Just one more try, I know that I can fix it

Échouer, n'était pas du vocabulaire du brun. Jekyll balaya plusieurs dossiers, observant des photos, des notes alors qu'il ne cessait de faire tourner en boucle les enregistrements de ses entretiens avec un patient. Jek' était un perfectionniste, celui qui ne se laissait jamais aller et qui calculait n'importe quel pas, et n'importe quel risque lorsqu'il décidait de venir en aide à un patient. Le brun voulait un cabinet réputé plus qu'un cabinet qui possédait les grosses têtes de la ville : il était bien plus honorable de sauver la vie d'un pauvre bipolaire étant à l'origine du massacre d'une famille digne de Amytiville, que de s'occuper durant des années des problèmes de morale des minables politiques qui croupissaient dans l'hypocrisie et le mensonge. Le brun savait donc choisir avec minutie ses patients, pour la bonne prospérité de son cabinet. Malheureusement, le cas présent, posait problème : Calvin, mais il était nommé monsieur Bennett dans la plupart des cas. Le brun savait que son patient était plus âgé et Jekyll avait pour habitude d'instaurer une distance entre lui et ses patients suite à quelques dérapages, dont il préférait taire les vices. Ce fut la mémoire du médecin qui sembla enfin trouver une solution, bien que son hypermnésie semblait défaillir de temps à autres, Stevenson se reposait souvent sur elle pour obtenir des détails, parfois futiles. Pour la première fois de sa carrière : le brun quittait totalement la théorie pour embrasser la pratique. Un risque, le patient pourrait y perdre bien plus qu'il ne pourrait y gagner. Jekyll soupira, venant s'enfoncer dans sa chaise, alors qu'il fixait le plafond, il était tard, enfin il était même désormais trop tôt. Néanmoins, après plusieurs heures de réflexions, à récolter des photos, des informations et à venir rendre le dossier complet autant qu'il pouvait l'être, le médecin était face au mur de son incapacité, et alors, il regrettait son don. Ce n'est qu'un fixant une photo sur le coin droite, puis celle trônant sur le sol qu'il semble brutalement plisser les sourcils. « конечно  » Évidemment, en russe. Le brun vint à se saisir des deux clichés, tous deux représentaient un même endroit, mais sur un créneau horaire différent : il était temps de sortir du cabinet, et cela, se produirait dans moins de deux jours.

Ce n'est que deux jours plus tard qu'il se retrouva dans ce fameux appartement, il avait toujours cette posture qui venait rappeler qu'il était le médecin, l'enregistreur glissé dans une main tandis qu'il tenait son dossier dans l'autre main, en laissant le patient venir observer son passé. Tout ce qui allait se produire lors de cette séance, était expérimentale, le brun ne garantissait aucune réussite et il ne pouvait vanter les mérites d'un test aussi grotesque. Monsieur Bennett n'était pas convaincu, et cela n'était pas surprenant. Jekyll, lui se promenait avec un visage confiant, parce qu'il ne pouvait qu'avancer, même si cela pouvait ressembler à une tentative minable pour ne pas perdre son patient, qui pourrait se tourner vers un cabinet plus réputé que le sien. Stevenson connaissait ses patients, tous, et c'était pour cela qu'il parvenait à tirer son épingle du jeu : lorsqu'il croisait un patient dans la rue, il pouvait citer son nom, demander des nouvelles de la femme de ce dernier ou même de son dalmatien venant de fêter son troisième anniversaire. Il ne comptait donc pas, abandonner, cette fois-ci. Jekyll écouta avec attention, son patient, prenant en compte ses doutes et ayant conscience qu'il ne pourrait pousser l'expérience que si Bennett était volontaire, sinon, cela ne valait pas la peine.  « Disons que je cherche une alternative à nos séances classiques, monsieur Bennett. Je pourrais vous diriger vers un hypnotiseur ou même une voyante, cela pourrait très bien éveiller en vous une idée, aussi floue soit-elle, mais je considère que les risques sont trop grands pour votre perception de la réalité, et je ne crois pas, aux voyantes.  » Le brun esquissa un léger sourire face à sa remarque, venant ouvertement de critiquer des femmes qui se disaient dotées d'un don alors que la plupart du temps : ce n'était que de la chance par des vérités générales. Le jeune homme observa son patient quelques secondes en haussant les épaules.  « Avant de réellement commencer, j'aimerais que vous me disiez si cet endroit provoque une réaction chez vous. N'importe quelle réaction, vous pouvez très bien me dire que le parfum de la pièce était celui de lavande, ou tout simplement que l'ampoule était grillée à l'époque. Si cela ne provoque rien chez vous, ce n'est pas grave. » Jekyll ne visait pas une révélation, mais quelques détails, et rien de plus.

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Vaurien, voleur, et bien d'autres mots péjoratifs étaient les définitions d'un psychologue dans l'idée générale. Le brun savait que sa profession n'était pas aimée, et il ne pouvait pas se résoudre à faire la défense de son métier. Jekyll savait qu'il ne pourrait convaincre les sceptiques, que son métier, avait de la valeur contrairement à toutes ces diseuses de bonne aventure. L'ancien mutant avait néanmoins plus d'affection pour l'hypnose, en effet, Jekyll savait qu'il était possible de convaincre l'esprit de tout et n'importe quoi. Il en fut longtemps l'auteur, même s'il s'agissait d'une mutation, cela ne signifiait pas pour autant que son acte était différent. Le jeune homme regrettait de ne pas pouvoir se glisser dans la tête de son patient, cela aurait porté ses fruits avec certitude, mais il devait se faire à l'idée de ne se baser que sur ses compétences. Calvin devait y mettre du sien, et malheureusement, cela était le plus gros du travail : l'idée de retrouver son passé ne semblait pas le hanter, et donc, il ne mettait pas réellement de la conviction pour retrouver sa mémoire. Un reproche ? Absolument pas. Une simple observation, qui changeait la donne dans son traitement. Le médecin écouta alors avec attention les mots de son patient sur un morceau de papier, simplement quelques expressions. Les frères du jeune homme était un vecteur néfaste autant qu'il était bénéfique : une influence pouvait perdre le patient et égarer sa propre perception des choses au profit de celle d'autrui.  « On pourrait toujours se diriger vers vos anciens voisins, mais je pense qu'il est temps de creuser votre passé de vous-même. Certes, pour reconstruire sa mémoire il est nécessaire de passer par autrui pour les fondations, mais les détails sont en vous et non dans le regard des autres. Le cerveau est un muscle, il faut le travailler, et je sais que cette séance ne sera pas une perte, puis cela offre un autre décor que mon sofa. » Jekyll instaurait certes une distance avec ses patients, mais il était hors de question de faire naître une relation perverse de dominant sur le dominé.


Jekyll se dirigea vers la fenêtre pour observer l'immeuble d'en face, les volets, déposant son regard un peu partout tout en continuant d'écouter son patient. Jek' devait mettre au point une tactique pour parvenir à sortir le jeune homme de son flou et mettre le doigt sur quelques éléments. L'appartement n'était qu'un premier élément, il serait facile de tenter de lui faire remonter des souvenirs dans l'immeuble, ou même une fois à l'entrée du bâtiment. Le ténébreux esquissa un léger sourire face à la remarque de son patient qui semblait parler de cela avec humour. Le plus ironique était que Jekyll connaissait une jolie mutante télépathe : Salomé Callahan, même s'il ne savait rien du secret de la brune.   « Si vous voulez je peux chercher un mutant télépathe, ou alors un voyageur temporel, cela certainement très perturbant pour vous autant que pour moi.   » Le brun se retourna en direction du jeune homme qui posait son téléphone sur le plan de travail. Jekyll le nota en silence avant de redresser son regard vers le patient avec un sourire en coin. « Si vous êtes d'accord, j'aimerais tenter une expérience. Vous allez fermer les yeux et je vais tenter d'éveiller en vous des bruits familiers, tester vos réactions et tout simplement tenter de faire remonter un souvenir. J'espère que l'environnement va faire remonter des habitudes en vous. Au début, vous serez passifs, et ensuite vous allez interagir avec l'environnement. Vous êtes d'accord ? » Il fallait tout essayer, même ce qui semblait ridicule.

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Tout ou rien, malheur que de croire que les mœurs auraient assez de coeur pour ne pas se jouer des leurres. Jekyll proposait, innovait, se risquait plus que nécessaire dans des théories qui ne valaient rien. Il jouait avec des hypothèses, des tentatives vaines : le brun désirait jouer dans les ténèbres, son univers. Les rêves étaient son terrain de jeu, et désormais, il ne cessait de tenter de venir faire revenir ce dernier dans le monde réel pour parvenir à modeler l'univers selon ses désirs. L'ancien mutant ne se mentait pas sur le pourquoi de cette tentative : aider le patient autant que se prouver qu'il n'était pas totalement rouillé lorsqu'il était question de l'inconscient. Jekyll devait écouter, mais il n'était plus l'acteur qu'il fut durant des années, et oui, cette idée portait un goût acide à ses lèvres. Le ténébreux n'était néanmoins pas là pour recouvrir sa gloire passé, nullement, il voulait épouser la vérité et non pas modifier cette dernière comme il en fut longtemps le profanateur dans sa jeunesse. Le jeune homme ne se moquait pas de son patient, avec son véritable désir de lui faire recouvrer la mémoire envers et contre la société. Calvin, était, le seul obstacle. Il n'était pas difficile d'observer son comportement et son désir anxieux de recouvrer la mémoire. Cela était naturel, mais chez lui, cela semblait se porter sur une peur plus sincère. Jekyll se demandait, s'il n'avait pas déjà conscience de ce qu'il fut par le passé, ou alors, de ce qu'il fut dans le regard des autres. Le psy ne pouvait que faire des suppositions, mais il n'allait pas s'écraser, il pouvait en jouer et il le ferait. Calvin n'était pas un homme insurmontable, et le passé du brun prouvait qu'il était parfois plus intéressant de s'attaquer à ceux qui semblaient au bord du gouffre. Ce gouffre, qui pouvait très bien se révéler plus proche que le psy ne l'imaginait, mais pour le vérifier : il fallait avancer.

Le brun proposa une option, qui laissait à désirer, et bien évidemment : monsieur Bennett refusa l'offre. L'être humain était intéressant, puisque facilement manipulable. Non ? Cela n'avait rien de surprenant et cela était toute l'idée. En proposant une expérience trop forte, qui entraînerait nécessairement un refus, la véritable proposition, qui serait moindre, semblerait simple et donc il serait plus simple pour le patient d'accepter cette deuxième expérience. Jekyll n'en était pas à son premier cas, et l'amnésie était une chose qui ne retirait en rien le comportement primaire d'un être humain. Le jeune homme inspira alors en venant se déplacer dans l'appartement, ne quittant jamais son patient du regard, pour que le contact soit rompu uniquement lorsque le patient le voulait, cela indiquait un certain type de relation. Si Calvin était de nature à utiliser l'humour, Jekyll lui, ne pouvait pas se permettre d'user d'humour pour soigner un homme dont le passé semblait être digne d'un trou pour une tombe. « Je comprends monsieur Bennett. » Affichant un sourire pour ensuite mimer pendant plusieurs secondes la réflexion, prétendant soigneusement qu'il était en train de réfléchir à une solution en venant porter son crayon contre ses lèvres, tapotant celle supérieure d'un geste doux. « Je vais donc vous proposez une autre expérience : Vous allez prendre la direction de la fenêtre, ouvrir cette dernière et fixer le monde extérieur sans jamais faire marche arrière, ni même détourner le regard. Je ne vous prive pas de vos sens, mais je vais simplement fixer votre regard sur un point pour que votre corps réagisse à des interactions sonores. Cela serait-il plus envisageable monsieur Bennett ?  » Jekyll prenait un risque, sinon, il devrait totalement renverser l'expérience et provoquer des réactions d'une autre façon.

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Se salir les mains d'une façon aussi stupide, venir plonger ses phalanges contre la médiocrité de la mise à mort d'une façon aussi débile que typiquement cinématographique. Le ténébreux ne comptait pas faire du mal à son patient, se contentant de tenter l'inacceptable pour les idiots, tandis que lui, il ne pouvait que croire en ses convictions et ses instincts. Le brun avait assez de force pour parvenir à venir au même type de manipulation dont il fut l'auteur dans les rêves, les fantasmes et les cauchemars. Peut-être tout cela n'était qu'un test dont il était la victime, après tout, ce besoin maladif de retrouver cette capacité magique dont il était le maître, cet univers fragile dont il était la terreur. Le psychologue ne pouvait pas se vanter de profiter des effets négatifs du vaccin : il n'avait pas la moindre excuse pour aller mal. Tous les effets néfastes étaient désormais ancrées dans sa personnalité et il ne cessait de s'en vanter par la force des choses. Le jeune homme allait donc jouer  avec ses fragments, ceux de son passé, tous ces souvenirs reniés dont il était le triste prédicateur. Monsieur Bennett ne serait pas une victime, puisque Jekyll était dans l'incapacité la plus totale de lui faire du mal, de venir lui arracher les souvenirs par la force. Il n'était que le volontaire d'une triste expérience, qui porterait peut-être ses fruits. Au pire ? Cela ne changerait rien à sa vie. Il voulait se construire avec son passé, logique, mais le brun, avait renié ses premiers souvenirs pour se bâtir une forteresse d'ivoire, pour guider sa propre vie vers un dénouement joyeux, grand et spectaculaire. Vivre avec ses racines, n'aurait été qu'un poids de plus qui l'aurait sans doute guidé vers la médiocrité profondément ancrée dans le dénouement tragique du rêve américain inachevé.

Le brun se dirigea finalement vers la porte d'entrée qui se trouvait dos à son patient, et le jeune homme afficha un sourire en coin. « Je ne compte pas faire cela, promis, vous repartirez par la porte principale et nullement pas la fenêtre. » Le jeune homme laissa alors cette dernière s'ouvrir, créant un léger courant d'air qui traversait la pièce principale. Jekyll soupira quelques secondes. « Je vais conserver un silence, vous pouvez parler à haute voix lorsque vous le désirez. J'espère sincèrement vous aider monsieur Bennett. » Soupirant tristement, le brun vint à pousser la porte pour la faire violemment claquer, créant un écho dans la pièce, qui recouvra bien vite les mélodies du monde extérieur qui se glissaient par la fenêtre. Une tentative de plus.

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