Aspen agita la poele énergiquement, prenant suffisamment son élan pour lancer la crêpe au dessus du feu de la gazinière et la retourner avec maestria. Elle avait pris un congé cette après midi, juste parce qu’elle en avait envie, et parce qu’il faisait beau et chaud, le temps idéal pour lézarder un peu sur le transat du balcon et prendre un peu de temps pour soi, ce qu’elle avait fait. Avant de se décider à passer derrière les fourneaux, elle s’était fait les ongles, avait bouquiné sur la terrasse au soleil, histoire de recharger les batteries en vitamine D, elle avait allumé la chaine hifi à fond sur de Taylor Swift et avait dansé dans le salon en chantonnant et en secouant la tête : C’était puéril, mais ça faisait sacrément du bien , ça tranchait avec le stress et la tension qui lui enserraient la poitrine depuis plusieurs semaines maintenant. Entre ses histoires de cœur, ses histoires de jumeau, son pacte démoniaque avec Pietra, elle ne savait même plus si le monde dans lequel elle surnageait était bien réel ou non. Elle avait réussi à grappiller quelques informations de ci et de là autour d’elle pour la mutante, sans réussir pour l’instant à récupérer la moindre donnée de l’ordinateur de Calista. Elle avait bien réussi à faucher une de ses clés usb, mais il n’y avait rien d’autre dessus qu’une quinzaine de playlists de BO de films et de série. Inutile donc. Elle recommencera une autre fois, autrement, mais il ne fallait pas qu’elle y aille frontalement. Sa sœur la grillerait aussitôt. Et puis bon, elle n’avait pas envie d’y penser aujourd’hui, alors qu’elle se sentait enfin de plus charmante humeur. Elle avait téléphoné à Sam un peu plus tôt dans l’après midi pour programmer une virée shopping à Louisville, avait envoyé un texto à son frère pour lui réclamer la recette des crêpes façon Lorcan –plus légères et goutues que celles des sites internet-, et elle s’était mise au travail dans la bonne humeur. Elle avait d’ailleurs presque terminé son bol de pâte quand un miaulement déchirant lui fit lever le nez de ses préparations :

- Quinn ? Quinnie chaton, tu es où ?

Oui, comme tout bon propriétaire de chat, Aspen s’adressait à son félin comme si elle allait lui répondre. Elle éteignit le gaz sous sa poêle, essuyant ses mains à un torchon en traversant le salon, le nez en l’air, en appelant encore le petite chatte en tendant l’oreille : après plusieurs miaulements plaintifs, elle repéra le son qui émanait de la chambre de Rhaena : comment le petit animal avait il pu se faufiler dans la chambre alors que la porte était close ? Elle soupira, la poele vide dans la main, peu encline à entrer dans la chambre de sa colloc en son absence. Sauf que si elle laissait Quinn dans la chambre non seulement la chatte allait miauler pendant des heures, mais surtout elle risquait de ruiner les meubles de la jeune femme à coups de griffes ou à l’urine. Autant éviter. Elle fit tourner la poignée et pénétra dans l’antre de Vyper sans en être encore consciente :

- Espèce de vilaine petite boule de poils, où te caches tu ?

D’un rapide coup d’œil comme ça, Quinn n’était nulle part, et donc probablement sous le lit ou derrière un meuble, ce qui expliquerait les couinements apeurés. Aspen se mit à quatre pattes pour trouver le petit animal sous le lit, cherchant ensuite derrière une comode, et enfin dans le grand placard mural contenant les vêtements de Rhaena. Là, la chatte jaillit comme un diable de sa boite, en renversant justement une petite qui était cachée derrière un tas de pulls et de chemises soigneusement pliées. Machinalement, Aspen attrapa les papiers tombés de la boite pour les re ranger, son regard parcourant les lignes de textes sans les lire, réfléchissant déjà à nouveau à ses crêpes quand un photo lui accrocha le regard. Une grande blonde à lunettes qui riait aux éclats dans les bras d’un grand brun. Calista. Pourquoi Rhaena avait elle une photo de sa sœur dans son placard ? Une photo qui ne lui disait rien, en plus, légèrement flou, comme si elle avait été prise de loin, en cachette. Aspen fronça les sourcils, retournant la photo pour y lire une inscription. Intriguée et vaguement inquiète, elle s’assit sur le lit pour lire avec plus d’attention le reste des documents agrafés à la photo, sans entendre le bruit de la clé qui tournait dans la serrure de la porte d’entrée …



 

Aspen peinait à comprendre tout ce qui était marqué sur les papiers qu’elle avait posé sur ses genoux. Elle n’était pas stupide, mais l’horreur de ce qui se présentait devant elle était juste trop énorme pour qu’elle veuille y croire : il y avait des chiffres, des annotations de la main de Rhaena et de son écriture délicate, des post its avec des noms et des adresses, des trombinoscopes avec des photographies barrées au feutre : parmi les portraits, elle reconnut plusieurs chasseurs réputés du coin, qui étaient morts ces derniers années, ces derniers mois même, dans des circonstances étranges. Comme souvent, ils avaient tous mis leur mort sur le dos d’un ou deux mutants qu’ils traquaient à ce moment là. Rhaena n’était pas une mutante elle le savait, elle lui avait montré ses résultats de dépistage presque le premier jour, avant de signer son bail. C’était peut être bête, mais à l’époque, l’idée de vivre avec une dégénérée lui était proprement insupportable, alors elle avait pris ses dispositions. C’était bien avant qu’elle apprenne pour Lorcan et Priam, bien sur. Alors que le puzzle se reconstituait dans sa tête, elle n’entendit pas sa mortelle colocataire pénétrer dans l’appartement de son pas félin, ouvrant la porte de sa chambre à la voler pour la prendre sur le fait. Aspen sursauta comme une enfant quand prend sur le fait, alors que Rhaena semblait prendre la mesure de ce qui était en train de se passer dans la chambre. D’ailleurs, Aspen bondit en arrière que celle-ci s’approcha pour lui arracher les papiers des mains, alors que la petite chatte s’enfuyait de la pièce, et à raison, quand on voyait les regards que s’échangeaient les jeunes femmes :

- J’étais en train de faire des crêpes et Quinn s’était enfermée dans ta chambre alors j’ai …

Elle secoua la tête, consciente qu’elle n’avait en réalité aucune explication à donner à la grande brune : ce n’était pas elle qui projetait, de toute évidence, de s’en prendre au beau frère de Rhae, alors elle n’allait pas s’excuser comme une enfant aussi. Aspen raffermit son emprise sur le manche de la poële qu’elle tenait dans la main : si son intuition était bonne et que c’était bien Rhaena qui avait tué tous ces chasseurs, elle n’allait probablement pas la laisser sortir de la chambre comme une fleur en l’engueulant juste pour sa curiosité, ce serait trop beau. Aspen songea aux couteaux dans sa propre chambre, et se demanda aussi si la Dryden avait son arsenal personnel, caché sous son matelas. En attendant, elle devait gagner un peu de temps, savoir ce dont Rhaena était capable avant de se jeter sur elle. Evaluer les risques pour mieux les éviter, c’était un des conseils les plus importants qu’Isobel avait pu lui donner. Alors elle se releva, maintenant une distance de sécurité évidente entre elles avant de reprendre :

- Alors comme ça ton truc à toi, c’est de buter des chasseurs, c’est ça ? Une vengeance à la con, non ? Qui est ce qu’on a pu t’enlever ? Un petit copain ? Un cousin sur lequel tu fantasmais ado ? C’est que ça me rendrait presque curieux.

Si elle se faisait aussi désinvolte et hautaine, c'était qu'elle avait besoin de voir Rhaena sortir de ses gonds, ou à tout le moins se concentrer sur autre chose, qu’elle puisse effacer la distance entre elles et lui asséner un bon coup de Teffal sur la tempe, appeler du renfort ou au moins aller chercher ses couteaux dans sa chambre. Alors qu’elle ne lachait pas Rhae du regard, elle vit quelque chose s’allumer dans ce dernier. Quelque chose de malsain, dangereux, qui ne lui disait clairement qui vaille…



 

Le cerveau de la rouquine carbure à toute allure alors qu’elle se refuse de quitter la brune des yeux. Lentement, les pièces du puzzle se rattachent les unes aux autres pour donner un tout nouveau sens à l’histoire, aux yeux d’Aspen : Evidemment qu’elle était proche de Lancaster, si son objectif à terme était de le buter, lui et tous ses alliés. Evidemment qu’elle rentrait tard le soir, et discrètement, puisqu’elle aussi devait être parfois recouverte de sang après une chasse mouvementée. Et puis le fait qu’elle ne laisse jamais son portable trainer sur la table, ni même son sac à main, toujours soigneusement rangé dans sa chambre. Toujours. Forcément, si elle aussi cachait sa Deadpool et ses petits couteaux favoris dans son sac Chanel, pas étonnant qu’elle y fasse attention. En attendant, il fallait qu’elle gagne un peu de temps, au moins pour évaluer la dangerosité de Rhaena. Pas besoin d’être Einstein pour se dire qu’elle n’était pas une enfant de cœur : Rhaena portait sa détermination et sa dureté sur son visage. Simplement, elle ne savait pas à quel Point elle était dangereuse, la seule chose qui la réconfortait un peu, c’était de savoir qu’elle n’avait pas d’arme à feu sur elle. Si c’était le cas, elle lui aurait déjà tiré dessus sans plus de cérémonie. Aspen raffermit sa prise sur le manche de sa poele, se redressant un petit peu. Du temps, il lui fallait plus de temps. Et pour ça, il fallait qu’elle parle, la Dryden. Au moins encore un peu. Et pour ça, elle savait exactement quoi faire. La pousser à bout. Ça tombait bien, elle avait un certain talent pour ce genre de choses :

- Ça serre les dents plutôt que de chougner … J’en déduis que c’est plus de la rage que de la tristesse d’un deuil amoureux. C’est plus … Viscéral … Hum … Oh, je vois …

Le sourire d’Aspen s’étira un peu plus, alors que son masque de petite garce se formait lentement sur son visage :

- Ça pue le complexe d’Œdipe à quinze bornes … On a du buter maman… Ou papa, surement … ouais, c’est ça … Un parent dégénéré tué devant tes yeux de petite mioche cachée dans le placard,  et depuis, tu as juré de venger sa mémoire de tous les vilains méchants qui lui ont fait ça ? Spoil Alert, tu pourras pas tous nous avoir. Et c’était lui ou elle le dégénéré, pas nous.

Paradoxalement, Aspen était bien moins convaincue de son petit discours qu’elle pouvait le montrer. Cela faisait des semaines que ses chasses s’espaçaient de plus en plus, qu’elle renaclait de plus en plus clairement à traquer le mutant, et surtout à l’abattre. Pire encore, elle acceptait les ronde discrètes dans les quartiers sensibles de la ville que pour pouvoir prévenir Pietra, Priam ou son frère de ne pas sortir ces soir là. Aspen n’était plus la jeune chasseuse virulente qu’elle avait pu être par le passé, et pourtant, c’était ce visage là qu’elle avait décidé de montrer à Rhaena, plutôt que de tenter de la convaincre qu’elle n’était pas tout à fait son ennemie. De toute façon, comment aurait elle pu la croire ? Les Wol’ étaient chasseurs de générations en générations, ce n’était un secret pour personne au sein de cette communauté, et Aspen avait toujours fait forte impression dans le milieu. Avouer à Rhaena qu’elle était à deux doigts de raccrocher les couteaux pour protéger son frère, jamais cette dernière ne goberait ça, même si c’était la plus stricte vérité. Un nouveau sourire moqueur, avant de remonter l’ustensile de cuisine à hauteur de regard, bien campée sur ses jambes.

- C’est dommage, j’avais pas prévu de mourir avant d’avoir fini les crêpes. Je suppose donc qu’on a un problème insolvable, toi et moi, Chérie.

Il fallait qu’elle se fache. Qu’elle explose. Elle voulait que Rhaena se jette sur elle, toutes griffes dehors. Que dans la précipitation, elle se fasse plus imprudente qu’à l’ordinaire, avide de lui arracher les cordes vocales pour la faire taire, pour qu’Aspen puisse l’assommer d’un coup de teflon, pour se carapater vite fait de là. Elle n’avait pas pour ambition de tuer Rhaena, elle ne s’en sentait pas capable. Simplement, elle comptait défendre chèrement sa vie, puisqu’il le fallait. Elle avait trop des choses encore en suspens dans sa vie pour qu’elle s’achève bêtement à cause d’un chaton trop curieux …



 

Si quelqu’un ne lui avait dit que la moitié des horreurs qu’elle venait de cracher à Rhaena, et si elle avait eu un de ses couteaux sur elle, Aspen aurait probablement été accusée de meurtre à la seconde d’après. Jamais elle ne se serait imaginée pouvoir dire des choses pareilles à sa colocataire : Malgré leurs caractères bien différents, elles avaient réussi à trouver un certain équilibre et elles s’entendaient bien, au moins en surface. Elles avaient suffisamment de points communs pour ne pas avoir à trop se forcer pour passer du bon temps ensemble, et c’était douloureux pour la rouquine de se dire que finalement, la majorité des moments passés ensemble n’était probablement que du chiqué. Elle n’avait surement été rien d’autre qu’un super alibi pour la Dryden, en plus d’être une source d’informations fiables concernant les membres de sa famille. Parce que oui, naivement, elle répondait aux questions de Rhaena quand celle-ci lui demandait des nouvelles de tel ou tel membre de sa famille. La seule chose qu’elle lui avait caché, c’était la mutation de Lorcan. Ça paraissait évident sur le moment, puisqu’elle était quand même l’assistante particulière de Lancaster, elle n’allait pas jeter son frangin dans la gueule du loup. Si elle avait su à l’époque que cela aurait pu tout changer …

La Wolstenholme se tient prête alors qu’elle observe le corps de sa colocataire se tendre, ses yeux lui lancer des éclairs. Elle était pas contente, oula non, et c’était l’effet recherché. Dans la tête de la rouquine, toutes les instructions de son père et d’Isobel tournaient en boucle : elle ne devait pas simplement se défendre. Elle devait se battre. Se battre pour tuer, si il le fallait, même si l’envie n’était pas là. On n’amadoue pas une bête sauvage. On l’abat. Pour le moment, Aspen ne pense pas à grand-chose, simplement qu’elle aurait préféré avoir un de ses bijoux avec elle pour se défendre … Alors quand Rhaena se rue sur elle pour tenter d’enfoncer une dague au niveau de son abdomen, elle ne peut s’empêcher de remarquer cette énième similitude entre elles. Tant mieux cela dit, parce que les combats aux couteaux, elle connaissait. Plutôt bien, même, et elle laissa la vipère s’approcher suffisamment d’elle pour qu’elle puisse profiter de son élan pour l’esquiver, frappant son poignet violemment pour détourner l’arme de sa trajectoire. La lame ne la frôla même pas, alors qu’elle se prenait en revanche l’épaule de Rhae de plein fouet. Mieux valait les os que la lame. Sans quitter Rhae des yeux, elle fit tourner la poële dans sa main avec dextérité avant de la tenir comme une joueuse de tennis en soufflant :

- Si tu sais tout sur tout, Rhae, j’suppose que tu sais aussi que je suis la pire des trois, hein ?  c’est quand même pas de chance pour toi.

Elle n’avait pas peur. Elle était déçue, décontenancée, mais elle n’avait pas peur de Rhaena. Elle avait déjà affronté des monstres bien plus effrayants que la svelte brune au sourire venimeux. Sans la sous estimer, Aspen considérait qu’au corps à corps avec une autre humaine, elle avait ses chances. Elle était plus qu’entrainée, et si Rhaena l’était aussi, au moins elles seraient à égalité. La seule chose qui la desservirait serait que Rhae puisse utiliser son arme de prédilection, là où elle était coincée avec sa bête poële à crêpe. Mais bon, c’était toujours mieux que rien : l’objet était suffisamment large pour servir de bouclier d’urgence et suffisamment costaud pour assommer la brune. Le tout, c’était de trouver une faille dans ses assauts. Aspen accusa encore plusieurs tentatives de Rhaena qui l’attaquait sans discontinuer, pareil à un animal furieux, la contraignant à parer les coups sans pouvoir en asséner. Ce n’est qu’après quelques minutes d’affrontement qu’elle réussit à décocher une gifle monumentale à son assaillante, lui lacérant la joue de ses ongles acérés. Elle lut la surprise dans le regard de Rhaena, à moins que cela soit l’expression d’une haine pure. Apparemment, la coquette n’avait pas apprécié qu’elle attente à l’intégrité de son joli minois …




 

Aspen découvre la sensation très désagréable d’être celle à qui l’on veut faire la peau. Bien sur, elle avait l’habitude de se battre pour sa vie, pour éliminer des mutants qu’elle considérait comme des monstres. Dans ce cas précis, elle n’aurait jamais eu l’idée de tuer Rhaena, c’était elle qui était marquée sur la liste de la vipère. Elle devait se démener pour sa vie comme l’avaient fait des dizaines de mutants face à ses poignards acérés et sa détermination implacable. Pas étonnant que certains d’entre eux, les moins expérimentés, s’effondraient sans opposer de réelle résistance : combattre Rhaena sans haine pour lui délier les muscles et lui donner envie de l’attraper à la gorge rendait le combat bien moins aisé. Malgré tout elle se démenait, pour la simple et bonne raison qu’elle n’avait aucune envie de mourir. Pas maintenant, pas comme ça, et encore moins des mains d’une bête humaine. Quitte à mourir, elle comptait le faire avec un certain panache.
Le camouflet qu’elle avait infligé à la tueuse avait surpris cette dernière, mais pas suffisamment pour lui permettre de s’approcher de la porte. Aspen n’avait pas eu le temps de remonter ses poings devant son visage que déjà celui de Rhaena lui faisait craquer la mâchoire dans un bruit qui ne lui disait rien qui vaille. Sa tempe évita de justesse le coin de bureau, alors qu’elle s’effondrait sans grâce contre les tiroirs qui se renversaient à moitié sur elle. Un voile rouge lui passa devant les yeux et elle essuya le filet de sang qui lui coulait de sa lèvre ouverte, à la recherche de n’importe quoi de tranchant ou contondant qui pourrait lui servir d’arme contre la furie qui se jetait à nouveau sur elle, sa lame brillant juste au dessus du visage de la rouquine. Une idée, il lui fallait une idée, vite. Sa main gauche tâtonnait autour d’elle alors qu’elle retenait le poignet de Rhae de l’autre, et elle lui écrasa un presse papier sur la tempe en roulant sur le coté dans un grognement. A défaut de l’avoir définitivement assommé, elle avait pu se redresser un peu, accroupie au milieu des feuilles et surtout, surtout, elle avait trouvé dans le désordre du bureau éventré une lame, pareille à cette que tenait sa colocataire, et qu’elle tenait maintenant bien fermement dans sa main droite. Elles étaient à présent toutes les deux armées, ce qui n’augurait absolument rien de bon, ni pour l’une ni pour l’autre. L’arme n’était pas un couteau de jet, mais bel et bien un couteau fait pour le corps à corps. Si elle voulait s’en servir contre Rhae, elle devait prendre le risque de s’exposer à son tour aux estafilades d’une adversaire dont elle n’avait eu qu’un aperçu de la dextérité. Mais à voir le nombre de croix sur son tableau de chasse, Rhaena devait être plus redoutable que tous les mutants qu’elle avait jamais rencontré. Aspen songea un moment à prendre la fuite, à hurler pour affoler les voisins, mais elle savait que c’était trop tard : l’éclat sauvage dans les yeux de Rhaena quand celle-ci se redressa rappela à son bon souvenir que la femme en face d’elle était une tueuse aguerrie, qu’elle devrait affronter comme une gladiatrice dans l’arène, jusqu’à la mort de l’une d’entre elle. Aspen inspira profondément, puis sans attendre que Vyper ait le temps de se redresser à son tour, elle lui décocha un nouveau coup de poing dans le ventre, accompagnée d’un coup de pied dans les genoux : elle était pieds nus, ce qui n’aidait pas forcément, mais ces talons ne demeuraient pas moins redoutables contre le genou de la brune qui craqua légèrement. Puisqu’elles étaient à présent à arme égale, Aspen allait défendre chèrement sa peau. Très chèrement.






 

La chasseuse voyait dans les yeux de Rhaena qu’elle ne l’épargnerait pas. Elle la tuerait, elle la viderait de son sang sans la moindre hésitation,et surtout sans le moindre remord, si elle lui laissait l’accès à la moindre faille. Ce qui lui glaçait le sang, c’était de se dire que ce regard, elle avait du l’arborer elle, à chacune de ses chasse, quand elle se tenait face à un mutant acculé. Avait elle elle aussi ce masque figé dans la détermination et la soif de sang ? Oui, probablement. Rhaena et elle étaient faites du même bois, et c’était probablement pour ça que pour l’instant, aucune d’entre elle ne venait prendre le dessus. Elle avait réussi a se saisir d’une des armes planquées dans la chambre de la brune, et maintenant, elle ne doutait plus un seul instant qu’il devait y en avoir d’autres, disséminées un peu partout .
Elle raffermit son emprise sur la petite dague, et sa position sur ses appuis. Les deux jeunes femmes se toisent un moment, un long moment même, avant que Rhaena relance l’assaut à coups de poings et de coudes qu’Aspen esquive sans trop de difficulté, sur entrainée à ce genre d’attaque. Simplement, cette fois ci, ce n’est pas un jeu : Dans une bourrade particulièrement violente, Rhaena la fait basculer sur le sol dans le couloir, roulant l’une au dessus l’autre comme deux chattes en furie. Sous le poids de la vipère, Aspen se débat comme un diable, esquivant les coup à la gorge, sentant une estafilade au niveau de son bras. Elle est blessée, mais ne sent pas encore la douleur, trop chargée d’adrénaline. Au dessus d’elle, Rhaena a brandit son couteau et c’est un bras de fer entre les deux qui empêche la chasseuse de chasseur de lui enfoncer l’arme en plein cœur. Les bras d’Aspen tremble sous la tension et l’effort de repousser Rhaena qui s’appuie de tout son poids sur elle, alors qu’elle cherche à toute vitesse comment échanger le rapport de force. Elle grogne, elle souffle, elle gémit, et soudain elle redresse violent son genou pour le projeter contre l’entre jambe de Rhaena : si le coup était létalement douloureux pour un homme, il n’en était pas moins excessivement brutal pour une femme de recevoir un coup dans les partie. Elle lui attrapa les cheveux pour terminer de la déséquilibrer et prendre le dessus sur la jeune femme. Et elle se mit à la frapper, à coups de poings, beaucoup. Elle enchaina les droites et les gauches sur le visage, le torse de la Dryden comme une forcenée, sans prendre garde à l’arme que cette dernière tenait encore dans la main. Elle voulait savoir pourquoi elle était une chasseuse ? Elle allait lui montrer ce que c’était de se frotter à une putain de Wolstenholme. Alors elle frappait, encore, encore et encore, sans laisser le moindre répit , en dépit du sang qui coulait des plaies infligées par la Dryden et cette arme qu’elles avaient encore au sol près d’elles …