Martial | Distance is covering your way, tears your memory...
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Moira Kovalainen
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Sujet: Martial | Distance is covering your way, tears your memory... Mar 8 Mar 2016 - 22:03
Distance is covering your way, tears your memory...
Moira & Martial
Un petit nuage de poussière s'éleva tandis que je frottais les crins de mon archet avec de la colophane. C'était presque cocasse, finalement... Je possédais un magnifique violon signé par Vuillaume, une pièce de collection qui avait plus d'un siècle et avait coûté une fortune à mon fiancé lorsqu'il me l'avait offert, un superbe archet tout aussi coûteux, et un talent qui, je l'espérais, faisais de moi une remarquable instrumentiste. Et pourtant, ces trois éléments essentiels n'étaient rien sans ce petit bloc de résine que je tenais dans ma main. Sans colophane, point d'accroche sur les cordes ni de vibration, et donc pas le moindre son. Je reposais alors le petit objet sur le lit, et m'emparais de mon violon pour l'accorder. Quel bonheur d'être au calme, enfin... J'avais pris l'habitude de vivre seule, avec ma liberté, dans une maison sans vis à vis, ce qui me permettait de jouer jusqu'à trois heures du matin sans que qui que ce soit ne me fasse de remarque... Et je me retrouvais à présent en plein cœur du centre ville de Radcliff, dans un immeuble, et qui plus est en... Colocation. Car si j'avais pu avoir l'air d'une squatteuse les premiers jours, ça faisait presque trois semaines que je vivais chez Marius, et nous avions déjà commencé à nous partager les frais. Autant dire qu'avec deux ouragans sur patte comme tout, cet appartement était rarement calme. Si nous pouvions avoir l'air fatiguant, la plupart du temps, sa présence me faisait du bien. La solitude me faisait de plus en plus peur, depuis que j'avais échappé de peu à la mort, je redoutais chaque minute passée seule dans cet appartement ou dehors... Mais il fallait que j'avance, que j'oublie, que je passe à autre chose... Seulement, dès que je fermais les yeux, je revoyais ces images abominables, je sentais à nouveau l'odeur de la poudre, le goût du sang sur ma langue et la douleur... Cette douleur insoutenable, cet instant où j'avais souhaité que tout s'arrête... Je peinais encore à trouver le sommeil, et ne comptais plus les fois où Marius avait dû me secouer ou me bercer en me répétant que non, il n'allait pas me tirer dessus et non, je n'étais pas en danger. Ah elle était belle, l'irlandaise ! Terrifiée par tout et n'importe quoi, angoissée par un grincement de porte et complètement paumée...
Finalement, ça ne faisait que quelques jours que je commençais à sortir la tête hors de l'eau pour y voir plus clair, et je peinais encore à nager pour rejoindre le rivage, je n'avais au moins plus l'impression de me noyer. Je fermais alors les yeux, inspirais, et laissait le silence m'envahir. Il m'en avait fallu, des efforts, pour mettre Marius à la porte ! Cet imbécile avait repoussé encore et encore son rendez-vous à l'hôpital, et il avait finalement fallu que je lui jette des coussins à la figure en lui interdisant de revenir sans une ordonnance en guise de laisser-passer... Quel idiot, vraiment... A croire que mettre sa vie en danger était plus important ! Parfois, je me demandais comment faisait Martial pour rester aussi calme avec son frère.
Chassant tout cela de mon esprit, je posais l'archet sur les cordes et laissaient mes doigts me guider. Quelques gammes, des arpèges... Et c'est naturellement la sonate du printemps de Beethoven qui me vint. Quelque chose d'enjoué, de joyeux, de presque naïf... Mes doigts positivaient pour mon esprit, et je me laissais simplement transporter par la musique, oubliant le reste, mes meurtriers de père et de frère, mes démons, absolument tout. Il n'y avait plus que mon violon, un compositeur de génie et un petit air de Vienne. J'aurais pu jouer comme ça pendant des heures... Si on ne m'avait pas interrompue. Une clé tournée dans la serrure, une porte qui s'ouvrit... Je stoppais net mon mouvement d'archet et levais les yeux au ciel. Jetant un regard au réveil posé sur la table de chevet, il ne me fallu pas longtemps pour faire le calcul : Trente minutes, ce n'était pas assez pour que Marius aille à son rendez-vous et revienne. Je soupirais, rageant d'avance à l'idée de devoir jouer les baby-sitter chiante, et sortis de la chambre, mon violon dans une main, l'archet dans l'autre.
« Dis donc, Marius Caesar ! Tu te fous de ma tronche ou bien j'hallucine ? Je croyais que tu avais un rendez-v... Martial ? »
Je restais là, à le fixer bêtement en me demandant si j'avais la berlue. Pourtant, Marius m'avait prévenu que son frère avait un double des clés, mais... A vrai dire, je ne m'attendais pas à le trouver là. Pas maintenant. Nous ne nous étions pas parlé depuis combien de temps, déjà ? Bientôt trois mois... Et la dernière fois, ça avait été pour nous engueuler. Depuis, j'avais été vaccinée, était passée à deux doigts de mourir et... Et Marius m'avait dit que son frère était là, le jour de mon enterrement. Parfait. Joie, bonheur et confettis, ça commençait bien. J'avais laissé le cadet des jumeaux dire à son frère que j'étais bel et bien vivante, et que j'avais emménagé chez lui, puisque j'avais eu trop honte pour lui envoyer moi-même quelque chose.
« Tu... Tu es venu voir ton frère ? Il est sortit, je ne sais pas quand il sera de retour, probablement pas avant ce soir, vu que je l'ai mis dehors pour son rendez-vous à l'hôpital... Mais il a dû t'en parler... »
Ralentit, Moira, ça ne sert à rien de lui parler avec un débit de mitraillette. Je me sentais sotte, parce que j'étais à la fois ravie de revoir Martial et totalement perdue car je ne savais pas comment lui parler. A défaut, autant faire comme si notre dernière rencontre n'avait pas existée.
« Marius a dû te dire que... En ce moment j'occupe la deuxième chambre... Enfin ta chambre, il a bien insisté sur ce point. Tu vas bien ? Tu veux boire quelque chose ? »
Etait-il venu voir Marius ? Passé déposer quelque chose ? Ce n'était certainement pas pour moi qu'il s'était déplacé, aussi me sentais-je d'autant plus bête que dans les deux cas, j'étais aussi utile qu'une plante verte. Posant délicatement mon violon sur la table basse, je me dirigeais vers la cuisine pour m'y faire un thé en attendant qu'il me dise s'il voulait ou non quelque chose.
Sujet: Re: Martial | Distance is covering your way, tears your memory... Jeu 7 Avr 2016 - 21:27
Cette monotonie du retour au travail, malgré des évènements envers lequel vous vous sentez quelque indifférent. La Terre peut cesser de tourner, le monde s’arrêter au milieu de sa course, rien ne pourrait suffire à cesser cette nonchalance inattendue m’habite. Elle s’épanche et nargue celui qui tente de faire descendre cette tension bien trop palpable, quand ce dernier préférerait s’effacer à l’écart dans un coin, à l’abri des regards indiscrets. Difficile d’échapper à ce qui fait mal, à ce qui tue : difficile de réaliser à tout ce qui vous empêche d’avancer sans penser irréfutablement à ce qui fait mal. Lente et constante, le temps semble s’arrêter, durer bien trop longtemps pour se sentir hors de cette frise chronologique nous habitant. On voudrait parfois se hisser hors de notre ligne de temps pour appuyer sur ce bouton pause et respirer avant d’aller à l’encontre de ce qui nous attend au lieu de subir perpétuellement cette course contre la montre qui nous bascule et nous rattrape. Parfois on préférait même fuir dans une direction, pensant que rien ne pourra vous atteindre en filant à l’anglaise sans prévenir qui que ce soit. Tout finit par faire l’effet d’un retour dans la figure sans que vous en ayez clairement conscience ; cela vous balaie de plein fouet sans pouvoir parfois agir pour contrer le mauvais sort s’acharnant sur vous. Pizzas et pack de bières dans les mains, je me rendais chez mon frère à l’improviste, dans l’espérance de lui faire une surprise : à cette heure-là il était là, puisque je connaissais ses horaires de travail, pas de risque que je trompe !
Ce n’était pas Marius qui jouait du violon dans l’appartement, l’archer avait toujours été tenu si maladroitement quand il m’imitait en voulant tenter de faire vibrer les cordes. Me serais-je trompé d’appartement ? Il me semblait pourtant me trouver au bon endroit. Clé enfoncée dans la serrure, mes doigts la tournèrent facilement : j’étais bien chez Marius. C’est en voyant ce visage spécifique que je me souvins qu’elle y vivait depuis quelques semaines. J’avais complètement oublié, mais il y avait de la pizza pour un régiment, ça ne poserait aucun souci ! La savoir chez mon frère donnait une impression quelque peu étrange finalement, depuis notre altercation. Les choses avaient changé et finalement j’ignorais sur quel pied danser avec elle, tout semblait bien trop compliqué et tendu pour ouvrir des portes supplémentaires à ce qui avait mis des années à être rafistolé. Le son du violon me le rappela comme l’effet d’une claque en pleine figure, négligeant le mien depuis bien longtemps. Les Caesar n’entendaient plus l’archer vibrer depuis bien longtemps. Comme à l’accoutumée, j’entrais pour finalement tomber sur Moira, seule. Interdite, elle semblait m’observer comme un contraste au paysage : le costume n’avait pas été retiré, pas même la cravate, pour ne pas y avoir pensé. L’habitude de le porter certainement, et de ne pas faire de taches dessus en mangeant, une vraie technique de professionnelle c’est moi qui vous le dis !
« Je te fais toujours le même effet de surprise à chacune de nos rencontres. C’est bien agréable. L’archer c’est mieux que l’arme quand même »
Le ton se veut amusé, contrastant avec celui de notre rencontre précédente. Tout semble plus simple, moins compliqué surtout et l’humeur se veut plus ou moins au rendez-vous-même si le sourire se fait rare. Ah oui l’hôpital, ce détail avait été sacrément négligé dans mon planning, à croire que je perdais parfois la tête, mine de rien. Ah la vieillesse ! Pas tout de suite quand même laissez-moi le temps d’y repenser, les cheveux blancs ne poussent pas à ce que vous voyez, vu ? Très bien dans ce cas, j’ai peut-être un Alzheimer précoce concernant certaines choses, à peine !
« C’est aujourd’hui ? J’avais oublié… pour une fois que je me libère tôt »
Ces pizzas ne vont pas rester dans cet état n’est-ce pas ? Ni la bière que je mets directement au frais, m’appropriant quelque peu la cuisine, d’une certaine manière, souriant à sa remarque concernant Marius et MA chambre.
« T’en fais pas j’ai apporté de la boisson. Tu es à l’aise au moins dedans ? Tu peux même la décorer si tu veux t’y sentir plus chez toi. J’espère que tu as faim j’ai pris de la nourriture pour un régiment ! On va manger en l’attendant. Ça va il ne t’embête pas trop ? »
Moira Kovalainen
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Sujet: Re: Martial | Distance is covering your way, tears your memory... Dim 10 Avr 2016 - 22:12
Distance is covering your way, tears your memory...
Moira & Martial
J'allais finir par croire que nos rencontres étaient destinées à n'être que dues au hasard... Et à la gêne. Car il fallait bien l'admettre, je me sentais incroyablement bête et prise au dépourvu. La dernière fois, j'étais entrée chez lui comme fleur et l'avais surpris alors qu'il rentrait d'un mois d'absence et de silence radio... Cette fois, c'était lui qui me surprenait là, alors que j'aurais dû me trouver six pieds sous terre depuis plusieurs semaines. Marius m'avait prévenu qu'il avait dit à son frère que j'étais en vie, aussi je ne m'étonnais pas trop que me voir ici ne le surprenne pas plus que ça. Après tout, trouver un cadavre ambulant chez son frère, jouant du violon... Bon... Ce n'était pas franchement un délire qu'on devait apprécier tous les jours. J'avais un drôle de sens de l'humour, mais pas au point de me la jouer façon spectre de la mort armé d'un archet comme dans la Danse Macabre de mon ami Saint-Saëns. Non, je restais bêtement à le fixer, me demandant si notre échange allait ou non être aussi tendu que le dernier... Et finalement, il eut l'air de prendre la chose avec humour. Je restais quelques secondes silencieuse, mes quelques neurones encore fonctionnels cherchant la meilleure façon d'analyser la situation.
« Ahah... C'est sûr, j'ai l'impression qu'à chaque fois qu'on se croire, c'est le hasard qui nous met sur la route de l'autre, c'est l'autre... Et méfie-toi, je suis bien plus habile avec un archet, je pourrais te le planter dans les fesses ! »
J'agitais ledit objet devant moi avec un sourire amusé, tout en lui expliquant que Marius était parti à reculons à son rendez-vous médical. Têtu comme une bourrique, son frangin... Pas moyen de lui faire entrer quelque chose dans le crâne !
« Je pense plutôt qu'il a délibérément oublié de t'en reparler... De peur que toi aussi tu le tannes pour qu'il y aille... D'ailleurs... Tu sais c'qui lui est arrivé ? Non pas que je te demande de trahir sa confiance mais... J'ai peur qu'il n'en ait parlé à personne et ça m'inquiète un peu, pour être honnête... »
Marius avait refusé de me parler de son accident, tout comme je n'avais pas voulu mentionner le mien. Seulement, je savais à quel parler de ce genre de chose à au moins une personne pouvait être cathartique... Je posais finalement mon violon sur la table la plus proche, prête à aller me servir un thé, quand Martial me proposa de la pizza et une bière... Qui aurait refusé ça pour se contenter d'un pisse mémère, franchement ?
« Oh volontiers ! On trinquera en son absence, tiens ! »
J'allais nous chercher des verres et des serviettes en papier pour éviter de mettre encore plus de bazar dans le souk sans nom qu'était quotidiennement l'appartement de Marius. Quand enfin nous fûmes assit dans le salon, je soupirais en m'enfonçant dans le fauteuil de cuir.
« Tu connais ton frère... Dès qu'il peut trouver un moyen pour emmerder, il le fait ! Hier il m'a réveillée à six heures avec un seau d'eau glacée dans la figure... » , dis-je en rigolant. « Mais bon c'est de bonne guerre, je le lui rends bien ! Et puis... Après tout ce qui s'est passé, ça fait du bien d'avoir de la compagnie... Bref... Je pense que si je commence à refaire la déco de ta chambre, il m'assassine, à moins que tu m'aides et me donne ton aval, tiens ! Ça serait une idée ! »
J'attrapais un morceau de pizza et mordais dedans avec appétit. A force de m'escrimer à tenter de faire sortir Marius de l'appartement, je n'avais pas vu l'heure passer et me rendais soudain compte que j'avais une faim de loup. Je détaillais un instant Martial, m'amusant toujours du contraste qu'il y avait entre lui et son frère. Costume ajusté, cravate, l'air sérieux... L'avocat dans toute sa splendeur ! J'avais presque envie de lui dire de retirer ladite cravate avant de s'étouffer avec.
« Mais assez parlé de ton frère ! Tu vas bien ? A ta tenue j'en déduis que tu n'es même pas repassé chez toi avant de venir... Tout se passe bien ? »
Difficile de masquer l'inquiétude dans ma voix et le sentiment de marcher sur des œufs... Après tout, trois mois auparavant, je lui avais quand même fais remarquer que j'avais du mal à savoir si je parlais à Martial ou à son reflet déformé par l'influence de son paternel... J'aurais préféré ne pas penser à cela et plutôt nous imaginer dix ans auparavant, nos violons entre les mains... D'ailleurs, en parlant de violon, je jetais un regard au mien en me disant que j'aurais été curieuse de voir si Martial savait toujours en sortir un son, ou si le simple fait de chercher à l'accorder lui donnait de l'urticaire.
Sujet: Re: Martial | Distance is covering your way, tears your memory... Lun 11 Avr 2016 - 16:24
Le hasard en effet, celui qui fait tout le temps en sorte de nous rapprocher, même dans ces moments où je ne devrais pas être au courant qu’elle est en vie. Moira est morte aux yeux de tous, l’enterrement ayant eu lieu trois semaines auparavant. L’impression est étrange, presque paranormale, avec une impression d’apercevoir un mort revenir à la vie. C’est ce que laisse supposer cette vision à la fois étonnante et étrange d’une femme dont la mort a été maquillée pour sa propre protection. Finalement on se retrouve une fois encore dans des circonstances toutes aussi exceptionnelles que les précédentes, ni plus ni moins en attendant que la prochaine se présente au perron pour nous réunir à nouveau puisque finalement ce sont ces évènements qui nous lient à chaque fois. Il y a dans ces rencontres comme un moment de flottement gênant et inexpliqué, dans lequel je préfère ne pas vraiment m’attarder. Le sujet sur certaines circonstances est relégué au rang suivant, ignoré et délaissé plutôt qu’accepter pleinement : autant éviter d’ajouter un malaise supplémentaire à ce qui semble pourtant bien trop installé pour ne pas évidemment remarquer cette pseudo-gène latente entre nous.
« Tu tiens trop à ton archet pour oser le salir avec quoi que ce soit… »
Bien trop même, comme tout violoniste qui se respecte. L’archet tout comme le violon demeurait entretenus avec un soin particulier sur lequel on ne lésinait pas. Sa crédibilité en prenait un coup, si bien que le sourire se glissait entre deux phrases amusées tandis que l’attention se reportait sur les pizzas qui n’attendraient pas l’arrivée du frère pour être avalées : ce fichu rendez-vous à l’hôpital tombait mal, mais les problèmes de Marius s’enchainaient également à la pelle, à croire que j’étais le seul de cette famille à avoir un semblant de vie normale, juste une illusion. Pour prétendre qu’ici, rien n’était différent d’une ville ordinaire, tout était étrangement similaire. La chaleur de juillet me fit rapidement abandonner veste et cravate que je déposais sur le côté du canapé pour revenir vers Moira, manches de chemise retroussée et un peu ouverte.
« Il a agi étrangement ces temps-ci ? »
Tâtonnements, comme pour partir à la pèche aux informations et en apprendre davantage sur ce qui semblait ne pas coller, sur ce qui ressemblait à un iceberg dont la surface émergée n’allait pas avec la surface. Ni plus ni moins, il n’y avait rien qui ne semblait se lire sur mes traits comme une inquiétude non dissimulée que j’aurais pu également ressentir. Dans le pire des cas, il suffisait de lui tirer les vers du nez jusqu’à obtenir les informations. Rien qui ne me soit foncièrement difficile à faire quand il était question d’interroger Marius. Je reconnais bien cette possessivité presque maternelle quand il est question de mes affaires, à croire que rien ni personne ne pourra approcher ce qui m’appartient en gardien farouche de ma mémoire. Il serait bien capable d’allumer des bougies chaque soir en attendant que je revienne le voir. Parfois il me désespérait, mais c’était un beau désespoir en soit, d’avoir une personne qui vous serait toujours loyale et digne de confiance. Parfois c’était juste un peu … trop.
« Tu peux y aller si ça te permet d’être plus à l’aise ici, ce n’est pas moi qui viendrais t’en faire la moindre remarque. Hey ! Gourmande ! Attends qu’on s’installe, Marius ne va pas revenir dans la minute ! »
D’un geste je cassais cette part attrapée au vol pour m’emparer d’un bout avant qu’elle ne s’en empare pour la manger. Je ne lui partagerai pas l’exclusivité de manger avant moi, en plus elle a pris une part avec le plus gros morceau de chèvre, comme si je partageais le fromage !
« Le fromage c’est sacré, navré ! »
Morceau avalé, les chamailleries se poursuivraient sur la table où nous serions bien plus à l’aise que de bout dans cette cuisine trop petite à mon goût. Bières et pizzas encore chaudes sont emportées sur la table basse de la salle à manger.
« Je suis venu directement, je crois que je n’aurais pas pu ressortir une fois rentré. Le boulot est toujours aussi soutenu, certaines journées se transforment parfois en enfer en cours de route. Et toi, comment vas-tu faire maintenant ? »
Moira Kovalainen
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Sujet: Re: Martial | Distance is covering your way, tears your memory... Lun 11 Avr 2016 - 22:03
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Je souriais à la remarque de Martial. Enfin j'avais le sentiment de retrouver davantage du Martial que j'avais connu des années auparavant, à des années lumière de l'inconnu que j'avais croisé quelques mois plus tôt. Il était violoniste, lui aussi, il savait ce que c'était que d'accorder une attention minutieuse et presque maniaque à son instrument. Le mien, c'était à la limite du fanatisme, et je ne laissais jamais qui que ce soit y toucher... Pas sans être certaine que la personne en question ne risquait pas de casser une corde ou de faire une connerie avec. Autant dire que quand Marius avait tenté de s'en approcher, j'avais montré les crocs et menacé de réduire son lapin en peluche en charpie...
« Mince alors, ma menace tombe à l'eau, je suis bieeeen trop prévisible ! » Dis-je sur un ton de tragédienne.
Il fut finalement question de Marius et de son étrange attitude ces derniers temps. Je fronçais les sourcils en évoquant le sujet. J'avais malheureusement passé bien trop d'années sans prendre de nouvelles ni de Martial ni de son frère, et ne savait finalement pas grand chose de la dernière décennies, même si nous en avions pas mal discuté avec Marius. Je n'étais pas devin ni télépathe, mais je n'étais pas idiote. Avec un père et un frère experts du mensonge et des non-dits, j'avais appris à cerner certaines techniques d'esquive... Et en la matière, Marius était une véritable anguille. Dès que le sujet devenait trop délicat, il prenait la fuite à grands renforts de « oh regarde ! Un papillon ! Il est joli, hin ? »... Et le PIRE... C'est que ça marchait souvent... Au début. A force, j'avais fini par me dire qu'il ne cachait pas certaines choses... Il cachait plutôt la moitié de ce qu'il avait dans la tête ! J'aurais aimé être télépathe juste pour pouvoir comprendre pourquoi il avait tant besoin de cacher tout ça. J'étais d'autant plus surprise que son frère ne sache rien lui non plus. De quoi Marius avait-il honte pour que même son jumeau ne soit pas au courant ?
« Étrangement est un euphémisme, à son stade... J'ai l'impression qu'il cache pas mal de choses... Et pas des petites choses, si tu vois c'que j'veux dire. On dirait presque qu'il cherche à protéger quelque chose ou quelqu'un, et comme je n'aime pas trop m'immiscer sans demander, j'ai préféré ne pas insister... »
Marius m'en voudrait certainement d'avoir attisé la curiosité de son frère ou de l'avoir alarmé, mais j'avais le sentiment qu'il avait besoin d'aide et s'enfonçait peu à peu dans une histoire qui puait la merde à plein nez... Et si je n'avais aucun moyen pour lui faire pression, Martial en revanche avait toutes les cartes en main pour le faire parler. Du moins je l'espérais. Quelle idée j'avais de m'entourer de genre bizarres, franchement...
Me retournant pour attraper la pizza, je remarquais que Martial avait abandonné veste et cravate pour être plus à l'aise et... Mais vas-y, retire donc la chemise, tant qu'on y est ! Difficile pour moi de chasser cette ado qui avait toujours eu un faible pour le charme mystérieux de l'aîné des Caesar... Mon regard se perdit entre ses trois boutons de chemise déboutonnés, et je fini par relever les yeux avant que mon esprit n'envisage de scénario bon à être censuré. Quand il fut question de redécorer la chambre que j'occupais, j'éclatais de rire. Ça c'est sûr, ce n'était pas l'avis de Martial que je craignais mais plutôt celui de son frère ! Saint Martial, patron de tous les Marius de ce monde, c'était à se demander s'il n'y avait un autel dédié à son frangin dans l'armoire du blondinet...
« Ah bah parfait ! J'hésitais à tapisser les murs de posters avec des licornes, mais je crois que je vais plutôt mettre des photos de toi partout, ça le dépaysera moins ! Hey ! Mais j'ai faim, moi ! »
Je tentais en vain de récupérer ce morceau de pizza qu'il venait d'honteusement me subtiliser, mais il eut tôt fait de gober le morceau de fromage qui y trônait. Navré, navré... Comme s'il avait l'air navré, tiens ! Faisant mine de faire la moue, j'attrapais l'olive sur mon reste de pizza et la lui lançais à la figure.
« Ah c'est bien français, ça ! Vous vendriez père et mère pour un morceau de fromage, j'suis sûre ! »
Incapable de faire mine de bouder plus longtemps, je le gratifiais d'un sourire à la fois innocent et amusé.
« Je n'ai rien mangé depuis hier soir, je crois que je commence à avoir méchamment faim, en fait... »
C'est finalement une fois installés au salon que nous pûmes poursuivre tranquillement cette conversation. Je hochais la tête en avalant ma pizza. Avec tous les problèmes qu'il y avait à Radcliff, les meurtres non élucidés, des listes de suspects longues comme le bras, des magouilles pas possible... La police et les bureaux d'avocats devaient être surchargés de boulot !
« Ca doit être l'enfer certains jours, j'imagine... Pour peu que tu tombes sur quelques cas difficiles... Heureusement que tu trouves encore le temps d'amener de la pizza à ton frangin ! Même si je doute qu'il en voit la couleur, finalement... »
J'esquissais un sourire, avant que celui-ci se transforme en grimace. Qu'est ce j'allais faire maintenant ? C'était une bonne question. Techniquement, j'étais morte. Et les morts ne reviennent pas à la vie, en théorie. Ou du moins pas sans qu'on se pose de sérieuses questions impliquant zombies, vampires et autres bestioles fantastiques.
« Honnêtement... J'en sais rien. Je ne sais pas si tu lis le journal, mais tu as dû voir qu'ils ont écrit que j'avais été assassinée, et tout un baratin à mourir d'ennui... Disons que d'après mon père, c'était le meilleur moyen pour que je sois en sécurité, mais je ne me vois pas changer d'identité du jour au lendemain ni même de métier... Tu me vois faire autre chose que le pitre avec un violon dans les mains ? »
Cette question-là, je me la posais autant que je la posais à Martial. Je n'avais pas envie de foutre ma vie en l'air à trente ans parce qu'il malade avait décidé de me réduire en charpie à cause des erreurs de mon frère.
« J'ai dis à mon agent artistique de ne rien dire pour le moment, je reprendrai quand je m'en sentirai capable, je pense... En attendant, je ravie les oreilles de ton frangin tous les jours ! D'ailleurs... »
Mettre un peu de positivisme et de bonne humeur dans cette histoire, c'était ce qu'il nous fallait ! Avalant ma dernière bouchée de pizza, je me levais et m'essuyais les doigts pour éviter d'abîmer le vernis de mon violon avec le gras. J'attrapais l'instrument, l'archet, et revenais vers le canapé, un sourire malicieux aux lèvres.
« Tu veux l'essayer ? Ça fait des années que je ne t'ai pas entendu jouer... »
J'avais adoré jouer avec Martial quand nous étions plus jeune, et avais accueillit son départ du conservatoire avec autant de déception que de colère. C'était peut-être l'occasion pour lui de renouer un peu avec l'archet et les cordes... D'autant que je devais lui faire sacrément confiance à ce niveau pour lui confier mon instrument.