C'était la même ville que celle qu'il avait connu et pourtant tout lui semblait différent, comme faisant partie d'un monde véritablement autre. Un monde duquel il ne possédait pas les clés et qu'il n'aurait jamais. Les gens avançaient mais lui restait éternellement sur place. Il ne savait pas ce qui avait changé ou plutôt il ne voulait pas l'admettre. Car cela ne ferait que raviver une fois encore la douleur que de ramener à la surface ce qui le tuait à petit peu. Radcliff n'était plus sa ville, même cela il avait réussi à le lui enlever. Toutefois, il valait mieux se trouver ici que chez lui. Parce que sa maison n'était plus pareille, parce qu'il devenait fou à force de les observer, de les voir veiller sur les moindres de ses gestes. Etrangement, il se sentait plus incapable depuis qu'il était rentré qu'au centre. Parce que là-bas, il n'était un parmi d'autres alors qu'ici, il devient cette cible, ce pauvre Noeh. Un fou qui n'a rien trouvé de mieux que de passer à travers un balcon, il savait bien que certains s'étaient laissés aller à cette version. Qu'ils avaient accepté cette vision tordue des choses, parce que la vérité était pire, parce que personne n'avait besoin de la connaitre. Parce qu'elle éveillerait encore plus de soupçons sur les actes qu'avait commis sa soeur. Alors, il passerait pour le suicidaire ce qui finalement il avait peut-être été. Tout était toujours confus dans sa tête et jamais il ne savait ce qui l'avait poussé à agir de la sorte, à préférer la mort à la vie. Oui, tout n'était qu'un flot continu de pensées qui s'entrechoquaient sans arriver à trouver un véritable sens. Se déplacer dans les rues de Radcliff était pour lui un véritable défi qui ne faisait que se renforcer par les regards que lui jetait. Noeh n'était pas à son aise, il ne le serait sans doute plus avant un long moment. Ce qui était certain c'est qu'il sentait de plus en plus cette impression de trop le saisir. Celle qui lui indiquait que le monde autour de lui devenait bien trop pesant, qu'il n'arrivait plus à le supporter. Noeh avait besoin d'espace, d'un endroit plus calme et c'est de la sorte qu'il débarqua au snack un moyen pour lui de retrouver son calme. Non, Noeh ne voulait guère faire une crise de panique en pleine rue et de la sorte inquiéter les passants. Non, il n'était pas fou. Non, il n'était pas dépressif il était juste dans son monde. Un monde dans lequel il n'avait pas entendu approcher la serveuse ce qui ne manqua pas de le faire sursauter. C'était le problème depuis Adriel, il avait perdu ce contact avec les autres, cette facilité lui faisait maintenant énormément défaut, bien trop pour qu'il puisse redevenir celui qu'il était autrefois. Son regard se releva doucement vers la serveuse, quelqu’un qu'il ne connaissait bien et finalement cela lui faisait du bien Parler n'était toutefois pas ce qui avait de plus évident, parce que cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait plus fait de choix ou plutôt que quelqu'un l'avait écouté. Oui, pouvoir décider était quelque chose dont il n'avait plus l'habitude. Choisir parmi tout ce qui était proposé était bien loin d'être évident pour lui et il avait bien du mal à voir ce qui pourrait le mieux lui convenir. « Euh... Euhmmm. » Non, il 'y arrivait pas. « Qu'est-ce que vous pendriez si vous étiez à ma place ? » Personne n'était à sa place, personne ne le serait jamais mais rien qu'une fois, il avait besoin de ne pas choisir ou plutôt de se laisser le temps de revenir à une facilité dans ses choix ce qui n'était pas prêt de pointer le bout de son nez. Alors, il attendait de savoir si sa réponse ne paraissait pas comme trop étrange pour la serveuse. Cette dernière l'étonna à son tour, lui demandant s'il était nouveau. Cette remarque le fit rire de l'intérieur, parce que finalement ce n'était pas si mal d'être pris pour un nouvel habituant. De ne pas être celui qui saute du balcon mais juste soi même si ce soit n'était plus vraiment aussi parfait et conséquent qu'avant. « Oui et non, je vis ici depuis longtemps mais cela fait quelques mois que je ne suis plus revenu. » Il confiait une partie de son histoire sans ne nullement donner les clés pour la comprendre. Parce qu'il n'avait pas envie de devenir ce que son histoire faisait de lui. Il désirait rester dans cette vision d'inconnu qui le plaisait tant. « Mais vous vous devez l'être puisque nous ne nous sommes jamais rencontré. » Ce n'était même pas une question, juste une affirmation donnée sur ton qui n'avait pas vraiment d'émotions. Parce qu'il n'arrivait toujours pas à les gérer. Il avait besoin de temps, d'espace et peut-être de renouveau.