Sujet: cover your crystal eyes (jealey) Sam 19 Sep 2015 - 23:58
19 février - La rue était silencieuse, seuls le bruits de moteurs de voiture venait briser cette absence de son, de temps à autres. Riley, les mains plongés dans ses poches et le volume de ses écouteurs au maximum, avançait tête à demi-baissée, en route pour rentrer chez elle. Sur son épaule droite se trouvait son sac de cours, noir. Elle avait eu à faire un petit détour par le centre commercial avant de pouvoir rentrer chez elle; leur professeur de littérature leur avait demandé d'acheter un livre, et la jeune fille avait profité du fait qu'elle terminait les cours assez tôt pour aller l'acheter. Ainsi, elle pourrait même le commencer ce soir; au moins, elle ne serait pas en retard comme certains de ses camarades qui allaient très certainement l'acheter à deux jours d'un de fameux contrôles de lecture de leur professeur. Enfin bon, ce n'était pas son problème; Riley se fichait bien des notes de ses camarades. Autant qu'ils se fichaient d'elle, à vrai dire; ils étaient dans la même classe, cohabitaient pendant les cours mais sans plus. Elle n'avait que très peu d'amis.. et c'était exactement ce qu'elle cherchait. Être seule. Ne pas attirer l'attention sur elle. Se fondre dans la masse. Être une élève invisible.
En même temps qu'un nouvelle chanson se lançait (Little talks du groupe Of Monsters and Men pour les petits curieux) la brune leva les yeux vers les fenêtres des immeubles, qui la surplombaient de toute leur hauteur. Elle aussi avait dans un appartement du temps où elle vivait encore en Louisiane, mais elle en gardait des souvenirs très flous. Riley avait l'impression qu'à chaque fenêtre d'un petit appartement, quelqu'un la fixait et la regardait avancer; c'était faux bien évidemment, qui se soucierait de la présence d'une lycéenne noire dans une ruelle vide? Personne bien évidemment. Poussant un petit soupir, la jeune étudiante accéléra quelque peu le pas, pressée de rentrer chez elle. Cette journée de cours l'avant complètement éreintée, vidée de son énergie.
Alors que la jeune adolescente se baissait pour refaire le lacet de sa converse droite, son écouteur gauche tomba, lui permettant d'entendre distinctement d'une voix venue d'une fenêtre plus haut; « Attention! » Lâchant ses lacets, Riley vit un pot de fleur se rapprocher d'elle avec une rapidité folle. « Que?! » fut le seul mot qui s'échappa de ses lèvres, avant qu'elle ne blêmisse, horrifiée. Non pas qu'elle avait peur de se prendre le pot de fleur dans la tête, non, elle avait terriblement peur parce qu'une nouvelle fois, son pouvoir venait de se manifester. Un mur invisible apparut autour d'elle, elle le sentit comme elle le sentait à chaque fois. Et le pot de fleur se brisa dessus, par sur sa tête; Riley aurait mille fois préférer être assommée par ce pot au lieu d'une manifestation imprévue de son pouvoir. « Je suis désolée est-ce que ça va jeune fille?? » La voix affolée de la propriétaire de l'objet parvint aux oreilles de Riley, la sortant de sa torpeur. Le champ de force disparut, et l'adolescente répondit d'une voix hésitante; « Je.... oui ça va. J'ai réussi à l'éviter. » Puis, sans demander son reste, elle fila, agrippant fermement la lanière de son sac à dos, sans prendre la peine de refaire son lacet tant elle était pressée de fuir.
Dernière édition par Riley Silverwood le Dim 4 Oct 2015 - 13:31, édité 12 fois
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Sujet: Re: cover your crystal eyes (jealey) Mer 23 Sep 2015 - 18:32
now that no beats rule your heart anymore
is it hard to go on? make them believe you are strong, don't close your eyes. all my nights felt like days, so much light in every way. just blink an eye. i used to be someone happy, you used to see that i'm friendly. all your smiles, all is fake, let me come in. i feel sick, gimme your arm from the shadow to the sun, only one step and you'll burn, don't stay too high. w/jeane merlyn & riley silverwood.
Elle aurait pu rester comme ça pendant des heures ; la mélodie du jazz au creux de ses tympans, chassant le temps froid de Radcliff. L’hiver. Interminable traversée du désert qui la rattachait à sa condition pathétique : elle était toujours là, dans cette ville qu’elle aurait voulu fuir. Et déjà, les parcelles discrètes de sa peau affichaient des blessures de guerre. De ses doigts, elle ne pouvait s’empêcher de caresser distraitement la cicatrice rosée qu’elle avait remportée de l’immeuble en ruines duquel elle s’était enfuie. La vie sauve. Face à une transmutante tarée qui avait décidé de la tuer. On en revenait toujours au même point : l’humaine était dans les dommages collatéraux, celle qui tombait au mauvais endroit, au mauvais moment, et qui devait en payer le prix fort. Et elle était encore vivante, malgré tout ça ; irrésistiblement accrochée à cette chose qu’elle exécrait tout autant qu’elle aimait – sans savoir pourquoi, survivait en elle l’espoir que les choses s’arrangeraient. Que c’n’était qu’un putain de cauchemar, et qu’il finirait un jour – qu’il y avait une lumière au bout du tunnel, et que le seul problème résidait dans le fait qu’elle ne la voyait pas encore. Nina couchée à côté d’elle, la tête posée sur ses genoux, Jeane laissait ses doigts blancs glisser dans le pelage gris-noir de l’animal, remerciant silencieusement le bien que ça lui faisait. Au combien ça la rassurait, alors qu’elle marchait au beau milieu d’un champ de guerre, et qu’elle y laisserait sa peau. Sa chienne semblait apaisée pourtant, et la température faiblarde ne l’empêchait en rien d’agiter doucement la queue en signe de contentement. A son oreille, on parlait de Paris, d’été en France, de ces douceurs qu’elle ne connaîtrait jamais – pas tant qu’elle était ici, du moins. Perchée sur ce qui lui semblait être le toit du monde, la Merlyn observait les rues, spectatrice silencieuse, œil impérieux qui se montrait omniscient – ou presque. Elle n’savait pas de quoi demain serait fait, ni quelle tuile lui tomberait sur la tronche aussitôt qu’elle quitterait son perchoir : c’était sans doute pour cela, que malgré le gel au bout de ses doigts, le jour qui déclinait, la rousse n’avait pas bougé. Et ne bougerait pas. Les monstres étaient là en bas, la bouche grande ouverte, attendant qu’elle se jette au beau milieu du chaos – elle ne voulait pas. N’voulait pas céder à l’appel lascif d’une pseudo sécurité qui n’existait pas à Radcliff : pas même lorsqu’elle croisait un visage familier, pas même lorsqu’elle retrouvait son père après seize années de silence et d’abandon. Ici, il n’y avait rien pour elle. Les jambes dans le vide, l’errance de ses songes l’éloigna assez pour qu’elle songe à ce que ça pouvait faire, d’être un oiseau : eux au moins, n’étaient pas retenus par les barrages autour de la ville ; ils pourraient se casser, s’ils le voulaient, l’univers tout entier soumis à leur bonne volonté, au battement de leurs ailes. Qui les amenaient ici. Ou leur permettaient d’aller voir ailleurs.
Voir ailleurs. Plus souvent qu’elle ne le voudrait, la Merlyn songeait à sa ville natale à elle ; Los Angeles devait continuer de bouillir sous le soleil, le temps resplendissant qui maintenait l’illusion à tous – que tout allait bien, dans l’meilleur des mondes. La grisaille de Radcliff disait les choses autrement, renforçant l’idée de chaos, le caractère étouffant d’une existence dictée par ces couronnés qui n’en faisaient qu’à leur tête. Combien de jours, allaient s’écouler, avant que Thaddeus Lancaster ne fasse un autre discours ? Que la situation ne dégénère encore une fois ? Les fêtes de Noël s’étaient écoulées sans heurts, une petite illusion en plus, poudre aux yeux auxquelles la rousse était incapable de croire durablement. Elle voulait que ça s’arrête, elle voulait s’casser d’ici. S’évader, illusoirement, c’était son seul échappatoire ; Jeane parfois, fermait les paupières et s’imaginait une autre vie : loin de ses cauchemars, loin de ses hantises. Et surtout, loin des transmutants, loin des chasseurs – qu’on les enferme tous dans une partie du monde et qu’on les laisse se déchirer : pourquoi fallait-il que les gens comme elle, les gamines qui n’avaient rien demandé à personne - qui n’avaient rien de particulier - se retrouvent au milieu de tout ça ?! Elle n’pouvait pas se changer en sable, elle ; ni retenir de l’électricité qui la tuerait normalement, juste au bout de ses doigts. Elle n’pouvait pas survivre aux bombes, aux feux. Elle était déjà incapable de dormir sans une lumière à côté d’elle, se construire une vie digne de ce nom : ces préoccupations, qui auraient dû être les siennes, étaient refourguées au second plan, parce qu’il y avait une guerre, ici, qui se jouait, qu’elle le veuille ou non. Qu’elle l’ait cherché, ou non. Peut-être lassée par les songes de sa compagne d’infortune, ou réveillée par les instincts qui l’habitaient, Nina se redressa brusquement, ses yeux furetant à l’alentour, à la recherche de quelque chose d’invisible. Jeane, perchée sur le bord de son toit d’immeuble, le casque encore collé à ses oreilles, demeura aussi silencieuse et immobile qu’une statue, le souffle suspendu à n’importe quelle menace, n’importe quel imprévu qui pointerait le bout de son nez. Est-ce que la tarée aux cheveux blancs l’avait retrouvée, et allait la tuer ce soir ? Est-c’que c’était autre chose ? Déjà, empreint de réflexes qui s’étaient profondément incrustés dans ses veines, son cœur pulsait contre ses côtes, baigné de panique et de ces hantises, qui la rendaient aussi faible qu’une gamine. Depuis l’incident de l’immeuble, la rousse se raccrochait plus fermement que jamais à ses petites possessions, ses doigts gelés se resserrant déjà, dans une de ses poches, autour du spray au poivre qui lui avait sauvé la vie, y’a pas si longtemps de ça. La chienne, pourtant, restait droite comme un ‘i’, les muscles sous ses poils bandés comme si elle était prête à bondir : ce qu’elle fit, d’ailleurs, lancée à pleine allure derrière une cible totalement invisible. Le temps que Jeane réagisse, Nina avait déjà passé la porte de sortie de secours, qu’elle avait laissée entrouverte, filant dans la cage d’escalier de l’immeuble presque déserté sur lequel elle avait cherché son habituel refuge. Y’avait quelques jours à peine, à l’autre bout de cette rue, elle avait vu Eremon se prendre une raclée de la part d’un chasseur ; c’était comme son lieu désormais, l’endroit qu’elle se plaisait à côtoyer, quand bien même elle détestait cette ville.
« Hey ! » trop lentement pour retenir l’animal, Jeane quitta son bord de toit, pour se retrouver sur ses jambes, et se lancer à la poursuite de Nina. Mais elle était rapide, beaucoup plus rapide qu’une rousse d’ores et déjà lassée par l’idée de courir après un chien totalement imprudent. Si seulement elle avait pu penser comme sa maitresse, ne jamais reprendre le chemin vers la terre ferme, et désirer rester à jamais coupée du monde. Nina n’était pas comme ça, elle se plaisait dans l’agitation des rues plus encore que dans le calme d’un grand parc dans lequel elle pourrait jouer à la balle – quel chien paradoxal. La jeune femme s’y était faite, mais elle n’avait certainement pas envie de paumer son chien, et de devoir errer jusque tard, sous une nuit noire, pour tenter de la retrouver. Ou pire, devoir la laisser dehors à cause de ce putain de couvre-feu. Présence familière, profondément longée dans ses entrailles, la panique revint faire vibrer le sang aux tempes de la rousse, alors qu’elle descendait, descendait des volées de marche à toute allure. Parfois, elle avait le sentiment d’entrevoir la chienne, mais celle-ci ne s’arrêtait pas, tenacement sourde aux appels de sa maîtresse. Au rez-de-chaussée, elle trouva finalement Nina, assise comme la plus obéissante des créatures, sa queue agitée par un amusement certains : quelle connerie. Jeane aurait pu la détester, tant son cœur brûlait au creux de sa gorge, le souffle court, l’esprit encore hagard d’avoir été sorti de sa torpeur de la sorte. « C’est pas croyable. » marmonna-t-elle, sans une once d’amusement, foudroyant l’animal d’un regard noir. Pourtant, elle s’avoua vaincue, gagnant la porte en laissant retomber son casque à musique autour de son cou, la voix suave du chanteur loin de ses oreilles, et la réalité, droit dans sa face. Ouvrant la porte, quittant la sécurité quasi-rassurante de l’immeuble, Jeane n’eut l’occasion de trainer les pieds que sur quelques mètres, avant qu’en effet, la réalité du monde ne la rattrape. Un cri, le cliché du pot de fleurs qui tombe du rebord d’une fenêtre, et en-dessous, une adolescente qui la ramenait à un autre temps. Le temps où tout avait été simple – si seulement. En écoutant ses entrailles, elle aurait voulu pouvoir sauter, faire quelque chose plutôt que de rester paralysée, perchée sur ses jambes. C’était impossible pourtant, furieusement impossible : l’indomptable Jeane Merlyn était devenue une statue glacée, des pieds à la tête. Tout se passa très vite ; alors que la brune aurait dû se prendre le pot de fleurs sur la tronche – et irrémédiablement, sans doute en mourir – celui-ci éclata en petits morceaux, près d’un mètre au-dessus de sa tête. Le premier réflexe de l’inconnue sembla être de prendre la fuite – un instinct que la rousse n’pouvait certainement pas blâmer. Et pourtant, elle, son réflexe fut plus stupide que tout le reste : plutôt que de se planquer, agir en fermant les yeux, faire comme si de rien n’était, Jeane lança ses pas précipités à la poursuite de l’adolescente. Elle la rattrapa bien assez vite, posant une main sur son épaule pour la retenir. « C’est impressionnant, c’que tu peux faire. » remarqua-t-elle, presque hagarde, incapable de savoir pourquoi elle avait fait ça, elle qui détestait les rencontres, détestait les gens, et détestait l’idée de l’existence des transmutants, et tout ce qu’ils avaient amenés. C’était à cause d’eux, que les chasseurs existaient. A cause d’eux, que son père avait été un d’eux. A cause d’eux, qu’irrémédiablement, les deux chemins s’étaient rencontrés, et que Jeane et sa mère s’étaient retrouvées au beau milieu. « J’le dirai pas. » reconnut-elle finalement, dans une confidence qui lui semblait indispensable de faire : ici, tout le monde semblait prêt à trahir tout le monde, pour survivre. Elle ne l’dirait pas ; parce que sinon, cette fille verrait sa vie être brisée en mille morceaux – des chasseurs qui se pointeraient chez elle, tuerait toute sa famille. Et la vaccineraient, comme si c’était l’acte le plus généreux qui soit. Ou pire. Pire. Elle connaissait le pire, et les cauchemars qui en étaient nés, continuaient de la poursuivre, dix mille kilomètres plus loin. Quatre ans plus tard. Et elle n’pouvait souhaiter ça à personne, pas même à son pire ennemi.
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Sujet: Re: cover your crystal eyes (jealey) Sam 26 Sep 2015 - 17:56
Fuir comme une proie ne posait pas de problème à Riley; elle savait bien ce qu'elle encourrait si quelqu'un se rendait compte de ce qu'il venait de se passer. A vrai dire, elle avait l'impression que tous les jours, c'était le même scénario; fuir, se cacher, se fondre dans le moule et faire comme si elle était invisible. En soi, cela marchait bien; personne n'avait jamais encore fait plus attention que cela à elle. L'adolescente faisait toujours tout pour ne pas être vue. Si cela la gênait? Pas tant que ça. Elle n'aimait pas que toute l'attention soit axée sur elle, alors être ignorée superbement pas les autres ne faisait que la soulager; ainsi, elle ne risquait pas d'être le centre de l'attention de tous et toutes. Toute sa vie, ses parents adoptifs n'avaient fait que lui dire de cacher ses capacités, de ne pas se faire remarquer; et elle comprenait leur logique. Ils n'en savaient pas plus qu'elle sur la façon dont elle pouvait rester en sécurité, et ils étaient aussi effrayés qu'elle ne l'était. Ils avaient beau ne pas être ses vrais parents, ils étaient sa seule famille et elle tenait à eux autant qu'ils tenaient à elle. Des fois, la lycéenne se demandait si ses parents étaient comme elle. Et si elle tenait son pouvoir d'eux? Peut-être que ses parents avaient été des sortes de super-héro par le passé? Peut-être l'avaient-ils abandonnée pour la protéger en espérant qu'elle soit normale? La jeune fille n'en parlait jamais (et encore moins avec ses parents adoptifs, craignant de les blesser en engageant cette discussion avec eux) mais elle s'était toujours demandé à quoi ressemblaient ses vrais parents, ce qu'ils étaient, ce qu'ils faisaient de leur vie; comme toute personne adoptée à vrai dire. C'était son droit après tout, elle ne faisait rien de mal en se posant ces questions.
Le souffle court, Riley continuait de courir, fuyant la ruelle dans laquelle le pot de fleur lui était tombé dessus. Elle avait l'impression d'être dans une vieille comédie de mauvais goût; le pot cassé n'était-il pas un gag récurant dans le cinéma, au même titre que la peau de banane et le pot de chambre? Tout le monde avait déjà vu un film avec au moins un de ces trois sketchs récurrents. L'adolescente allait s'élancer dans la rue qui s'offrait à elle quand une main inconnue se posa subitement sur son épaule, sans prévenir, lui arrachant un sursaut de surprise. Faisant vole-face, le regard hagard, elle eut un instant d'hésitation quand elle se retrouva face à une jeune femme rousse à l'allure essoufflée qui terminait de lui dire; « C’est impressionnant, c’que tu peux faire. » La brune pâlit automatiquement, cherchant à se défaire de l'emprise de la jeune femme sur son épaule sans réussir à faire un mouvement. Elle l'avait vue. Elle avait tout vu. Riley arrêta de respirer, plongeant son regard dans celui de son interlocutrice, sans savoir quoi faire. Si elle faisait mine de s'enfuir, la rousse se mettrait-elle à hurler au mutant? Était-ce une de ces personnes qui chassaient les personnes comme elles? Allait-elle la livrer à des personnes mal intentionnées en échange d'argent? La jeune femme dut sentir sa terreur et son malaise, car elle lui dit comme si c'était évident; « J’le dirai pas. » Sans le vouloir, Riley se détendit légèrement en entendant ces mots. Cependant, elle ne se départit pas de son air méfiant, et ses muscles étaient toujours aussi crispés, comme si elle allait se remettre à courir d'un instant à l'autre (ce qui était le cas). La brune ne savait pas si elle devait croire cette jeune femme ou non; combien de mutants avaient été tués après avoir cru à ce genre de discours? Beaucoup trop.
Pourtant, même en sachant tout ça, l'adolescente leva la tête vers la rousse en face d'elle et lui dit; « C'est vrai? » Juste après, elle se rendit compte de la naïveté de ses paroles. Elle n'était pas du genre à croire tout ce que tout lui monde lui disait, elle savait que tous faisaient des promesses en l'air sans pour autant les tenir; pourtant, elle voulait croire cette fille. Elle voulait croire que, encore aujourd'hui, elle resterait à l'abri de tout ce danger qui pendait au-dessus de sa tête, telle l'aurait fait l'épée de Damoclès. Elle voulait croire que toutes les personnes n'était pas pourries et sans coeur, que toutes n'étaient pas capables de gâcher la vie de quelqu'un sans remords. Elle voulait croire tout ça. Sa vision des choses et ses envies étaient peut-être un peu trop utopistes, mais elle n'était encore qu'une adolescente n'ayant connu que la crainte d'être découverte au grand jour. « Pourquoi? » demanda-t-elle à sa compagne de fortune, lui adressant un de ces regards qui en laissaient deviner long sur vos pensées.
Dernière édition par Riley Silverwood le Dim 4 Oct 2015 - 13:04, édité 2 fois
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Sujet: Re: cover your crystal eyes (jealey) Mer 30 Sep 2015 - 1:38
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is it hard to go on? make them believe you are strong, don't close your eyes. all my nights felt like days, so much light in every way. just blink an eye. i used to be someone happy, you used to see that i'm friendly. all your smiles, all is fake, let me come in. i feel sick, gimme your arm from the shadow to the sun, only one step and you'll burn, don't stay too high. w/jeane merlyn & riley silverwood.
Toute humaine qu’elle était, Jeane n’avait jamais laissé d’empreinte sur ce monde. Elle s’était toujours contentée d’être, d’avancer sans se retourner, d’errer pour ne pas affronter ses démons. Radcliff la forçait à faire du surplace, un fait qu’elle répugnait plus que tout au monde – ici, c’était pire encore que partout ailleurs dans le pays. Ici, il y avait des chasseurs, des gens qui détestaient les transmutants pour des raisons totalement arbitraires. Et des dégénérés qui ne trouvaient rien de mieux à faire que de rétorquer à la violence par encore plus de violence encore. Radcliff, c’n’était définitivement pas la ville où elle avait l’intention d’arrêter son chemin quel qu’il soit ; vivre ici ? Elle était une fille des grandes métropoles, le fantôme des rues bondées, qui ignorait et se plaisait à être ignoré. C’était comme ça qu’elle faisait son business après tout –il était toujours plus facile de détrousser un abruti dans une artère bondée de gens que dans une petite ruelle avec trois clampins. Sa liberté d’agir lui manquait, tout autant que bien d’autres choses dans son existence d’autrefois, qu’elle préférait largement ne pas nommer : ici, ce bled du Kentucky était l’endroit parfait pour s’mourir à petit feu. Elle finirait ensevelie sous les gravats d’une guerre qui ne la regardait pas. Ou tuée par un chasseur qui voudrait contrôler ses gênes, et qui serait potentiellement de mauvaise humeur face à une gamine qui n’éprouvait que dégoût à son égard. Ou elle crèverait tuée par un dégénéré qui péterait un câble, prendrait un magasin en otage ou quelque chose dans ce genre-là. C’était de cette façon que le monde tournait, n’est-ce pas ? La sédentarité lui déplaisait plus que tout le reste, et ce sentiment pesant semblait rendre Nina toujours plus imprévisibles – bon dieu, qu’est-ce qu’elles seraient mieux, sur les routes à des milliers de kilomètres d’ici. La réalité s’installait toujours, chassant les rêveries quelles qu’elles soient – il n’y avait pourtant qu’éveillée, que la rousse pouvait se permettre de tels délires. Sauver la face, d’une quelconque manière. Et pourquoi donc ne dénoncerait-elle pas la petite transmutante qu’elle venait de croiser au détour d’une rue ? Allez savoir ; elle-même ne savait pas pourquoi, ce qui motivait chacune de ses décisions au quotidien – la Merlyn s’avérait aussi imprévisible qu’une tempête, tantôt à pousser un inconnu dans les bras d’un destin scellé et mortel. Tantôt prête à endosser le visage d’une quelconque héroïne croisée au détour d’un pot cassé. La question de la gamine la fit se questionner plus qu’elle ne l’aurait voulu, et Jeane s’était déjà perdue dans plusieurs secondes de silence, lorsqu’elle observa à nouveau sa vis-à-vis. Dénoncer les transmutants, ça pourrait peut-être lui acheter une certaine tranquillité ici ; était-elle pourtant devenue ça ? Quand bien même elle n’hantait pas ces rues depuis bien longtemps, elle savait déjà, c’que le régime en place, c’que le maire élu faisait aux gens comme cette gamine. Cette gamine qui lui semblait aussi familière qu’elle lui était étrangère.
Elle lui rappelait une Jeane d’un autre âge, d’une autre époque. D’une autre vie. Sous le soleil californien et la tranquillité d’une vie sans nuage. Qu’est-c’qu’elle avait été insouciante, elle, à quinze ans, ses crises de nerf se limitant aux colères qu’elle crachait à l’égard du fantôme du père absent. Elle savait ce que c’était, le chaos, le vrai ; voir sa famille, son cœur décimés par des fous furieux qui ne tuaient que pour tuer. C’avait été des chasseurs pourtant, ceux qui ici, se grimaient de bonnes intentions pour expliquer leurs actes. Y’avait rien à expliquer, rien à savoir quant au pourquoi du comment elle ne s’abaissait pas à devenir comme eux. Comme les démons qui hantaient ses cauchemars, la poursuivaient dans son sillage, et peu importait l’allure à laquelle elle fuyait. Jeane n’fuyait jamais assez loin – et jamais elle n’imposerait un tel fardeau à qui que ce soit. « Parce que... » et elle se stoppa aux abords d’une hésitation, ses yeux clairs sondant un instant le visage qui se trouvait en face d’elle. Jeane n’était pas de ces filles qui s’livraient en de grandes confidences tragiques sur sa vie passée – purée, si elle pouvait choisir, elle voudrait vivre avec des gens qui la regardaient normalement, plutôt qu’en de grandes billes noyées de pitié et de fausse compassion. C’était le choix qu’elle avait pris en laissant les murs blancs de l’hôpital derrière elle ; le choix qu’elle avait pris en arrêtant d’essayer de s’trancher les veines, pour essayer de survivre. « J’suis pas une balance. » répondit-elle donc simplement, dans un haussement d’épaules plutôt hésitant. Ça n’allait pas être une gamine de quinze ans qui allait lui faire une analyse psychologique sur ce qu’elle cachait, de toute manière. Elle était prête à fuir à nouveau, prendre ses jambes à son cou comme l’aurait volontiers fait la petite transmutante face à elle. Toutes deux devaient savoir ce qu’il adviendrait maintenant, des transmutants qui osaient se montrer au beau milieu d’une rue – après les histoires de la fête foraine, le carnage entrainé par cette simple fête plongée dans l’horreur, Lancaster devait avoir imaginé tout un tas de répercussions sanguines. Elle allait faire volte-face, lâcher un mot pour poursuivre son chemin, c’est pourtant Nina, sage et presque oubliée jusque-là, qui fit un rapide mouvement en direction de l’autre bout de la rue. Dans une œillade par-dessus son épaule, la Merlyn put voir deux voitures de police, s’arrêter à quelques mètres de là – quelqu’un avait-il vu ce qu’il s’était passé ? Ou était-ce la femme au pot de fleurs qui s’inquiétait du sort de la pauvre gamine qu’elle aurait – selon les lois de la physique naturelle – dû tuer par sa connerie ? « Tu devrais filer. » ajouta-t-elle précipitamment à l’adresse de la fille à la peau noire – s’il y avait encore quelque chose qui la retenait elle, de détester complètement les transmutants au point de souhaiter leur lente agonie, c’n’était peut-être pas le cas de tout le monde. Pas des flics de la ville en tout cas ; elle les avait déjà vus, commettre des actes qui ne ressemblaient en rien à des actions de policiers normaux. L’inquiétude s’éveillant comme un animal enragé dans ses entrailles, Jeane poussa la brune en l’attrapant par une des épaules – comme si le désir de fuir elle aussi, était né de ce qu’elle avait sous les yeux. « On devrait pas rester ici. » car même elle, elle aurait des ennuis si elle se trouvait là, à vrai dire ; ces soi-disant policiers, ils n’avaient plus aucune limite. Sans crier gare, Jeane se mit donc à courir, Nina sur ses talons, et tirant avec elle la plus jeune d’elles deux, la tenant fermement par le bras – direction peu-importait-où-elles-finiraient. Loin du danger, c’était déjà bien ; c’était l’instinct que ses tripes lui dictaient depuis des années déjà.
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Sujet: Re: cover your crystal eyes (jealey) Dim 4 Oct 2015 - 20:55
La jeune fille avait la désagréable sensation que plus elle restait ici, plus elle s'exposait à un danger qui ne mettrait pas longtemps avant de pointer le bout de son nez. En soit, c'était idiot de penser ça; tout était dangereux à Radcliff, tellement que bientôt tous risqueraient leur vie quand ils iraient faire leur course pour le mois. Quand elle était petite, Riley se sentait tellement bien dans cette ville; maintenant, une petite voix au fond d'elle lui soufflait que déménager ne serait pas une si mauvaise idée. Mais serait-elle vraiment en sécurité ailleurs? Qu'est-ce qui pouvait lui assurer une vie sans dangers? Qu'est-ce qui lui prouvait qu'une horde de hunter ne serait pas envoyée aux trousses de sa famille et d'elle? Absolument rien. Elle se doutait bien que tant qu'elle serait différente, elle serait traquée comme une bête. Du gibier. Et bien sûr, ça l'effrayait. Tout ce qu'elle voulait, c'était avoir une vie tranquille et heureuse. Elle n'avait pas demandé à avoir ce don, mais elle faisait avec comme on s'habituait à un nez trop gros ou des yeux un peu trop en amande. Elle s'y faisait. C'était une part intégrante d'elle et elle ne voudrait la perdre pour rien au monde, même si cela pouvait lui assurer un avenir meilleur. Peut-être même qu'elle pourrait retrouver un jour sa famille biologique si elle était toujours en vie. Et que se passerait-il si ses vrais parents étaient comme elle? Au moins ça la rassurerait. Cela lui donnerait la possibilité de se livrer pour de bon, de dire tout ce qu'elle avait sur le coeur; parce que même si elle faisait confiance aux Silverwood, sa famille d'adoption, elle ne pouvait pas tout leur dire.
Sa question à l'intention de la rousse eut l'air de créer une légère hésitation chez cette dernière car elle se stoppa après lui avoir répondu un bref et très court « Parce que... ». Riley, elle, se contenta de hausser les sourcils, comme pour l'inciter à parler. Parce que? La jeune fille ne comptait pas lui laisser -littéralement- sa vie entre ses mains avec pour simple réponse un "parce que". C'était loin d'être convaincant. Sans rien laisser paraître de son scepticisme, la noire attendit patiemment que son interlocutrice termine sa phrase, car elle se doutait bien que le "parce que" n'était pas la réponse complète. « J’suis pas une balance. » Déjà, c'était un peu plus convaincant. Silencieuse et sérieuse, la lycéenne hocha alors la tête comme si elle validait l'argument. Très bien et maintenant elle faisait quoi? Avec cette fille qui venait d'être témoin de sa nature de mutante, et cette vieille femme qui devait être en train de se demander si Riley était morte suite aux blessures qu'elle aurait dû techniquement avoir, la jeune fille ne savait vraiment pas quoi faire. Accorder sa confiance à la rousse et arrêter de se méfier de tout le monde? Non, c'était cette méfiance qui l'avait gardée encore hors de tout danger.
Alors que Riley allait dire quelque chose, il lui sembla voir quelque chose bouger à quelques mètres. Son regard se posa sur le chien -qui semblait être celui de son interlocutrice. Et juste derrière, la voiture de police qui venait de s'arrêter. Automatiquement, le sang de la jeune fille se glaça dans ses veines. Si en temps normal elle aurait dû être confiante de voir la police, à Radcliff ce n'était vraiment pas bon signe. Encore moins pour elle. Ces personnes qui étaient sensées faire régner et appliquer la loi ne faisaient que semer la terreur et effrayer les citoyens. Pas de manière concrète bien sûr, mais tous à Radcliff savaient qu'il ne fallait pas avoir de comportement suspect si on ne voulait pas se faire tirer vaccins et balles dessus. « Tu devrais filer. » oui, évidemment qu'elle devrais se faire la belle. Hochant doucement de la tête, l'adolescente tourna la tête vers la jeune fille qui se trouvait près d'elle « Oui.. » fut la réponse qu'elle lui souffla, tétanisée par la crainte d'avoir été découverte pour de bon. Que risquait-il de se passer si c'était le cas? Dans le meilleur des cas elle serait vaccinée contre son gré. Et dans le pire des cas... à vrai dire, elle ne voulait pas y penser. « Déjà? » murmura-t-elle. La brune était tellement surprise de la vitesse à laquelle ils s'étaient retrouvés sur place qu'elle se demandait s'ils étaient vraiment là pour elle.
« On devrait pas rester ici. » Riley ne suivit pas tout ce qu'il se passa tant ce fut rapide. Un instant elle était en train de fixer cette voiture qui lui faisait tant peur et ces silhouettes vêtues d'uniformes qui commençaient à en sortir, la seconde d'après elle était en train de courir, tirée en avant par sa compagne. Il lui sembla même voir le chien courir, tantôt derrière elles, tantôt en train d'ouvrir la marche, comme un ange gardien silencieux. Courir ne posait pas de problème à l'adolescente; elle était très sportive, et toute son enfance avait été rythmée par divers sport. Pendant une période, elle avait pratiqué de l'athlétisme et avait été déclarée comme la plus rapide de son groupe. Son endurance était suffisamment développée pour qu'elle ne soit pas essoufflée au bout de trois mètres ce qui, au vu de la situation, était plutôt utile.
Après plusieurs minutes passées à courir dans le silence des plus angoissant, l'adolescente jeta un regard derrière elle et fut soulagée de ne voir rien qui aurait pu laisser penser qu'on les aurait suivi. Avec un peu de chance les policiers de la ville n'avaient rien vu de leur fuite et elles pourraient toutes les deux rentrer tranquillement chez elle pour aller regarder leur série du moment. Ou écouter de la musique. « On doit être assez loin. » dit-elle à l'attention de la rousse. Machinalement, l'adolescente replaça correctement ses cheveux qui avaient volé dans tout les sens durant leur course effrénée. « Désolée. » lança-t-elle finalement à la jeune femme qui l'accompagnait, gênée. Après un court silence, elle jugea bon de s'expliquer un minimum au lieu de balancer des mots comme ça sans prévenir. « De t'avoir en quelque sorte mêlée à... » à quoi? Allez, dis-le. « ...ça. » Oui, ça. La jeune lycéenne brune ne voyait pas vraiment comment qualifier les récents évènements autrement. Et puis, c'était toujours plus rapide à dire; Riley n'aimait pas vraiment perdre son temps dans des paroles inutiles et préférait gagner du temps plutôt que de se perdre dans mille et unes formules de bienséance. Cela ne l'empêchait cependant pas d'être polie avec ses interlocuteurs, évidemment.
Une nouvelle fois, l'adolescente jeta un regard derrière elle, histoire de s'assurer qu'elles étaient toujours seules. La rue dans laquelle elles avaient toute les deux terminé leur course était déserte - Riley ne savait pas si c'était une bonne ou une mauvaise chose à vrai dire. Pendant un instant, elle hésita avant de tendre sa main en direction de la rousse, tout en se présentant rapidement; « ... je suis Riley. » Autant se présenter, la politesse n'avait jamais tué personne. Et puis, si cette fille savait qu'elle était une transmutante la lycéenne voulait au moins connaître son nom et ne pas la qualifier mentalement de "la rousse". « Et vous deux? » lança-t-elle juste après, jetant un bref regard au chien tout en adressant un bref sourire à ce dernier. Enfin à la chienne; maintenant, Riley pouvait bien voir que l'animal était une femelle et non un mâle.
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Sujet: Re: cover your crystal eyes (jealey) Ven 16 Oct 2015 - 2:13
now that no beats rule your heart anymore
is it hard to go on? make them believe you are strong, don't close your eyes. all my nights felt like days, so much light in every way. just blink an eye. i used to be someone happy, you used to see that i'm friendly. all your smiles, all is fake, let me come in. i feel sick, gimme your arm from the shadow to the sun, only one step and you'll burn, don't stay too high. w/jeane merlyn & riley silverwood.
Radcliff n’était pas un lieu où elle voulait rester, pas un lieu sur lequel elle voulait s’échouer. Ni un endroit auquel elle voulait s’attacher. Jeane avait parcouru bien des kilomètres, depuis sa Californie natale, le Los Angeles où sa vie était tombée en ruines – elle n’voulait pas rester ici. Elle n’voulait pas avoir une quelconque raison de rester ici : son père n’en serait jamais une, ni même les causes qui se déchiraient l’une contre l’autre dans les rues de la ville. Non ; rien, rien n’devrait l’empêcher d’avancer, aussitôt en aurait-elle la chance : la rousse voulait conserver sa liberté, conserver son cœur solitaire et sa foi en une existence solo. C’était mieux ainsi, lui dictaient chacun des fibres de son être. Au moins, elle n’aurait plus à assister à la mort de qui que ce soit, et personne ne viendrait plus jamais frapper à sa porte pour menacer sa vie, d’une quelconque manière. Si seulement elle pouvait mettre un tant soit peu de distance entre elle et cette ville de malheur : qui pouvait bien vouloir rester dans un endroit pareil, avec un maire atroce et des fous furieux qui faisaient exploser tous les recoins de la place publique ? Jeane aurait volontiers dévisagé chacun des habitants de cet endroit, l’incompréhension parfaitement visible dans le fond de ses prunelles, si seulement elle n’avait pas surtout une furieuse envie de passer inaperçue. Ne jamais se faire remarquer, et éviter les problèmes au possible : une promesse qu’elle n’parvenait que trop rarement à remplir à vrai dire, tant les dangers se présentaient à tous les coins de rue, dans ce bled. Ici, alors qu’elle promenait son chien. Là-bas, dans un immeuble voisin, tandis qu’elle faisait les poches d’un type et entrait dans le premier bâtiment venu pour lui échapper. Ou sur ce toit, à quelques rues de là, quand elle était tranquillement posée pour écouter de la musique – et ainsi mieux assister à la bagarre de nuit qui avait coûté un brin de dignité à Eremon. Radcliff lui nuisait presque tout autant que chacun des malheurs qui la dévoraient de l’intérieur ; tout c’qu’elle voulait, c’était se casser d’ici – elle y arriverait encore aujourd’hui, presque sans regret. Sans penser à Eremon, qu’elle laissait derrière elle. Sans songer aux visages familiers sur lesquels elle avait posé le regard : c’ne serait pas son géniteur qui viendrait en premier dans ceux qu’elle regretterait – mais presque ces visages innocents comme celui de cette gamine qu’elle dévisageait, ici, au milieu de cette rue où, encore une fois, elle était tombée au mauvais endroit, au mauvais moment. L’adolescente n’lui semblait pas plus haute que trois pommes, fragile dans chacun de ses aspects ; elle lui rappelait Valeria, la fille qu’elle avait été avant tout ça. Valeria qui avait vivoté dans les rues de Los Angeles, insouciante et totalement peu concernée par la cause mutante – ou celle de leurs ennemis. La fille comblée, malgré l’absence de son père : la rousse fusionnelle d’avec sa mère, celle autour de qui son monde entier gravitait. Valeria et sa simplicité, Valeria et sa joie de vivre. Valeria et les chasseurs qui avaient fait basculer sa vie, comme ça, comme un ouragan qui aurait tout mis sans dessus-dessous.
Ils n’avaient pourtant pas été une catastrophe naturelle ; mais c’était tout comme, frappant sans conscience ni regret, abandonnant des décombres derrière eux, pour n’jamais se retourner. N’jamais se retourner ; c’était probablement ce qui se jouait, inlassablement dans ces rues, la nuit une fois que le couvre-feu était mis en place. Les chasseurs traquaient, s’incrustaient dans les appartements de ceux qu’ils jugeaient dangereux (ou ceux qu’ils pouvaient faire chanter à leur guise) et les tuaient, comme ça. Parce qu’ils masquaient leurs pulsions sadiques avec un quelconque sens de justice qu’ils seraient bien les seuls à comprendre, en ce bas monde. Jeane les détestait, tous ces connards atroces qu’elle n’avait que trop souvent vus, à Radcliff ; y’en avait même un qui lui avait sauvé la vie, lors de cette putain de fête foraine. L’horreur. Elle savait ce que ça faisait, malgré tout, d’être un gibier, d’avoir sa vie suspendue à un fil sur lequel on n’avait aucun contrôle – un martyr dont elle connaissait les causes, les effets. Chaque caprice du destin : était-ce de la compassion, ou simplement de la présence d’esprit, que de ne souhaiter ça à personne ? Surtout pas à une fille qui lui semblait si jeune, totalement étrangère et pourtant familière comme le visage d’un autrefois qui lui était désormais inaccessible ? Jeane n’pourrait plus jamais connaître l’innocence d’une vie sans conséquence ; c’n’était pas pour autant qu’elle souhaitait une telle solitude à tous ceux qui l’entouraient. Alors elle ne dirait rien, non, elle se tairait et passerait volontiers son chemin, comme si de rien n’était. Jamais elle ne collaborerait avec Lancaster ou les gens comme lui – ou ceux qui étaient pires encore que le maire de cette ville, car ils existaient. Elle était prête à courir avec la gamine qui l’accompagnait, s’enfuyant à toutes jambes pour ne surtout pas tomber sous le joug des flics corrompus de cette ville : ça, elle l’avait déjà compris à de nombreuses reprises, que rares étaient les employés du commissariat, qui luttaient pour le bien des habitants de Radcliff, dans le sens logique du terme. La plupart d’entre eux étaient juste de ces pourris qui sortaient la nuit pour tuer des gens, sans crier gare : peut-être bien que dans les rangs de ces gens-là, se cachaient ses démons à elle, les enflures qui avaient tué sa mère, et dont elle avait remonté la trace jusqu’ici. Radcliff était le centre de gravité des connards : la bouche de l’Enfer vers laquelle tous les démons les plus atroces qui soient, décidaient de graviter. Ouais, c’était une bonne image – y’avait aussi des transmutants, qui n’faisaient pas dans la dentelle ; ils disposaient dans la vie humaine comme si elle ne signifiait rien pour eux – ceux-là, ils n’étaient définitivement pas mieux que ces ennemis qu’ils dénonçaient. Définitivement, l’innocence craintive qu’elle avait lue dans les yeux de sa vis-à-vis, Jeane voulait la préserver : elle avait la ferme conviction que c’était une des rares choses bien qu’elle pourrait faire ici, dans cette ville. Autant le faire à fond. Jusqu’à s’en cramer les poumons, l’air râpant sa trachée alors qu’elle s’arrêtait enfin de courir, à la même hauteur que la jeune brune qu’elle avait accompagnée. Depuis combien de temps n’avait-elle plus fait ça ? Courir à toute vitesse, comme si sa vie en dépendait ? Bien souvent, Jeane oscillait entre le désir pur et simple de crever, et la nécessité de survivre. Là, c’était différent – comme si elle avait eu envie d’échapper à l’étreinte d’une menace certaine. « T’en fais pas. » remarqua-t-elle, en dévisageant la gamine avec un sourire sincère ; l’air lui manquant la coupant dans sa phrase. « J’m’en. J’m’en suis mêlée toute seule. » c’était le cas de le dire ; elle avait décidé de s’avancer d’un pas décisif, d’ouvrir la bouche pour interrompre l’adolescente dans sa fuite – autant assumer jusqu’au bout. Oui, elle était humaine, sans rien de particulier : mais à choisir entre deux mecs armés et une adolescente fuyarde, y’avait pas photo pour elle. Autant assumer. « J’suis Jeane. » finit-elle par répondre à la dénommée Riley, appuyant ses paroles d’un signe de tête, sa main trouvant le pelage de sa chienne pour flatter celle-ci derrière les oreilles. « Elle c’est Nina. » ajouta t-elle donc, observant l’animal qui profitait de ses caresses avec gaité. « J’suis désolée. J’aurais pas dû t’interrompre quand t’as essayé de partir. C’était stupide. » on aurait pu croire qu’elle avait parlé à Nina, mais elle releva finalement les yeux vers son interlocutrice, bel et bien humaine : la pauvre Riley qui se retrouvait dans une situation bien critique, tout ça parce que Jeane avait décidé de n’pas passer son chemin – pour une fois.