All monsters are human

Le soleil disparaissait derrière les tours de bétons, sonnant enfin la fin d'une longue journée de travail harassante. Ouvrier dans le bâtiment, il venait de commencer un nouveau chantier, avec de nouveaux collègues plus chiant les uns que les autres. Pourquoi les gens avaient-ils cette manie de vouloir lui parler ? Il ne chantait pourtant pas la vie, le visage gommer de tout sourire et sympathie pendant ses heures de boulot. La vérité étant qu'il détestait ce travail, lui qui avait un haut niveau d'étude dans son pays, il devait enchaîner les petits travaux merdiques pour subvenir à ses besoins à et ceux de sa petite-sœur. Il préférait se sacrifier pour elle, il était l'aîné, le grand-frère, l'homme. Latika avait une chance de réussir dans ce pays, encore plus depuis sa prise du sérum qui lui avait ôté son horrible pouvoir. L'Indien retira son casque et ses gants, le jean taché de terres et le débardeur souillé par la transpiration. Il n'avait envie que d'une seule chose : prendre une putain de douche. L'avantage des chantiers, c'était les sanitaires de fortunes installées pour le confort des ouvriers, eux qui trimaient toute la journée pour offrir aux gens de nouveaux bâtiments, de nouveaux commerces où ils iraient dépenser bêtement leurs argents. La zone industrielle se vidait peu à peu, les travailleurs rentrant chez eux, les boutiques fermant pour la nuit, le calme avant la tempête. Il prit une douche rapide, après que tout le monde soit partit. Il s'offrit alors le luxe d'allumer une cigarette, histoire de décompresser au calme. Sa soeur dormant chez une amie, il n'avait pas forcément envie de retrouver la solitude et le silence de l'appartement qu'il partageait avec elle. Sortir ? Mais pour aller où ... Dix ans bientôt qu'il était sur le sol américain et pourtant, il ne comptait presque pas d'amis dans son cercle. L'ennui et la monotonie étant ses fidèles alliées dans la vie, triste réalité.

L'Indien retrouva le confort de ses vêtements, un jean simple, un tee-shirt blanc et des baskets, rien de très fashion. Le dernier bus étant passé, c'est à pied qu'il devrait retrouver le centre de Radcliff, blasé. Mains dans les poches, écouteurs dans les oreilles qui crachaient de la musique folk, il ne remarqua même pas les deux vans noirs qui roulaient au pas derrière lui. Perdu dans la musique et dans ses pensées chaotiques, le brun tourna alors la tête, se sentant épié. C'est fou comme le cerveau pouvait créer toutes sortes d’affabulations, ce sentiment d'être traqué lorsqu'on se retrouve seul ... Et si ce n'était pas qu'une impression ? Parano, le grand brun prit une petite ruelle dont les imposantes voitures ne pouvaient pas passer. Sourire victorieux, naïveté insolente. Deux hommes en costumes sombres semblaient attendre l'Indien.  « Comment vas ta sœur ? » Demanda un des hommes avec une voix qui sonnait familière dans la tête de Kahl. Son cœur s’accéléra, son esprit fit vite le rapprochement avec l'un des hunters qui avaient traqué les deux Suresh à New-York. Comment c'était possible ? Comment avaient-ils pu remonter jusqu'à lui ? Figé, il retrouva rapidement ses réflexes d'animal traqué, prenant alors la fuite dans la direction opposée. Ses poumons s'embrasèrent dans la course poursuite, des balles commençant même à jaillir dans sa direction, ciblé, traqué, dans la merde. Il trouva refuge derrière une grosse poubelle, pris au piège comme un cerf face aux chasseurs. Il ferma les yeux, les poings serrés, lorsqu'il les rouvrit, son regard était totalement blanc, celui-ci levé vers le ciel. La douce nuit étoilée laissa place à des nuages qui cachèrent les astres,  un vent orageux se leva pour balayer les détritus sur l’asphalte. Le tonnerre commença à gronder sévèrement, comme pour mettre en garde les deux hunters. Il détestait utiliser ses pouvoirs pour faire du tord, mais il devait bien se défendre. Il se leva alors en tendant la main vers les deux chasseurs, des éclairs se mirent à zébrer le ciel et dans un geste, la foudre tomba à quelques mètres des deux hommes qui échappèrent de justesse à une mort atroce. Sonnés par le choque, il en profita pour prendre la fuite de nouveau, mais un troisième homme lui barra la route et lui envoya un coup de taser dans le ventre. Il hurla sa douleur en même temps que le tonnerre, à l'unisson face à la barbarie humaine. Il tomba à genoux sur le goudron, vaincu, en silence.  

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Son cœur battait encore à la chamade, sentant encore l'électricité parcourir son corps après la décharge reçue dans son abdomen. Quelques gouttes de sueur déferlèrent sur son visage crispé par la douleur. Son seul crime ? Être différent. L'histoire se répétant sans cesse, traité comme un monstre. Il releva son regard blanc dont les pupilles retrouvèrent leurs teintes chocolat naturelle. Le coup reçu l'empêchait d'utiliser ses pouvoirs, se sentant alors pris au piège, à la merci de ce chasseur. Il avait réussi à vivre pendant huit ans sans être traqué, il avait quitté son pays natal pour aider sa sœur, ayant renoncé à ses études, à sa famille et ses amis pour au final, survivre. La seule satisfaction étant la prise du sérum par sa sœur, celle-ci n'étant plus la cible des hunters, c'était au tour de Kahl. Contrairement à Latika, sa mutation n'était pas une malédiction, mais plutôt un véritable don des Dieux. Il avait la capacité de contrôler les éléments météorologiques, se disant que avec un don pareil, il pourrait lutter contre la sécheresse meurtrière de certains pays, d'offrir de meilleures récoltes pour ces terres sèches, infertiles et oubliées par trop de monde. Jamais il ne renoncerait à ses pouvoirs, c'était comme lui enlever une partie de son âme. Le sourire perfide du chasseur en disait long sur ses mauvaises intentions. Le hunter sortit alors une arme de sa veste, prêt à s'en servir, mais un nouveau protagoniste entra dans la scène. Tout se déroula si vite, qu'il avait du mal à suivre ce mystérieux homme dans ces mouvements. Il semblait voler, touchant à peine le sol. Une grâce et une agilité surhumaine dans ces gestes qui le trahissait sur sa véritable nature. Le transmutant aux yeux jaunes mit au sol le chasseur avec une facilité déconcertante. Dépêche, il faut qu'on file ! Kahl observa la main tendu devant lui et n'hésita pas à la prendre pour se relever. Encore sous le choque du coup précédent, il puisa dans ses dernières forces pour fuir en compagnie du nouveau transmutant.

Les deux mutants erraient dans la zone industrielle, il emmena alors son nouveau camarade de fortune dans un chantier en construction sur lequel il travaillait ces derniers jours. De là où ils se trouvaient, ils pouvaient non seulement se cacher, mais aussi voir si une voiture arriverait. Assis contre un mur, il reprenait sa respiration, encore haletant par la course, n'ayant pas du tout les mêmes capacités physiques du mutant aux yeux félin. « Merci ... Sans toi j'étais foutu. » Il se leva et tendit une main reconnaissante vers le mutant. « Moi c'est Kahl et toi ? » Il prit le temps de le détailler, il avait l'air d'être sympathique, bien qu'il avait apprit à ne pas se fier aux apparences. Il avait toujours ce côté méfiant envers les nouvelles personnes qu'il croisait, mais il se sentait plutôt serein vis à vis de lui. Il utilisa son tee-shirt pour éponger la sueur sur son front, dévoilant alors la marque du taser sur ses abdominaux, stigmate de la bêtise humaine. Un bruit de crissement de pneus sortit les hommes du petit moment de répit ... Au loin, ils pouvaient voir les deux voitures avancer dans leurs directions. « Putain ils lâcheront jamais l'affaire ... » Il en avait marre d'être pacifiste, il jeta un coup d’œil à Jorden et ses pupilles redevinrent blanches. La vengeance est un plat qui se mange froid songea l'Indien. La brise légère d'été se transforma rapidement en de grosse bourrasques de vents puissantes et violentes en direction des deux autos. Les voitures tremblèrent, à la limite de dévier de leurs trajectoires. Cependant, il était encore trop épuisé par le coup reçue et se contenta de lever un brouillard épais qui forcèrent les deux véhicules à s'arrêter à cinq cent mètres du chantier. Les hunters étaient perdu dans la brume, il se tourna alors vers Jorden. « On pourrait essayer de piquer une de leurs voitures ? » Ils devaient rejoindre le centre-ville, ils y seraient plus en sécurité que perdu dans cette immense zone industrielle où se cacher était presque impossible. Il ramassa une barre de fer, arme de fortune pour une bataille pas du tout préparée ... Quant à la guerre, elle faisait déjà rage depuis un moment.

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