Quelques secondes, puis il est là. Il me prend dans ses bras, et un soulagement intense me prend. Il est le seul à m'appeler comme ça, et entendre mon prénom de sa bouche me fait du bien. Je préfère pourtant nettement Iseult, mais il a sa manière à lui de dire Megan. Je me perds. Je sais bien qu'il est remarié, je ne devrai pas profiter de sa gentillesse. Il est trop gentil d'ailleurs. C'est moi qui l'ai quitté, et il est toujours là pour moi. Je suis un monstre. Pourquoi ai-je fait tant de mal ? De toute façon, mes sanglots m'empêchent de dire quoi que soit. Et même une fois que je ne pleure plus, il me faut un moment pour me calmer et reprendre mon souffle. Ce n'était pas la première fois que je pleurais dans ses bras. Au contraire, pleurer de joie ou de peine, il a déjà dû affronter ça avec moi. Mais c'était la première fois que je pleurais dans ses bras sans être sa femme.

- Qu’est-ce qu’il se passe vraiment ? Il s’est passé quelque chose ?

Il est si tendre avec moi, que ça ne fait qu'augmenter ma culpabilité. Je ne sais pas si c'est mon pétage de plomb ou les anti-dépresseurs qui font déjà effet, mais je me sens soudainement épuisée, comme vidée de toute force vitale. C'était un peu le cas ces derniers temps déjà, en fait. Même mon boulot n'arrivait plus à me donner l'envie, la force. Quelle loque. Je déteste me savoir comme ça. Surtout que j'ai l'impression que la solution à tous mes malheurs se trouve dans cette pièce. Mais qu'elle ne m'est plus disponible... Il m'aide alors à me relever, et je tente de me reprendre, bien que je fasse pâle figure. Il ne mérite pas de me voir dans cet état, je devrai me montrer forte pour lui.

J'aimerai lui poser des questions sur son remariage. S'il compte rester longtemps à Radcliff. Lui confier mes peines, ce pourquoi j'en suis vraiment là aujourd'hui. Se souvient-il, qu'aujourd'hui jour pour jour, cela fait 365 jours que nous sommes officiellement divorcés ? Un an que j'ai ces regrets qui me bouffent la vie. Mais j'avais gardé la tête hors de l'eau grâce à mes amies, mon frère, mon chien, mon travail... aujourd'hui, il ne reste plus que mon bébé, mes amis sont loin, mon frère aussi, et je ne me reconnais plus tellement dans mon travail. Peut-être est-ce parce que je suis nouvelle, et que l'équipe avec qui je travaille ne m'emballe pas plus que ça pour l'instant ? J'aimerai tellement passer la nuit dans ses bras. Ne craindre aucun cauchemar parce qu'IL serait là. Mais il est marié, bon sang. Mais toujours est-il qu'il est tard, et que je ne sais pas si sa voiture passerait inaperçue la nuit. Je tente de parler distinctement, même si je suis encore prise de soubresauts lorsque je lui propose:

- Excuse-moi Isaac. Est-ce que... tu veux manger et dormir ici ? Le couvre feu a sonné... je ne sais pas ce que tu fais dans ces moments là ? Si tu rentres quand même chez toi ? Tu devrais peut-être... prévenir d'éventuelles personnes qui t'attendent...

Voilà, c'est dit. J'ai la gorge qui se noue et je baisse à nouveau les yeux. Mais j'ai l'impression que ça va tout de même mieux. Peut-être est-ce la présence d'Isaac, ou ces foutus médocs. Ou l'addition des deux. Et s'il restait dormir ici ? Qu'est-ce que je ferai ? Est-ce qu'on en viendrait donc à parler de nos problèmes respectifs ? C'est tellement surréaliste, je ne sais plus où on en est tous les deux. Si, lui, je sais où il en est. Il est marié.