« Fais de toi un homme. Tiens toi droit. Porte le costume avec droiture et classe. Ne baisse pas les yeux. Jamais. Tu es un Vasyklo. On ne baisse pas les yeux, chez nous. »En fait, tout ça n'est qu'une histoire de famille et des parents trop exigeants ? Oui, à peu près. Personne n'a parlé d'originalité.
C'est comme ça, chez les Vasyklo. C'est cette fierté mal placée, cet orgueil qui les guident. Et ils n'en ont pas honte. Ils jouent sur la perfection, sur l'idéal, la beauté et l'influence. On est pas laid chez les Vasyklo. Non, on est beau, séduisant et on le sait surtout. On le sait et on l'utilise. Les premiers mal sont destinés à servir l'entreprise familiale, tandis que les femelles contraintes à des mariages arrangés, profitant au finance de la famille. C'était comme ça. Tout le monde s'y pliait.
Sauf Yulian. C'est comme ça. Il est né ainsi. On ne le changera pas. L'ordre n'est pas pour lui. La soumission encore moins. Alors pendant des années, il a servi le bon intérêt de sa famille. Il a porté le costume, la coupe droite et lisse, rasé de près. Il a appris tout ce qu'il a savoir... Et très franchement, il était plutôt doué dans son domaine.
Si son père le voyait aujourd'hui. S'il savait ce que son fils faisait des connaissances qu'on lui a apprise. Il revend de la drogue. Et il est plutôt bon à ça. Parce que le business est le business, et qu'il est un Vasyklo, à croire que ça lui sert enfin à quelque chose.
Yulian n'était pas fait pour cette vie.
Parce qu'il ne peut pas mettre un frein à sa bouche. Il ne peut pas suivre les règles quand il sait qu'elles sont injustes. Il ne peut pas... changer qui il est.
Parce que Yulian aime la musique, l'art et les cigarettes. Il aime dessiner sur son corps et s'affirmer. Il ne peut pas être droit, il ne peut pas rester dans le bon droit chemin.
Et ça, aucun membre de sa famille ne l'a jamais compris. On a essayé de le modeler, de le reformer... mais c'est un esprit libre, c'est comme ça. Alors on l'a rejeté. Après l'avoir frappé.
Peut-être que c'est de là que vient toute sa colère, toute sa haine contre le monde et sa frustration. C'est peut-être pour ça qu'il a besoin de se droguer autant. Pour échapper et oublier. Oui, peut-être.
une cigarette. un joint. une ligne. allez, donne moi plus
Aujourd'hui, il a revêtu le costume. Parce que le business est le business. Et quand on veut faire les choses bien, on s'habille bien, c'est comme ça. Le costume, il le porte bien et aussi contradictoire que ça puisse paraître, il fait autant parti de lui autant que les arabesques sur sa peau.
Il vend une valise de drogue en 10 minutes. Il est doué. Tout le monde le sait. C'est comme ça.
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Il enchaîne les coups les uns après les autres. Sans pitié. Sans hésitation. Avec force et agilité. Il frappe encore et encore, si bien que bientôt, il ne sait même pourquoi il frappe. Mais le visage ensanglanté de son adversaire, lui rappelle toute la haine qu'il lui porte. Alors il continue de frapper et de la fracasser. Jusqu'à ce que ses propres poing saignent et lui fasse mal. Puis on vient les séparer. Yulian a gagné. Yulian gagne toujours.
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Le noir l'entoure. Les cris. Le sang. Les coups de feu.
Les images défilent devant ses yeux, aussi vive et nette qu'une film. Pour les autres ce n'est qu'une photo. Pour lui c'est comme une pellicule d'une de ses vieilles caméras. Il voit tout, sent tout, entend tout. Comme s'il était juste là.
Il pose sa main sur sa nuque. Cet homme est la seule ancre qui le ramène à la réalité. Il croise son regard concerné et inquiet. Un peu. Peut-être.
Et, Yulian se laisse aller. D'un geste lent, il pose sa tête contre le ventre de l'homme. C'est sa seule raison de revenir à la réalité. La seule chose qui le pousse à choisir ce cauchemar plutôt que l'autre.
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Il le dessine, en le regardant de ses yeux brûlants et chaud. Il le dessine, retrace les courbes forte et fine de son corps. C'est la première fois que Yulian se sent aussi aimé, aussi désiré. Mais c'est un premier amour. Et les premiers amours ne durent jamais. Ils s'en vont toujours et disparaissent comme la fumée d'un joint... Yulian n'en parle jamais parce qu'il n'y a rien à dire. Vraiment rien dire. Il n'y pense même pas.
C'était son premier amour, sa première fois. Il l'a dessiné et quand son père a appris qu'il était gay, il l'a fracassé contre un mur.
Yulian n'a plus jamais revu son premier amour.
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« PUTAIN DE BORDEL DE MERDE ! FENRIR JE SUIS SOUS LA DOUCHE ! »C'est une belle maison, une belle grande et immense maison, rempli de luxe et d'argent. Ça lui rappelle beaucoup la maison de son enfance. C'est peut-être pour ça qu'il la déteste autant. Parce qu'outre être son donjon, sa prison, elle est le souvenir constant d'un passé qu'il veut oublier.
« Autant de putain d'argent dans cette baraque et on peut pas prendre une douche et faire la vaisselle en même temps. Bravo, Fenrir, Bravo. » crache Yulian près de lui, encore plein de savon, une serviette autour des hanches.
Fenrir le regarde de ses yeux noirs et coléreux.
Ça va mal finir.
Ça finit toujours mal, entre eux de toute façon.
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Vous ne comprenez rien ? C'est trop confus ? Trop flou ? Ca ne ressemble à rien ? Ca n'a ni queue ni tête ? Aucun sens ? Aucune vie ?
Eh bien, bienvenue dans la vie de Yulian Noah Vasokly, Mesdames et Messieurs.