Event || Philip, do you want a pizza?

Do you want a pizza sir?

(verlaine) ▽ Il pleure dans mon cœur Comme il pleut sur la ville, Quelle est cette langueur Qui pénètre mon cœur ?

Je revenais d’une maison que je venais de servir et le pizzaiolo avait encore une adresse. Sans même qu’il n’ait eu le temps de s’excuser de l’heure tardive de la demande, je lui lançais un regard noir. « Tu sais très bien qu’ils sont partout, on n’a pas le droit d’être dehors à une heure pareille ! J’espère qu’au moins c’est une belle jeune femme qui me laissera dormir dans le canapé ! » Je pris la pizza sous son bras et lis l’adresse indiqué par mon collègue : 251 Magnolia street. Bon, ça allait encore, ce n’était pas trop loin. Allant vers mon véhicule, je mis la pizza dans le petit conteneur au-devant de la petite moto puis démarra.

Les rues étaient presque toutes du même modèle. Il n’y avait rien qui était au hasard. À présent, depuis plus de six mois de métiers, je savais exactement où se trouvait les rues, j’avais même réussi à retenir mes habitués, leurs maisons, les chemins les plus pratiquent pour y aller. Mais là, c’était un peu plus compliqué. En quelques minutes j’arrivai et je vins sonner à la porte tranquillement. Comme à mon habitude, j’arborais un agréable sourire, pas trop crispé et pas trop joyeux non plus, quelque chose de poli et de simple. De ce que je pouvais voir, c’était une grande maison, ce qui laisser présumé soit un long, très long prêt ou sinon, cela indiquer que la personne qui vivait là était assez fortuné. En tout cas, j’étais sagement sur le pas de la porte, attendant de voir la personne qui pourrait peut-être m’héberger ce soir. Ce que je savais déjà c’est que je n’aimais pas faire la petite victime. Quitte à repartir s’il n’y avait pas de hunters dans les parages, je le ferais… Je n’étais pas à ça près.

(c) AMIANTE

Philip ne se souvenait plus exactement du moment de la journée où les coups de feu avaient commencé. Une chose était sûre il détestait la violence. Il avait même était un hippie convaincu dans les années 60 et la mort de David n'avait certainement pas arrangé les choses. Face à la déferlante de violence dont il savait capable les hunters (et aussi à cause d'une légère paranoïa), il avait simplement décidé de se barricader dans son immense demeure le temps que les choses se tassent. Il avait cependant mal évalué la quantité de nourriture disponible dans sa cuisine, si bien qu'il fut rapidement à court de pitance.

Philip sautilla discrètement jusqu'à la fenêtre la plus proche et écarta l'un des épais rideaux pour observer la rue pour l'instant du quartier cossu où il habitait depuis maintenant plus de vingt ans. Pas un chat, pas un malade cagoulé armé d'un flingue en train de beugler à la recherche d'un autre individu à abattre. Le vieil aristocrate n'aurait sans doute pas le courage d'aller jusqu'au magasin le plus proche et s'en aurait voulu de causer la mort d'un innocent livreur.

Il n'avait pas commander de pizza depuis 82, quand il avait dû passer la nuit chez Roger Briggs, un courtier tellement éméché qu'il arrivait à peine à tenir ses clefs dans le bon sens. C'était le temps de la bohème, un temps mort depuis bien longtemps. Depuis Phil Cavendish était sans doute devenu un peu trop timoré. Il décrocha son téléphone, fixe, il était du genre rétro, et commanda une pizza au hasard auprès du livreur le plus proche.

Le vieil homme manque de sursauter quand la sonnette résonna dans son salon. Il se précipita vers sa porte d'entrée, ouvrit la porte rapidement et demeura quelques instants interdit devant le jeune chevelu au sourire crispé devant lui. Mais ce ne fut qu'une brève minute, puisque Philip le saisit sans ménagement,essayant de le faire entrer, en lançant des regards paranoïaques d'un bout à l'autre du trottoir.

- Mais ne restez pas planter là avec votre sourire de nigaud ! Ce sont des malades !

Do you want a pizza sir?

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Comme un bon samaritain, j’avais attend sur le pas de la porte lorsque soudainement celle-ci s’ouvrit à la volée et un homme plus très jeune m’attira à l’intérieur. « Mais ne restez pas planter là avec votre sourire de nigaud ! Ce sont des malades ! » Je ne pus m’empêcher de rire à cette réplique, c’était un contexte si inhabituel que je n’avais pas peur loin de là, j’étais plutôt content. Enfin, je n’arrêtais pas de pouffer de rire face à cette spontanéité. Notre ville était à feu et à sang et cet homme ne voulait pas me voir trainer dehors alors que c’était lui qui m’avait fait venir dès le départ. Vraiment Radcliff n’arrêtera jamais de m’impressionner.
« Je viens vous livrer votre… » et encore un rire sortit de ma foutue bouche. Je me stoppai pendant un instant avant de reprendre le discours habituel dans un calme impassible. En fait, j’étais tellement lassé de le dire que je n’y prenais même plus goût, j’avais peut-être même l’allure d’un automate. « Bonsoir monsieur, voilà votre pizza » je tendais l’objet tant convoité avec un léger sourire. « Ça vous fera 7dollars et nous vous souhaitons un bon repas, n’hésitez pas à me rappeler en cas de besoin. » Après le discours que j’étais obligé de sortir à tous les clients, je regardai l’homme avec sourire. « Désolée, la maison oblige de dire tout ça pour pas avoir de procès pour je ne sais quelles raisons, vous avez l’habitude de faire ça, vous les américains… » Dans sa voix on entendait parfaitement son accent d’écossais sorti de son Royaume Uni profond. « Je peux savoir pourquoi je suis dans votre maison monsieur… ? »

Jamais je n’avais pensé finir une soirée ainsi dans l’une des plus belles maisons de Radcliff un soir où tout allait des plus mals. Peut-être existait-il encore des personnes qui avaient un semblant de respect pour eux et leurs semblables ? En tout cas, j’ étais là en alerte au moindre signe avant-coureur d’une probable arme si au pire des cas cet homme était l’un des ancêtres des hunters, mais si c'était le cas, cette ruse était peut-être l'une des pires au monde.

(c) AMIANTE

Philip se drapa dans dans une indifférence toute britannique quand il comprit que le livreur se moquait insidieusement de lui. Il pinça les lèvres, tripota un instant les branches épaisses de ses lunettes avant finalement de déclarer sur un ton tranquille :

-J'admets que cette situation porte un peu à confusion... Soit...

Le gamin (toute personne de moins de trente 30 ans lui semblait se promener en couche-culottes) reprit son sérieux et débita les banalités habituelles des commerciaux. Il avait cependant un accent qui chatouilla en Philip des souvenirs lointains. Des souvenirs du grand oncle Cormac qui râlait contre la domination anglaise. Mais la nostalgie laissa rapidement la place à un frisson d'horreur qui lui secoua l'échine. Ces bouseux d'écossais ne changeront jamais.

- Vous autres américains ? Aurais-je tant que cela perdu mon accent "si charmant" ? articula-t-il en imitant les petites américaines de la campagne profonde qui n'avait connu que le Texan incompréhensible.

Sir Cavendish avait pourtant toujours pris un soin presque maniaque à conserver les inflexions particulières de son Angleterre natale. Il se redressa dignement et tâcha de rester un hôte convenable malgré l'insulte qu'on venait de lui jeter au visage.

- Vous êtes dans cette charmante demeure, acquise difficilement, j'étais comme vous mais pour des donuts, pour partager cette pizza et éviter de vous balader de nuit après le couvre-feu. Prenez donc une place sur mon ravissant sofa.

Philip lui désigna une place et s'installa à son tour. Il avait vécu un an seul sans accueillir personne et avoir de nouveau de la compagnie était une sensation étrange.

- Je ne suis pas certain d'avoir saisi votre nom.

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Voyant la bourde que je venais de faire, jese sentit alors tout gêné, tout con, incapable. Déjà parce que l’homme était mon aîné, je lui devais respect et si ce dernier n’avait pas apprécié la façon dont je lui avais parlé, je me serais tout de suite excusé. Ne voulant créer aucune tension, je répliquai alors presque aussitôt : « Excusez-moi, mais il y en a qui veulent se prendre pour des anglais simplement parce que c’est chic. Je ne pouvais pas savoir, on est bien loin de notre terre natale. »

N’étant pas dans un environnement que je connaissais, je restais là, dans l’entrée. Sans savoir où je pouvais mettre mon derrière. C’était étrange comme situation mais quand l’homme me dit que je ne devais pas rester dehors vu les temps qui courraient, je le trouvais d’un coup totalement plus charmant. « Comment on peut avoir une si belle maison en ayant un travail comme le mien ? Je me résous à vivre en colocation avec une jeune femme car je ne peux même pas me payer un appartement à moi seul… » Puis une pensée me traversa l’esprit. « Vous n’avez pas peur des personnes que vous faites rentrer ici ? Enfin, ils ne cherchent qu’un certain type de personne… Comment pouvez-vous savoir que peut-être je fais partie de ce groupe de personne. »

L’homme me désigna une place sur le sofa non loin de lui. J’avais totalement oublier de lui dire mon prénom ou encore de le remercier de sa générosité. « Merci déjà de m’accueillir, on sait jamais de quoi ils sont capables. Je suis Loeven, Loeven Moriarty ! » Je présentais alors ma main afin de faire les présentations dans les bonnes et due forme.

(c) AMIANTE

Ce gamin ne manquait peut-être pas autant de bon sens que Phil l'avait pensé au départ. Il semblait vraiment navré d'avoir vexé le vieil homme, ce qui le faisait là aussi un peu remonter dans son estime. Il existait donc toujours un peu de respect dans le vaste monde.

- Je ne suis pas resté vendeur de donuts toute mon existence, ou alors j'aurais une chaîne à mon nom depuis bien longtemps. Bien que Cavendish donuts sonne bien, je suis actuellement propriétaire de la galerie d'art de Radcliff, tu y as déjà mis les pieds ?

Le jeune homme lui demanda grosso modo si Phil se méfiait de lui. Philip trouvait la question intéressante. Radcliff était vraiment devenu le berceau de la trahison et des faux-semblants, à croire que la moitié de la ville avait pété les plombs. C'était pourtant une ville si sympathique. Philip lui répondit un petit sourire ironique :

- Le groupe de personnes qui chasse ou le groupe de personnes chassé ? Le nombre accablant de fuites mystérieuses du laboratoire doit bien prouver que je ne suis qu'un humble humain sans don particulier, même si l'état de mon fils aurait pu créer quelques soupçons... Et si tu n'as pas enfoncé ma porte un fusil à la main e hurlant, j'imagine que je n'ai pas grand chose à craindre de toi, n'est-ce pas ?

Il s'appelait Loeven Moriarty, un prénom bien inhabituel mais qui sonnait plutôt bien. L'aristocrate lui serra la main avec chaleur puis se servit une part de pizza.

- Alors, jeune homme, depuis combien de temps habitez-vous aux États-Unis ?

Malgré son accent écossais, Philip n'arrivait pas à déterminer le temps que Loeven avait passé dans les vertes contrées américaines. Certaines personnes ne perdaient jamais les inflexions caractéristiques de leurs origines malgré les années.

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Ce qu’avait l’homme, d’un certain âge, à dire allait certainement m’être d’une aide précieuse dans un lapse de temps court ou un peu plus lointain. Toute aide était bonne à prendre, c’était ce que mes parents m’avaient inculqué, alors peu importe, pour une fois qu’une personne plus âgée pouvait me faire connaître sa science, j’en étais heureux. « Jamais m’sieur… » Répondis-je en souriant, quoi que j’aurais bien aimé y aller, mais il me fallait travailler pour avoir une vie avec un minimum de décence et je devais aussi rattraper le retard que j’avais accumulé au niveau de ma formation. Ma vie avait changé du tout au tout et ça m’énervé au plus haut point. Si tout ne tenait qu’à moi, je serais resté à Aberdeen dans ma vieille Ecosse et j’aurais certainement tué le hunter qui avait ruiné nos vies ou alors il m’aurait tué en tout cas, nous ne serions plus deux dans ce bas monde. « Je ne suis pas des personnes qui chasse, plus l’autre catégorie en fin de compte… Je doute qu’il puisse savoir, je ne me suis pas fait recenser dans votre ville. » C’était ça, le plus étrange. Je n’avais pas été recensé à Radcliff pourtant certains des hunters savaient pour ma condition. Était-ce parce qu’une personne proche de moi m’avait vendu ou était-ce mon frère qui avait encore une fois tout fait foiré ? Je ne savais pas. Il avait tellement l’habitude de nous mettre dans le pétrin celui-là que c’était plutôt vers cette hypothèse que je me dirigeais. « Mon frère m’a amené ici il y a quelques mois, bientôt neuf mois il me semble. Je ne me suis pas encore bien intégrer dans cette ville. » Les Moriartys n’avaient fait que fuir depuis la mort de leur petite sœur Lyanna. C’était peut-être ça aussi que Loeven reproché à son frère. Il n’avait pas pris soin de le ménager loin de là, il l’avait embarqué dans une fuite que personne ne pouvait gérer. Arrivés à Radcliff, il lui avoua que la personna ayant planifié le meurtre de sa sœur se trouvait dans la ville et qu’en fait tôt ou tard ils allaient devoir la tuer, ou la torturer ou bien d’autres choses que je n’ai pas envie d’énumérer.

(c) AMIANTE

Phil eut un vague sourire. Ce n'était pas donné à tout le monde de pouvoir se permettre d'errer dans les galeries, théâtres et autres endroits que les gens oisifs aimaient visiter. Loeven n'en était pas encore à ce stade, mais à force de travail et puisqu'il semblait être plus fin qu'au premier coup d’œil, il saurait tirer son épingle du jeu.

-L'autre catégorie, voilà qui est fort intéressant. J'ai connu quelques personnes dans la même situation, à la fois extrêmement inconfortable et fascinante. Ne pas se faire recenser ici est aussi une idée fort sage. Il semblerait que depuis plus d'un an les hunters soient étrangement au courant à propose des personnes intéressantes de la ville.

David était mort parce qu'il avait fait des tests sanguins à Radcliff. C’était quand le repérage du génome mutant n'était pas systématiquement fait. Il voulait simplement savoir si son hypermnésie était naturelle ou s'il était un transmutant. Il ne s'était pas méfié. Les hunters n'étaient qu'une vague menace à l'horizon, quelques hurluberlus un peu retardés qui s'agitaient contre l'évolution. Pourtant ils l'avaient tué, la menace était bien présente, même à Radcliff, où son fils avait toujours vécu.

Philip croqua pensivement une part de pizza. c'était un peu trop gras à son goût mais plutôt bon, il devait l'admettre. Bien sûr les hunters ne tiraient sans doute pas toutes leurs informations des taupes de l'hôpital. En vérité ils étaient assez difficiles à trouver, ils pouvaient être votre voisin, votre médecin, avoir des informations sur tout le monde.

-Ce n'est jamais facile d'arriver dans une nouvelle ville. Pourquoi as-tu quitté l'Ecosse ? Il me semble que ton pays te manque beaucoup, n'est-ce pas ?

C'était toujours difficile les premiers mois, mais le mal du pays finissait toujours par diminuer.

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Des bruits au dehors firent relever la tête de Loeven, il n'aimait pas ça, il n'aimait pas le fait qu'une sorte de guerre puisse détruire une villes, des gens et ainsi des familles. Le maire de cette ville n'avait définitivement pas de cœur pour faire ça à des personnes qui n'avait rien demandé à personne. En tout cas, maintenant, il était en sécurité pour le reste de la nuit, c'était un bon point.
- C'est exact. Les documents concernant les personnes transmutantes doivent leur être communiqué sinon, je ne vois pas comment ils pourraient être au courant de tout ça.
La chance n'était pas réellement présente dans la vie du jeune Moriarty, tout avait eu une fin catastrophique. On commence par les parents morts dans un accident de voiture puis de sa sœur tuée parce qu'elle n'était rien d'autre qu'une mutante et puis là maintenant, il était loin de son pays natal, loin de ses valeurs et de sa patrie à cause de fous qui pensent pouvoir protéger le monde. Ces fous qui étaient présents dans sa vie, qui étaient présent dans son quotidien, il leur livrait des pizzas, il allait dans les mêmes magasins toujours en craignant plus ou moins pour sa vie. C'était peut-être dû à cette expression pensive qu'avait Loeven que l'homme lui demandait si son pays ne lui manquait pas.
- Je suis parti parce que des personnes ont tué ma sœur. Et ses mêmes personnes sont dehors et font leur loi en tuant de pauvres âmes. Mon frère et moi sommes partis parce qu'ils en avaient après nous. Et oui, ça me manque de ne plus entendre ce ton chaleureux et musical dans la voix des personnes que je rencontre, ça me manque de ne plus avoir d'immenses lacs où me baigner, ça me manque parce qu'ici, tout est différent, tout est si... Civilisé... Je ne sais même pas si ce que je dis est cohérent, j'en suis désolé.

(c) AMIANTE

Il y eut pendant un bref moment des bruits sourds à l’extérieur, qui bien que lointain marquaient une agitation inquiétante. « Cela va sans doute durer encore un bon moment » songea le vieil aristocrate. Les hunters mettraient sans doute un peu de temps à évacuer toute la haine qu’ils avaient accumulée. Heureusement que Loeven et lui-même était en sécurité.

- Il semblerait bel et bien qu’une taupe se soit installée à l’hôpital de la ville, si ce ne sont plusieurs. Avec ce nouveau maire, les hunters vont avoir plus facilement accès aux informations sensibles, malheureusement. David, mon fils, est mort à cause de cela. Je me demande combien il y aura de personnes… particulières qui mourront cette nuit.

Sans doute beaucoup. Il n’avait aucun doute que les chasseurs avaient leurs cibles attitrées qui ne s’attendaient sans doute pas à être dénichées aussi aisément. Quelle tristesse… Plus le temps passait plus la conversation prenait une tournure sensible et personnelle. Loeven évoqua sa propre sœur décédée. Il ne faisait aucun doute qu’elle avait elle-aussi disposé d’un certain nombre de dons qui lui avaient couté la vie.

- Oh, tout cela est très claire jeune homme. Comme c’est amusant ! Moi-même je trouve cet endroit relativement peu civilisé, mais ayant été élevé par une famille ancienne d’aristocrates anglais, je suppose que tout n’est qu’une simple question de perspective… Pardonne-ma curiosité, mais ton frère est-il aussi un mutant ?

Pour la première fois dans la conversation, le mot juste de la chose était finalement apparu. C’était un tabou inutile qui avait été abattu. Si c’était le cas, avoir trois enfants mutants étaient possibles mais relativement rares, à moins que les parents aient été eux-mêmes transmutants. Un quasi-miracle. Combien Maiken avait-elle dit ? Moins de 5 % de la population ?

- Mh, je ne pense pas vous laisser dormir dans ce sofa (bien qu’il soit extrêmement confortable, là n’est pas la question). J’ai plusieurs chambres de libres à l’étage…

Il avait voulu avoir plusieurs enfants, mais Lisa était lentement tombée malade peu après la naissance de David. Son cancer avait même été trouvé pendant sa grossesse. Parfois la vie était d’une ironie glaçante.

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« Mes sincères condoléances. Je comprends votre situation… » Je ne sais pas réellement pourquoi les hunters étaient tous aussi cruels les uns que les autres, pourquoi ils avaient un telle soif de vengeance, pourquoi ils nous voulaient morts, pourquoi ils n’arrivaient pas à vivre sachant que nous existions. Je ne connaissais pas de transmutants ayant tué de sang-froid un hunter, simplement pour le plaisir, pour l’envie, ce n’était que des représailles ou uniquement de la légitime défense. Les morts à présents ne devaient plus se compter sur les doigts d’une main mais par dizaine, c’était un peu comme si vous lâchiez des agneaux dans une fosse aux lions, ils allaient se donner à cœur joie. « Nous l’étions tous, enfin, nous n’avons jamais su pour nos parents… » Je marquai une courte pause avant de reprendre, humectant mes lèvres. Mes sourcils se froncèrent sous le poids de tant de souffrances endurées. « Ils sont morts quand j’étais un peu plus jeune, un accident de voiture… Autant dire que notre vie n’est pas des plus rose, mais on fait avec et on avance. Sur cinq, nous ne sommes plus que deux… » Mon regarde se porta dans le sien, le poids des confessions de ce soir étaient immense, elles étaient une longue, large page de leurs histoires. Je ne sais pourquoi mais ma confiance était totale en cet homme meurtri par la perte de son fils. Je le comprenais plus que de raison. « Je ne pourrais jamais vous remercier pour votre hospitalité. Certains n’aurait simplement pas proposé, même connaissant le tarif pour les personnes étant dehors après le couvre-feu. » Le suivant tranquillement, je me foutais bien de manger ou non, encore une fois, la question de savoir si Eremon était en vie me traversa l’esprit, il avait une sainte manie à toujours être dans les dangers les plus grands, à toujours fréquenté les mauvaises personnes. S’en était presque ahurissant. Il avait un don pour les emmerdes. Ça, j’en était certain.
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(c) AMIANTE

« Je comprends votre situation » Philip ne sut que répondre et se contenta d’un bref hochement de tête de remerciement. Il n’était pas certain que Loeven puisse réellement comprendre, la perte de ses parents n’étaient pas la même chose que la perte d’un enfant. Il pouvait compatir en revanche, il avait connu une souffrance du même acabit. Il faisait maintenant parti d’une famille où il y avait plus de morts que de vivants. Pas étonnant que son frère et lui aient choisi une fuite dans des contrées lointaines.

-Quel drame terrible. Un accident et un meurtre. J’imagine que ton existence a dû être des plus précaires.

Sir Philip avait connu des moments pour le moins difficile après son arrivée en Amérique et le divorce de sa première femme. Couper les ponts avec une famille richissime dans le début de la vingtaine et partir à l’autre bout du monde n’avaient sans doute pas été le choix le plus raisonnable de sa part…

-C’est comme moi qui t’aie fait venir tard pour éviter de mourir de faim, une mort qui doit être assez terrible. Je suis navrée. Mon estomac m’a fait perdre tout sens des convenances et des réalités. Ou bien la sénilité…

Le vieil homme eut un sourire contrit.

-Si tu veux bien me suivre. J’ai laissé la chambre de son fils intacte. Ce sera donc l’une des chambres d’amis que tu devras occuper. C’est terriblement impersonnel mais suffisant.

La maison de Philip comptait au total cinq chambres. Une grande qui était la sienne, il y dormait il y a bien longtemps avec Lisa. Celle de David, le sanctuaire et trois autres chambres d’amis de petite taille mais contenant le mobilier minimal adéquat en cas de visite impromptue.

-J’ai entendu dire que beaucoup de mutants se retrouvaient sans toit, la montée des discriminations fait des ravages dans certains coins du pays. J’ai la ferme intention d’accueillir quelques âmes en perdition pour les abriter.

Il était temps de mener une action, même aussi passive. Il finirait bien par trouver un moyen plus agressif de défendre les « dégénérés ».

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La faim s’était fait oublier, il n’avait pas faim, son estomac était plutôt serré. Il n’aimait pas voir ses personnes dehors, parfois mortes, parfois assassins. L’existence avait dû être précaire. On enchaîné les petits boulots, on essayait de se sortir la tête de l’eau, comme on pouvait. Il ne répondit pas non plus, à quoi bon, tout ça s’était passé, plus rien n’avait de goût maintenant. Il acquiesça, c’était suffisant. « Ce n’est pas grave, je ne suis pas mort et vous m’offrez l’hospitalité. Ça ira mieux demain matin. » Loeven comprit pourquoi il avait laissé la chambre telle quelle. Il avait eu du mal à empaqueter les affaires de Lyanna, il avait aussi eu du mal avec celles de ses parents. Puis, la maison avait certainement dû se vendre, il ne savait pas vraiment, c’était plutôt les affaires d’Eremon, Loeven s’en foutait, il ne voulait pas de l’argent des morts, il ne voulait pas avoir encore plus sur le cœur, sur le dos. « Rien qu’un canapé me suffira, alors vous savez, l’aménagement m’importe peu. » Ils étaient montés à l’étage là où il devait y avoir certainement les chambres. « J’ai entendu dire que beaucoup de mutants se retrouvaient sans toit, la montée des discriminations fait des ravages dans certains coins du pays. J’ai la ferme intention d’accueillir quelques âmes en perdition pour les abriter. » « ça serait particulièrement audacieux et courageux, je suis sûre que vous aurez des candidatures rapidement. » Loeven se mit à bailler. Il était fatigué, il avait bien voyagé à travers la ville et bien travailler. La fatigue s’emparait peu à peu de lui, tombant dans les bras de Morphée. Il entra dans la chambre que l’homme lui avait conseillé et se laissa tombé sur le lit. « Vous m’excuserez, mais je pense rester ici pour la soirée. »
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(c) AMIANTE

Philip haussa un sourcil réprobateur en entendant Loeven prononcer le mot « canapé ». Il ne répondit rien. Il dormirait dans une chambre que cela lui plaise ou non.

- Certes, les âmes perdues ne manquent pas, mais je ne suis pas certain de pouvoir cacher éternellement. D’autant plus que…

Il hésita un instant. Était-ce une bonne idée de médire dans le dos des courtois voisins même si leurs activités étaient connues de tous ? Le vieil aristocrate décida que cela n’avait aucune importance, puisqu’une grande partie desdits voisins devaient se promener cagoulés en ce moment et tirer sur tout ce qui bougeait.

- D’autant plus que je compte parmi mes voisins directs les Callahan. Vous connaissez les Callahan ? Vieille famille de Radcliff, mes voisins depuis plus de 20 ans maintenant, j’ai quasiment vu la fratrie grandir. Ils sont nombreux et pas très fréquentables, ce qui risque d’être assez problématique.

Phil ne s’en doutait pas encore, mais la semaine qui suivait, une vieille connaissance allait lui envoyer un message pour accueillir une jeune transmutante en fuite, proposition qu’il devait accepter bon gré mal gré puisqu’assez urgente.

Mais Loeven s’était déjà laissé tomber sur le lit, terrassé par la fatigue, ce qui fit sourire Phil. C’était sans doute suffisant pour une journée bien chargée.

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