I. (san francisco) L'air était sec en ce mois d'août, le ciel était d'un bleu doux et rares étaient les nuages qui encombraient le ciel en cette période de l'année. Maisy aimait beaucoup s'allonger dans l'herbe encore fraîche et observer le ciel. Ses mains avaient l'habitude de s'étaler sur ses côtés et d'arracher quelques bruns d'herbe délicats. De belles fleurs avaient poussé tout autour de la maison toujours bien entretenue. Les parents de Maisy étaient certains que plus leur maison semblait agréable, moins on ne soupçonnerait ce qui se passait à l'intérieur. Ils avaient donc pris l'habitude de parfaitement entretenir leur nid et de saluer jovialement les passants alors qu'ils venaient chercher le journal sur le pas de la porte. Se faire passer pour le parfait stéréotype de la famille américaine était ce qu'ils savaient faire de mieux. Mais Maisy reconnaissait parfaitement la différence quand elle entrait dans la bâtisse. Une certaine ambiance sombre s'y dégageait, et on ne pouvait la ressentir qu'une fois que l'on était au courant de ce qui s'y passait vraiment. Une fois dans la maison, Maisy s'empressa de marcher jusque dans la cuisine. Elle avait toujours eu du mal à l'appeler "sa" maison, elle ne la considérait pas comme telle, elle la voyait plus comme une simple bâtisse qui avait vu passer beaucoup d'étrangers, beaucoup trop même. Les pas lourds de son père vinrent la tirer de sa rêverie. Il se présenta devant elle, un sourire en coin accroché aux lèvres. Mai avait toujours été inquiétée par ce regard qu'il affichait, et ce sourire. Elle serra le verre d'eau qu'elle tenait dans ses mains de plus belle, jusqu'à ce que ses jointures deviennent blanches. Ses yeux étaient grands ouverts et elle ne lâchait pas son paternel des yeux. Il la surplombait de plus de soixante-dix centimètres, son père avait toujours été quelqu'un de très grand et qui savait en imposer. Ses mains vinrent se poser sur sa taille tandis qu'il ne lâchait pas Maisy des yeux. « Suis moi. » dit-il, d'une voix grave et monotone. La jeune fille posa le verre d'eau à moitié plein sur le plan de travail d'une main tremblante. Dans ces moments là, elle savait que la dernière chose à faire était de désobéir à son père, elle l'avait déjà expérimenté. Ses yeux bleus se baladèrent dans tous les recoins de la maison. Elle suivait son paternel d'un pas las et, sans grande surprise, ce dernier ouvrit la porte de la cave avec une clé qu'il gardait exclusivement. Mai eut un léger mouvement de recul avant d'entrer dans la pièce souterraine, mais elle ne pu faire autrement que d'exécuter les souhaits de son père. Les marches craquèrent lorsqu'ils les utilisèrent pour descendre, et à ces bruits, la mère de Mai leva la tête en direction de son mari et de sa fille. Elle afficha un grand sourire sur ses lèvres rosées et ses dents blanchies. « Parfait, vous êtes à l'heure. » sans dire un mot, Maisy regarda ses deux parents échanger quelques mots discrètement. Un bruit sourd la fit sursauter et retint son attention. Ses yeux se baladèrent tout autour de la pièce éclairée par une unique source de lumière artificielle qui renvoyait une douce lumière bleue. Elle pu finalement localiser la source du bruit quand ses yeux se fixèrent sur une porte noire isolée sur un mur de briques. Ses yeux vinrent de nouveau se poser sur ses parents, et sa mère la regardait désormais. Elle s'approcha d'elle et s'abaissa pour avoir son visage à la hauteur du sien. Elle prit dans ses mains délicates les mains de Maisy, encore tremblantes. « Tu ne dois pas avoir peur Mai. Surtout pas d'eux. » Maisy sentit son coeur s'accélérer doucement, jusqu'à le ressentir dans ses tempes. Sa mère se releva sans lâcher la main droite de Maisy. Elle l'escorta jusqu'à ladite pièce dans laquelle son père venait d'entrer quelques secondes auparavant. La porte s'ouvrit de l'intérieur. Maisy entra dans la pièce à contre coeur, et bien que sa tête lui disait de faire demi-tour et de ne plus jamais revenir ses pieds, eux, décidèrent d'entrer et de faire face à ce qui l'attendait. C'est ce que ses parents attendaient d'elle, après tout. Dans la pièce sombre, où les murs n'étaient même plus reconnaissables, un homme était assis au centre. Les mains et les pieds liés à une chaise. Le père de Maisy se tenait juste derrière lui. Son ombre était encore plus impressionnante que lui et donnait froid dans le dos. La porte par laquelle la jeune fille était entrée se ferma brutalement et le bruit sourd et surprenant manqua de la faire trébucher. Elle se retourna, le visage apeurée. Mais la voix de son père lui fit de nouveau tourner la tête en direction du milieu de la pièce. « Ce sont des monstres Maisy. Ne l'oublie jamais. » et jamais elle ne l'oublia.

II. (radcliff) Les rues de Radcliff étaient désertes en ce début de journée. Maisy pouvait sentir ses cheveux blonds rebondir sur ses épaules au rythme de ses pas. Ses mains étaient enfouies dans ses poches pour tenter vainement de les réchauffer. Une légère buée s'échappait de sa bouche à chaque souffle qu'elle poussait. Bien que les yeux de Mai étaient occupés à regarder tout autour d'elle, son esprit lui, divaguait. Depuis quelques temps, la jeune femme s'était retrouvée à voir surgir certains doutes. Elle n'était plus aussi certaine que ses actions étaient justes. Elle avait, depuis peu, commencé à penser différemment. Et bien qu'elle essayait tant bien que mal de repousser ces idées, elles revenaient sans cesse et obligeait Maisy à se questionner. L'air frais venait soulever ses cheveux et vint lui caresser légèrement l'échine, le chemin jusqu'au laboratoire n'était pas long, mais le froid qui se dégageait des rues de la ville l'allongeait beaucoup. En temps normal, il n'aurait fallut que quelques minutes à Maisy pour se rendre à son travail, mais en ce début de journée, la hâte d'y aller n'était pas présente et ses foulées était ralentit par la le poids de ses pas. La jeune femme était tourmentée par cette action qu'elle avait faite quelques jours auparavant. Un sentiment de culpabilité n'arrêtait pas de la hanter, et bien qu'elle était fière de ce qu'elle avait accompli elle ne pouvait s'empêcher de sentir des regards se poser sur elle et la juger à chaque coins de rues. Ce mutant qu'elle avait libéré quelques jours auparavant avait disparu. Ce mutant qu'elle avait libéré tandis que Beatrix était partie. Ce mutant là, qui avait maintenant disparu. Elle n'avait pas cherché à le retrouver, ses effort n'auraient été que peu concluants. Mais elle se souvenait parfaitement de son visage, et il le hantait. Ce visage qu'elle avait vu pour la première fois dans le laboratoire. Cette peur qui était greffée à son visage tandis que Mai, elle, le regardait. Elle n'avait pas cherché à comprendre sur le coup et ne préférait n'avoir rien à faire avec les activités secrètes de Beatrix. Cependant elle n'avait pas pu faire autrement que d'agir, que de le sauver. Pourquoi lui? La question restait sans réponse. Et jamais, jamais elle n'aurait fait cela quelques semaines auparavant. Maisy avait été élevée dans cet environnement stricte et conservateur dans lequel les idéaux de ses parents devaient être respectés. Mais quelque chose l'avait poussé à enfreindre ces règles, et cela la hantait. Dans sa rêverie, Maisy n'avait pas fait attention à la direction dans laquelle elle marchait et manqua de peu de renverser un homme qui s'était arrêté pour lire son journal. Elle s'excusa poliment avant de ramasser une page de journal qu'elle avait faite tomber dans sa maladresse. Mai prit une grande respiration avant de reprendre son chemin, essayant de faire le vide dans son esprit. Elle devait oublier tout cela pour ne serait-ce qu'une journée, au moins.