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 Long time no see ! [Momorius]

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Marius Caesar
Marius Caesar

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SUR TH DEPUIS : 24/01/2015
MessageSujet: Re: Long time no see ! [Momorius]   Long time no see ! [Momorius] - Page 2 Icon_minitimeDim 1 Nov 2015 - 22:21



Jamais je ne parlerai de ma mutation à mon père. Jamais. Déjà que de base, je ne veux pas lui parler, mais de ma mutation… la bonne blague. Jamais je ne lui en parlerai parce que je sais trop bien ce qu’il me dira : que je suis un raté jusque dans mes gènes, que je suis un raté autant dans mes actes que dans mes pensées, que je ne suis pas capable de faire quoique ce soit de normal. Je me souviens de ce rendez-vous avec le médecin scolaire. Déjà, mon père, se faire convoquer par l’internat, ce n’était pas vraiment ce qu’il préférait même s’il s’en tapait pas mal, des convocations. En général, il déléguait à Michel mais là… non. Ensuite, se faire convoquer non pas par le directeur mais par le médecin scolaire, ce n’était pas vraiment dans ses habitudes. Je me souviens de ce rendez-vous, lorsqu’on a diagnostiqué ma cleptomanie. Une tare de plus. Je me souviens encore de son rire puis du regard qu’il m’a lancé lorsque le médecin lui a fait remarquer que ça n’avait rien de drôle. Un regard déçu, presque désabusé. Et cette sensation de n’être qu’un échec constant. Une déception continue, comme si je faisais exprès de cumuler les malformations. Alors non, Moira, il est hors de question que j’envisage une seule seconde ma mutation comme quelque chose d’évident. Et c’est pas une question d’être lâche ou autre, c’est juste une question de bon sens : ma mutation, c’est juste une anomalie de plus sur mes gènes et si je dois la perdre pour ne pas perdre mon frère, et bien je n’hésiterai pas une seule seconde à me vacciner, me revacciner, me vacciner encore jusqu’à ce que ce soit définitif. Même si je dois devenir aveugle, sourd, paraplégique pour ça. Tant que Martial ne me tourne pas le dos. Je la suis du regard lorsqu’elle se déplace, je crache ce que j’ai à dire dans une tension grandissante. Et je me rends compte à la fin de ma phrase qu’elle s’est calmée. Un peu. "Je... J'avais pas du tout pensé à ça, désolée... Mais au final, ce n'est pas toi que tu dois blâmer pour être comme ça... Disons que... J'ai mes raisons d'être comme ça." Je lui offre une moue pas convaincue. C’est moi qui suis désolé d’être aussi con et buté mais… C’est pas moi que je dois blâmer ? Bien sûr que non, c’est juste le destin, la poisse, le karma. Si ça se trouve, dans une vie antérieure, j’étais un goéland qui s’éclatait à chier sur les touristes et du coup, j’ai accumulé un certain nombre de mauvais points et j’en paye les conséquences maintenant. Si ça se trouve.

J’ai l’impression que l’un comme l’autre on en a marre de cette tension que la conversation totalement nulle – non mais vous avez vu ce sérieux ? on s’en étoufferait – a foutu entre nous. Parce qu’on s’excuse, on se débat dans les désolé qui n’ont d’utilité que de se dire ce qui est déjà implicite. Je n’ai pas envie de me disputer avec elle, surtout pas maintenant alors que ça fait des siècles qu’on ne s’est pas vu. Et je suis incapable de lui en vouloir. "T'en fais pas, va... Après tout, c'est moi qui t'en ais mis une... On est deux cons, ça non plus ça n'a pas changé, tiens !" Je lâche un petit rire, sincère, gamin, naturel, spontané. Ouais, on est deux cons, toujours aussi cons, mais quelque part, toujours aussi complices dans notre connerie. « Ouais, d’ailleurs, tu m’as pas loupé, ça va se payer ça ! » Je lui rétorque, en lui promettant du regard mille souffrances, allant d’une guerre de chatouilles à une fournée de cookies en passant par un après-midi ciné. Elle va me payer sa baffe, ouais.

Dans tous les cas, pas question de traîner dans le terrain plein de miasmes de disputes, je m’empresse de changer de sujet. Alors, elle est là depuis quand-comment-pourquoi ? Parce que je ne compte pas la laisser refiler à perpète, pas alors qu’on a tous les deux grandis et qu’on n’a plus nos parents sur le dos pour nous faire profondément chier. Emporté par mon élan, je m’hasarde à parler de tournage, je sens qu’elle ne va pas me louper sur le sujet. Et merde : je n’ai pas le temps de changer à nouveau de sujet que déjà elle me coupe et cherche sur ma table de chevet de quoi écrire tout en me répondant. "Heu... Non, ça ne fait que quelques mois que je suis ici. J'ai tellement déménagé quand j'étais gamine que j'ai toujours la bougeotte, tu vois le genre... Pour le moment je n'ai pas prévu de bouger, et puis avec cette connerie de blocus, comment tu veux sortir ? C'est dingue, quand même... Oh d'ailleurs ! Voilà ! Note-moi le tiens, comme ça on aura plus aucune raison de ne pas rester en contact !" « Bonne idée ! » J’attrape le bout de papier, le déchire en deux pour noter sur l’autre morceau mon numéro. Heureusement que je m’en sors pour écrire avec mes deux mains d’ailleurs, même si je suis loin d’être ambidextre. Je me concentre sur les chiffres pour ne pas entendre ce qu’elle me dit. "Au fait... C'est quoi, cette histoire de tournage ? C'est plus le hand, ton truc ? Parce que si tu es dans le cinéma, je vais garder précieusement ton numéro, ça vaudra sûrement de l'or, un jour !" Ouais, tournage, hand… terrain sensible sans l’être. Je m’applique enchaîner sur un autre sujet, un sujet tout à fait lâche, un merveilleux coup bas : Martial. Elle se tasse dans le fauteuil, je note même qu’elle rougit… J’explose de rire. Mais genre… vraiment. "Ahaha, t'es con... Ça fait des années qu'on ne s'est pas vus, pas sûr qu'il se souvienne de moi ! Et puis comment ça t'es toujours célibataire ? Une bouille mignonne comme la tienne ? Tu me surprends ! T'as pas encore trouvé ta perle rare ?" Le bon fou-rire, celui qui est supposé durer pendant… vingt secondes. Ca me fait beaucoup moins rire lorsqu’elle me renvoie l’ascenseur dans la figure. « Bouarf, les perles rares, je les paume, tu me connais, j’suis pas très très ordonné. Et puis, j’suis pas calibré pour ça, Moira. » Jolie manière de dire que j’ai tout fait foiré avec ma perle rare à moi. Et que ça ne me semble pas vraiment bien parti finalement pour la récupérer. Je me fais d’ailleurs la remarque que si Moira est l’une de mes seules connaissances à m’avoir connu lorsque j’étais gosse, elle ne m’a pas vraiment fréquenté au lycée lorsque j’ai commencé à vraiment sortir avec des filles et encore moins en post-bac où là… Non, pas de perle rare. Je n’ai pas des masses envie de m’étaler sur le sujet et je cherche encore une porte de sortie lorsqu’en parlant de porte, y’en a une qui vient de résonner. Pas loin. Je penche la tête pour essayer de voir le couloir, Moira finit par dire tout haut ce qu’on pense tout bas : "Ah... Je crois qu'on va venir me déloger... Tu me planques sous ton lit ? J'm'ennuie comme un rat mort, dans ma chambre, et le médecin est bizarre..."

« Han oui ! Tiens, planque-toi sous le lit ! Ou sous la couverture ! Allez vite ! De toute façon, tous les médecins sont bizarre et en plus, les infirmières elles sont même pas sexys et… » On a quel âge déjà ? Mais ça ne sert à rien parce que l’infirmière vient de débarquer dans ma chambre. Je prends les devants immédiatement. « Promis, je la ramène dans sa chambre quand on finit de discuter comme ça elle ne risque pas de se perdre dans les couloirs et… » Et je me tais. Parce que le regard de l’infirmière n’est pas très très engageant. Et surtout parce qu’elle me regarde avec insistance. Quoi, j’ai un bouton sur le nez ? Je me redresse, m’apprêtant à lui faire la remarque que même si je suis mignon, faut pas trop me mater comme ça, lorsqu’elle hausse un sourcil. Je ne parle pas l’infirmière, moi. A moins qu’elle n’essaye de me dire que… je regarde l’heure et me laisse retomber sur les oreillers. Et merde. Le médecin va pas tarder à arriver pour examiner mon cœur. Et elle a bien retenu que je ne voulais pas en parler à mon père donc sûrement pas à mes amis. Je me mords la lèvre. Putain.

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