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 (celestron) la dolce vita

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Aaron Trager
Aaron Trager

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SUR TH DEPUIS : 15/05/2016
MessageSujet: (celestron) la dolce vita   (celestron) la dolce vita Icon_minitimeMer 26 Juil 2017 - 23:12

La dolce vita
Celeste & Aaron



Mois d’août. Premier août, même. La chaleur est étouffante malgré la climatisation, le hall est bruyant malgré l’heure plus que matinale, l’air est moite, lourd, malgré la ventilation qui vrombit et ne dépareille pas d’un avion en vol. Et, bien sûr, Aaron met quelques minutes à se repérer. Il cligne des yeux, rallume son téléphone, le sent vibrer un nombre incalculable de fois dans sa main au rythme des appels, messages, notifications accumulées pendant les treize heures – plus lorsqu’on tient compte du décalage horaire – qui l’ont séparé du décollage, la veille, à Louisville. Treize heures quarante minutes, un record sans goutte d’alcool, d’un certain point de vue. Treize heures quarante minutes, une éternité à se passer et repasser en pensées les jours à venir, et les jours qui ont défilé de mars jusqu’à cet instant. Des jours qui se sont enchaînés à toute vitesse, dans un tourbillon d’ennuis, de sourires, de rencontre, de visite, d’angoisse ; dans un tourbillon de renaissance également, dans ces moments passés avec Moira, volés, attrapés, saisis au vol. Il a encore sur les lèvres le goût de son parfum, il a encore entre ses doigts le fantôme de sa main, il a encore dans les yeux les pupilles fixes de la violoniste et son ultimatum. Il a encore en son sein, en sa poitrine, le désir puissant d’aller plus loin. Le besoin de construire, de bâtir, d’enraciner dans le roc, dans la durée. Le besoin d’aller de l’avant. Et de rassembler, enfin, les deux parts les plus importantes de sa vie.

Des jours qui se sont enchaînés, tiraillés par le doute, aussi. L’échec. L’angoisse. Une anxiété sans pareille, dans des pensées traversant sans cesse l’Atlantique pour retrouver Celeste, la chercher sans la trouver ; espérer la retrouver un jour. Comprendre, aussi. Chercher à comprendre, où il y a eu erreur, où il y a eu faux pas, où il y a fracture pour y apposer des soins, pour essayer de réparer, pour essayer de réconcilier. Il entend encore le tumulte des émotions de sa fille, Aaron. Il voit encore son regard, il sent encore sa froideur, sa colère, il est hanté par Celeste, il est hanté par son absence, hanté par le conflit entre son amour, sans limite, pour sa fille et celui, illimité également, qu’il se découvre pour Moira. Il est hanté par la panique à l’idée de devoir perdre l’une des deux, à l’idée de savoir que d’en perdre une, il perdra également l’autre, rongé par la rancœur. Rongé par les remords.

Les treize heures quarante minutes n’ont pas été suffisante pour penser à tout ça. Pour faire le point. Et quand Aaron descend donc de l’avion, pose les pieds à Gêne, il n’a pas l’esprit aussi tranquille qu’il ne le souhaiterait. Lorsqu’il découvre la silhouette de sa belle-mère qui l’enlace sans plus attendre, peste dans un italien trop rapide pour qu’il le comprenne, fait un pas en arrière sans arrêter de parler, le considère de haut en bas en l’abrutissant de commentaires. Lorsqu’il sourit, sans y penser. Lorsqu’elle lui claque à nouveau la bise, le forçant à se pencher pour qu’elle atteigne ses joues et lui répète, un peu trop de fois, que ça fait plaisir de le voir, qu’ils ne se voient pas assez souvent et que même si onze ans, douze ans sont passés, il reste son fils, il moi piccolo ragazzo. Il n’a pas l’esprit tranquille. « Où est Celeste ? » L’anglais fleurit naturellement, interrompt le flot de parole d’Agata. Il se reprend, dans un italien rouillé et surtout hésitant. « Dov’è mia figlia? Dov’è Celeste ? »Où est Celeste ? Elle n’est pas là, elle n’est pas aux côtés de sa grand-mère, elle… n’est pas venue le chercher. Ca lui fait mal. Et le regard peiné d’Agata n’aide en rien, même si elle tente de le rassurer. Trop tard. « Era stanca, voleva dormire… » Les mains s’agitent, Aaron fait signe que ce n’est pas grave. Se rend compte qu’au final, rien n’a changé et que la discussion qu’il aurait dû avoir avec Celeste avant de l’envoyer, de force, de l’autre côté du monde, cette discussion, il n’a fait que la repousser : il ne l’a pas évitée. Agata s’inquiète en le guidant vers le parking où sa petite voiture est garée. Il est tôt, oui. Si dans l’aéroport, c’est l’effervescence, c’est loin d’être le cas à l’extérieur. « E ‘molto presto, sai? La spiaggia, la città, i grandi spazi aperti… è faticoso, sai? » Il est tôt, oui. Il est très tôt, mais il est surtout trop tôt pour parler italien, surtout à une telle vitesse, Aaron comprend l’idée – Celeste est fatiguée par le grand air, la plage, la ville, ses activités – mais s’avère bien incapable de répondre autre chose qu’un « Capisco… non ti preoccupare… » articulé avec toujours cette hésitation qui le quittera bientôt. Le temps de se réhabituer à une langue étrangère.

Dans la voiture, Agata continue à faire la conversation, allant même jusqu’à lâcher régulièrement le volant pour se plier aux exigences italiennes de la communication, indifférentes aux crispations de son gendre. Bientôt, ils quittent Gênes, bientôt ils rallient les petites routes, bientôt, ils atteignent la ville, plus petite, qui héberge sa belle-famille. Noyé sous le flot de paroles, Aaron a décroché et se contente se retrouver ses vieux réflexes. Si, Of course, Certo… Il sait qu’elle lui raconte les derniers mois, déjà communiqués par mail et parfois par skype, mais… La voiture s’arrête, Aaron s’en extrait sans plus tarder, chercher sa fille des yeux. « Celeste probabilmente ancore dormendo ». Oui, bien sûr, Celeste doit encore dormir, il n’est que sept heures du matin, et pourtant… il a encore de la voir, de s’assurer qu’il reste son père à ses yeux. Il a envie de savoir qu’il lui a manqué, au moins un peu, quand son absence à elle s’est révélée être une épine plantée dans son cœur, douloureuse à chaque battement. Sa valise retrouve son ancienne place dans la chambre de Chiara, transformée à leur mariage en chambre d’amis. En chambre avec une photo du couple, des jeunes mariés, des jeunes parents, et une photo de Chiara, seule, resplendissante. La photo qu’il a placée sur son bureau, à l’orphelinat. Il tient le cadre dans sa main, le repose, fuit la chambre et se rapatrie dans la cuisine où Agata a déjà mis de l’eau à chauffer et s’active avec une énergie épuisante. Aaron retrouve ses marques. « E… dov’è Paolo ? Dormendo anche ? » Retrouve son italien, aussi, et ses fautes de grammaire qu’il n’a pas réussi à éradiquer. La réponse d’Agata ne se fait pas attendre : son mari est déjà parti en bord de mer promener les chiens, il ne devrait pas tarder. Les chiens. Aaron se fait la remarque que Neo doit avoir bien grandi depuis mars, lui aussi.

Le thé, les biscuits, la cuisine, le silence. Il se retrouve seul, et enfin, ses pensées s’apaisent. Peu de personnes dans les environs, peu d’émotions à écouter. Juste le silence, ou du moins des sons étouffés par la distance. Et l’apaisement d’avoir changé de continent. Ses doigts délogent son téléphone de sa poche, ignorent les messages de Sofiane, se connectent pour rassurer Moira. S’interrompent dans un message qu’ils abrègent lorsque le calme se trouble de bruits. Et d’émotions. Qu’il n’a pas le temps d’interpréter, la silhouette de sa fille est dans l’embrasure de la porte après avoir dégringolé les escaliers de la demeure italienne. Il a un sourire, Aaron, et il perd ses mots. « Celeste… » Un sourire, un soupir. Un regard vers l’horloge : huit heures. « Tua nonna mi ha diceva che… » Non, définitivement non, il est encore trop tôt pour parler italien. « Je m’attendais à ne pas te voir avant midi, ta grand-mère m’a dit que tu étais fatiguée… les vacances se passent… bien ? » Il a envie de la prendre dans ses bras, de l’embrasser sur les deux joues et sur le front, il a envie de la serrer tout contre lui, il a envie de la tenir tout contre lui, son petit bébé, de poser son menton sur son front, de la sentir avoir confiance en lui. Comme avant. Mais non. Tout ce qu’il retrouve, c’est une gêne entre eux. Cette gêne qu’il n’arrive pas à surmonter. Qu’il ignore s’ils parviendront à surmonter un jour. Peut-être que si elle fait un pas vers lui, elle… ils… « Il doit rester du thé, même s’il doit être froid. Tu veux que j’en refasse ? »



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Celeste Trager
Celeste Trager

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MessageSujet: Re: (celestron) la dolce vita   (celestron) la dolce vita Icon_minitimeSam 19 Aoû 2017 - 12:14

Trois coups sont donnés contre la porte. « Celeste ? » Aucune réponse. Un sourire vient étirer les lèvres de la vieille dame. « Celeste, sei sveglia ? » Un grognement sourd se fait entendre. Une réaction. Enfin, l'ombre d'une réaction. Un rire s'échappe des lèvres de la grand-mère. « Sai che andiamo a trovare tuo padre stamattina, piccola... » Celeste s'enfonce un peu plus dans ses couvertures dans un autre grognement agacé. D'abord, son aînée répond par un silence embêté. Elles en ont déjà parlé une ou deux fois, mais face au braquage presque quasi-évident de Celeste à l'évocation de l'arrivée de son père, Agata n'avait pas cherché à plus forcer le débat que cela. « Va bene. Lo stesso pensi ad uscire della tua tana per accogliergli. È tuo padre. » Les pas de sa grand-mère s'éloignant se font entendre dans le couloir.

Celeste ne peut pas être tranquille. Nulle part. Ni avec son père, ni au lycée, ni ici. Pourtant c'était le but de la manœuvre : venir ici, prendre du temps pour elle, lui permettre de réfléchir, de s'assagir peut-être aussi, se reposer et revenir en forme pour la rentrée. Par forme, il faut simplement saisir éloignée de tous les ennuis qu'elle a pu avoir durant l'année entière, à commencer par la perte de sa mutation. Son père a supposé qu'en l'envoyant loin de Radcliff, dans ce petit bout de paradis italien, la mini-Trager parviendrait à se détacher de se mal-être qui la rongeait il y a encore de ça si peu de temps. Malheureusement, il est encore bel et bien là. Malgré les jours qui passent, l'adolescente continue de ruminer la plupart du temps sur les mêmes souvenirs, les mêmes instants, les exacts mêmes mots. Puis sur ce regard qu'a pu avoir son père sur elle lorsqu'elle lui a révélé toute la vérité...

Il y a des choses dont Celeste ne parvient pas à se défaire. Le souvenir glaçant de cette discussion au beau milieu des champs en fait partie. Poussant un nouveau soupir, cette fois-ci bien plus lasse que les précédents, la jeune femme repousse la couverture qu'elle a sur la tête. Son regard rencontre le plafond blanc, avant de se tourner en direction de Neo, couché en boule à ses côtés. Un petit sourire accompagne sa main qui vient se déposer avec délicatesse sur le haut du crâne de l'animal. S'il y a bien un souvenir heureux qui réussir à lui redonner du baume au cœur, c'est bien le jour où Neo est entré dans sa vie. Il n'y a bien que lui qui ne la décevra pas. Jamais.

Ca fait un paquet de jours qu'elle est là, Celeste, et elle ne ressent pas les bienfaits qu'on lui a promis. Certes, passer du temps avec sa famille la change. En apprendre un peu plus sur sa mère également. Ici, elle ne craint pas de l'évoquer. Ses grand-parents prennent même souvent l'initiative de lui raconter de petites anecdotes quand ils sentent qu'elle n'ose pas demander mais qu'elle y songe cruellement. Ça change. Son père n'ose pas aborder le sujet comme eux le font, sans doute parce que la douleur de la perte est un peu plus apaisée chez ses aïeux que chez lui. En tout cas c'est ce que l'adolescente ressent. Ce n'est pas comme si elle était extrêmement douée pour comprendre tout ça ou pour vouloir le comprendre. Surtout son père. Celeste n'a plus du tout envie de le comprendre ou de l'écouter depuis un moment, encore plus depuis qu'il a ramené son « amie » à leur table à Noël. A partir de ce jour, Cel n'a pas mis longtemps à saisir qu'on venait de lui piquer le peu de place qu'elle pouvait avoir dans le cœur de son père... tout comme la place que sa mère pouvait encore y avoir aussi, réduisant le tout à néant. Voir son père s'éloigner d'elle a laissé dans son écume une déchirure plus vivace encore que la perte de sa mutation.

Du bruit se fait entendre au rez-de-chaussée. Une porte qui s'ouvre, la voix ensoleillée de sa grand-mère, des pas qui montent les escaliers, se rendent dans une chambre non loin de la sienne, le bruit d'une valise déposée au sol, une minute ou deux de silence puis de nouveau des pas dans l'escalier. Son père est là. Neo semble l'avoir senti également car ce dernier s'agite soudain avec enthousiasme. « Neo arrête, chut, calme-toi... » Lorsque le jeune chien vient tirer le bas de son bas de pyjama, l'adolescente consent enfin à bouger. « Ok, ok, j'arrive... » Dans un soupir résigné, Celeste sort de son lit, relève sa longue chevelure dans une queue de cheval pour avoir l'air un peu plus réveillée et vient ouvrir la porte à Neo qui gratte sans relâche contre pour lui faire accélérer le mouvement. « T'es vraiment qu'une p'tite terreur. » Un sourire doux passe sur les traits de la jeune femme avant qu'elle ne se retrouve dans le couloir de l'étage.

Là, ses pas deviennent encore plus hésitants qu'ils ne l'étaient déjà. Elle n'a pas envie de descendre tout comme elle a tout de même envie de voir s'il a changé depuis la dernière fois qu'elle l'a vu, ou si, tout bêtement, il se souvient encore d'elle alors qu'elle ne fait plus partie de son quotidien depuis plusieurs semaines à présent. C'est la boule au ventre que la mini-Trager descend à son tour les escaliers. Sans se donner le temps de faire marche-arrière, elle s'avance jusqu'à la petite cuisine. L'émotion qui la submerge lorsqu'elle aperçoit son père est un mélange entre la colère coriace qu'elle éprouve envers lui et le soulagement de le trouver ici. Lui aussi semble perturbé de la situation. Celeste acquiesce à sa première question. « J'ai pas soif, merci », qu'elle répond brièvement à la seconde.

La gorge serrée, la petite brune s'avance dans la cuisine jusqu'à prendre place autour de la table, sur la chaise la plus éloignée de l'endroit où se trouve son père. Dans un premier temps, elle ne sait pas quoi faire d'autre que de rester silencieuse et de lancer quelques petits regards à son père. Histoire de vérifier qu'il ne s'évapore pas dans l'un de ses battements de cils. Mais non, il reste là. Il ne bouge pas. Bien. Quand il faut y aller, il faut. « Alors ? Ton... Ton voyage s'est bien passé ? »

Spoiler:
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Aaron Trager
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MessageSujet: Re: (celestron) la dolce vita   (celestron) la dolce vita Icon_minitimeMar 29 Aoû 2017 - 20:31

La dolce vita
Celeste & Aaron



Il l’entend. Il l’entend avant de la voir. Il l’entend, avec ses oreilles, comme un humain normal, mais également avec son autre ouïe. Il entend sa colère, il entend son hésitation, il entend aussi ce qu’il pense être de l’appréhension. Il entend, enfin, sa présence, lorsqu’elle apparaît dans la cuisine, qu’elle avance, un Neo pour lui ouvrir le passage. Et aussitôt, Aaron se rend compte que non seulement sa fille, sa petite fille, sa petite princesse, sa perle rare, sa petite merveille, est une véritable femme à présent, mais aussi que rien, strictement rien, n’a changé entre eux. Il y a toujours cette gêne, il y a toujours cette fissure, cette fracture dans leur relation père-fille. Rien n’a changé pendant ces quelques mois. Les choses, même, donnent l’impression d’avoir empiré par le malaise qui s’étend entre les deux Trager qu’Agata a laissés seuls pour plus d’intimité. Si l’italien est la première tentative du père, l’anglais s’impose rapidement : il est trop tôt pour se croire encore bilingue. Première question, sans réponse, juste un hochement de tête. Courageux, pour une fois, insistant même, Aaron récidive alors que Celeste s’avance, alors qu’il hésite à la prendre dans ses bras sans pour autant avoir la force d’aller au devant d’un refus plus que blessant. Seconde question, la voix de sa fille éclôt dans la cuisine, comme pour mieux décourager les efforts du paternel. « J'ai pas soif, merci ». Aaron a la gorge serrée, un sourire crispé, légèrement forcé, comme pour se convaincre que ce ne sont pas, finalement, des retrouvailles si catastrophiques que cela. Neo vient quêter des caresses, le père en dispense sans savoir quoi rajouter, alors que Celeste s’assoit malgré tout ; elle n’a pas fui sa présence, c’est déjà une bonne chose, n’est-ce pas ?

Le père se contente de peu, la gorge serrée. Et c’est bien triste que de se rendre compte sitôt le pied posé dans la maison de ses beaux-parents, sitôt sa fille face à lui, qu’à présent, le seul fait qu’elle accepte d’être dans la même pièce que lui le rende heureux. Un silence, le silence. Des petits regards, Aaron a beau chercher un sujet de conversation, rien ne lui semble convenable. Parler de Moira est proscrit, pour l’instant tout du moins. Parler de l’orphelinat, de Sofiane, des nouveaux pensionnaires… il faut qu’il apprenne à se détacher de son travail, voilà bien trop de temps qu’il s’y immerge sans oser respirer. Parler de Radcliff, parler de l’intérêt de la milice, parler du recensement, qu’ils devront faire dès la rentrée ? Il n’en est pas question. Alors Aaron garde le silence, un peu trop longtemps. Il aimerait croire qu’il ne fait qu’attendre qu’elle se décide à lui parler, qu’il fait preuve d’une patience pédagogique, éducatrice, mais… mais non. Ce silence, c’est le silence de son propre échec. Et il serait bien hypocrite de sa part que de s’aveugler d’excuse.

« Alors ? Ton... Ton voyage s'est bien passé ? » Aaron sourit. Si le voyage s’est bien passé ? « Oui, ça va. Un peu long, comme tu t’en doutes… mais j’ai pu dormir, lire un peu, et regarder quelques films. » Ses propos ont-ils le moindre intérêt ? Pour être honnête, Aaron en doute. En doute vraiment. Mais… Il insuffle un peu d’enthousiasme dans l’ensemble, avec un franc sourire. Dans son esprit, sa mutation tort ses émotions pour étouffer son malaise. Il ne touchera pas à l’esprit de sa fille, ça non, mais au sien… son esprit vaut-il la peine d’être épargné de toute manipulation actuellement ? « En tout cas, je suis bien content d’être arrivé. » Non. Il n’a pas besoin de sa mutation pour être sincère. Et sa voix s’infléchit, de l’hésitation propre au doute et à l’affection qu’il porte pour Celeste. Et qu’il ne cessera jamais de lui porter. « Et bien content de te voir, aussi. » Souffle-t-il, murmure-t-il, se contente-t-il de penser les mots qui suivent ? Il est bien incapable de le savoir. Mais il les dit, avec tout son coeur, et toute son âme, comme un aveu, comme une confession intime. « Tu m’as manqué, Celeste. Chaque heure, chaque seconde, tu m’as manqué. » Va-t-elle répondre à son honnêteté par du scepticisme renforcé de dédain ? Oh, de cela, Aaron en est presque certain. Mais… Il hausse les épaules. Elle lui a manqué, avant autant de force que Moira lui manque à présent. Son coeur est écartelé entre sa fille, son joyau, et entre la femme qui a su percer ses barrières, aller le chercher dans la solitude de son veuvage pour lui rappeler qu’avant d’être un père et un veuf, il était un homme. Et de cela, d’ailleurs, il va devoir en parler avec Celeste, avant qu’ils ne quittent l’Europe, pour redémarrer une nouvelle année d’un bon pied. Ou à défaut, du mieux qu’ils pourront. Un soupir, le père regarde sa princesse. Et fait l’effort de chasser Moira de ses pensées.

Sa voix reprend, pleine d’une vitalité presque naturelle, qu’il est allé cherchée au fond de son être. Ce sont ses premières vacances avec Celeste depuis bien trop longtemps. Il faut qu’ils en profitent, il faut qu’il en profite. « Bon ! Et du coup, quel est le programme de la journée, avant que ton vieux père ne s’écroule de fatigue en remerciant le décalage horaire ? » Il se lève, rapporte sa tasse - vide - à l’évier et revient avec une éponge pour éjecter les quelques miettes issues de son petit-déjeuner. Des gestes simples, si différents pourtant d’une pizza glissée au four et mangée entre deux rendez-vous ou d’un noeud de cravate effectué sans y penser devant la vitre d’une voiture. Des gestes simples : des gestes de vacances. « Tu pourrais commencer par me faire revisiter la propriété ? Ca fait des années que je ne suis pas venu, j’imagine qu’il y a tout un tas de changement. Agata et Paolo seraient capables de démolir une grange pour construire une piscine sans nous en toucher deux mots ! » Ou pas. Les parents de Chiara en seraient capables, bien sûr, mais… mais ce n’est pas la question : Aaron veut redécouvrir sa fille. Vraiment. Dusse-t-il commencer par redécouvrir tout un panel de grimace et de mauvaise humeur.


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