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 how many years deep is your wound? (owen & malachi)

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MessageSujet: how many years deep is your wound? (owen & malachi)   how many years deep is your wound? (owen & malachi) Icon_minitimeLun 25 Avr 2016 - 21:32

how many years deep is your wound?
OWEN & SCARLETT & MALACHI

Le verre de cristal s'était fracassé contre le carrelage de la cuisine. Il avait glissé entre ses doigts, et Scarlett n'avait pas cherché à le rattraper. Les éclats s'étaient éparpillés dans la pièce, tandis que la jeune femme restait pétrifiée, une expression horrifiée déformant ses traits. Plus pâle qu'une morte, Scarlett tenait une feuille de papier dont elle ne pouvait détacher son regard. Elle lisait et relisait les mots et les chiffres imprimés, incrédule, ses grands yeux verts brillants de larmes qui ne tardèrent pas à commencer à couler sur ses joues. Il n'en fallait pas beaucoup pour ruiner toute une vie. Une simple feuille de papier. Une feuille de papier qu'elle possédait depuis plus d'un an, qu'elle n'avait jamais étudiée avec attention parce qu'elle n'en avait pas vu l'intérêt, parce qu'elle l'avait tout simplement oubliée, avant qu'on ne lui demande son dossier médical pour compléter les démarches d'adoption. Scarlett avait alors pensé que c'était l'occasion rêvée pour faire un peu de tri dans toute cette paperasse accumulée depuis des années, toutes ces choses que l'on conservait instinctivement, sans réellement savoir si l'on en aurait besoin un jour. Il manquait toujours un papier pour ceci, une facture pour cela... Tout ceci était parti d'une bonne intention, de la volonté d'accomplir quelque chose de bien en adoptant un enfant. Alors Scarlett n'aurait jamais imaginé que cela puisse lui revenir si violemment en pleine figure. Il lui avait fallu beaucoup de temps pour accepter la perte de son bébé, pour s'autoriser à reconsidérer sa maternité, pour entamer les démarches d'adoption du petit Garrett. Tout ce temps, tous ces efforts, venaient d'être réduits à néant par quelques mots imprimés sur du papier recyclé. Pendant une minute, la jeune femme avait eu l'impression de revivre cette nuit terrible où elle avait perdu sa fille. La douleur fulgurante qui l'avait réveillée en pleine nuit, les contractions, la panique... Caleb qui l'emmenait à l'hôpital, la portait jusqu'aux urgences tandis qu'elle hurlait dans ses bras... Et puis cet accouchement terrible, cet accouchement prématuré où elle n'avait fait que pleurer, hystérique, parce qu'on lui avait dit que sa fille était morte in utero et qu'elle allait tout de même devoir lui donner naissance, parce qu'à presque six mois de grossesse, c'était ainsi que cela se passait. Ce tout petit bébé inerte dans ses bras... Elle ne saurait jamais de quelle couleur étaient ses yeux. N'entendrait jamais le son de sa voix. Ne la verrait pas sourire, grandir, vivre. Parce que son petit cœur avait cessé de battre trop tôt.

Parce que Violet avait été assassinée. Assassinée. Scarlett ne l'avait pas perdue parce que quelque chose ne se passait pas bien durant sa grossesse. Elle ne l'avait même pas perdue "sans raison", comme cela arrivait parfois, sans que la médecine ne puisse l'expliquer. Sa fille était morte parce que quelqu'un, de toute évidence au courant de sa véritable nature et mal intentionné, lui avait injecté une dose de NH24 à son insu, sans qu'elle ne s'en rende jamais compte. C'était ce que ses analyses sanguines de l'époque disaient. Il n'était pas écrit clairement NH24 sur le papier, mais Scarlett connaissait ses composants par cœur, elle avait vu les dégâts qu'ils causaient, elle savait ce qu'une dose risquait de faire à une femme enceinte... Mais jamais, même dans ses pires cauchemars, elle n'aurait imaginé être un jour victime d'une telle barbarie. Faire le deuil d'un enfant perdu naturellement était déjà une terrible épreuve, mais le faire en sachant qu'on vous l'avait arraché sciemment... Non, non, non, c'était insurmontable. Scarlett avait l'impression qu'on venait de lui arracher le cœur, qu'on l'avait piétiné et qu'on avait ensuite tenté de lui en faire avaler les morceaux de force. On lui avait arraché sa fille, et elle ne l'avait pas compris. Abattue par le chagrin, rongée par la culpabilité, aveuglée par la colère, elle n'avait pas prêté attention à ce qui à l'époque semblait n'avoir aucune importance. Et aujourd'hui, elle avait l'impression qu'on lui prenait Violet une nouvelle fois. Sa toute petite Violet... Caleb et elle auraient été de merveilleux parents. Ce bébé, ils l'avaient voulu de tout leur cœur, ils l'auraient aimé à la folie. Ils l'avaient aimé à la folie. On ne lui avait pas juste pris sa fille, on lui avait pris son seul amour, sa vie entière. Quiconque lui avait injecté cette dose de NH24 l'avait détruite, lui avait volé son existence.

Scarlett. Son prénom prononcé la fit sursauter. Elle battit des paupières lentement, sa vision rendue floue par les larmes. Incapable de reprendre ses esprits, de se raccrocher à la réalité, la belle vacilla et s'appuya instinctivement sur le comptoir de la cuisine. La gorge serrée comme si on tentait de l'étrangler, elle tenta de prendre une profonde inspiration, mais ne parvint qu'à hoqueter, secouée par un violent sanglot. Scarlett. Owen. Owen était là. Elle se souvenait, maintenant. Elle l'avait invité à dîner, parce que ces dernières semaines elle ne l'avait pas beaucoup vu, et elle souhaitait passer un peu de temps avec lui. Alors elle l'avait invité à dîner, songeant qu'ils passeraient une bonne soirée ensemble. Elle avait cuisiné, une odeur légèrement épicée flottait dans la cuisine ouverte sur le salon, et il y avait un cheesecake au citron au frais. Plus rien de tout cela n'avait aucune importance, elle avait eu l'appétit coupé à l'instant où elle avait compris ce qui lui était réellement arrivé. « Mon bébé... Mon bébé, ma Violet... Owen... » Scarlett croisa les bras sous sa poitrine, et ses doigts accrochèrent nerveusement la soie de son chemisier. L'énergie pulsait déjà dans ses veines, elle pouvait le sentir, mais pour la première fois depuis des année, elle choisit de l'ignorer. « On l'a tuée... Quelqu'un l'a tuée... J'ai cru... J'ai cru que c'était de ma faute, mais ce n'était pas de ma faute... » Elle voyait Violet. Sa jolie peau claire, ses boucles noires comme celles de son père. Ses toutes petites mains, ses pieds minuscules. Elle n'avait pas voulu la lâcher, espérant naïvement que son étreinte maternelle suffirait à la protéger, à la ramener à la vie. Puis il avait fallu qu'on la lui enlève, et elle avait hurlé pendant de longues minutes, s'était débattue dans les bras de Caleb, qui avait dû user de sa force herculéenne pour la garder au lit. Tous ses souvenirs, aussi limpides et insupportables que si elle avait quitté l'hôpital la veille.

Pour Scarlett, c'était l'épreuve de trop. Celle qui venait de fracasser son éternel optimisme, et l'avait envoyée au sol. Littéralement, puisque la jeune femme avait fini par se laisser glisser sur le carrelage de la cuisine, la tête entre les mains et le papier toujours serré entre ses doigts. « On me l'a prise... On me l'a prise... Elle était tellement petite Owen, tellement petite... » De violents sanglots la secouaient, incontrôlables, et ses paumes commençaient à prendre une inquiétante teinte écarlate et lumineuse. Scarlett ne s'était jamais aussi peu souciée du potentiel destructeur. Comment aurait-elle pu ? On avait tué son bébé. Il n'existait même pas de mot pour définir un parent qui avait perdu son enfant tant c'était horrible. Ce qu'on avait fait à Violet, c'était impardonnable. Comment pouvait-on vouloir la mort d'un enfant innocent ? Peut-être que son bébé n'avait pas été la cible initiale, mais c'était elle qui était morte. Ce n'était pas un accident. Ce n'était même pas naturel. Violet, pas encore sortie du ventre de sa mère, avait été victime de la barbarie humaine. Meurtrie jusque dans son âme, Scarlett ne pouvait que sangloter, pleurer cet enfant qu'elle n'élèverait jamais parce qu'on lui avait ôté ce droit en lui ôtant la vie.
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MessageSujet: Re: how many years deep is your wound? (owen & malachi)   how many years deep is your wound? (owen & malachi) Icon_minitimeMar 26 Avr 2016 - 9:15

-scarlett & owen-
how many years deep is your wound?
Scarlett... Owen était venu à Radcliff pour elle, parce qu’elle avait besoin de lui, parce qu’elle le lui avait demandé et qu’il n’avait pas pu être là quand elle l’avait fait. Coincé à New-York parce qu’un connard avait monté un dossier bancal pour corruption, il avait dû rester à disposition et il n’avait pas pu être là, pas pu lui venir en aide, rien pu faire. Et il s’en était voulu, plus qu’un peu. Parce qu’il avait toujours été là pour elle autrefois, parce qu’il ne l’avait jamais laissé tomber. Quand les allégations portées contre lui s’étaient écroulées comme un château de cartes, il avait demandé sa mutation dans un autre service. Un job de merde dans une ville de merde qu’on lui avait accordé sans même sourcillé, trop content qu’ils étaient de se débarrasser d’un transmutant avec un passif, même blanchi. Ah ça, pour soutenir les héros, les masses se mobilisaient. Par contre, quand il s’agissait de défendre un mec dont la carrière dérangeait parce qu’elle usait n’importe qui, y avait plus personne. C’était pas très reluisant après tout, de devoir envoyer les agents exfiltrés en désintoxe, ça faisait mauvais genre. Ça avait été si facile de reléguer le dégénéré de service dans un patelin rempli de fous furieux. Voilà à quoi ressemblait l’entraide entre collègues. Une putain de mauvaise blague que personne ne tentait de rendre drôle. Il ne détestait pas son job pour autant, que du contraire. En fait, quand on ne le collait pas à des patrouilles de routine qu’il n’aurait jamais dû faire en raison de son grade, y avait de quoi faire en ville. Le nombre de morts et de disparitions était astronomique, une anomalie numérique grandiose et avant que Radcliff change de main, personne n’en avait grand-chose à foutre. Pour autant, il appréciait pas forcément non plus la nouvelle maire et pour être honnête, il n’en avait strictement rien à foutre tant qu’on le laissait faire son boulot sans lui coller des bâtons dans les roues. Humains lambdas ou hunters, mutants menacés, menaçants ou hunters, il n’en avait rien à foutre. S’il fallait les coffrer pour meurtres, menaces ou même un putain d’excès de vitesse, il le faisait. Pour lui, y avait pas de différences et s’il ne pouvait pas se les faire, il trouverait un moyen de se les faire quand même. C’était là qu’il en était mais, ça en valait la peine, pour elle. Parce qu’il n’avait jamais laissé tomber sa sœur auparavant et que ça n’allait certainement pas commencer.
Gamin, il avait eu du mal à l’accepter quand elle avait débarquer chez lui mais, il avait rapidement compris que personne ne voulait perdre ses parents. Elle était rapidement devenue sa sœur et mieux valait que personne ne s’amuse à contester ce lien. Ça avait toujours mal fini pour tout le monde et par quelques heures de colle ou diverses punitions pour lui. Il avait toujours été hyper protecteur avec elle, à un point qu’il était devenu très difficile de contester qu’ils étaient frère et sœur. Pourtant, la réalité administrative était différente. Ils étaient cousins. Un mot qui ne voulait pas dire grand-chose pour eux, tant pis si personne ne comprenait vraiment le fond des choses, ça, c’était pas le problème d’Owen. Oh bien sûr, il lui en avait voulu quand elle avait quitté New York mais, comment lui reprocher ? Deux fois... ça faisait deux fois qu’elle perdait ses parents. N’importe qui aurait péter un plomb, lui le premier. Quelle idée de s’engager comme flic alors qu’il était destiné à tout autre chose ? En attendant, il voulait la retrouver, véritablement pouvoir passer un moment avec elle et partager ses drames. Le temps qu’il s’installe et que les emmerdes en ville se tassent, ils n’avaient pas franchement eu ce temps. C’était pour ça qu’il avait accepter de dîner. Pour lui parler, pour qu’elle lui parle. Et aussi pour profiter d’autre chose qu’un plat préparé dégueulasse réchauffé au micro-onde. Pour faire bonne mesure, il s’était préparé, un peu. Ce qui se résumait en réalité à une chemise propre, presque repassée et pas à un de ses éternels pulls noirs si chers à son cœur et d’une praticité sans borne pour les interventions. Une façon de dire à sa sœur que tout allait bien. Il n’aurait pas enfilé une chemise sinon. Sauf qu’en arrivant, en dehors de l’odeur alléchante de la bouffe qui s’échappait de la porte, elle ne répondait pas. Un appel, deux appels, pas de réponses. Il sortit ses clefs et ouvrit la porte pour la trouver prostrée au sol, en larmes.

- « Putain. » Il se rapprocha pour l’appeler encore. Prudent. Il connaissait trop bien la mutation de sa sœur que pour ne pas se méfier. « Scarlett... » Il s’attendait à une réaction plus parlante mais, elle avait relevé la tête. « Scarlett. »

Il s’attendait bien à ce qu’elle lui explique pourquoi elle était dans cet état mais, il ne s’attendait pas à se bouffer la vérité de la situation en pleine gueule. Livide parce qu’il n’avait pas pu être là pour elle à ce moment-là non plus, il s’attendait presque à des reproches. Pourtant, c’était pas le genre de Scarlett. Pourquoi elle parlait de Violet ? Pourquoi elle se mettait dans un tel état maintenant ? Et encore la vérité, crue, nette et dégueulasse. Il s’embrasa d’un coup, sentant la colère gronder dans ses entrailles. Qui était donc l’enfant de pute qui avait ça ? Parce qu’il était bien entendu hors de question de remettre ce qu’elle lui disait en question. Si elle lui disait qu’on avait assassiné son bébé pas encore né, alors c’était vrai. Point. Il aurait aimé la serrer dans ses bras mais, sachant ce dont elle était capable et n’ayant jamais oublié les conseils de leur mère à ce sujet, il restait prudent. C’était l’horreur pour un mec comme lui de ne pas pouvoir apporter le réconfort nécessaire au seul membre de sa famille encore en vie, protecteur comme il était, il se faisait violence. Aussi, quand il vit ses mains irradier de lumière, il lui arracha le papier qu’elle avait dans les mains. Manquait plus qu’elle fasse exploser le quartier avec une putain de feuille A4. Il la saisit par les épaules, avec une douceur dont il n’était capable que pour elle ou pour des gamins, l’obligeant à le regarder dans les yeux.

- « Scarlett, regarde-moi. S’il te plait regarde-moi. Allez frangine, focus. On retrouvera le responsable, j’en fais mon affaire. Mais hey... essaie de respirer d’accord ? » Elle détournait déjà le regard. « Nan nan nan, dans les yeux Sca. Concentre-toi. C’est pas le moment de faire sauter le quartier. Tu t’en voudrais trop. T’as assez souffert. » Il passa derrière elle, s’assit, ses jambes de chaque côtés d’elle pour la prendre dans ses bras sans toucher ses mains. « J’te dirai pas que ça ira, c’est des conneries mais faut que tu respires avec moi. Ferme les yeux et respire avec moi. Pense à ce que maman disait. »

Combien de fois n’avait-il pas vu faire sa mère ? Combien de fois ? Il connaissait les gestes et généralement, il était largement capable de les reproduire. Sauf qu’il ne l’avait jamais vu dans cet état. Jamais. C’était la goutte de trop, le drame qui risquait de tout faire péter, littéralement. Il savait qu’elle n’avait pas forcément besoin de toucher quelque chose mais, c’était moins évident pour elle de le blesser sans le voir et sans le toucher directement. Deux précautions valaient mieux qu’une même s’il aurait aimé ne pas devoir faire gaffe pour la consoler.
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MessageSujet: Re: how many years deep is your wound? (owen & malachi)   how many years deep is your wound? (owen & malachi) Icon_minitimeDim 8 Mai 2016 - 16:43

how many years deep is your wound?
OWEN & SCARLETT & MALACHI

La terre s'était ouverte sous ses pieds et l'avait précipitée dans le néant, elle avait été engloutie toute entière et d'un seul coup. Après des années et des drames à n'en plus finir, elle venait finalement de l'atteindre, ce célèbre point de non retour. Son optimisme était partie en fumée, calciné en même temps que sa foi en l'humanité. De toute évidence, elle s'était trompée, l'être humain n'était finalement pas capable d'autre chose que de destruction. La bonté n'était pas innée chez l'homme, c'était un trait de plus en plus rare, et qui ne faisait pas le poids face à la violence gratuite distribuée aux quatre coins du pays. On ne pouvait pas pousser une femme à la fausse couche et se prétendre bon. On ne pouvait pas supporter l'assassinat de son bébé et garder espoir en son prochain. Ses idéaux, Scarlett venait de les enterrer de façon définitive. Sa naïveté ne l'avait que trop longtemps aveuglée, il n'y avait rien de bon, rien à sauver dans cette ville. Mettre les pieds à Radcliff, c'était passer un pacte avec le Diable, corrompre son âme et se condamner à d’innommables souffrances. Scarlett n'avait jamais été croyante, mais il y avait quelque chose de tristement religieux dans cette histoire, comme si une malédiction divine avait frappé la ville ainsi que tous ses habitants. Et il ne servait à rien de prier, de supplier Dieu de leur venir en aide... Car soit il n'existait pas, soit il avait décidé de faire la sourde oreille – auquel cas, c'était un être bien plus abject qu'elle ne l'aurait cru. Si Dieu avait réellement créé l'homme à son image, alors Scarlett n'était pas le moins du monde intéressée par une rencontre. Quel Dieu digne de ce nom laissait une enfant innocente mourir ? Violet n'avait pas mérité son sort. Elle n'avait pas mérité de mourir avant de voir le jour, avant d'avoir ouvert les yeux, avant d'avoir été couverte de tout l'amour de ses parents. Horreur... Comment allait-elle pouvoir le dire à Caleb ? Comment allait-elle pouvoir lui avouer que leur fille n'était pas morte parce que c'était ainsi, mais parce que quelqu'un avait décidé qu'elle n'avait pas le droit de vivre ? Ce serait lui briser le cœur – encore, retourner toute son existence, détruire tous les efforts accomplis dans l'espoir de faire son deuil. Mais elle n'avait pas le droit de lui cacher la vérité, n'est-ce pas ? Et peut-être... Peut-être qu'elle n'avait pas envie de porter ce poids seule.

Les mots d'Owen, elle ne les entendait et ne le comprenait qu'à moitié ; et ça lui était parfaitement égal. À partir de ce moment, tout lui serait égal. Rien n'aurait jamais autant d'importance que Violet et la façon dont elle était morte, la façon dont on la lui avait arrachée. Elle aurait eu un peu plus d'un an. Sans doute aurait-elle été une petite fille adorable, pleine de vie et de joie. Elle aurait probablement été porteuse du gène mutant, et Scarlett aurait été fière d'elle et l'aurait soutenue quel qu'aurait pu être son don. Cela faisait partie de ces choses qu'elle ne saurait jamais, une de plus à ajouter sur la liste de toutes ces choses qu'elle n'expérimenterait pas. Alors le quartier, dans l'immédiat, elle s'en moquait bien. Peut-être qu'avec un peu de chance, elle se tuerait par la même occasion... ? « Tais-toi, Owen, tais-toi !! » Elle ne voulait pas fermer les yeux, elle ne voulait pas respirer, elle ne voulait pas penser à sa tante... Elle aurait voulu ne pouvoir plus penser du tout. Oublier que l'on avait assassiné sa fille, oublier qu'elle perdait une par une les personnes qui comptaient pour elle, oublier que malgré tous ses efforts pour voir le bon côté de la vie, on lui maintenait la tête sous l'eau. Finalement, peut-être aurait-elle mieux fait de se noyer au lieu de continuer à lutter. Pour une fois, Scarlett n'avait pas envie de penser à ce qui l'entourait, à ceux qui l'entouraient. Le moment était sans doute bien mal choisi pour être égoïste, mais elle n'était de toute évidence plus en état de penser. Tout ce qu'elle voulait, c'était que le monde s'arrête de tourner et devienne silencieux. Scarlett n'en pouvait plus de toute cette douleur, de tout ce bruit. C'était comme si l'équivalent d'une ruche bourdonnait dans son crâne, et son cœur avait été remplacé par un tambour furieux. Le sang bouillonnait dans ses veines, elle avait l'impression d'être une grenade dégoupillée sur le point d'exploser. Ce qu'elle était probablement, au fond. Elle l'avait toujours été, elle s'était simplement débrouillée pour l'oublier au quotidien. Mais ce qui en elle était dangereux, et aujourd'hui elle n'avait plus envie de contenir cette bête sauvage.

« Je me contrefiche du quartier, tu entends ?! Ils ont tué mon bébé... Peut-être qu'après tout, cette ville et ses habitants méritent de partir en fumée !! » Owen avait raison, la crise de nerfs passée, elle ne supporterait pas de réaliser avoir tué des personnes innocentes parce qu'elle avait été incapable de se contrôler. Là elle était tout le problème, Scarlett n'avait même plus envie d'entraver sa mutation. Elle n'en avait pas la force, complètement dévastée par la nouvelle qui lui était tombée dessus sans crier gare. Toute sa vie, Scarlett l'avait passée à brider ses pouvoirs, à s'assurer qu'ils soient toujours maîtrisés afin d'éviter les catastrophes. Les catastrophes... Elles avaient été inévitables. On n'évitait pas le destin. Ce qui devait arriver arrivait, c'était une loi universelle de l'univers. Violet devait mourir... et elle était morte. Si c'était juste ? Bien sûr que non, mais la vie l'était rarement, Scarlett ne le savait que trop bien. Ses parents. Son oncle et sa tante. Violet. Caleb. Evelyn. Malachi. Siward. Qui serait le prochain à souffrir, à mourir ? « Va-t-en, Owen, va-t-en ! » Elle ne voulait pas lui faire de mal, mais il était bien placé pour savoir qu'il valait mieux ne pas la titiller lorsque son don menaçait de lui échapper. « Laisse-moi tranquille, Owen, laisse-moi tranquille ! » Brusquement, Scarlett se releva en le repoussant d'une main, l'écartant avec une force insoupçonnée chez elle – une force vraisemblablement décuplée par sa mutation.

Les doigts de Scarlett se crispèrent sur le rebord en marbre du comptoir de la cuisine, et la pierre résista mal aux micro-décharges d'énergie qui échappaient à l'Anglaise. Le marbre craqua, se fendit bruyamment et Scarlett relâcha le meuble et recula. Elle battit des paupières plusieurs fois, sans parvenir à chasser le voile écarlate qui couvrait sa vision. Elle n'y voyait pas clair, ses pensées étaient chamboulées et petit à petit le contrôle de son corps lui échappait. « Il faut que tu t'en ailles, Owen. Ça va aller. » C'était un mensonge, et un plutôt évident. Ça va aller. Combien de fois avait-elle répété ces mots à des patients en sachant très bien qu'ils allaient vivre un enfer ? Ces trois petits mots combinés étaient les plus hypocrites au monde. On les lui avait prononcés alors qu'elle perdait Violet... Et comme une idiote, elle y avait cru. Parce que dans les pires moments, on avait besoin de pouvoir se raccrocher à quelque chose. Une toute petite flammèche d'espoir, n'importe quoi... Ça n'avait pas été. On lui avait dit ces mots, on lui avait menti. Oh, pas volontairement, aucun médecin ne le faisait volontairement... L'envie de rassurer une personne en détresse était toujours plus forte que celle de leur cracher une vérité nue au visage. Mais donner de faux espoirs, n'était-ce finalement pas plus cruel encore ? Parce que naïvement, Scarlett avait cru qu'il y avait une chance, même infime, que sa fille puisse survivre. Parce qu'aucune mère ne pouvait accepter la mort de son enfant. Sauf que Scarlett y avait été confrontée. Et c'était à cause de cela qu'elle menaçait de faire exploser tout son appartement. Elle avait eu le cœur brisé et ça, ça ne guérissait pas.
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