2008 - GODDARD, KANSAS. « Dante ! » Au son de sa voix, le mutant se stoppa net. Raina. Que faisait-elle là ? Elle n'était pas censé être là, pas censé assister à ça. « Dante, qu'est-ce que t'as fait ? » souffla-t-elle, la voix brisée, le regard trempé. Fou de rage, Alvarez détourna le regard de son œuvre, de son massacre. Il fit volte-face et plongea son regard fou dans les yeux apeuré de sa femme. Derrière lui, les cris de douleurs s'élevaient encore dans l'air lourd de cette soirée d'été. Que faisait-il ? Comme réveillé d'un mauvais rêve, le mutant prenait enfin mesure de l'ampleur de sa folie. De ce qu'il venait de faire. A ses pieds, des dizaines de corps brûlés, léchés par les flammes Tout avait débuté avec une simple phrase, juste quelques mots. Arrosez-vous d'essence et craquez une allumette. Certains bougeaient encore, ceux qui avaient survécu. Et maintenant, le parc paisible de la ville ressemblait à un champ de bataille. Le corps tremblant de Raina manqua de faillir à la vue d'un tel massacre, et à l'idée que tout était de sa faute. Avait-elle épousé un monstre ? « Qu'est-ce que t'as foutu Dante ? » cria-t-elle telle une furie, la gorge nouée, frappant un grand coup contre le torse de son mari hagard. « Ils ... ils devaient payer. Ils devaient souffrir pour ce qu'ils ont fait aux enfant, je ... J'voulais les voir souffrir. » Comme pour illustrer ses paroles, un cri déchira l'air alors qu'une énième personne s'écrasa contre le sol, succombant finalement aux flammes. Raina porta ses deux mains contre sa bouche. Des hommes, pour la plupart, des femmes aussi. Tout ceux qui étaient venu confronter Dante quelques jours plus tôt chez lui. Tout ceux qu'il soupçonnait d'avoir tuer ses précieuses filles. « Mais t'es un grand malade ! T'es complètement fou ! J'suis bouleversée aussi, autant que toi, pourtant tu m'vois pas foutre le feu à la moitié de la ville ! » Ses poings fragiles vinrent s'écraser encore et encore contre le corps de Dante, qui ne réagit pas. Le mutant était ailleurs, complètement insensible au massacre qui faisait encore rage autour de lui. Il avait l'impression d'avoir perdu la tête ; il l'avait surement fait. Plus rien n'avait de sens, et le sol commençait à tourner sous ses pieds. Il était fatigué. Seul les coups répétés de sa femme le rattachait au monde autour de lui. « Dis leur d'arrêter ! Tu m'entends ? Arrête-les Dante, dis-leur de se jeter dans le lac ! » Le regard de Dante était perdu dans le vide. « Non. » souffla-t-il. Doucement. Calmement. En paix avec cette horrible décision. « Comment ça non ? Tu te rend compte de ce que t'es en train de faire ? » Les larmes coulaient abondamment sur les joues creusées de la jeune femme. « Non, j'les arrêteraient pas. Ils ont pas arrêté quand ils ont entendu Anthea et Alma crier à l'aide dans la grange ! Alors ils vont brûler, comme elles elles ont brulées. » La rage brulait dans les yeux de Dante, terrifiant sa femme qui recula de quelques pas. « T'es taré, Dante. Complètement. J'vais chercher la police. » La belle fit volte-face, commença à courir vers le commissariat sans grand espoir ; elle savait qu'ils ne pourraient rien contre Dante. Mais elle ne pouvait pas rester là sans rien faire. « Stop ! Viens-là. » ordonna-t-il à sa Raina qui se retrouva obliger de s’exécuter, brisant ainsi la promesse qu'il lui avait fait de ne jamais utiliser son pouvoir sur elle. La belle jura, s’exécutant sans aucun choix. « Ne fais pas ça, s'il te plait Raina. Tu sais que je m'en tirerais toujours de toute manière, t'y peux rien. Mais si tu m'aimes vraiment, si t'aimais nos filles, tu f'ra pas ça. » Le mutant n'utilisa pas son pouvoir, il ne voulait pas la forcer. Raina le savait, et il sentait qu'il n'avait pas usé de son don ; sa femme lui avait appris à faire. Elle devait le décider toute seule. « Dégage. » souffla-t-elle sèchement, se rapprochant du mutant, son visage à quelques centimètres du sien. « J'veux plus jamais te revoir Dante. Tu fais tes affaires, et tu dégages de ma vie. » Le cœur de Dante se brisa. Au fond, il avait espéré qu'elle comprenne. Déçu, il porta un dernier regard sur la scène apocalyptique dans son dos, avant de partir. Il ne savait pas où aller, il ne savait pas quoi faire. La seule chose qu'il savait, c'était que plus rien de le rattachait dans cette chienne de vie et qu'il n'était plus décidé à se laisser faire par ce foutu destin.

2014 - BOSTON, MASSACHUSETS. Le pas pressé, les yeux encore lourds de sa nuit sans sommeil, Dante regagnait finalement son appartement après une journée en bonne compagnie. Le mutant aurait facilement pu se faire raccompagner, n'ayant qu'à claquer des doigts pour se faire prendre en stop. Pourtant, il ne refusait pas l'air frai de ce début de soirée après être resté enfermé toute la journée. Le mutant tira longuement sur sa cigarette, perdu dans ses pensées, lorsqu'un cri attira son attention. Les rues de cette petite ville était calme, l'animation faisait tâche dans ce décor trop ennuyeux au goût de Dante. Aussi, il n'hésita pas à se diriger vers la source de ce bruit d'un pas nonchalant. Il débarqua dans une petite ruelle, apparence déserte mais qui se révéla la scène d'une confrontation dans un recoin. Ne se cachant même pas, Dante s'arrêta en plein milieu du passage, main dans les poches, observant la lutte devant ses yeux. Un petit groupe d'homme, cinq ou six abrutis qui avaient décidé de s'acharner sur une gamine. Mais ce n'était pas le cri de la jeune femme qu'il avait entendu, mais l'un de ses agresseurs, qui gisait quelques mètres plus loin. Loin de se laisser faire par les primates qui s'en prenait à elle, la blonde tâchait de riposter du mieux qu'elle pouvait ; et la belle n'avait pas l'air de trop mal se débrouiller. Comment avait-elle pu faire face si longtemps à un groupe d'une telle taille ? Le mutant ne bougeait pas, se contentant d'observer la lutte sans un mot. Fasciné. La jeune femme semblait rendre chacun des coups qu'on lui affligeait, tenant tête à ses agresseurs avec plus de hargne qu'il n'avait jamais vu. Elle était douée, beaucoup trop douée pour que cela soit naturel. Un sourire malin s'étira sur les traits de Dante alors que la belle semblait perdre prise. Incapable de se protéger contre tous ses attaquants, il l'observait sombrer sous l'insistance du groupe de pervers jusqu'à qu'il ne puisse même plus voir les longs cheveux blonds de la belle. Alvarez tira une dernière fois sur sa cigarette avant de l'envoyer voler de l'autre côté de la ruelle. « Stop ! » souffla-t-il finalement, s'approchant théâtralement de la scène du crime. Soudainement, plus personne ne bougea, figé dans le temps par l'ordre du mutant. Les assailants lancèrent des regards hagards, ignorant ce qu'il leur arrivait. « Éloignez-vous d'elle. » lança-t-il doucement, d'un calme déroutant dans une telle situation. Les cinq hommes s’exécutèrent, se levant immédiatement pour s'éloigner de la blonde sans comprendre l'emprise dont ils étaient victime. Dante s'approcha encore de la belle qui sauta sur ses pieds, les yeux ronds, apeurée par ce qui venait de se passer. Ou par Dante peut-être. Le mutant plongea son regard dans celui de la blonde alors qu'un des agresseurs tâcha de s'échapper ; sans détourner le regard de la belle, sa voix claqua dans la nuit fraichement tombée. « Ne bougez-pas ! » L'homme s'arrêta net, coupé dans sa course, incapable de reposer sa jambe à terre. Un tableau ridicule qui pourtant ne réussit pas à faire détourner le regard de Dante. « Maintenant prenez vos armes, enlevez la sécurité et placez les sur vos tempes. » Les hommes s'éxécutrent, sans grande surprise pour Dante qui ne doutait pas de son pouvoir. Assez peu étonnamment, chacun des assaillant portait un revolver. « Bonjour. » souffla-t-il finalement à la jeune femme, charmeur, en s'approchant un peu plus près d'elle. Le regard de la blonde semblait capté par celui du mutant, s'aventurant de temps à autre sur les corps immobiles de ses attaquants. Muette, la belle ne répondit pas. « Enchanté, je m'appelle Dante. » Un grand sourire éclaira ses traits carnassiers, un sourire charmeur qui aurait pu faire oublier à n'importe qui le monstre qu'il était vraiment. Timidement, la jeune femme répondit, laissant échapper son nom. Enid. Une originalité qui plut encore plus au mutant, de plus en plus fasciné par la belle. « Et bien Enid, c'est à toi de choisir. Tu veux laisser ces fils de putes partir, ou tu veux qu'ils appuient sur la gâchette ? » Le calme dans la voix de Dante étant alarmant pour quelqu'un qui s'apprêtait à commettre un massacre de la sorte. Mais le mutant n'en était pas à son coup d'essai, ces choses là ne lui faisait plus rien. A quoi bon laisser vivre de tels ordures ? En les effaçant de la surface de la terre, il faisait un cadeau à beaucoup de monde ; à Enid et toutes les autres femmes qui auraient connu le même sort. Et puis au final, ce n'était pas lui, il ne tuait personne. C'était eux qui s'ôtaient leur propre vie. La jeune femme ne comprenait pas très bien se qui se déroulait autour d'elle. Il y a quelques minutes à peine, elle était encore en train d'essayer de sauver sa propre vie, et maintenant on lui proposait d'en enlever cinq ? Dante pouvait lire le doute dans ses yeux, mais il reconnaissait l'un de siens quand il en voyait un. Cet éclat de culpabilité, ces quelques secondes d'hésitation, ce n'était qu'une façade. Une excuse, qu'elle se faisait à elle-même. Était-elle une bonne personne ? Était-elle une meurtrière ? Dante était persuadée qu'elle connaissait la réponse, il attendant seulement qu'elle le découvre à son tour. Quelques instants plus tard, la belle acquiesça vivement, condamnant ses assaillants sous le regard un peu trop ravi de Dante. Le mutant passa son bras autour des épaules tremblantes de la belle, l'attirant vers l'autre bout de la ruelle ; il voulait éviter de tâcher son nouveau manteau, il venait tout juste de le trouver sur quelqu'un dans la rue. Il se retourna vers les attaquants, enveloppant toujours la belle d'un bras protecteur. Un dernier regard vers la jeune femme, et sans un regard il donna l'ordre. « Appuyez sur la gâchette ! » Dante releva le regard pour assister au spectacle, admirant les corps tomber les uns après les autres, les murs repeints de sang et de cervelle. Le mutant sentit le visage de la blonde trouver refuge contre sa poitrine, son regard ayant fuit ce spectacle funeste. Mais Dante n'en doutait pas. Dans quelques temps, une telle scène ne la dérangera plus.

2015 - RADCLIFF, KENTUCKY. Trisha. Trisha Lecter. Enfermé dans son appartement, un mug de café entre les mains, il écoutait la voix guillerette de la jeune chasseuse à l'antenne parler de tout, de rien. Il l'écoutait prétendre que tout allait bien, que la vie suivait son cours. Mensonge. Depuis qu'elle était entré dans la vie de sa famille, plus rien n'allait bien. A cause d'elle, il avait perdu Andrew et ça, il ne pouvait pas lui pardonner. Son propre frère, ce mutant en qui il avait tant d'espoir. Andrew était encore jeune, il lui rappelait lui au même âge ; Alvarez prévoyait de grandes choses pour lui, mais tous ses plans avaient étés saboté par la jeune femme qui parlait à présent du temps hivernal de ce début d'année. Un crime qui ne resterait pas impuni, Dante lui avait promis. Lui et le reste de sa famille, ils se chargeraient de condamner la chasseuse comme il se devait. La voix de la jeune femme s'estompa, laissant place à une chanson pop qui hérissa le poil de Dante. Il éteignit la radio, se promenant dans son grand duplex luxueux en plein centre ville. Usuellement, il restait chez Enid avec le reste des siens, ou même au bar de Barry. Mais il aimait cet appartement. Un cocon qu'il habitait depuis prêt d'un an maintenant, et dans lequel il se trouvait bien. Au second étage, en face d'une large fenêtre qui s'étalait sur tout le mur se trouvait son atelier où il passait ses journées à peindre et à sculpter. Une pièce qu'il affectionnait tout particulièrement. Mais aujourd'hui, il devait se préparer. Pour une fois, il avait quelque chose à faire de se journée autre que dessiner ou cuisiner -une passion qui avait commencé il y a près de six ans, et qu'aujourd'hui il maîtrisait à merveille, au régal de sa famille. Dante devait rejoindre les autres, et tout particulièrement Barry, à qui il voulait faire part de son plan. Car la nouvelle venait de tomber : le père de Trisha, le célèbre Carlisle, venait de sortir de prison. Une opportunité sans précédent pour Alvarez qui voyait déjà sa vengeance toute tracé. Si on lui ôtait l'un des membres de sa famille, il en ferait de même.