens même pas quand tu as été rejoindre ton lit et au fond, tu t'en fiches. Tu te frottes les yeux pendant que ton reste du breuvage tourne dans le micro-onde. Tu l'avales ensuite d'un trait malgré son goût bouilli passablement dégueulasse. C'est un sacrilège de boire un café aussi mauvais, mais tu n'as pas fait les courses récemment et t'es contenté d'un vieux paquet resté au fond d'un de tes placards quasiment vides. Sûrement un vestige de la dernière visite de ton père. Il n'a jamais su apprécier les bonnes choses. Tu restes un instant immobile à contempler la triste mine de ton appartement. Une présence féminine ne serait pas de refus, compte-tenu du ménage qui n'a pas été fait depuis un bail, mais tu te refuses à les laisser entrer autre part que dans ta chambre. Une à essayer une fois de passer la porte de ton bureau et s'est pris un tel tas de remontrances en pleine face qu'elle ne passera plus la porte de chez toi de si tôt. Un rictus goguenard s'étale sur ton visage alors que tu te remémores la scène. Avec le ramassis de conneries que tu lui as débité, elle t'a sûrement pris pour un psychopathe. Au fond, elle n'aurait d'ailleurs peut être pas tort, mais de toute façon, tu te fous bien de son avis... Et de celui des autres. La seule femme qui peut te blesser n'est autre qu'une petite blonde aujourd'hui devenue grande que tu as vu grandir. Liv'. Quand tu en parles, beaucoup de personne s'imagine que c'est la femme de ta vie. Ils n'ont pas totalement tort, mais pas vraiment raison non plus. Olivia, c'est ta petite soeur, la prunelle de tes yeux, et quiconque se risque à prononcer son nom en ta présence à intérêt à n'en dire que du bien s'il ne veut pas finir avec la tête au carré.

Ta dose de caféine engloutie, tu te délestes de ton mug au fond de l'évier sale pour rejoindre la salle de bain attenante à la chambre. Tu abandonnes tes vêtements sur le sol pour te passer aussitôt tout entier sous le jet d'eau froide, sans pouvoir retenir la salve de frissons qui te traversent alors que les gouttes dégoulinent sur ta peau, le long de ta colonne, t'électrisant tout entier. Ce n'est pas forcément ce qu'il y a de plus agréable mais c'est ce que tu fais tous les matins, sans exception ; cela te rend plus alerte. L'eau chaude, tu l'utilises simplement pour relâcher tes muscles, le soir, après la tension d'une journée de chasse ou de simple défenseur des rues de Radcliff. Tu fermes les yeux un instant, laissant ton esprit partir vers d'autres contrées, loin de la petite salle de bain exiguë. Tu repenses brièvement à ton enfance, plutôt paisible si on omet les longues journées harassantes de chasse avec ton père et la maladie de ta mère. Toi et ta soeur avaient beau avoir grandi ensemble, vous ne vous êtes pas construits de la même façon et avez toujours été très différents. C'est un miracle que vous soyez restés si proches au fil des années. Penser à elle te fait sourire un bref instant avant de te tirer de sous le jet glacé. Il faut que tu t'actives, une dure journée t'attend. Aujourd'hui, tu vas rencontrer ton nouvel équipier et cette perspective ne t'enchante guère. Tu enfiles des vêtements propre, attrapes une pomme et sors enfin de ton antre. Après avoir veillé à bien la fermer à double tour, tu grimpes dans ta vieille jeep et roule en direction du commissariat, sans te presser. Tu es en avance, et comme toujours, tu seras à l'heure. A peine as-tu passé les portes que tu sens que quelque chose ne tourne pas rond. L'attitude de tes collègues a changé, une lueur amusée dans leurs regards t'interpelle, mais tu ne fais aucun commentaire. Tu sauras bien assez tôt de quoi il retourne. Ton chef passe la tête par son bureau et te fais signe de le rejoindre. Tu t'exécutes et, à peine as-tu franchi le seuil que tu comprends. Assise dans un fauteuil, une jeune femme à la longue chevelure blonde t'offre son dos. Ton supérieur fait les présentations alors que tu t'assoies, mais tu sais déjà ce qu'il va dire... Ce n'est pas un équipier dont tu as écopé mais une équipière. Tu lui serres la main, tu écoutes patiemment les recommandations et tu ranges ces informations dans un coin de ton esprit. Tu te retiens de sourire en pensant, non sans ironie, que si elle tient une semaine avant de demander sa mutation, ce sera déjà pas mal. En réalité, tu ne lui donnes pas deux jours.

Et pourtant... Tu l'ignores à cet instant mais June, la blonde que tu imagines écervelée et comme un boulet à ton pied, fera à présent partie de ton quotidien. Ensemble, vous résoudrez plus d'affaires que ce que tu résolvais jusqu'alors en loup solitaire, toi qui ne faisait confiance à personne d'autre que ton instinct. Tu lui confieras même ta vie et, chaque matin dès lors, tu râleras qu'elle arrive constamment en retard et que cela t'irrite au plus haut point. A croire qu'elle le fait exprès... Cependant, tu la laisseras faire ses preuves, bon gré mal gré. Elle se révèlera une bonne enquêtrice et les critiques sur ses méthodes se feront de plus en plus rares. Tu ne lui ouvriras toutefois pas la porte de ton jardin secret. Tu conserves une certaine réserve à son propos que tu ne t'expliques pas totalement vu ses bons résultats. Peut être les affres des entrainements de ton père qui t'a appris à te méfier de tout et de tout le monde, même de toi même. Bientôt, tout le monde vantera l'équipe de choc que vous faîtes, mais jamais tu ne laisseras voir que cela te touche. Tu hausseras les épaules et prendras une nouvelle affaire en lui disant d'essayer de ne pas tout faire foirer, et vous reprendrez la route en vous taquinant mutuellement. C'est un bon élément, mais jamais tu ne le verbaliseras. Ta devise, c'est que l'on peut toujours mieux faire. Rien n'est jamais totalement parfait, et tu attends presque le faux pas qu'elle fera inévitablement un jour ou l'autre.