-james, penny & elspeth-

You like to think you're never wrong

Son assurance sur ses deux jambes retrouvées, Elspeth avait retrouvé sa place au garage bien qu’elle ne l’ait jamais vraiment perdue. Alta avait pourtant insisté pour qu’elle ne recommence pas tout de suite à s’occuper de la réserve et jamais trop longtemps debout ou penchée sur une voiture ou sous une voiture. Bref, il veillait comme… comme une espèce de grand frère casse pied protecteur. Elle n’arrivait pas à le voir comme un père, il n’en avait franchement pas la tenue. Alors maintenant qu’il commençait enfin à lui lâcher la bride… elle essayait de cacher à tout prix que sa jambe, c’était pas encore tout à fait ça, que ces foutus os, même ressoudés, pouvaient continuer à lui mener la vie dure. Il paraissait que c’était normal et un kiné ne pouvait pas le lui confirmer vu qu’elle n’avait jamais pu le payer, gardant bien ça sous silence vu que c’était son problème et celui de personne d’autre.
Tout ça, c’était la raison pour laquelle elle était toujours au garage. En s’appuyant sur une étagère à cause de ça, elle avait basculé et répandu son contenu au sol, foutant en l’air la fin de sa journée. Retardée parce qu’elle voulait tout ranger avant de rentrer histoire de ne rien laisser paraître le lendemain, Els envoya un message à Aspen pour lui dire de ne pas s’inquiéter. Depuis qu’elle avait gagné une voiture -elle n’avait jamais eu autant de chance-, il lui était clairement plus facile de se déplacer. Elle n’avait juste pas encore pu la conduire avant. Et franchement, ça lui faisait d’autant plus bizarre maintenant qu’en prime, elle vivait dans une maison. Mais, elle s’y ferait un jour…
Elle était toujours en train de ranger les différentes boîtes après les avoir vérifiées quand un type entra, comme s’il était chez lui. C’était une foutue manie ! Grayman, passe encore, elle l’avait bien pris et pour cause, il l’avait aidée, peut-être même sauvée pour ce qu’elle en savait. Mais ce type là, Els ne le connaissait ni d’Eve, ni d’Adam et il n’avait rien à foutre là. Si Alta était là, il aurait grincé des dents à la question du mec et aurait probablement répondu un peu sèchement que c’était pas le genre de la maison de faire dans l’usinage. Ce qu’elle répondit à sa façon. Quelque part, ça l’emmerdait qu’on puisse les prendre pour des guignols.

- « Pas que j’sois obligée de vous répondre vu l’heure et le panneau fermé sur la porte d’entrée mais… ça a l’air d’être des modèles d’usine d’après vous ? Comme je viens de le dire, nous sommes fermés, alors si c’est pour des renseignements, j’vous prierai de bien vouloir revenir demain. »

Rester zen. Après tout, ils avaient peut-être encore oublié de faire ce qu’il fallait en quittant le garage même si elle avait de gros doute vu la façon dont elle les avait enguirlandés la dernière fois. Ou alors, Jim comptait revenir, elle savait qu’il faisait ça de temps en temps et n’en avait jamais rien dit. Elle ne pensait même pas qu’il était au courant qu’elle savait. Il était peut-être là en toute bonne foi, mais honnêtement, elle avait de gros doute. Rien qu’à sa tronche, Els ne se privait pas de le classer dans la catégorie fouteur de merde.

Penny se sentait calme pour la première fois depuis des semaines. Depuis son arrivée à Radcliff elle n’avait pas eu beaucoup de temps pour respirer – elle n’aurait jamais pu croire que de retrouver sa famille aurait autant chamboulé sa vie. Mais ça l’avait fait, et elle doutait à présent être la même personne qui était débarquée dans le Kentucky. Ça en était frustrant, de voir à quel point ça l’avait ébranlé de rencontrer son grand-père, et puis de revoir son père – ce dernier, surtout. Elle avait encore du mal à croire ce qui était arrivé – et à quel point il avait su percer sa carapace comme personne auparavant, cette carapace qu’elle avait mis toute sa vie à construire. Elle était plongée dans l’inconnu à ce qui concernait sa famille – elle s’était donc réfugié, le reste du temps, dans ce qu’elle connaissait. La chasse. Ce monde, elle en faisait partie depuis des années et il était familier, réconfortant. Elle avait pris un nombre impressionnant de chasses depuis quelques temps – même Will lui avait dit qu’elle devrait peut-être se calmer. Mais elle n’en avait pas envie. Car traquer une cible, pourchasser un transmutant, c’était la seule chose qui parvenait à lui vider la tête. Et ça lui faisait du bien de faire son boulot, de le compléter, de débarrasser la planète d’un autre de ces abominations. Et ce soir elle était sur la trace d’un gros morceau – un qui saurait certainement la mettre de bonne humeur pour quelques temps. Mettre la main sur James Archer – ça saurait en faire quelques jaloux. Juste à l’idée, Penny en souriait à l’avance.

Il se promenait, nonchalant comme à son habitude. Ça faisait un temps qu’elle le suivait, attendant le moment opportun – mais elle en avait plus qu’assez d’attendre. Elle agirait ce soir. Elle lui suivit donc avec son agilité habituelle, réalisant à un certain moment que son trajet n’avait rien d’habituel – sans doute avait-il compris qu’il était suivi. Très bien, se dit Penny, qui comptait bien se montrer à la hauteur du défi. Elle était loin d’une amateur, elle le lui prouverait qu’il n’avait pas affaire à une débutante avant de lui planter une balle entre les deux yeux. Mais l’homme fit quelque chose à laquelle elle ne s’attendait pas – il s’engouffra soudainement dans un commerce dont les lumières étaient toujours allumées, même à cette heure tardive. Grinçant des dents, Penny débattit sur la manière d’agir – il y aurait sans doute un employé là-dedans, et donc un témoin. Puis elle haussa des épaules – elle aviserait une fois à l’intérieur. Elle n’allait certainement pas laisser Archer filer. Elle se faufila donc à l’intérieur du commerce – un garage de vieilles voitures, d’après l’enseigne – très discrètement. Elle sortit son arme, planté solidement entre ses doigts, se cacha derrière une voiture et tenta de repérer l’homme à l’intérieur. Elle le vit finalement, quelques pas plus loin, discutant avec une jeune femme blonde – l’employée, très clairement.

Pas de temps à perdre – elle avait bien envie de terminer son boulot. Elle visa donc Archer, le pistolet bien levé devant elle, et s’approcha des deux silhouettes. « Désolé d'interrompre votre petite discussion » dit-elle avec un petit sourire. « Mignon, comme choix de cachette. » ajouta-elle à l’homme tout en s’approchant, le tentant en joue. Puis, elle se tourna vers la jeune femme, lui lança un regard noir. « J’vous conseille de foutre le camp, j’suis pas d’humeur pour du dommage collatéral. »

-james, penny & elspeth-

You like to think you're never wrong

La dernière intrusion au garage, elle pouvait faire avec. La fille qui s’était pointée était pas vraiment bien dans ses chaussettes, elle avait voulu se venger sans réfléchir… ça, Elspeth pouvait le comprendre facilement. Le ressentiment était un sentiment qu’elle connaissait bien et la vengeance… disons qu’elle faisait avec comme elle pouvait puisqu’elle ne pouvait pas se venger. Le responsable du boxon dans sa vie, c’était son père et elle l’aimait. À part lui asséner des mots durs au visage, Els ne ferait jamais rien d’autre.
Mais là, l’intrusion au garage était d’un tout autre niveau. La tronche du type ne lui revenait pas et son sourire, elle le sentait pas. Et si c’était probablement vrai que le panneau était mal accroché, cette foutue porte aurait dû être verrouillée, pas ouverte ! S’il y avait une chose dont elle était certaine, c’était ça. Autrement dit, soit les gars avaient oublié de fermer, soit ce type l’avait rouvert. Dans les deux cas, ça allait barder.

- « Je serai ravie d’en faire part à mes collègues. Maintenant, si vous voulez bien m’excuser… » Dégagez du garage ! Mais elle ne pouvait pas être aussi virulente.

Seconde intrusion de la soirée… et ça commençait à devenir redondant et très agaçant. Elle allait lui en foutre des dommages collatéraux. Et si Elspeth fit mine de s’éloigner réellement, ce ne fut que pour revenir avec un marteau de carrossier dans une main et quelque chose de tout aussi lourd dans l’autre, qu’elle s’empressa de jeter au milieu des deux personnes qui avaient visiblement décidé de se fritter dans le garage.

- « Si vous voulez vous faire la peau, allez le faire dehors et pas dans le garage ! Allez régler vos putains de merde ailleurs qu’ici ou je jure que la prochaine fois, c’est vos tronches que je vise ! »

Ça n’était pas prudent, elle pouvait bien le concéder. Mais franchement, qu’ils aillent donc régler leur problème ailleurs. Elle n’avait rien avoir dans leur connerie. Mutant, hunter, elle n’en avait rien à faire. C’était pas son problème et d’ailleurs, il y avait trop peu de gens à son goût qui mesuraient les conséquences de ces affrontements pour les gens qui n’avaient rien demandé.

- « Dégagez de là ! Foutez-moi le camp ! Vos deux putains de camps ont déjà bien foutue assez de bordel comme ça ! »

Dans ses mots, elle sous-entendait avec un certain poids « dans sa vie ». Elle avait perdu sa mère à cause d’une maudite mutation. Ça avait gâché une grande partie de sa vie. Et même si elle n’en voulait pas à son père, toutes les mutations n’étaient clairement pas bonnes à garder. Et dans une moindre mesure, elle avait failli y passer à cause d’un hunter cinglé qui avait fait sauté la mairie. Elle avait perdu de l’argent pendant deux mois et commençait seulement à s’en remettre. Alors oui, c’était irresponsable de hurler, prise entre deux feux avec un mutant qui savait faire elle ne savait quoi et une bonne femme armée d’un flingue.