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 come and visit my world.

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Noeh Callahan
Noeh Callahan

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SUR TH DEPUIS : 15/03/2015
MessageSujet: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeJeu 12 Nov 2015 - 18:30

Noeh a beau essayer de défaire son poignet de l'emprise du fin bracelet, il n'y a rien à faire. Il est prisonnier. Le plastique répugnant colle à sa peau, empêchant le détecteur de mutant de bouger, condamnant l'étudiant à subir l’humiliation ultime. Les familles de chasseur sont dures, complexes. Elles sont régies par un mécanisme qui échappe depuis toujours au cadet Callahan. La veille, tout le processus, les méthodes directes et sans détour, les règles à suivre et les démarches strictes à adopter, elles lui sont revenues en pleine poire comme jamais auparavant. C'est un mauvais souvenir trop récent, bien trop frais, et incarné à même son être par ce pauvre bout de plastique qui peut produire un bruit strident à tout moment.
Noeh est concentré sur son bouquin d'Histoire. Ce cours, il le suit depuis deux mois, mais il a le sentiment que rien ne rentre dans son piètre crâne. Les informations, dates, noms importants ou les périodes multiples ne cessent de se mélanger pour donner au final un melting-pot de connaissances qui ne ressemble plus à rien. Frustré, le jumeau Callahan fulmine. Pour une fois, il est même tellement plongé dans ses écrits qu'il n'entend pas les pas de son père qui se rapprochent. Ce dernier débarque dans le salon presque achevé d'être rénové de sa démarche assurée, imposante, avant de déposer dans le champ de vision de Noeh un petit bracelet sombre. Arquant un sourcil, Noeh accepte de lâcher un peu ses révisions inutiles pour relever un visage blasé en direction de son aîné. « C'est pour quoi ? » Alexander Callahan prononce des mots comme « te protéger », « c'est pour ton bien », « ta mère et moi faisons ça pour toi » et les pires : « tu ne te feras pas avoir une deuxième fois ». A présent, l'étudiant ne s'agace plus de sa leçon qu'il n'arrive pas à mémoriser, mais du nouvel affront dont il est victime. Encore. Puis l'ordre de son père a sans doute pour but de l'achever. Noeh secoue la tête. Hors de question qu'il mette ce truc, que ce soit à l'un ou l'autre de ses poignets. Le jumeau sent dans le ton de son père qu'il n'est même pas supposé donner son avis, qu'il n'a juste pas le choix. Se levant prestement, Noeh balance un regard noir à son père, puis vomit avec un air dédaigneux une réplique mi-connerie mi-moquerie à l'attention de l'objet supposé « évolué », avant de chercher à s'éloigner de ce père aux idées délurées pour rejoindre son antre. Sauf que Noeh oublie souvent que son corps ne peut plus suivre son esprit vif comme il le voudrait, ou que son père est encore agile pour son âge. Dans un juron étouffé, l'ancien pianiste sent son poignet gauche se tordre, se vriller, sous une pression massive, entend sa béquille s'échouer au sol dans un claquement sec, alors que le plastique mord la peau claire, presque translucide, de son poignet. Se dégageant de la prise de son père, les battements de coeur de Noeh s'affolent en même temps que la surprise ne l'empêche de répliquer quoi que ce soit à ce qui vient de se passer. Noeh se sent démuni. Il a le sentiment d'être revenu quinze ans en arrière, de n'être qu'un gosse qui n'en fait qu'à sa tête et qu'il faut remettre dans le droit chemin, que son père n'en a toujours rien à faire de ce que l'étudiant peut bien dire et qu'il sera obligé de suivre les règles de la famille Callahan jusqu'à la fin de sa foutue vie. Son père s'éloigne alors de son pas naturel, impérial, tout en laissant échapper une dernière chose à l'égard de son fils : c'est pour ton bien.
Ses doigts recroquevillés et tordus s'acharnent à vouloir réaliser l'impossible. Noeh ne peut pas. Il n'est pas capable de se défaire seul du bon vouloir de ses parents, de cette nouvelle invention mise au point par les scientifiques pro-Taddheus de la ville, c'est au-dessus de ses forces. Alors que ses phalanges esquissent un nouvel essai vain, l'étudiant laisse échapper un cri de rage. Seul dans sa chambre, il attend juste le moment où ce bracelet va se mettre à biper. Cette nuit, il en a même cauchemardé. L'esprit de Noeh commence à lui jouer des tours, de bien vilains tours, et la panique le gagne petit à petit. Avec la rééducation, ses études qui se déroulent un peu mieux, et un début de prise de conscience quant au chemin parcouru jusqu'ici, Noeh commençait à aller mieux. C'est vrai : il osait mettre un peu plus le pied dehors, à moins s'attaquer à la moindre personne lui adressant la parole ou encore à maintenir une distance moins gigantesque avec le reste du monde. Les choses commençaient à presque s'arranger, même si à la méthode Noeh. Seulement, avec ce bracelet accroché au bout du bras, tout s'écroule. Tout est remis en question et l'étudiant a l'impression d'être tout juste sorti de l'hôpital. Il psychote. Il devient parano. Ce bracelet va se mettre à sonner, il va le réduire à l'isolement, à la peur de l'autre, à la hantise de la mauvaise découverte. Et Adriel va resurgir. Son absence fantomatique va revenir hanter l'esprit et l'âme en peine du cadet Callahan pour lui remémorer que, ce qu'il lui a fait, il ne pourra jamais l'oublier. Jamais. Dans un geste brusque, qui manque lui faire perdre l'équilibre, Noeh se lève de sa chaise de bureau. La pièce est sombre, caverneuse, mais il met rapidement la main sur une veste et sa béquille, avant de s'aventurer hors de sa chambre et de prendre la direction de l'entrée du manoir, qui sera aujourd'hui son issue de secours. Il doit prendre l'air ; s'éloigner, marcher un peu, respirer profondément, mais, avant tout, aller voir Sam. Il n'y a qu'elle qui peut le comprendre et qui peut l'aider sur ce coup. Même s'il omet les derniers mois où ils se sont peu vus, la dernière discussion de famille qui ne s'est pas bien déroulée, l'amitié avec Lorcan et Aspen qu'il a mis à mal, et leur lien fraternel qu'il malmène de tout son être depuis le début, Noeh a besoin d'elle. C'est plus fort que lui, et il sait que ça ne sert à rien de lutter. S'il ne part pas voir sa jumelle maintenant, il va faire une connerie. L'ancien pianiste n'a d'ailleurs jamais marché aussi vite avec sa fameuse béquille. Sur sa route, il croise quelques personnes, dont une qui fait sonner le bracelet. Secouant la tête, Noeh ne s'arrête pas. Il sent un mal-être incommensurable le gagner au fil de sa démarche saccadée, mais il poursuit tout en cherchant à y prêter le moins d'attention possible. Le centre-ville approche. Les immeubles où se cachent les appartements s'élèvent devant lui. Le chemin jusqu'à celui de Sam, il le connaît pas coeur. Il n'est pourtant pas venu souvent, mais il retient toujours ce qui concerne sa soeur, même s'il en donne moins le sentiment depuis son accident. Après avoir grimpé dans le premier ascenseur disponible, Noeh écrase un poing tremblant contre le numéro du bon étage. Les secondes passées dans le petit habitacle étouffant sont longues. Les portes s'ouvrent enfin et Noeh s'engouffre dans le couloir. Une fois arrivé devant la bonne porte, ses doigts contraints de tout mouvement amples cognent avec frénésie contre le bois. « Sam ?! », que Noeh appelle d'un ton désespéré. Il espère qu'elle est là. Qu'elle n'est pas partie, qu'elle n'est surtout pas loin, pas aujourd'hui. « Sam, faut que tu m'aides ! » Les explications ne peuvent pas être données en plein milieu de ce couloir. Dans un geste idiot, le cadet Callahan tente d'ouvrir la porte par ses propres moyens, et est surpris lorsque cela fonctionne. Il tombe alors nez à nez avec Sam. Il doit avoir l'air d'un fou, avec son corps qui tremble et ses pensées en vrac, mais il ne perd plus une seconde et passe à côté de sa soeur sans plus attendre son reste. Un bip strident secoue son poignet. « Merde, ça déconne encore », qu'il crache en secouant son poignet gauche. Dans une pensée infondée et sortie de nulle part, Noeh se dit que son bracelet ne doit pas supporter la proximité du carbone de sa béquille. L'espoir fait vivre. « Papa m'a obligé à foutre ce machin, mais j'en voulais pas, j'ai l'impression qu'il va se mettre à sonner toutes les deux secondes, ça me rend nerveux, faut que tu m'aides à le raisonner, c'est juste des conneries, tout ça parce que je me suis fait avoir une fois et que je suis passé par cette putain de fenêtre ! » Noeh a tellement besoin de laisser tout ça sortir qu'il n'arrive pas à regarder Sam droit dans les yeux plus d'une seconde. Alors qu'il s'approche de son pas claudiquant, un nouveau bip de son bracelet le freine dans sa démarche. Toute son attention se concentre sur le petit appareil qui passe presque inaperçu, quand on ne sait pas à quoi il sert. « Je vais finir parano Sam... »
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Salomé Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeSam 14 Nov 2015 - 19:09

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CRACKLE BONES

La pointe de son pied tapote encore et encore le bois du bureau, les yeux perdus sur le ciel qui se découpe à travers la vitre, entre les toits des bâtiments. Les bruits de la rue lui parviennent trop clairement, comme toujours, à travers le vitrage merdique de la fenêtre, et sa concentration se fait la malle avant même qu'elle n'ait commencé. Elle s'acharne sur le bouchon de son stylo qu'elle mordille entre ses dents depuis une vingtaine de minutes, tentant de se concentrer sur les notes qu'elle a prise au fil des entretiens psychologiques menés depuis ces dernières semaines. Ces pensées dérobées, jetées sur le papier et griffonées avec mépris, un mépris envers elle-même et cette manière indigne de procéder. Mais elle n'a pas le choix, pas lorsque le contrôle lui file entre les doigts et que sa malédiction l'enrôle dans les esprits torturés de ses patients. Elle n'aime pas ça. Définitivement pas. Ses doigts extirpent une première cigarette de son paquet qu'elle allume machinalement. Il n'y a bien que ça pour apaiser ses nerfs l'espace de quelques instants, et il est de toute évidence trop tôt pour se servir un verre. C'est quelque chose qu'elle s'attache à respecter, de plus en plus. Ne plus déboucher la bouteille à tout moment de la journée, sans se soucier des horaires. Depuis qu'elle a recommencé à s'entraîner doucement, et que les tremblements sont apparus. Comme un électrochoc, un rappel à l'ordre. Le signe que l'imprégnation de son corps par ce réconfort en bouteille devenait peut-être un peu trop importante. Alors, elle détourne le regard des bouteilles qui parsèment son salon. Et elle recommence à s'agacer des mots illisibles qu'elle a pu rédiger.

Un sursaut la tire de ses pensées en entendant son nom crié à travers la porte, ces trois lettres portées par l'une des seules personnes autorisées à le faire. Son échine s'hérisse et sa nuque se redresse. Noeh. Elle attrapa son portable immédiatement, cherchant à y lire un quelconque indice de sa venue imprévue. Rien. La brune se retourne sur son siège, une main portée à sa tempe qu'elle masse du bout des doigts, comme pour s'assurer qu'elle n'a pas halluciné la voix de son jumeau. C'est tellement inhabituel que ça en semble presque irréel. Noeh, ici, sans prévenir, sans qu'elle ne l'ait appelé, après tout ce qui a pu se passer ? Les coups cessent de s'abattre devant chez elle, lui laissant une seconde imaginer qu'elle s'est trompée. Que son esprit fatigué divague, ça ne serait pas la première fois. Mais subitement, une pluie de mots résonne à nouveau, la tétanisant une seconde avant de la pousser à se lever, l'élançant sans hésiter vers l'entrée de son appartement. Des tas d'hypothèses décousues se forment déjà dans son crâne. Les unes plus macabres que les autres. La mutante est revenue. S'en est pris au Manoir à nouveau. Ou à leur père. Ou à lui, directement. Ou bien est-elle sur ses pas. La porte s'ouvre juste avant qu'elle ne l'ait atteinte, et ses traits tirés par l'angoisse se retrouvent subitement face à Noeh. « Merde Noeh, il se passe quoi, là ? » Elle achève de libérer l'entrée en repoussant d'une main affolée le battant qui part s'écraser contre le mur alors que son frère file déjà à l'intérieur. Elle veut lui dire de s'arrêter une minute, de la laisser le détailler un peu, elle qui n'a pas même eu le temps de réaliser s'il était blessé ou non. La porte claque dans son dos tandis qu'elle la referme. Un bipement retentit sans qu'elle n'y prête immédiatement attention, trop attachée à contempler son frère qui agite son poignet dans le vide. « On t'a fait... » ...du mal. Sa phrase se coupe tandis qu'il reprend la parole, la laissant réaliser qu'il ne s'agit nullement d'une entorse, ou d'une douleur quelconque. L'inquiétude qui marque son visage n'en demeure pas moins présente, inévitablement attisée par la panique de sa moitié, capable d'exacerber ses émotions les plus infimes de manière totalement irrationnelle. Il parle vite, sûrement trop pour qu'elle n'en saisisse l'essentiel immédiatement, seules les dernières paroles restant fermement ancrées dans sa tête de manière douloureuse. « Calme toi deux secondes, j'comprends rien ! Il t'a forcé à quoi, de quoi tu parles ? » Il a le regard fuyant, et ça ne lui plaît pas. Il n'a pas le droit de débarquer comme ça, de remettre l'accident sur le tapis sans lui expliquer clairement ce qui se passe, c'est trop lourd à gérer pour elle, pour cette version minable d'elle-même. Parce qu'elle tremble sous l'appréhension, elle tremble en miroir de ses tremblements à lui, elle ressent tout subitement de manière si puissante que ça la terrasse de l'intérieur. Dans quelques temps, ça fera un an. Anniversaire sordide du jour qui en brisant sa vie à lui, a aussi brisé la sienne. L'éclatant en un millier de morceaux, impossibles à réassembler comme avant. Certains s'étant même perdus au passage, les mois lavant l'espoir de les retrouver, de se sentir à nouveau invincible, de le savoir intouchable. Elle ne supporte pas cette affluence d'émois qu'elle ne sait plus étancher. Elle devrait se faire rassurante, le roc sur lequel il pourra s'appuyer sans craindre qu'elle ne s'effondre. Elle essaye de se ressaisir, se fait violence parce que c'est ce qu'ils s'étaient promis, d'être là l'un pour l'autre, de faire tout leur possible.

Il s'approche et elle pose sa main sur sa joue, incapable de maintenir une quelconque distance, instaurant le contact de manière douce tandis que la chaleur de sa paume tente de lui apporter un peu de réconfort. Le son aigu reprend alors qu'il s'approche et attire l'oreille de sa soeur, qui l'oublie dans la seconde en pensant qu'il ne s'agit que de son téléphone. « Eh, ça va aller Noeh. Je suis là, ... » Salomé suit son regard, agacée elle aussi par cette sonnerie qui ne s'arrête pas. « Qu'est-ce-que c'est que ce truc ? C'est ta montre ? » Sa main abandonne sa joue et se joint à la seconde pour remonter la manche et détailler le poignet de Noeh. « C'est ce truc là qui t'emmerde ? » Arquant un sourcil en reportant ses iris sur lui, légèrement perplexe, ses mots continuent à tourner dans sa tête tandis qu'elle essaye de leur donner un sens. Elle assène une pichenette sur le côté du bracelet, comme si ça allait aider à l'arrêter. Bip, bip, bip. Incessamment, ça lui strie les tympans. « Tu dis que c'est P'pa qui t'oblige à le porter ? » Un léger sourire lui échappe, imaginant la course poursuite improbable de son paternel aux trousses de son frère, incapable de trouver une raison valable pour laquelle il aurait agit de la sorte. Ils n'avaient plus cinq ans. Ils ne pouvaient plus les forcer à porter les vêtements et accessoires selectionnés par leur mère. La situation était tellement invraisemblable. « Tu penses que c'est quoi, en fait ? Qu'il a mis une puce GPS pour connaître tes moindres positions ? » Elle regagne son sérieux, la belle, en réalisant que Noeh est loin d'en rire. « Dis moi ce que c'est Noeh, ou tu vas commencer à me faire peur. » Instinctivement, elle le libère, comme si cela allait l'éloigner du sifflement porté par le bracelet. Et il s'arrête. Soudainement. « Trop bizarre. » Et elle demeure pensive, Salomé. Et elle ne sourit plus. Plus du tout.


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Noeh Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeVen 20 Nov 2015 - 17:26

Ça sonne. Ça n'arrête pas de sonner. Dès qu'il fait un pas en avant, avant d'en faire un en arrière. Cette connerie semble scientifiquement programmée pour le détruire de l'intérieur. Noeh ne sait plus comment agir. Un instant, il observe le braceler, la seconde suivante, il veut essayer de l'arracher. Les questions s'entremêlent dans son esprit tandis qu'aucune réponse ne vient les refréner. Est-ce que ça fonctionne ? Est-ce que la personne qu'il a croisé dans la rue tout à l'heure était des leurs ? Est-ce qu'il est condamné à entendre ce bruit faire vriller sa tête toute sa vie ? Est-ce que ça s'arrête ? Est-ce que ça peut l'aider ? Est-ce que ça peut le guérir ? Est-ce que ça... La main de Sam tout contre sa joue accapare toute l'attention précaire dont Noeh est capable. Son regard, à la fois perdu et bouleversé, s'écrase dans le sien. Il ne crie qu'une chose : aide-moi. Tel un cri muet, un appel à l'aide trop assourdissant pour être compris, il supplie sa jumelle de faire quelque chose, de lui dicter la marche à suivre. Il reconnaît, Noeh, que Sam est la plus douée, qu'elle est le cerveau des deux, la plus posée, la plus réfléchie, la plus mature et la tête pensante. Lui, il n'est que le seconde, celui qui est arrivé après, que ce soit dans la famille, dans le cœur de leurs parents, dans l'esprit des gens. Le cadet Callahan s'en remet à celle capable de résoudre tous ses problèmes de sa voix apaisante et de ses gestes présents, il met les cartes entre les mains de sa moitié, parce que c'est ce qu'il a toujours fait quand il ne peut pas s'en sortir seul. Et Noeh comprend maintenant qu'ils ne s'en sortiront à vie que tous les deux, car c'est ce que la nature a décidé pour eux et il lui en est reconnaissant. S'il n'y avait pas Sam dans sa vie, qui serait vraiment là pour lui ? Qui serait présent pour assurer ses arrières, souffler à son oreille que tout va bien, que les choses vont et peuvent s'arranger ? Pas grand monde, pour ne pas dire personne. Sam est unique, irremplaçable, elle est à Noeh ce qu'il est à elle, et c'est un lien inoubliable, un contrat tacite entre eux que ni l'un ni l'autre ne pourra rompre. D'ailleurs, l'ancien pianiste le remet au goût du jour en venant ce jour même frapper à sa porte. Il prouve dans ce moment de nervosité ingérable sans elle qu'il n'a pas tiré un trait sur elle, sur celle qu'il considère comme son unique famille, et qu'il a besoin d'elle. Vraiment besoin d'elle. Son regard émeraude et pénétrant promet que, toutes les autres fois, il a menti. Il a sorti son plus beau mensonge en prétendant qu'il pouvait s'en sortir seul, encore mieux lorsqu'elle se trouvait loin de lui et de sa carcasse de rancune stupide. C'était idiot, Noeh le pense plus que jamais. « C-c'est pas une montre », qu'il bafouille de sa voix toujours quelque peu tremblante, tandis que son regard s'abaisse sur les mains de sa jumelle qui détaillent l'objet de sa venue. Il n'arrive pas à sourire lorsqu'elle repose la question concernant leur père. Oui, c'est bien lui qui l'a obligé à porter ce foutu bracelet. C'est pas drôle, Sam, pas drôle du tout, ce n'est pas le moment de plaisanter. Son regard incrédule souffle ces mots qui ne parviennent pas à passer les lèvres de Noeh. Mais, après tout, Salomé n'a pas encore eu vent de toute la situation, alors c'est normal qu'elle réagisse de cette façon. Qui aurait cru, qu'à son âge, Noeh serait encore obligé de subir les lubies de son géniteur ? Les mains de sa sœur s'éloignent alors, faisant cesser le son durant de longues secondes. L'ancien pianiste ne le remarque même pas, trop occupé à trouver les mots justes pour tout déballer à sa jumelle. Le truc, c'est que dans un tel moment, Noeh n'est pas apte à mettre la main dessus. Alors, il se lance, sans filet. « C'est supposé m'avertir si je me trouve à proximité d'un- », qu'il débute, avant de rebuter à prononcer le dernier mot. Trop de mauvais souvenirs remontent. Il l'avait senti. Dès que ce bracelet a touché sa peau, il a deviné que toutes ses craintes presque envolées, à peine éteintes, reviendraient à la charge. « De quelqu'un comme Adriel. » Le prénom écorche sa langue, érige une nouvelle cicatrice interne. Son regard échoue du visage de sa sœur jusqu'au bracelet qu'il élève à nouveau dans les airs. « Si ce machin capte une mutation proche, il est censé biper. » Peut-être le fait-il à un endroit mal choisi, moyennement situé pour le pauvre petit objet qui s'accroche à son poignet, car le son strident reprend de plus belle. « MAIS IL ARRÊTE PAS ! », qu'il s'agace en secouant sa main, malheureusement toujours reliée à sa béquille, ce qui le déséquilibre un instant, avant qu'il se repose le bout de cette dernière au sol. Manquerait plus qu'il se casse la figure pour devenir encore plus misérable qu'il n'en donne déjà l'air. Son visage est métamorphosé par une mine révoltée, preuve que Noeh est de plus en plus ébranlé par cette nouvelle épreuve. « Il débloque, comme les personnes qui l'ont mis au point. Papa a expliqué que ce sont des scientifiques qui s'en sont chargés récemment, ou je sais plus trop qui, mais que peu de personnes sont au courant pour le moment et- et ensuite- tu- tu connais la suite. » Sa voix devient pâle, alors que son regard recherche l'appuie de son jumeau chez Sam. Le cœur battant à tout rompre, Noeh veut réduire la minuscule distance qui s'est immiscée entre eux à cause de son désir de vouloir voir ce bracelet loin de lui, avant que le bip ne reprenne de plus belle une fois proche de sa jumelle. L'ancien pianiste donne l'impression d'être un enfant puni, avec ses épaules courbées et ce visage ravagé par l'instant, ainsi que par ce bruit agaçant qui va commencer à lui filer la migraine. « Il-il faut que tu me l'enlèves, Sam, j'y arrive pas tout seul... », qu'il souffle d'un ton étouffé, comme si la respiration commençait à lui manquer. Il a honte, Noeh. Honte de ne pas être assez fort, doué, déterminé. Si ses séances de rééducation avaient été plus concluantes, peut-être qu'il ne serait pas là. Il aurait pu se défaire de cette emprise sonore et physique sans l'aide de personne, et surtout sans imposer cette vision regrettable à sa propre sœur. Malheureusement, le jumeau Callahan prouve une nouvelle fois que peu de choses lui réussissent. Il a beau s'acharner, fixer ces quelques doigts en leur ordonnant de s'ouvrir sur-le-champ, dans sa chambre ou entre les murs de l'hôpital, comme s'il possédait un quelconque pouvoir mental, rien ne fonctionne. Il fait plus de progrès au niveau de la marche. C'est ce que médecins et infirmiers ont dit. L'étudiant se raccroche à ces mots autant qu'il peut, mais il en a assez. Il aimerait retrouver ce membre qui lui manque, ce fantôme qui reste accroché tel un moignon au bout de son bras pour lui rappeler qu'il n'y arrive pas. C'est pour cette raison que son père a gagner la partie. Il a bien pensé la chose, a choisi d'accrocher le bracelet à la main inverse car sachant que la main droite ne lui permettrait pas de s'en débarrasser seul, voire même du tout. « Je veux pas savoir si les personnes que je croise dans la rue sont... » Comme plus tôt, les mots ne sortent pas. Noeh ne sait plus comment les nommer. Il a le sentiment d'être revenu des mois en arrière, dans ces instants où rien que de penser à ce qu'était Adriel le terrifiait. « Ou-ou même si elles peuvent s'en prendre à moi, j-je suis pas prêt... » Et l'ancien pianiste secoue la tête, encore et encore, pour chasser toutes ces idées qui martèlent son être, autant que pour tenter d'oublier ce bruit qui envahit toute la pièce et les enveloppe, lui et Sam.
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Salomé Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeSam 19 Déc 2015 - 14:34

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CRACKLE BONES

Elle sent l'ombre de son sourire persister légèrement sur la commissure de ses lèvres, attendant patiemment que Noeh lui explique ce dont il est réellement question. S'il ne s'agit pas d'une montre, qu'est-ce-que c'est ? Il ne lui aurait tout de même pas collé au poignet l'un de ces bracelets censé prévenir les proches lorsque son détenteur fait une chute. Elle manque de rire à nouveau, tant les hypothèses qui se bousculent sont plus ridicules les unes que les autres. Tant ses nerfs s'étirent insidieusement, à mesure que son frère bafouille sans réellement l'éclairer. Elle incline légèrement la tête, Salomé, attendant qu'il parvienne à achever cette phrase qui semble si difficile à prononcer. Le prénom haï s'échappe. Vrille les tympans de la brune, noue ses tripes dans la seconde. Adriel. Le visage s'immisce dans son esprit sans qu'elle ne parvienne à l'empêcher d'y ressurgir. Parce qu'elle ne peut y penser sans perdre ses moyens, même un an après. Qu'elle le tuerait une fois de plus, si elle le pouvait, en voyant l'état dans lequel sa simple évocation plonge sa moitié. La rancune sillonne tant et si bien dans ses veines que les mots ne font pas immédiatement leur chemin. Qu'elle ne percute pas sur le coup. Il faut que la sonnerie s'élance à nouveau pour qu'elle décroche des images insoutenables du sourire sardonique du dégénéré qui danse dans son crâne. Un oeil perdu posé sur le poignet de Noeh, comme si elle remarquait l'objet pour la première fois alors qu'il tente de lui expliquer. Une seconde, elle nage en plein rêve. Elle entend ses paroles, mais ne parvient à les enregistrer. La voix de son frère s'éloigne et s'approche au gré de ses pensées qui résonnent encore de cette phrase qu'elle ne veut comprendre. Qu'elle ne peut comprendre. Comme si son inconscient s'évertuait à la protéger d'une vérité qu'elle n'a pas la force d'assimiler. Les battements de son coeur s'égrènent de plus en plus lentement, et les pulsations envahissent ses oreilles, et le sang bat ses tympans en laissant la marée pourpre envahir son champ de vision, noyant les derniers souvenirs d'Adriel en les emportant loin d'elle. Ne laissant derrière elle que le néant. Le néant empli des mots de son jumeau. Sa nuque se hérisse tandis qu'il s'énerve, hausse le ton. Et les traits de la serveuse pâlissent à vue d'oeil, une sale envie de vomir pendue aux tripes. Elle demeure parfaitement immobile, incapable d'élever la main pour apaiser son frère en la déposant sur son épaule. Incapable d'ouvrir la bouche pour prononcer la moindre parole rassurante. Incapable de le regarder, laissant ses yeux ne capter que du vide, un grand vide dans lequel elle aimerait se fondre, disparaître. La fatalité s'impose à elle sans qu'elle n'ait la force de la repousser. Tout semble se disloquer autour d'elle, et plus rien n'a la moindre importance. Plus rien n'en aura plus jamais. Elle est le monstre, ce monstre contre lequel ce bracelet a été créé. Ce monstre contre lequel leur père veut le protéger. Ce monstre que Noeh appréhendera à chaque minute, à chaque nouvel éclat résonnant à son poignet. Ses lèvres tremblent et son rythme cardiaque recommence à s'accélérer. Tout doucement. Elle non plus, elle n'est pas prête.

Et lentement, elle sort de son état second. S'en extirpe difficilement, faisant violence aux muscles tétanisés. Un pas en arrière, un mouvement de recul, comme s'il portait sur lui une bombe à retardement dont chaque écho sonore la rapprochait d'une échéance dramatique. Comme si elle pouvait s'en éloigner encore un peu, au moins l'espace de quelques minutes. Le temps de le regarder une fois encore, tant qu'il ne sait pas. Le temps d'ancrer profondément dans son crâne le souvenir de ses prunelles qui la voient comme sa soeur, comme la Sam de toujours, celle qu'il vient chercher lorsqu'il se perd. Elle n'a pas pu camoufler sa réaction, Sam. Elle n'a pas pu assembler son bon sens et son courage pour ne pas laisser passer la terreur qui a griffé son regard, alors elle le détourne brutalement, fait mine de chercher quelque chose des yeux. Pourquoi pas quelque chose qui lui permettrait de lui arracher l'objet maudit, pourquoi pas ? Son coeur s'écrase dans sa poitrine, comprimé à l'extrême sans savoir comment envoyer ses pulsations désordonnées. Elle tangue légèrement sur ses jambes tremblantes, s'approche sans le vouloir. Le son strident qui s'élève du poignet de son frère la frappe en plein visage, la laissant un instant abasourdie, parce qu'elle réalise totalement, elle comprend exactement ce qui est en train de se produire, et plus rien n'a de sens. Tout s'arrête brutalement en ce lieu, en cette heure, la Terre ne tourne plus et le temps s'est suspendu. Une fraction de seconde, elle a l'impression de sortir de son corps, de s'évader de cette enveloppe charnelle pas foutue de fonctionner correctement, dépouille monstrueuse qu'elle aurait aimé laissé derrière elle et ne jamais plus l'incarner. Elle se voit debout, une main prenant appui derrière elle contre le coin du mur, les phalanges presque translucides sous la force qu'elle y imprègne. Elle observe toutes ces réactions infimes qui parsèment son masque de menteuse, la bouche qui s'entrouvre dans un tremblement incertain, les yeux qui s'écarquillent imperceptiblement, les narines qui se dilatent et les sourcils qui se haussent. Elle voit son double dans un état de détresse qu'elle ne lui a plus connu depuis quelques temps, lui qui semblait lentement remonter à la surface, l'entraînant sans même le savoir dans son sillage. Elle le regarde qui s'agite, qui ne comprend pas. Qui vient chercher du réconfort à ses côtés, cet espoir de le voir passer les portes de son appartement de sa propre initiative se voyant concrétisé, dans une vision cauchemardesque. Un cauchemar. Voilà ce que ça a tout l'air d'être. Un putain de cauchemar. C'est impossible. Impossible que tout cela soit réellement en train de se produire. Elle voudrait demeurer spectatrice, ne jamais réintégrer son organisme, cette fragile silhouette qui se décompose si rapidement entre les murs sombres de sa demeure. Pourtant, en un battement de cil, elle se retrouve de nouveau projetée dans cette carcasse tremblante, décontenancée, elle voit la scène se jouer à travers ses prunelles qui se perdent à mesure que son souffle se brise dans sa gorge. « Noeh.. » Elle se racle la gorge, passe ses doigts frissonnants dans ses mèches brunes en dégageant son visage. « Je.. » Sa voix s'étrangle, elle ne sait pas, elle ne sait plus comment faire pour prétendre être ce qu'elle n'est définitivement plus depuis un an. Sa soeur. Une Callahan. Salomé Callahan. La gorge se serre et elle attrapa la main de son frère, le coeur battant au rythme des hurlements du bracelet. « Je vais l'enlever. J'te promets. » Les mots se cassent en chemin, le message passe tant bien que mal, et elle l'attire à sa suite vers la cuisine. Démarche mécanique, tentatives de se dépouiller de toute réflexion, d'intégrer cette enveloppe vide si souvent revêtue au travail, à l'université. C'est avec tous les efforts du monde qu'elle daigne regarder la nouvelle arme des chasseurs. Le genre de gadget qu'elle aurait adoré, auparavant. Elle se penche au dessus du poignet de son frère, l'appuie sur la table pour pouvoir mieux l'étudier. Laisse ses cheveux barrer son visage pour mieux y camoufler les émotions qui le ravagent. Elle tire dessus, cherche un mécanisme permettant de l'ouvrir. Ses mains tremblent sur la peau de son frère tandis qu'elle s'affole de plus en plus, jurant après cette invention de merde qui lui déchire les oreilles. Qui lui déchire le coeur.

Elle l'abandonne près de la table, avance de quelques pas, comme incapable de s'arrêter, surtout lorsque la sonnerie cesse comme une douce provocation et que son échine se glace. Elle crispe ses mains sur le bord du plan de travail, s'y blanchit les ongles en sentant un goût métallique courir sur sa langue. Ses dents se desserrent légèrement, libèrent les joues, et elle ouvre avec précipitation le premier tiroir. Puis un second. Un troisième. Elle ouvre un placard sous l'évier. Les referme un par un dans de violents claquements qui la font elle-même sursauter. Pour déposer sur le bois les ciseaux, tournevis, pinces, tout outil susceptible de le libérer. De les libérer tous les deux. « On va en venir à bout, d'une manière ou d'une autre. » Elle chuchote comme pour elle-même, tandis qu'elle essaye une dernière fois de le manipuler entre ses mains alors que la sonnerie s'élève, elle tire dessus, frappe la table du plat de sa main qui fourmille sous le choc durant quelques secondes. « Y'a forcément un moyen, c'est pas possible autrement ! » Et pourtant, plus elle essaye, plus l'espoir s'amenuise, peu à peu.
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Noeh Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeLun 11 Jan 2016 - 0:39

Noeh est incapable de réagir plus. Lorsque sa soeur l'entraîne à sa suite dans la cuisine, il garde le visage livide, le regard plongé dans le vide. On dirait que plus rien ne se passe dans son cerveau, que ses pensées s'amenuisent tellement qu'elles en disparaissent. Elle ne doit plus penser que le bracelet est accroché à son bras gauche, celui sur lequel il force pour marcher à peu près normalement. Du coup, le chemin jusqu'à la pièce suivante est difficile, étrange, mais il se fait vite, même si c'est surprenant pour l'étudiant. Peut-être que l'idée de pouvoir enfin se débarrasser de ce bracelet mais surtout de ce bruit strident qui envahit l'espace clôt de l'appartement motive chaque parcelle de son être et le pousse à se surpasser. Le plan de travail de la cuisine devient pourtant une aide indéniable pour tenir debout lorsque Sam le redonne un peu de leste. Noeh plisse les yeux pour essayer de mieux observer ce que trafique sa jumelle au niveau de son poignet, mais il se rend vite compte que ça ne fonctionne pas. Il y a toujours ce bip incessant. Il comprime le cerveau de l'ancien pianiste, annihile sa moindre tentative de s'en détourner. Et ça a l'air d'être la même chose pour Sam. Noeh remarque qu'elle s'agite beaucoup. Elle fait plein de gestes saccadés, nerveux, des essais infructueux pour mettre un terme à ce vacarme qui les trouble tous deux. Lorsqu'elle s'éloigne un peu, Noeh scrute son visage et reconnaît ce fameux air déterminé. Mais il y a quelque chose de plus. Un petit il-ne-sait-quoi qui l'interpelle et lui fait froncer les sourcils face à ce mystère qu'il aimerait prendre le temps de résoudre... Mais il n'a pas le temps. Noeh s'aperçoit soudain que le bracelet a arrêté de sonner et il abaisse le regard dans sa direction. Ça fait tellement de bien de ne plus rien entendre tambouriner contre ses tympans que l'ancien pianiste laisse presque échapper un soupir soulagé de ses lèvres, jusqu'à ce que le bruit reprenne d'un coup. Pile au moment où la main de sa sœur se saisit à nouveau de son poignet pour l'aider à se débarrasser de l'objet. « A-Arrête », qu'il bafouille, doucement d'abord. Le bruit des tiroirs qui claquent résonne encore dans la pièce au moment où sa sœur dépose sous ses yeux des ciseaux et autres objets supposés les aider à arranger les choses. Elle réessaye et s'agace d'un nouvel échec. Le regard de Noeh passe du bracelet au visage de sa jumelle à plusieurs reprises. Est-ce qu'elle a remarqué ce qui s'est passé elle aussi ? Est-ce qu'elle a remarqué ? Est-ce qu'elle... « S-Sam... », que Noeh cherche à la raisonner, sans succès. Ils sont en train de s'éloigner et Sam ne semble pas être capable de le remarquer. Elle est coincée dans un cercle vicieux, entre hésitation quant à la méthode à adopter pour le défaire du bracelet et s'acharner à mettre en action la fameuse nouvelle idée. Elle ne le remarque même plus. Elle est à des années lumières de lui et Noeh continue à perdre pied alors que le bracelet poursuit son chemin de chanteur à la voix d'or. Jusqu'à ce que l'évidence explose aux yeux du cadet Callahan et, qu'au moment même où il le réalise, son cœur se serre et qu'il opère un geste de recul, avorté par les doigts de sa jumelle encore agrippés au bracelet. Noeh tente une deuxième fois de se reculer, avec plus de conviction, mais se confronte au même refus de sa sœur, trop absorbée pour comprendre d'instinct que quelque chose ne va pas. Inspirant doucement, l'étudiant cherche à ramener sa sœur à lui en secouant son autre main, avant de s'aider de celle-ci pour repousser l'emprise de sa jumelle. Mais rien. « SAM DEGAGE ! » Noeh repousse sa sœur aussi loin que le lui permettent ses maigres forces et son esprit remué, et il se recule brusquement jusqu'à venir cogner le meuble derrière lui. Il secoue la tête tout en continuant à la regarder. Il a besoin de comprendre. Il veut saisir ce qui se passe mais il n'arrive pas à prononcer les bons mots. Il manque débuter à plusieurs reprises, mais ce ne sont que des sons incompréhensibles qui passent ses lèvres tremblantes. Pourtant, les questions sont bien là. Et le silence aussi. Depuis qu'il s'est éloigné de Salomé plus rien ne trouble l'atmosphère qui se veut paisible de cet appartement savamment décoré. Noeh a l'impression qu'il vient tout juste de courir un marathon tant le souffle lui manque. « Pourquoi... Pourquoi est-ce qu'il s'est arrêté... Pourquoi est-ce qu'il- P-Pourquoi est-ce qu'il réagit quand t'es proche ? » Il ne la regarde plus mais constate du coin de l'oeil que son poignet gauche ne vibre plus au rythme infernal de la sonnerie du bracelet. « Putain, Sam », qu'il poursuit d'un ton tremblant. « Me dis pas que- » Il peut pas le dire. Jamais. Il ne le dira pas parce que ça rendra tout ce qui se passe bien trop réel et Noeh s'y refuse. Sam peut pas être... Elle ne peut pas faire partie de ces... Se rapprochant brutalement du plan de travail, le cadet Callahan cherche à se saisir d'un ciseau : d'abord de sa main droite toute repliée, qui ne l'aide pas à venir à bout de ce qu'il veut, puis il engage après plusieurs secondes gâchées sa main gauche dans l'assaut. Même s'il va galérer à couper le bracelet de cette main, il va se débrouiller pour en venir à bout. « Ça débloque, ça débloque, c'est impossible, nous- nous on peut pas être comme ça, ça se saurait, c'est pas dans nos gênes, je peux pas y croire, c'est de la folie, c'est de la pure folie, je- non, non, non j'suis pas d'accord, je veux pas » Noeh conteste. Il repousse l'évidence, s'éloigne comme il peut du destin. Il n'assume pas la possibilité de se retrouver en face d'une... C'est Sam. C'est juste Sam. Ça ne peut être que Sam. Sa jumelle, son sang, sa vie. C'est n'est qu'elle, à deux pas de lui, ce que son regard tendre qui croise le sien. L'étudiant exulte les marques d'inquiétude qu'il décèle malgré lui dans les prunelles de sa sœur. Est-ce que c'est son rôle de se préoccuper de lui, là, maintenant ? Noeh sait que non. Mais il doit faire flipper. Avec son visage qui perd toute notion de couleur vitale et les mots qu'il bégaye en de petits murmures à peine audibles. Mais avant qu'elle ne fasse la moindre chose, le moindre pas, n'ait la moindre attention envers lui, Noeh relève son regard dans le sien. Toute trace de panique a disparu ; on ne peut plus y deviner que de la colère, une fureur qu'il n'avait jamais encore ressenti pour sa jumelle. « T'approches pas. » Et si elle le touchait encore ? Et si elle était comme Adriel ? Depuis quand est-ce qu'elle ment ? Noeh a l'impression d'être en plein milieu d'un cauchemar. A force d'essayer de se défaire seul du bracelet, il abandonne. Toute force vitale le délaisse pour se barrer au loin et son bras vient longer son corps soudain amorphe. Au moins, il ne pourra plus se blesser dans un accès de connerie, pour toujours prouver qu'il peut se débrouiller seul, mais ses doigts continuent de presser le ciseau comme si ce dernier pouvait lui éviter de s'écrouler sur le carrelage de la cuisine. « Qu'est-ce tu es ? » La question ricoche contre son propre cœur. Comme si elle n'était plus sa sœur, comme s'il venait d'oublier le temps d'un instant tous leurs souvenirs, comme si tout venait de changer. C'est peut-être le cas. Noeh est tellement paumé qu'il ne gère plus ce qui passe la barrière de son esprit ou de ses lèvres. Il fixe juste d'un regard vide de vie le visage de cette personne qui lui semble à ses années lumières de lui, alors qu'elle était il y a deux secondes à peine le centre de son univers.
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Salomé Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeVen 15 Jan 2016 - 20:54

this could be the end of everything

CRACKLE BONES

Elle sent à peine le poignet qui lui échappe, les doigts qui luttent pour se défaire de son emprise. Elle n'entend pas son nom, elle n'entend plus la voix de Noeh. Le cri strident qui s'élève du bracelet efface toute autre chose, l'engloutit doucement dans une spirale infernale dont elle ne parvient à se défaire. Ses nerfs menacent de la lâcher, s'électrisant un peu plus à chaque seconde supplémentaire. Et puis vient l'impact. Les mains qui la repoussent et les mots qui la déchirent toute entière, tandis qu'elle vacille sur quelques pas de recul. Elle ne perd pas l'équilibre, crispe ses mains sur le rebord de l'élément de cuisine qui accueille son dos. Pourtant, elle ressent toute la violence, tout le désespoir de ce geste, et son souffle meurt dans sa gorge qui se serre. Les battements de son coeur ont remplacé la sonnerie, martelant ses tympans tandis que sa vue se brouille, effaçant doucement Noeh de son champ de vision. Elle tremble de tout son corps, Sam, ses jambes semblent prêtes à défaillir et elle s'accroche de toutes ses forces au meuble derrière elle. Elle attend les mots qui vont suivre avec une appréhension qui noue ses tripes et manquent de retourner son estomac,  s'accrochant au maigre espoir qui lui reste de l'entendre prononcer toute autre chose. Sa colère contre ce bracelet qu'elle n'arrive pas à lui enlever. Contre son mécanisme qui ne cesse de s'activer sans raisons apparentes. Les lèvres à demi-ouvertes, elle le fixe, suppliante. Tout, tout mais pas ça, Noeh.

Mais il sait, il a compris. Tout s'effondre, l'appartement achève de s'assombrir. Elle a envie de hurler, de tout renverser autour d'elle, de se briser les phalanges contre les murs encore et encore, jusqu'à n'en plus rien ressentir. Elle ne bouge pas d'un centimètre, pourtant, les pieds scellés dans leur position sans daigner effectuer le moindre mouvement. Tout se bouscule à l'intérieur, la douleur chemine le long des os et lacère son être de part en part. Elle ne le dira pas. Elle ne peut pas le dire sans s'effondrer, pas à lui, pas à Noeh. Il s'approche et elle semble prête à dire quelque chose, avant de réaliser qu'il ne vient pas vers elle. Il maintient la distance, comme si elle allait lui sauter dessus d'un instant à l'autre pour lui dévoiler toute l'étendue de l'ignominie qu'elle porte en elle. C'est ce qu'elle ressent tout au fond d'elle, et ça la tétanise. Mécaniquement, ses yeux suivent les gestes de son frère, ces gestes désormais tellement inutiles. Elle ne cherche même plus à l'aider. C'est terminé. Il sait. Ses paupières se ferment doucement, comme si une fois dans le noir tout allait s'effacer. C'est ce qu'il lui disait, quand ils étaient gosses, et qu'elle se retrouvait à grimper dans son lit au beau milieu de la nuit. Ferme les yeux Sam, c'est rien du tout. Et ces mutants qu'elle croyait voir tapis dans l'ombre disparaissaient doucement à l'aube des terreurs nocturnes. Mais aujourd'hui, rien ne s'efface. Ils n'ont plus rien des mômes qui fonctionnaient à deux, elle n'a plus rien de cette gamine qu'il accueillait d'une étreinte rassurante tandis qu'elle ne s'autorisait à craquer que dans la pénombre de la nuit. Il n'a plus rien de ce frère qui essuyait les larmes d'un geste tendre, gardant le secret des doutes et des peines qu'elle cachait au lever du soleil. Et en laissant les ténèbres tomber derrière ses paupières, plus rien ne disparait. Plus rien ne disparaîtrait jamais.

Les yeux s'ouvrent et elle le regarde, ses prunelles parcourent chaque trait tendu de son visage livide, et elle ne peut rien faire. Elle n'a pas le droit de faire quoi que ce soit de plus. Spectatrice impuissante tandis qu'il réalise. Et elle ne peut s'approcher pour l'enlacer, elle ne peut exécuter le moindre pas dans sa direction parce que quand elle essaye, rassemblant ce qui lui reste de courage pour avancer, les mots claquent dans l'air et la meurtrissent si profondément qu'elle en plaque une main sur sa poitrine. Comme s'il venait de l'atteindre physiquement, l'ordre brise ses côtes pour transpercer son coeur. Tout disparaît autour d'elle tandis que la marée s'élève devant la jade de ses iris, noyant la colère qu'elle lit dans ceux de sa moitié, cette haine qu'elle ne peut soutenir. Il ne peut pas la regarder comme ça, il ne l'a jamais regardée comme ça. Elle veut lui dire qu'elle ne lui fera pas de mal, qu'il n'a pas à la repousser, que ce n'est pas de sa faute après tout. Qu'elle se hait pour ce qu'elle est. Mais en un battement de cils, il réapparaît, les larmes chassées brutalement roulent sur ses joues de manière désordonnée, brûlant sa chair comme des traînées acides. Qu'est-ce-que tu es. Un sanglot lui échappe et sa main se plaque instantanément sur ses lèvres pour réprimer tout ceux qui pourraient suivre. Ta soeur. Je suis ta soeur. Les mots sonnent faux même à l'intérieur de sa propre tête, et elle n'ose même pas les prononcer. Elle note la paire de ciseaux toujours fermement portée par son frère, leur éclat vrillant sa rétine en lui filant le vertige. Elle comprend enfin ce qu'a pu ressentir Lorcan, près d'un an plus tôt, lorsqu'il se trouvait dans sa position et qu'elle se trouvait encore à la place de celle qui posait les questions, couteau à la main, rage aux lèvres. Et elle aimerait encore mieux qu'il lui enfonce les lames dans le ventre plutôt que de la laisser comme ça, à devoir soutenir ces deux grands yeux qui la contemplent comme une étrangère. C'est à son tour à elle de maintenir la distance, de rester en retrait, tapie dans ce coin de cuisine comme un animal apeuré. Et elle la sent, cette vie qui lui file entre les doigts. Cette vie qui n'a de sens que pour lui. Sa voix se brise au premier mot prononcé. « Je suis comme lui. Dégénérée. » Les mots écorchent ses lèvres tandis que la voix d'Adriel résonne en parfait écho à l'intérieur de son crâne. Elle ne l'a jamais si bien ressenti qu'en cet instant, dans le regard de son frère, de son double qui ne lui renvoie plus que l'image infâme de ce que camouflent ses gènes. Elle ne se défend pas sur le coup, ses jambes la lâchent avant toute parole supplémentaire. L'échine glisse le long du meuble et les genoux heurtent le sol tandis qu'elle s'y retrouve assise maladroitement. Elle reste un instant là, bancale, les cheveux en bataille devant son visage. Cette posture misérable, à combien de reprise s'y est-elle retrouvée depuis un an ? Imbibée d'alcool, à s'écrouler au sol dans les lourds sanglots d'une âme désespérée ? Elle se retrouve brutalement projetée au point de départ, pitoyable, mille tourments pendus au coeur et l'attirant vers les abysses d'une fin certaine.

Sa nuque se redresse, sa tête s'incline en arrière tandis qu'elle reporte enfin son regard sur lui. Voilà ce qu'elle est. L'ombre d'elle-même. Les prunelles vidées de tout élan vital. La tête défoncée par tous ces mois à laisser les autres entrer dans sa tête, ou à se laisser entrer dans le leur, elle ne sait plus. Sa voix est rauque, s'effrite dans un murmure. « C'est arrivé juste après ton accident. J'ai rien voulu de tout ça. » Ses épaules sont lourdes, s'affaissent un peu plus durant la confession. Elle a l'impression d'attendre sa sentence, prostrée dans cette position de faiblesse. Elle laisse son sort aux mains de son frère, parce que de toute manière, il n'en a jamais été autrement. Et elle s'ose enfin aux paroles déterminantes, celles qui seront encore pire que les premières. L'aveu de sa monstruosité. L'aveu de sa capacité à entrer dans sa tête. « T'étais par terre, et toutes leurs pensées sont rentrées dans ma tête d'un coup. Parce que c'est ce que j'suis. Une dégénérée qui entend les pensées. » Elle ne sait pas bien si elle a prononcé la phrase en entier, ou si le murmure s'est disloqué avant qu'elle n'ait terminé, les spasmes de sa cage thoracique tentant en vain d'extérioriser les sanglots qu'elle retient. Il n'y a plus de place pour le mensonge, il la regarde déjà comme un monstre. La colère se mêle à la détresse et ronronne doucement au fond de son ventre, rappel muet de ces mois à se battre pour tenir, pour rester à ses côtés sans entrer dans son crâne, à croire naïvement qu'elle pourrait s'en sortir. Ces soirées à arpenter les pensées de Lorcan, pour apprendre à ne jamais s'introduire parmi celles de Noeh. Tout a été vain. Tout finit par s'effondrer. Ses yeux relevés une dernière fois vers lui se posent sur les ciseaux qu'il tient à la main. La crainte n'est pourtant pas liée au tranchant des lames, ni à ce qu'il pourrait en faire. Parce que ces peurs irrationnelles ne sont rien, en comparaison à celle qui la ronge de l'intérieur. « Me laisse pas, Noeh. Me laisse pas toute seule. » Mais elle sait déjà, Sam, que rien de tout cela ne va disparaître.

Rien, à part lui.
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Noeh Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeSam 23 Jan 2016 - 0:16

Noeh se traite mentalement de connard. C'est une toute petite voix, cette maigre partie de lui qui trouve quelque chose de rationnel à cette situation paranormale, qui l'insulte pour le secouer, mais aussi pour lui démontrer que c'est pas de cette façon qu'il va régler les choses. L'aveu que vient de lui faire Sam fait juste trop mal. Il engendre une réaction chez lui qu'il n'a jamais eu à gérer avant. Si seulement il avait pu s'y préparer. Si, rien qu'une fois, elle avait laissé le doute envahir ses pensées, pour qu'il se marre tout seul à songer à cet échange. L'étudiant n'y aurait pas cru, mais au moins aujourd'hui n'aurait pas été une grande première. A présent, il se déteste. Il se maudit de réagir de la sorte mais il ne voit pas comment faire autrement. Il repousse tout le monde depuis des mois, ceux en qui il avait confiance avant l'accident, pour leur éviter de souffrir avec lui, mais ce qui se passe là, maintenant, dépasse son entendement le plus profond. Il éloigne Salomé parce qu'il a peur. Il a la frousse qu'elle fasse quelque chose contre lui comme Adriel a pu le faire. Malheureusement, même mort, ce dernier restera sa seule référence. Sa triste, seule et unique référence, celle qui le terrifie encore la nuit, celle qui l'empêche de reprendre le cours d'une vie « normale ». Noeh continue à serrer son pauvre ciseau. Il a peur de le lâcher. Il s'inquiète aussi, un bref instant, de faire peur à Sam. Mais il doute qu'elle puisse avoir plus peur de ce qu'il peut faire que lui de ce dont elle est capable. Il ne sait pas comment se comporter face à elle, ni quelle position adopter exactement. Deux extrêmes luttent en son fort intérieur et ses pensées déjà bouleversées n'en sont que plus affectées : est-ce qu'il doit la prendre au sérieux ? Est-ce qu'il doit croire ce que son cerveau vient de mettre en évidence ? Est-ce qu'il doit la soutenir ? Est-ce qu'il doit... Noeh se souvient soudain de quelle famille il fait partie. Des Callahan. De ces putains de Callahan. Et elle aussi. Et il tilte qu'il y a un truc qui ne peut pas coller dans tout ça. Alors que son regard ne parvenait pas à se reposer sur son visage, l'ancien pianiste s'efforce de la regarder lorsqu'il perçoit son corps rejoindre le sol dans un coin de son champ de vision. Il la regarde d'abord plus qu'il n'écoute. Noeh encaisse sans rien dire. Il se demande quand est-ce que ça va s'arrêter. Que ce soit les mots de Sam, les battements frénétiques de son cœur, les larmes qui ont envie de rouler sur ses joues, la peur qui annihile ses sens. Il aimerait que tout ça s'arrête sur-le-champ. Toutefois Noeh a le sentiment que toutes ses maigres forces l'ont abandonné. Il ne peut pas exercer le moindre mouvement, alors il continue à se raccrocher à ce ciseau dans sa main gauche et à ces jambes qui tiennent encore debout par il ne sait quel miracle. Puis il y a ce dégoût qui filtre par ses veines, avant de venir laisser un goût amer contre sa langue. « Je peux pas. Co-comment tu veux que je reste là ? » Il crache sa question, comme à sa mauvaise habitude. Sauf qu'aujourd'hui, elle prend une dimension si différente de celle qu'une telle interrogation cache en temps normal que ça lui arrache la gueule de la prononcer. Un peu comme si, dans le malheur, la connexion qu'ils peuvent ressentir tous les deux prenait plus de place qu'à l'accoutumée. Blesser Sam revient à blesser Noeh. La repousser revient à se repousser. C'est une espère de force mentale et physique que le cadet Callahan expérimente au mauvais moment mais qu'il n'a pas le choix de faire intervenir ou non. Elle le dégoûte et lui donne envie de se rapprocher à la fois. « J'ai envie de vomir. » Son murmure est ponctué par le ciseau qui rejoint sa place initiale sur le plan de travail de la cuisine. Noeh entreprend de s'en éloigne sans tomber, avant de s'appuyer contre le mur le plus proche (et par définition le plus éloigné possible de Sam). Il a paumé sa béquille un peu plus tôt, il a pas envie de la chercher maintenant. La supplique de sa jumelle l'oblige à braquer toute son attention sur elle. Pourquoi est-ce qu'il a l'impression de pas la reconnaître ? Ça fait des années qu'il la côtoie, qu'il partage plus qu'un truc basique de frère et sœur avec elle, qu'elle est sa jumelle, à la vie comme à la mort, alors pourquoi, pourquoi, est-ce qu'elle lui semble si étrangère ? « Je te laisse pas toute seule. C'est toi qui m'abandonne. » C'est pas lui qui a développé il ne sait quoi. C'est pas lui qui joue les apprentis mutants. C'est pas lui qui n'a rien dit. C'est pas de sa faute ce qui lui arrive, c'est juste pas de sa faute... Mais la culpabilité est déjà là. Noeh fait une association d'idées qui le mène à penser que s'il avait écouté ses parents plus jeune, à la base, au commencement, il aurait suivi ces foutus cours pour chasser, il ne serait pas partie couler des jours supposés heureux à la fac, et il n'aurait pas fait de mauvaise rencontre. Il n'aurait pas croisé le chemin d'Adriel et Sam n'en serait pas là. « T'avais pas le droit de me faire ça. » Sur le coup, il choisit la facilité. Il préfère rejeter toute la faute sur elle pour partager un peu les torts. C'est juste tellement plus simple, et moins douloureux. Noeh aura tout le temps de s'en vouloir ; en supposant qu'il n'a pas déjà commencé à ce maudire depuis qu'il a entendu les mots passer les lèvres de sa sœur. « Bordel. » L'interjection résonne entre les quatre murs de la pièce. Avec tout ça, les autres informations sont remontées moins vite jusqu'à son cerveau. Son ton plus brusque, soudain, presque exprimé de façon trop audible pour aller avec la voix brouillée qu'il vient d'employer à l'instant. Se reculant d'un nouveau pas sur le côté, pour mettre encore un peu de distance entre lui et Sam, Noeh cherche à se concentrer, malgré la tempête qui sévit dans tout son être, si elle est en train de toucher à ses pensées. Si elle est en train de faire quoi que ce soit. « Tu-tu lis dans mes pensées ? Là ?! Maintenant ? T'entends ce que je pense ?! », qu'il s'exclame d'un ton paniqué. Si Noeh avait un jour démontré des signes avant-coureurs d'une quelconque forme d'asthme, on aurait pu le croire en pleine crise de manque d'air vital. Mais là, asthme ou non, c'est le cas. Il a l'impression que l'espace déjà réduit de la pièce cherche à étriper son espace vital pour le mettre plus bas que terre. De toutes les mutations possibles et imaginables, il a fallu que sa sœur devienne une espèce de télépathe capable de deviner le moindre truc qui passe dans sa tête. C'est supposé arriver que dans les films, ça, dans les putains de films de merde sur des pouvoirs à la con, pas dans la vraie vie, pas à travers Sam, pas entre eux. La pilule passe pas et Noeh se passe une main tremblante sur les traits avant qu'un sanglot étranglé ne l'empêche de reprendre d'instinct la parole. Beaucoup trop de choses envisagent de sortir d'un coup et l'étudiant ne sait plus comment gérer ce poids bien trop lourd qui prend appuis sur ses frêles épaules. « J'suis pas d'accord, t'as pas le droit de faire ça, j'suis sûr que je peux te bloquer, je peux t'en empêcher, je veux pas- c'est pas possible, tu vas- NON. » Son refus ricoche entre ses propres tempes. Noeh veut continuer à cacher qu'il souffre de tout ce qui se passe dans sa vie, tout ce qu'il peut encore ressentir pour Aspen, ou même commencer à ressentir pour Pietra, il veut garder pour lui tous ces doutes et ces douleurs qui le hantent parce qu'il refuse de les partager avec qui que ce soit. Et surtout pas Sam. Pas elle, pas sa jolie Sam, pas sa sœur, pas sa jumelle, c'est une chose qu'il ne veut pas faire. Elle est supposée être celle des deux qui se relèvera la première de ce qui lui est arrivé, sur qui est-ce qu'il va pouvoir prendre modèle maintenant ? Puis merde, c'est sa vie privée. Elle a pas à lire dans ses pensées, ou à faire genre qu'elle peut pas le maîtriser. Il a des secrets, il a des pensées qui dépassent sa propre décision parfois, puis il est capable de songer à plein de trucs à la fois, tout ça ça va tellement vite, mais c'est censé être rien qu'à lui. Ça lui appartient. « T'as pas le droit... », qu'il souffle du bout des lèvres, tout en relevant une dernière fois son regard dans le sien. Noeh tient plus en place. Il supporte plus de se trouver aussi proche d'elle, et il a pas envie qu'elle début dès à présent la lecture intensive de sa boîte crânienne.  Il a pas non plus envie de dégueuler insultes et reproches, mélangés à son dernier repas, à même sa cuisine. « Faut que je sorte d'ici. » D'un regard absent, il se met en quête de sa béquille. Une fois trouvée, il s'arrange pour ne plus la lâcher et quitter la pièce sans se retourner.

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Salomé Callahan
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MessageSujet: Re: come and visit my world.   come and visit my world. Icon_minitimeLun 8 Fév 2016 - 22:33

this could be the end of everything

CRACKLE BONES

Chaque phrase est pire que la précédente. L'atteint un peu plus profondément. Elle voudrait lui dire qu'elle aussi, elle se donne envie de vomir parfois, moins souvent qu'avant mais que c'est pas pour ça que sa condition ne la répugne pas. Que ça s'estompe avec le temps, si tant est qu'un point d'ancrage suffisamment solide soit là pour limiter les dégâts, aider à garder la tête hors de l'eau pour ne pas se noyer dans ses propres pensées. Il lui dit qu'elle l'abandonne, et ça la tue à petit feu. Elle a tout fait pour que ce moment n'arrive pas, pour ne jamais l'abandonner. Même après la fête des fondateurs, alors qu'elle avait furieusement envie de tout lâcher, de se laisser aller à un long sommeil sans rêve sans être sûre de se réveiller. Elle avait essayé de rester éveillée, de garder les pieds sur Terre pour lui, pour l'aider à se relever parce qu'elle lui avait promis qu'elle serait là, qu'elle avait cru en cette promesse et que désormais tous ces mots lui semblaient dérisoires. Mais elle se tait, elle se rend compte que ses paroles à elle aussi causent de plus en plus de dégâts, elle le note sur chaque geste de sa moitié. Sa douleur la percute de plein fouet, et une culpabilité acide s'immisce sous sa peau, carbonise son être, la tétanise sur place. Elle l'observe qui s'éloigne, un peu plus encore, alors qu'elle a foutrement plus le droit de le retenir, d'esquisser le moindre geste dans sa direction. Et ses mots cinglent l'air, elle les reçoit comme autant de coups assénés en plein visage, décomposant un peu plus ses traits à chaque nouvelle salve de panique, de dégoût, et elle s'étrangle à moitié. « Non !! » Elle a crié, plus fort qu'elle ne s'en croyait capable, replongeant son regard dans le sien, s'y accrochant comme pour le défier de détourner le regard. Son coeur semble prêt à jaillir hors de sa poitrine, disséqué par les paroles mordantes de son frère. Douloureuses pulsations la déchirant de l'intérieur. « Non, j'suis pas dans ta tête putain, j'y suis pas, j'y... » Le sanglot de Noeh l'achève, rappelant inévitablement à la surface tous ceux qu'elle réfrène, et elle se mord les lèvres à s'en blesser, les yeux gorgés de larmes et la gorge nouée. Ses dents se serrent alors qu'elle attrape le rebord du plan de travail, qu'elle pousse sur ses bras tremblants pour regagner un semblant de contenance, d'allure convenable. Elle se redresse pour lui faire face, pour lui prouver qu'elle n'est pas que cette loque qui se traîne par terre en pleurnichant, qu'elle ne se glisse pas dans son crâne comme un serpent alors que son monde s'effondre. Mais les mots suivant ne calment pas le déluge, l'orage gronde derrière chaque syllabe et elle ne veut plus entendre, elle ne peut plus entendre ces reproches, pas dans sa voix à lui. N'importe qui, mais pas lui. Ses murmures font échos à ses propres pensées, ces réflexions qu'elle s'est faite il y a près d'un an, s'assurant que c'était impossible, qu'elle n'en était pas capable, que le destin ne pouvait pas se montrer si ironique que ça. Le déni, ce même déni qu'elle entend dans la voix de son frère, elle s'est laissée allée à y croire, des mois durant, essayant d'oublier, de se persuader que les voix n'existaient pas, qu'il ne s'agissait que d'un manque cruel de sommeil, qu'il ne pouvait en être autrement. Elle a tant espéré, Salomé, à prier mille dieux de lui arracher cette saloperie des veines, elle qui ne croyait pourtant plus en rien. Dans le dernier regard de Noeh, toute sa dégénerescence lui apparaît, plus clairement que jamais. Elle se sent monstrueuse, indigne de respirer le même air que sa moitié. Et c'est comme si elle acceptait la fatalité. Ses épaules crispées retombent mollement tandis que sa nuque se détend sans qu'elle ne s'en rende compte. Ses mains frissonnent, ses doigts qui ne peuvent plus s'accrocher aux siens, qui ne peuvent plus l'enlacer. Ses lèvres sèches ne savent plus quelle parole prononcer, les hurlements restent confinés derrière ses côtes, se bousculent à l'intérieur, terminent de dilacérer ses nerfs. Elle a peur d'ouvrir la bouche, d'essayer d'expliquer que non, elle n'est pas entrée dans sa tête, que le mal n'est pas encore fait. Mais elle n'est plus capable de formuler la moindre phrase, son cerveau refuse de réfléchir davantage, dernier mécanisme enclenché pour se protéger, se protéger des mots cinglants et se protéger d'elle-même. Un gouffre semble s'ouvrir sous ses pieds alors qu'il se détourne, qu'elle ne peut même pas bouger pour le retenir, parce qu'il ne restera pas, elle le sait, elle le connaît, et elle sait. C'est terminé.

Elle tend l'oreille tandis que le bruit de ses pas traverse le salon, rythmant son coeur à chaque grincement du parquet. Elle retient son souffle, garde les yeux bien ouverts, comme s'ils allaient s'arrêter, comme pour s'accrocher à un infime espoir irréaliste de l'entendre revenir. Bientôt, le silence. Le silence et plus rien à quoi s'accrocher. Ce sont des petits pas timides vers l'entrée, la porte qu'il a laissé ouverte en partant qu'elle repousse doucement. Et puis, elle se tourne, contemple son appartement désespérément vide. L'espoir s'envole et l'horreur la frappe dans la seconde. Elle l'a perdu. Elle l'a perdu et avec lui, elle a tout perdu. Tout se renverse sur son passage. Les chaises. Ce qui se trouve sur les tables. Tout se casse, tout s'envole, et elle brise, elle déchire, elle ruine tout ce qui se trouve sur son passage, sous les cris de son coeur dévasté. Elle n'en a plus rien à foutre. C'est terminé. Ses ongles griffent ses traits ravagés par les larmes, s'acharnent à sang sur ses tempes maudites comme si l'abomination allait en sortir, retirer ses serres de son esprit et la laisser en paix. Sa propre voix s'empare de son crâne, lui renvoie ses pires travers, ses mensonges, tout ce qu'elle a pu faire pour cacher la monstruosité, comme elle a repoussé tout le monde, son père, sa mère, Aspen, Kingsley, Matthias, Noeh, tous les visages sont passés en revue dans sa tête tandis qu'elle laisse l'alcool envahir ses veines, ranimer le feu qui dévore ses tripes depuis qu'il est parti, depuis que ses mots n'ont cessé de revenir hanter son cortex inlassablement. L'horloge tourne, rien ne s'apaise, la descente aux enfers s'effectue insidieusement, sans qu'elle ne retrouve la lumière. Jusqu'à ce que les ciseaux lui tombent sous la main. L'éclat lui défonce la rétine, et elle y resserre sa prise, les contemple. La lame glisse sur sa peau sans l'entailler, évalue le tranchant, pique le bout de son index pour y contempler la formation rougeâtre. Le temps s'arrête. Son coeur s'apaise pour quelques secondes, la laisse regagner un semblant de calme, de réflexion, le temps de réaliser ce qu'elle est en train de faire, à jouer avec le feu. Le temps de se demander si elle en est capable, si c'est ce qu'elle veut. Elle appuie doucement sur la chair de l'avant bras, observe le muscle s'enfoncer. Capable, sans doute. Mais quelque chose lui revient, un murmure, puis un ton assuré, suffisamment assuré pour deux, et les larmes remontent une nouvelle fois à ses yeux. Bien sûr que si. Tu peux tenir un an, et plus encore. On est deux, maintenant. On va très bien s’en sortir. Lorcan. Elle doit voir Lorcan. Tout de suite.


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