Y’a son nom inscrit à l’encre noire qui semble presque te narguer. Saül. C’est étrange comme prénom. Saül. Doucement, tu fais glisser ton doigt sur la feuille avant de relever les yeux vers ton frère. Il est concentré sur sa propre feuille. Près à démonter son mutant. Il ne reste plus beaucoup de temps avant l’assaut. Et toi, ça t’angoisse. T’as pas envie. T’as vraiment pas envie de participer à ça. A ce massacre. Mais tu te forces. Parce que c’est ce que tu es censé faire. Tuer des mutants.

Et ça s’active. Tout autour de toi. Ca s’active. Les coups de feu résonnent tandis que tu te faufiles jusqu’à la Rose Rouge pour débusquer ton mutant.

Alors t’es là. Au milieu de cet univers qui te correspond si peu. Autour de toi, le monde de la nuit s’active. Les gens dansent avec chaleur, se trémoussant tout contre toi. Ca t’fait rougir un peu. Cette façon qu’a cette fille à onduler contre toi. A glisser ta main sur ton corps si peu excité par sa présence.
Puis finalement, tu le vois. Après de longues minutes. Tu le vois passer dans une autre salle. Alors tu repousses finalement la fille pour te diriger vers lui. Déterminé. Saül. Tu y arriveras cette fois. C’est sur. Tu y arriveras.

« Vous ne pouvez pas entrer » Tu hausses les sourcils. « Quoi ? Pourquoi ? Il vient d’entrer lui ! » Il te fixe avec ce regard froid. Ca te fait frissonner. Sa façon de te regarder. Alors tu lèves les mains. Comme un enfant pris en faute et tu recules. Il faut que tu trouves un autre moyen d’entrer. Une porte de derrière. Alors tu ressors afin de te glisser vers l’arrière du bâtiment. Et la chance semble te sourire puisqu’une personne sort par la porte, te permettant de la bloquer afin d’entrer dans cette pièce secrète.

T’as les yeux écarquillés. Là. Comme un gamin devant les vitrines de Noël. Devant toi, il y a des femmes à moitié nues qui dansent sensuellement. Puis des hommes aussi. Ton regard se pose sur ta cible. Il fait doucement glisser son tee-shirt au sol. Et toi tu clignes des yeux, totalement absorbé. Tu ne fais même pas attention aux jambes de cet homme qui trainent sur ton chemin, trop absorbé lui aussi par la danse d’une jeune fille. Et tu te ramasses. Lamentablement. Tous les regards se tournent vers toi. Heureusement, la salle est sombre et il est difficile de voir à quel point tu rougies. Bonjour l’entrée discrète. « Hum... Pardon... »

Honteux, tu te relèves avant de te diriger vers Saül, ne cessant de le regarder.

Doucement, tu t’approches de lui. Tu observes cet homme un peu dégueulasse qui glisse ses mains sur son corps sans une once de gène. Tu trouves ça étrange. Tout ça. Tu ne comprends pas très bien pourquoi est-ce qu’il se laisse faire. Il n’a pas l’air très heureux.

L’obscurité de la salle te permet de te cacher. Ce n’est pas plus mal. Sans un mot, tu sors ton canif de ta poche, près à l’ouvrir quand le bon moment viendra. Tu te répètes les mots de ton frère inlassablement dans ta tête. Les mutants sont le mal incarnés. Ils ne sont là que pour détruire tout ce que nous aimons. Il a raison après tout. Sans eux, ta maman ne serait pas morte. Elle serait toujours là. Près de toi. Alors, tout doucement, tu murmures des mots pour elle « … j’le fais pour toi maman … pour te venger … » Ca te donne du courage. Ca te donne la volonté de t’avancer et d’ouvrir la lame, près à l’enfoncer dans son corps trop peu vêtu.

Y’a ton cœur qui bat fort dans ta petite poitrine. Tu regardes un instant autour de toi pour vérifier que personne ne fait attention à toi avant d’ouvrir le couteau afin de poignarder ton mutant. Mais la lame n’atteint pas la cible. Au lieu de s’enfoncer dans son cœur, elle se contente de lui entailler le dos. Violemment. Son cri résonne dans la salle et du recule brusquement, tremblant. Tu te retrouves là. Comme un con. A ne plus savoir quoi faire. Partir. Courir. Ou finir ce travail que tu as si mal fait. Tu es plutôt doué pourtant normalement. Mais c’est ton inconscient qui a parlé pour toi. Tu ne voulais pas vraiment le blesser ce gamin. Alors ta main a dévié. Pour ne pas le tuer. Pour le protéger de ce besoin débile de rendre ton frère fier.

Finalement, tu arrives à sortir de ta torpeur. Difficilement. Alors tu fuis. Tu fuis vers la sortie pour tenter de t’en sortir indemne. Tu t’en veux. D’être aussi minable. D’être aussi incapable de tuer un foutu mutant. Pourtant, il était là. Juste devant toi. Tu n’avais pas grand chose à faire. Et même ça, tu l’as raté. Tu te sens nul. Tellement peu digne de ton frère. Il te détesterait s’il savait. S’il voyait à quoi point tu es différent de lui.
Tu tentes encore de fuir lorsque tu commences à ressentir ce besoin intense de te laisser aller contre un garçon. Ce besoin incontrôlable.  Insatiable. Alors, sans trop réfléchir, tu viens te presser contre cet homme. Là. Près de toi. C’est comme si tu oubliais brusquement ta timidité. Ton manque cruel d’expérience pour t’égarer contre ses lèvres. Il est beau. Horriblement attirant. Et tu sens que tu ne peux pas résister. C’est comme si tu étais fais pour ça. Alors tu te mets sur la pointe des pieds, glissant ta main sur sa nuque pour mêler ta langue à la sienne.
Tu ne sais pas pourquoi tu fais ça. Vraiment ça. Ca te ressemble si peu. Et pourtant, t’es là, à onduler ton petit corps d’adolescent contre son bassin. Tu ressens cette douce chaleur. Ce besoin de son corps contre le tient. Alors tu glisses ta main sur son entre jambe. Le caressant de façon appuyée.
Tu rougies un peu de tes propres gestes. Sans vraiment comprendre d’où vient ce sentiment de désir étrange et pourtant.