(001), Marié trois fois, Aloys a deux fois cru trouver l’amour de sa vie. Son premier mariage, arrangé par ses parents, s’est terminé par la mort en couche de son épouse alors qu’elle n’avait pas vingt-deux ans. Son second mariage, lorsque son fils avait plus de dix ans, s’est soldé par un désastre puisque c’est au bout de quatre ans de mariage qu’ils se sont aperçus qu’Aloys ne vieillissait plus. Il n’y a pas réellement eu de divorce, mais on a prié Aloys de ne plus paraître en public. Son épouse a fini par mourir de vieillesse cinquante ans plus tard. Son troisième mariage, Aloys avait à l’époque 114 ans, s’est conclu cette fois par un réel divorce. Depuis, Aloys refuse de s’engager dans des relations amoureuses et a définitivement fait une croix sur tout ça. Même si sa vaccination risque de changer son point de vue. (002), Justement, en parlant de vaccination, Aloys a du mal à assimiler le fait de ne plus être immortel, de ne plus se régénérer. La douleur, il la connait, il la supporte, et il tarde donc à soigner de petites coupures puisqu’il les oublie aussitôt. De même, profondément altruiste, Aloys n’hésitera jamais à se mettre en danger pour soigner et sauver quelqu’un. Immortel depuis bien trop d’années, il a même tendance à s’exposer trop en comptant sur sa mutation pour le sauver. Ses amis proches doivent régulièrement lui rappeler qu’il n’est plus immortel et que regarder avant de traverser n’est donc plus une option. (003), 162 ans, c’est vieux, on est bien d’accord. Mais pour être franc, Aloys n’a pas vu passer les siècles. Après son départ de la Belgique, il s’est promené un peu partout, apprenant des langues, découvrant différents domaines de la médecine, sauvant des vies puisqu’il ne pouvait mourir. Sa mémoire est sélective, et il ne se souvient pour ainsi dire pas vraiment de ses décennies de vie. Juste de quelques épisodes marquants. Et encore. (004), Passionné de peinture et de dessins, c’est un grand collectionneur et ça doit être l’une de ses rares manies, si on oublie sa tendance à toujours frapper trois coups, puis deux, puis trois, lorsqu’il veut entrer dans une pièce. Des tableaux de grands peintres ou des croquis effectués dans la rue, il possède une aile du château familial, en Belgique, où tous sont exposés et ne conserve auprès de lui que ses préférés. (005), Le domaine familial, d’ailleurs, est toujours habité par les de Miribel. Le secret de l’aïeul immortel est préservé depuis toujours et, pour éviter d’éventuel problème, il n’a le droit de revenir sur son domaine – puisqu’il en serait techniquement le propriétaire légal – qu’une fois tous les six mois. Dans ce cas là, il se fait souvent passer pour un cousin éloigné. La lignée qui habite le château est celle de ses descendants directs, puisque son fils né de son premier mariage a survécu. Aloys n’aime pas vraiment ses descendants qu’il trouve trop… pressés, trop attaché aux soucis financiers. Mais bon, l’important c’est qu’ils entretiennent le domaine, veillent à ce qu’il ne manque de rien et ne lui mette pas de bâtons dans les roues. (006), Aloys est hémophile depuis sa vaccination. Comme si la nature avait besoin de lui faire payer ses décennies d’immortalité en tentant de le faire mourir plus rapidement. Comme il a tendance à oublier de se soigner, il a déjà fini deux fois à l’hôpital évanoui pour avoir perdu trop de sang. (007), Aloys a tendance à utiliser des mots, des expressions, des tournures de phrases un peu trop désuètes. Comme ce mot. Et lorsqu’il fait l’effort de se concentrer pour parler comme tout le monde, il se trompe alors d’expressions, mélangeant le verlan avec l’argot en passant par d’autres langues tout simplement. De même, il a des réflexes et des manies de son enfance qui ressortent rapidement, l’amenant à se comporter comme un gentilhomme lorsqu’il s’agit de se lever lorsqu’une dame se lève de table, de tousser proprement dans un mouchoir ou encore de jurer avec des sacrebleu… (008), Aloys a été déporté. Ce n’est pas la période de sa vie qu’il préfère, et il a d’ailleurs occulté de sa mémoire l’ensemble des souvenirs qui s’y rapportent. Il avait eu la mauvaise idée d’habiter à Paris au milieu du XXième siècle et plus encore la mauvaise idée et le courage d’héberger des réfugiés et de rares juifs survivants de son village. De son passage à Auschwitz, il garde un numéro sur son avant-bras que même sa mutation n’a pas réussi à exclure, affaiblie comme elle l’était par les privations et la souffrance. C’est la seule fois de sa vie que l’immortel a senti dans sa nuque le souffle de la mort. (009), Aloys adore les enfants. Il mourrait – vraiment – pour sauver un petit enfant, qu’il soit mutant, humain, fils d’Hunter ou psychopathe. Pour lui, un enfant est par définition innocent, et il faut à tout prix préserver cette innocence. (010), Le numéro qu'il garde de son passage à Auschwitz, en dehors d'être un traumatisme certain, est ce qui lui a permis de prouver qu'il était immortel, tout comme ses quelques tentatives de suicide avortées. Les premières années après la découverte de sa mutation, Aloys avait l'habitude de se trancher les veines le main pour regarder, fasciner, sa peau se réparer. Après Auschwitz, le numéro marqué sur son avant-bras a remplacé cette macabre habitude.

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