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 (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?

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Ailionora Townshend
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MessageSujet: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeMar 20 Déc 2016 - 12:05

Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?
Razen & Ailionora



La langue coincée entre les dents et les sourcils froncés, je savais que cette étape était cruciale, et que de sa réussite dépendait celle de la soirée. Je n'avais pas le droit à l'erreur, ou plutôt je me l'interdisais. Avec un soupir de contentement je me baissais, les yeux au niveau du verre doseur, et appréciais la généreuse quantité de rhum que j'y avais versé, respectant parfaitement cette recette de lait de poule trouvée sur internet. A vrai dire, j'étais loin d'être une grande cuisinière. Ma grand-mère m'avait appris deux ou trois trucs quand j'étais gamine, mais après sa mort et tous les... Problèmes rencontrées avec ma mère, j'avais plus ou moins laissé tomber l'idée de devenir un cordon bleu. Quant au repas de Noël, j'avais laissé tomber le jour où ma charmante génitrice était rentrée pour le réveillon, encore à moitié ivre, et m'avait craché au visage qu'il était hors de question qu'elle touche à l'immondice répondant au doux nom de bûche de Noël au chocolat que j'avais entreposé dans le frigo. J'avais douze ans, elle s'attendait à quoi ?

Alors oui, Noël me laissait cette saveur douce-amère sur la langue, j'en redoutais les fêtes autant que je les aimais et... Et mon dernier Noël s'était résumé à moi, un saucisson acheté au marché, un gros morceau de fromage et les abrutissements télévisuels réservés aux gens qui le passait seuls, pendant que ma mère faisait régner la justice dans les rues, à grand coups de PV placardés sur des pare-brise couverts de neige. Moui alors comme ça ça faisait un peu pitié, la gamine de 16 ans que j'étais à l'époque, réveillonnant seule parce que sa mère travaillait et que son père était censé ne pas exister. Je lui avait écris un paquet de lettres, ce soir-là ! Certaines teintées de ma colère et de mes larmes, d'autres banales pour lui résumer les quatre ou cinq films que j'avais vu dans la soirée, les dernières pour lui raconter des blagues que de toute manière il ne pourrait jamais lire.

La vaaaache ! A bien y réfléchir, j'avais passé de sacrés Noël de merde, ces dernières années ! Le lait de poule ne serait pas de trop pour digérer tout ça ! Du moins si je le réussissais... Car pour le moment, la cuisine était dans un bordel indescriptible et, mon père n'étant bien sûr pas au courant de ce que je préparais, il valait mieux pour moi que tout soit rangé à son retour, où je risquais de passer un sale quart d'heure. Après avoir mis à chauffer tous les ingrédients, je tournais sur moi-même pour me rendre compte du fiasco. Des coquilles d'oeufs par terre, de la farine sur tous les meubles, je ne ressemblais à rien, toute échevelée que j'étais, mais au moins, j'avais fais l'effort de faire un gâteau de Noël, moi qui conspuais de toutes mes forces les aliments sucrés. Il ne me restait plus qu'à couper fromage, saucisson et cornichons et à tenter de faire un truc joli – de toute manière il n'y a que moi qui pourrais admirer le non travail de l'artiste – et à faire cuire les énooooormes burgers festifs dont j'avais préparé le pain et les accompagnements. Non, pour le coup j'étais fière de moi ! Bon à part pour le bordel ambiant...

Une fois le lait de poule prêt, je l'entreposais au frigo avec le reste, grimaçais comme une enfant de quatre ans... Et m'attelais au ménage et nettoyage. J'vous jure, une vraie petite cendrillon ! Pourtant, j'étais devenue maniaque avec les années, je n'aimais ni la saleté, ni le désordre, tant j'avais eu en horreur cette période où la maison de ma mère avait davantage eu l'air d'une porcherie qu'autre chose. Une bonne heure plus tard, la cuisine brillait, et il ne restait plus rien de la reconstitution criante de vérité de Verdun qu'avait pu être la cuisine auparavant. Coiffée de deux couettes que je n'avais pas réussi à faire à la même hauteur – ce qui me donnait l'air particulièrement ridicule – d'un serre tête corne de rennes et d'un magnifique pull de Noël rouge pétant orné d'un gros sapin vert, j'aurais pu avoir l'air parfaitement dans le thème dans cette trace de farine sur le nez qui n'avait rien à faire là.

Alors que j'entendais la clé tourner dans la serrure, je m'empressais d'aller chercher deux verres de lait de poule pour aller accueillir comme il se doit mon royal paternel. Tout sourire, me retenant de sautiller, je lâchais un :

« Joyeux Noëëëëël, papaaaa !! »

Que j'aurais voulu un peu moins fort et aigu. Là, ça faisait plus agression ou sirène de pompier qu'autre chose.
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Razen Townshend
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeMar 27 Déc 2016 - 10:17

Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?
Razen & Ailionora



On pourrait croire que chez des malfrats comme le sont depuis tant d’années les Townshend, Noël passerait à la trappe aussi bien que toutes les fêtes et surtout les plus joyeuses, mais c’est une grossière, très grossière erreur. Razen a toujours attaché une importance démesurée à la famille. Toujours. Quand ils étaient en famille d’accueil, il mettait un point d’honneur à trouver des cadeaux pour ses deux petits frères, quitte à piocher dans les jouets des autres enfants de la famille qui les hébergeait, ou à voler discrètement dans les magasins. Il mettait un point d’honneur, aussi, à préparer des décorations, à anticiper le soir de Noël, à chantonner tous les airs qu’il connaissait, à en inventer des nouveaux quand l’inspiration lui venait et plus encore, à être encore plus aux petits soins avec Ren et Alvin qu’à son habitude. Puis, quand Ren était parti et qu’Alvin et lui étaient restés seuls, enfin indépendants, enfin autonomes, Razen a toujours insisté sur Noël, sur la famille, sur leur noyau familial malmené mais toujours aussi indestructible. Un noyau qu’il a fait voler en éclats il y a quelques mois maintenant.

Razen n’a pas une âme d’enfant. Ou alors, il a l’âme d’un enfant dont il faut avoir très peur et d’un futur petit enculé. Mais il aime Noël, il a une fille, et il est hors de question que parce qu’Alvin n’est plus là, il faille mettre dans un coin les pulls moches de Noël, les bonnets rouges surmontés d’un pompon blanc, les nez rouges à imposer sur le nez d’Ailionora et les petits gâteaux qu’il ne sait pas préparer mais qu’il s’évertue pourtant chaque année à faire, comme si son ultime objectif était bel et bien de faire perdre des dents à ses cobayes.

Ca fait bien deux heures qu’il est sorti, le Razen. Ca fait bien deux heures qu’il passe et repasse inutilement dans toutes les allées du marché de Noël, à la recherche d’une inspiration, déjà, et d’une motivation, ensuite. Oh, avec ses talents d’acteur, il ne devrait pas avoir trop de mal de convaincre un imbécile de porter ses affaires pour lui jusqu’à leur appartement, parce qu’en tant que pauvre petit père aveugle, il sait avoir droit à de la compassion, mais… l’esprit de Noël agit peut être et Razen n’a pour une fois pas envie d’exploiter qui que ce soit. Il replie sa canne, se frotte les yeux, tend la main pour caresser les épines du sapin. Un Nordmann. Un peu défraîchi, mais qui tient bien ses épines. Razen enlève son gant, faufile ses doigts entre les branches pour aller s’égratigner contre le tronc. 80 centimètres, ce n’est pas bien haut. Il glisse de sapin en sapin, écoutant d’une oreille et dans des sourires polis le baratin du vendeur. 165 centimètres, sa mutation s’active à plein régime, et il commence à comprendre si bien le dernier sapin qu’il en a presque envie de l’appeler Rodney. C’est un signe. « Je vais vous prendre celui là ! » Il cherche dans ses poches les billets, laisse son regard vide se perdre dans le vide quand sa concentration cherche à reconnaître la somme qu’il tient en main. Un angle corné, 10 $. Deux angles, 20 $. Les billets changent de main, il se retrouve bien con avec son arbre sous le bras, sa canne dans l’autre et la foule qui s’écoule autour de lui, comme un fleuve qu’il devrait remonter à contre courant jusqu’à son appartement.

Razen est extrêmement intelligent, mais il sait aussi être un gros con. Il envisage un instant d’appeler Ailionora mais elle doit encore dormir, ou lire, ou patiner, ou faire ce qu’une gosse sait si bien faire pour s’occuper pendant les vacances scolaires. Résigné, Razen finit par plaquer sa main sur le sol, singeant des lacets à refaire. Sa mutation se déploie sous lui, cascade assourdissante de compréhension, d’intuition, d’information en continu. Il se concentre sur la surface du revêtement disposé sur le sol, il se concentre sur les légères compression, un peu partout, celles qui bougent, et celles qui ne bougent pas. Une goutte de sang perle au niveau de son nez, lui rappelle à quel point son orgueil et ses décisions ridicules peuvent lui en coûter, parfois, il imprime dans son esprit un chemin pour éviter les chalets et ça lui suffira. Lorsqu’il se relève, c’est pour déplier sa canne, partir du principe que les gens sont peut être des moutons stupides, mais des moutons stupides doués d’une acuité visuelle supérieure à la sienne – ce qui n’est franchement pas difficile – et hop, c’est parti, Razen rentre chez lui, alourdi d’un sac de petites conneries achetées et d’un gros sapin qu’il va rapidement conspuer, honnir et maudire sur les cinq prochaines générations. Au bout d’un temps interminable, il s’échoue finalement hors de l’ascenseur, sur le palier de l’étage. Ses clés s’extirpent de sa poche, foncent dans la serrure qu’elles peinent à retrouver, tournent et déverrouillent l’ensemble. « Joyeux Noëëëëël, papaaaa !! »

Ah ça, il sursaute le Razen. « Merde ! Tu m’as foutu les j’tons ! » Entre la voix suraiguë de la gamine et le grognement surpris du père, les Townshend ont l’air d’être des personnes particulièrement raffinées. « Joyeux Noël toi aussi, sale môme ! Viens là faire un câlin à ton vieux père tout gelé ! J’ai trouvé un truc sur le trottoir, tu m’aides à le rentrer ? » D’un mouvement, il désigne le sapin un chouia malmené pendant le trajet, qui trône dans l’entrée.  « J’sais plus ce que tu aimes, donc je t’ai pris des bretzels, et du saucisson de sanglier et des bières allemandes. » Le manteau tombe, ses gants aussi, il les jette en direction du canapé. Et c’est en enlevant son écharpe et son bonnet que son odorat prend le relais. Il ne sent pas mieux qu’un autre gus, le Razen, mais il sait bien mieux interpréter ce qu’il sent. « Du rhum ? »


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Ailionora Townshend
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeMar 17 Jan 2017 - 16:56

Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?
Razen & Ailionora



Faire un Noël parfait, c'était un peu ce dont tout le monde rêvait. Que la grande tante Germaine soit coincée dans les embouteillages, que l'oncle Barnabé ait de bonnes blagues à raconter entre la dinde et le fromage, et surtout, SURTOUT que l'on oublie les querelles, les rancune et autres saloperies qui, de toutes manières, ne pouvaient que gâcher un bon repas. Chez nous, il n'y aurait ni grande tante, ni oncle, rien que moi et mon père. Et Bigorneau, parce qu'il faisait maintenant partie intégrante de la famille. A ceci près que j'ignorais où il était à ce moment-là. Bah ! C'était pas important ! Ce qui l'était en revanche, c'était la qualité irréprochable du lait de poule que je m'apprêtais à servir. Lorsque mon père passa l'entrée, je me mordis la langue pour ne pas éclater de rire. J'oubliais parfois qu'étant aveugle, il devait sursauter vingt fois plus que les gens normaux quand ils l'agressaient comme je venais de le faire. Quoi que c'était un mutant, lui aussi... C'était de famille ! Même si pour le coup, son cadeau empoisonné je m'en serais bien passé, mais ça c'était une autre histoire.

« Désolée, j'y ai mis un peu trop d'enthousiasme... Faudrait pas que papy Razou fasse un infarctus, hin ! »

Papy, petit surnom ridicule, ça valait bien le sale môme dont il venait de m'affubler, hin ! Je posais les deux verres sur le bras et m'empressais d'aller lui faire un câlin avant de jeter un œil à la chose informe et verte qu'il me montrait.

« Un sapiiiiin !! Oh lala t'es trop cool c'est trop chouette j'adore on va le décorer ça va être trop bien et trop beau et on aura le plus beau sapin de la ville et... »

Et blablabla, tais-toi, Aily, et surtout ralentis la cadence, tu parles trop vite. Claquant des mains en sautillant, je me précipitais vers le sapin pour le rentrer, tirant dessus de toutes mes forces jusqu'à ce qu'il soit à peu près au milieu du salon. C'est à cet instant que Bigorneau jugea que c'était le moment pour lui d'entrer en scène. On entendit un « BOUM ! » retentissant, suivit d'un couinement qui me laissa penser que cette andouille s'était probablement vautrée en sortant de ma chambre, et un vacarme de griffe dérapant sur le parquet s'en suivit. Une grosse de poils blanche surgit dans le salon, dérapa et vint s'échouer à mes pieds avec la plus grande classe du monde. Le museau dans les aiguilles, il éternua et se redressa, la langue pendante et l'air con. Seigneur que ce chien pouvait être bête et adorable à la fois...

« T'es complètement teubé comme chien, toi... Va pas te mettre une épine dans un coussinet, j'suis pas sûre qu'il y ait un véto d'ouvert ce soir ! »

J'ébouriffais la fourrure du chien puis me relevais en essayant de redresser le sapin plutôt que de le laisser traîner au milieu du salon. C'malin, tiens ! Un sapin d'un mètre quatre vingt, en voilà une idée qu'elle est bonne ! Du haut de mon fier mètre cinquante cinq, je conspuais la nature et refusais de demander de l'aider à mon aveugle de paternel, répondant dans un marmonnement à ce qu'il me racontait.

« Cool ! Les bretzels et le saucisson ça marche du tonnerre ! J'ai préparé des trucs pour le repas, j'espère que ça sera bon... Comme tu peux pas les voir, ça sera pas trop grave s'ils ont une sale gueule, mes burgers, hin ? Sauf si tu te la joues Daredevil mais ça serait pas très fair-play... »

Une fois le sapin en place, je le lâchais en poussant un soupir de soulagement.

« Hin ? Ah ouais, du rhum... J'ai fais du lait de poule, mais j'ai peur d'avoir eu la main lourde sur l'alcool, justement... Tiens... »

Je m'approchais du bar, attrapais un verre et le tendis à mon père pour trinquer.

« Bon bah... A Noël ? Rien que nous deux mais ça sera cool, hin ? »

Ca, ça sous entendait « tu as des nouvelles d'Alvin ? », mais je préférais ne pas poser la question, tant le sujet était susceptible de faire passer cette soirée d'agréable à cauchemardesque. Je portais le verre à mes lèvres et en avalais une gorgée avant de recracher le tout par réflexe.

« Eeeeeurk ! C'est dégueu ! La vache mais pourquoi vous buvez tous ça à Noël ? »
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Razen Townshend
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeLun 23 Jan 2017 - 14:00

Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?
Razen & Ailionora



On a tendance à oublier que Razen est aveugle. En même temps, ça peut se concevoir: lorsqu’il évolue dans son appartement et qu’Ailionora n’a pas été prise d’une frénésie soudaine de réorganisation, il pourrait presque passer pour un voyant - sans aucun don divinatoire, rassurez-vous. Le fait est que, mutation aidant, à coup sûr, Razen a cette capacité étonnant de se placer dans l’espace, de garder dans un coin de sa mémoire l’organisation d’une pièce et l’agencement des meubles et, surtout, de faire appel à tout ça presque inconsciemment. Dès qu’il se trouve en terrain connu, le Razen, on peut oublier qu’il n’y voit strictement rien. On peut même s’ébahir devant ses capacités hors norme et le savoir que lui procure à chaque instant une mutation si liée à son être que la limite entre ce qui est normal et ce qui ne l’est pas chez lui disparaît pleinement. Mais… mais Razen est aveugle. Et avec sa cécité viennent toutes sortes de limites qui, si elles tendent à devenir invisibles, restent bel et bien présentes. Comme, par exemple, son incapacité à voir, hé oui… Ou encore son incapacité à anticiper des pépiements provenant de sa fille et à sursauter lorsqu’elle lui hurle dans les oreilles… « Désolée, j'y ai mis un peu trop d'enthousiasme... Faudrait pas que papy Razou fasse un infarctus, hin ! » Le voilà qui lève les yeux au ciel, réflexe qu’il n’a toujours pas perdu malgré onze ans, maintenant, de cécité. “Quelle insolence, qui t’a élevée, gamine ?” le voilà qu’il maugrée avec un sourire moqueur. Une insolence qu’elle va payer en l’aidant à rentrer le machin qu’il vient de ramener. « Un sapiiiiin !! Oh lala t'es trop cool c'est trop chouette j'adore on va le décorer ça va être trop bien et trop beau et on aura le plus beau sapin de la ville et... » Et il la laisse parler en entrant définitivement dans l’appartement et en la laissant s’épuiser sur le machin. Tant mieux, plus elle sera épuisée et plus vite Razen aura une paix somme toute très relative. Oh, il l’aime sa fille, il n’y a aucun doute à avoir à ce propos et il n’y en a jamais eu, mais… mais rien qu’à l’écouter parler, on la sent habitée par une hyperactivité qui a soigneusement sauté une génération. Razen la laisse donc faire, préfère enlever veste, bonnet, gants, écharpe, ces quinze couches de vêtements qu’il a enfilées pour ne pas attraper la mort, les jeter plus ou moins vers le canapé et… « BOUM ! » retentissant. Il sursaute, le Razen, encore une fois. “Aily ? C’est… ah… c’est le couillon...” Un chien aussi futée que sa maîtresse. « T'es complètement teubé comme chien, toi... Va pas te mettre une épine dans un coussinet, j'suis pas sûre qu'il y ait un véto d'ouvert ce soir ! » J’éclate de rire en essayant de m’imaginer la bête avec une épine dans la patte, sans grand succès. “C’est sûr que dans ce cas là, la seule solution ce serait l’amputation ! Qu’est ce que tu en penses, Bigorneau ?” il raille, Razen, tout en se débarrassant enfin des victuailles supplémentaires ramenées du marché de Noël - parce que tant qu’à faire et à être dans le froid, autant ramener de la bonne bouffe. Et en parlant de bonne bouffe… Razen hausse un sourcil, un large sourire sur les lèvres. Du rhum, sérieusement ? Sa fille picole toute seule maintenant ? « Cool ! Les bretzels et le saucisson ça marche du tonnerre ! J'ai préparé des trucs pour le repas, j'espère que ça sera bon... Comme tu peux pas les voir, ça sera pas trop grave s'ils ont une sale gueule, mes burgers, hin ? Sauf si tu te la joues Daredevil mais ça serait pas très fair-play... Hin ? Ah ouais, du rhum... J'ai fait du lait de poule, mais j'ai peur d'avoir eu la main lourde sur l'alcool, justement... Tiens... » Les doigts de Razen trouvent un support sur la table du séjour, il s’y adosse, le temps de profiter d’un peu de calme, d’un peu de sécurité. Il tend une main, récupère le verre. ”Lait de poule, burger ? Et bien ma fille, avec le sauciflard et la bière, on va avoir un repas de roi !” Chez les Townshend, on ne rigole pas avec la bouffe, encore moins avec le gras. Chez les Townshend, les légumes font souvent office de décoration et chez les Townshend, enfin, on trinque. A l’aveugle. Bien sûr. Toujours. « Bon bah... A Noël ? Rien que nous deux mais ça sera cool, hin ? » Rien que nous deux. Il lève son verre, l’Anglais, en laissant Aily s’occupe du reste pour que les deux récipients s’entrechoquent. ”A Noël et à l’unité des Townshend, ouais ! Ca me semble un bon programme !” Il avale une gorgée sans plus tarder, mais là où il entend Ailionora exprimer son dégoût de manière… assez sonore avant de le faire avec des mots, lui se contente de faire claquer sa langue de satisfaction. « Eeeeeurk ! C'est dégueu ! La vache mais pourquoi vous buvez tous ça à Noël ? » Il éclate de rire, Razen, il éclate de rire sans plus tarder. ”Ah… ça, tu comprendras quand tu seras plus grande Aily. C’est quoi que t’aimes pas, le rhum ? Tu veux un jus de pomme à la place ?” On le précise maintenant ou plus tard qu’à seize ans, donc plus jeune que la loupiote en face de lui, Razen se sifflait des bières en douce à une ou deux heures du matin parce qu’il était incapable de dormir ? Et les verres de rhum n’étaient pas non plus rares, ‘pour se réchauffer’, à l’en croire. ”Tu nettoyeras, tout de même, vu comme tu l’as chargé, faudrait pas qu’à faire la serpillère, Ducon nous fasse un coma éthylique…” D’ailleurs, en parlant du clébard, Razen s’accroupit et tend la main dans le vide, sentant rapidement une truffe s’y loger et une langue la lécher. Il caresse le chien, avec affection. Razen aime bien les chiens et le départ de Hulk, le machin d’Alvin, ça a fait un trou dans l’appartement ça aussi. Peut-être est-ce pour ça, aussi, qu’il a fini par offrir le husky à Ailionora. ”Niveau décoration de Noël, tu as trouvé la boîte ? Il doit y avoir une guirlande que m’avait fait ton oncle quand il avait douze ans.” Et des boules de Noël chipées dans un magasin où ils avaient laissé le prix, pour la blague, d’ailleurs.

1134 mots... (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? 1172902275
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Ailionora Townshend
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeDim 5 Fév 2017 - 23:34

Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?
Razen & Ailionora



Noël, c'était vraiment la plus cooool période de l'année. Y avait des décos partout dans les rues, de la neige, et puis les lacs et les mares gelaient ! C'était toujours à cette période que j'me la jouais un peu casse-cou en allant patiner sur des zones pas franchement sûres mais ça, mon père n'avait vraiment pas besoin de le savoir. A Noël on mangeait comme des gros, on se faisait des cadeaux, et surtout, y avait cet accord tacite entre les profs et les élèves : pas de contrôles avant Noël, on fait une trêve ! C'était pour ça que j'étais si joviale et euphorique, parce que pour une fois depuis longtemps, j'allais passer un Noël fabuleux, j'en étais certaine. Ça me rendait espiègle aussi, et lorsque mon père me demanda qui m'avais élevée, je répliquais avec une bouille de lutin.

« J'sais pas mais pas toi, en tout cas ! »

Et ça ne sonnait pas comme un reproche, plutôt comme une blague faite sur un sujet pas drôle du tout. Comment j'aurais pu lui en vouloir ? Il ignorait mon existence, et la seule responsable, la seule à qui j'en voulais vraiment, c'était ma mère. Ma mère pour m'avoir interdit de rencontrer mon père, ma mère pour avoir réduit mon enfance à celle de petit parasite perturbant la vie d'une alcoolique, ma mère qui m'avait finalement abandonnée. Faisant la moue, j'attrapais Bigorneau par le coup pour le serrer contre moi, tout en tentant d'échapper à ses fourbes coups de langue.

« Naaaaan tu couperas rien à mon chien ! Bigorneau il est parfait, c'est juste qu'il est pas tout à fait fini... Mais on coupe rien, sinon en plus d'être con il ressemblera plus à grand chose. »

Il n'était pas futé, ce chien, mais il était adorable, il dormait au pied de mon lit, veillait sur mon sommeil, et j'avais bon espoir qu'il puisse être dressé pour aider mon père à s'en sortir sans tonton Alvin sous le même toit. Me relevant, je sautillais jusqu'à la cuisine pour allumer le four qui servirait à faire chauffer les monstrueux burgers que j'avais préparé, et ramenais les deux verres de lait de poule. Ah ça pour manger comme des rois, on allait pas mourir de faim ! On allait même plutôt rouler sous le canapé à la fin de la soirée ! Quant à l'unité des Townshend, elle se résumait à nous deux pour le moment, et c'était déjà pas mal. Lait de poule cul sec et... Et aussitôt recraché. Ça avait un goût immonde, de trop de choses improbables et pourtant, j'avais suivi la recette à la lettre. Grimaçant, j'attrapais une bière – quoi comment ça c'est mal de boire à mon âge ? Z'avez vu mon père ? - et en vidais la moitié d'une bouteille pour passer le goût infâme du truc.

« J'sais pas... Ca doit être le rhum, ouais, c'est trop... Amer pour moi, ou j'sais pas... Mais en tout cas j'aime pas ! Et le jus de pomme ça sera d'la bière, c'est bien aussi. »

Tu comprendras quand tu seras plus grande... LA phrase la plus détestée de l'histoire, LA phrase que disaient tous les adultes pour ne pas avoir à expliquer à leurs enfants que non les bébés ne naissent pas dans les choux, oui le monde pue, oui y a des connards partout et non les gentils ne gagnent pas toujours à la fin. Je baissais alors les yeux vers Bigorneau, qui reniflais le lait de poule recraché sur le parquet avec un air suspicieux. Il s'y repris à plusieurs fois, comme s'il n'était pas certain de ce qu'il avait sentit, et décida finalement qu'il n'en voulait pas. A défaut, il alla se coucher – ou plutôt s'étaler – dans son panier en soupirant comme un mal aimé.

« Tu parles, Bigorneau l'a reniflé mais c'est pas assez fab' pour son palet délicat, j'crois. Bon aller. Le sapin. »

Je sautais sur mes pieds, posais ma bière et me plantais devant le sapin, les mains sur les hanches. Si j'avais trouvé la boîte ? A vrai dire, je ne l'avais pas cherchée. Chercher un truc dans cet appart, c'était un peu partir en expédition pour un autre monde : risqué. Je me dirigeais donc vers le placard de l'entrée, l'ouvrit... Et me fit pratiquement assommer par une essoreuse à salade – et ne me demandez pas ce qu'elle foutait là.

« Ça va ! J'ai rien ! A part p'tet un trauma crânien, le jury délibère. »

Grommelant des choses que la politesse et les pâquerettes me supplient de ne pas écrire ici, j'attrapais une chaise, grimpais dessus et me hissais sur la pointe des pieds en maudissant ma petite taille pour les trente années à venir. Quand finalement j'attrapais un carton à moitié éventré d'où dépassait une guirlande faite avec des capsules de bière et des bouchons de bouteilles de vodka, une grosse boule rouge cerise s'en échappa et alla finir sa course vers la liberté sur le parquet. Pestant, je tentais de garder un semblant d'équilibre tout en descendant de la chaise. A peine avais-je eu le temps de la remettre à sa place que Bigorneau, en bon chien bien élevé, vint sauver la pauvre boule tombée à terre, mais alors que je tendais la main pour la récupérer, il me feinta et trottina joyeusement jusqu'à mon père. Là, il s'assit, sa queue battant le pied de la table basse, alors qu'il semblait attendre que mon père lui lance la boule... Bien joué, mon chien, mais papa y voit aussi mal de nuit que de jour. Impatient, Bigorneau lui enfonça sa truffe humide dans le bras.

« Je crois que Bigorneau veut jouer... T'as qu'à l'occuper pendant que je risque ma vie avec tes décos ? Sérieux une guirlande en capsules ? C'est quoi c't'humour de poivrots ? »

Avec un soupir de soulagement, je posais le carton au pied du sapin.
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeDim 19 Fév 2017 - 21:35

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Razen & Ailionora



S’il y a quelques années, on avait dit à Razen qu’il se retrouverait père d’une sale môme de dix-sept ans, à trente-huit ans passés, non seulement il n’aurait pas cru le porteur de mauvaises nouvelles mais en plus, il aurait éclaté de rire. Des deux Townshend inséparables - anciennement inséparables du moins -, autant être honnête, c’était Alvin qui semait des gamins dans toutes les villes. Pas Razen. Ou du moins, Razen n’en semait que dans une ville sur deux, ou trois. Voire quatre. Bref. Moins. Mais voilà, aujourd’hui, il a une loukoum face à lui, et une loukoum extrêmement mal élevée qui le traite de vieux, lui piaille dans les oreilles et qu’il adore malgré tout et contre toute attente. « J'sais pas mais pas toi, en tout cas ! » Il explose de rire, loin de prendre ça mal. De toute manière, les regrets, il l’a compris bien assez tôt, ne servent à rien dans la plupart des cas, sauf si on a une affection toute particulière pour les insomnies et les ulcères. « Ca j’le sais bien, sinon tu jurerais plus et, surtout, bien plus vulgairement ! » raille-t-il sur sa lancée, prêt à poursuivre sur le sujet sans s’arrêter.

Heureusement qu’un couillon sur pattes vient l’interrompre, d’ailleurs. Un chien qu’il ne regrette pas un seul instant de lui avoir offert mais, qui, bon sang de bonsoir, ne brille clairement pas par son intelligence. Et dire qu’à un moment, il s’est demandé si le dresser pour faire chien-guide ne pourrait pas être une option… mais... « Naaaaan tu couperas rien à mon chien ! Bigorneau il est parfait, c'est juste qu'il est pas tout à fait fini... Mais on coupe rien, sinon en plus d'être con il ressemblera plus à grand chose. » Mais… mais non, en fait. Razen éclate une nouvelle fois de rire, tout en finissant de se décharger et avant de récupérer des mains de sa fille de quoi boire.

Boire et manger, les deux verbes les plus importants dans la vie d’un Townshend, à n’en pas douter. S’il n’avait pas eu sa mutation pour lui prouver sa paternité, Razen aurait pu s’appuyer là dessus pour être certain de la filiation d’Aily. Boire et manger. Boire de l’alcool, manger du gras: deux indispensables pour rendre un homme heureux. Et plus encore lorsqu’il a le plaisir d’entendre sa fille recracher le temps. C’est vrai qu’elle a eu la main lourde sur le rhum, mais bon sang, le résultat est pas aussi dégueu qu’elle le dit ! Oui, blablabla, Razen sait très bien qu’un père qui se respecte n’est pas supposé laisser sa fille encore mineure picoler comme ça, mais il n’a pas le coeur à lui interdire de se rincer le gosier avec un peu de bière. « J'sais pas... Ca doit être le rhum, ouais, c'est trop... Amer pour moi, ou j'sais pas... Mais en tout cas j'aime pas ! Et le jus de pomme ça sera d'la bière, c'est bien aussi. » Sa main cherche Ailionora, trouve son bras, remonte jusqu’à son épaule pour lui ébouriffer les cheveux sans la moindre indulgence. « De toute manière, la bière, c’est juste un bol de céréales vaguement fermenté, ça peut bien compenser le jus de pommes… »

En revanche, le lait de poule recraché, ça colle et ça pue, et ça n’est pas facilement évitable par un aveugle donc même si Razen est plutôt un papa cool la plupart du temps, il y a des choses avec lesquelles il ne rigole pas. Et l’hygiène et la propreté de l’appartement en font malheureusement partie. « Tu parles, Bigorneau l'a reniflé mais c'est pas assez fab' pour son palais délicat, j'crois. Bon aller. Le sapin. » Il fronce les sourcils, en posant une main sur la table, s’étant relevé après la désertion du clébard. Et il pousse même un soupir devant le remue-ménage et le boucan qui suivent la déclaration de sa feu-follet de fille. Un soupir et un sursaut inquiet, il faut bien l’avouer. « Ça va ! J'ai rien ! A part p'tet un trauma crânien, le jury délibère. » « Comme aux dernières nouvelles, c’est toi l’trauma, ça va, je me fais pas trop d’souci alors... » Il lui lance un sourire complice, tout en contournant sagement la zone éclaboussée un peu plus tôt et en rejoignant la voix d’Aily, ainsi que le canapé à proximité du sapin où il se laisse tomber dans un grognement signifiant plus ou moins « bordel que la terre est basse » dans ce qui s’assimilerait plus facilement à un grognement d’homme des cavernes qu’à une élocution soignée d’un être humain. Ailionora, ton père est un australopithèque.

« Je crois que Bigorneau veut jouer... T'as qu'à l'occuper pendant que je risque ma vie avec tes décos ? Sérieux une guirlande en capsules ? C'est quoi c't'humour de poivrots ? » Il relève la tête, avant de poser ses pieds sur la table basse et de la balayer sans aucun égard pour les chutes successives de magazines, télécommandes et autres livres sur le sol. Le chien veut jouer ? « Et comment tu veux que je l’occupe, hein ? Allez, passe moi une de ses balles, je vais voir ce que je peux faire » Pour un observateur externe, il faut bien se le dire, Razen ne brille pas d’enthousiasme mais, et Aily n’en sera pas dupe, il adore suffisamment les bêtes pour passer des heures à lancer une balle à l’aveuglette, attendre que l’autre idiot la lui ramène et recommencer. « Et ne te moque pas des oeuvres d’art de Tonton Alvin ! Il y a mis tout son coeur… et j’avais que ça sous la main pour l’occuper… » L’aveugle fronce les sourcils, à ce souvenir, tout en gratouillant le crâne de Bigorneau. « Dis, moustique, tu pourras me décrire le sapin ? Et il faut que tu rajoutes toi une guirlande, c’est la tradition ! » Razen se réinstalle sur le canapé pour s’y allonger sur le ventre, croiser ses bras sur l’accoudoir, fermer des yeux de toute manière inutile et regarder sa fille de toutes ses oreilles. « T’en profiteras pour me parler de tes Noëls. » Il aimerait que ça sonne comme une question... « … et de Gill… ? » Une question indiscrète. Et risquée. Mais qui le titille un peu, soyons franc.

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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeDim 14 Mai 2017 - 19:15

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Par moments, je culpabilisais un peu de mon attitude. Bon ok, vraiment un tout petit peu et pas bien longtemps, en général. Mais ça m'arrivait. Je lui menais la vie dure, à mon pauvre père aveuglé et dépassé ! J'abusais de sa confiance, profitais de la liberté qu'il me laissait pour transgresser les quelques règles qu'il avait établi, juste parce que... En fait je ne savais pas trop pourquoi je faisais ça. Peut-être par peur qu'il m'oublie ou se lasse de moi, peut-être parce que j'aimais entendre l'inquiétude dans sa voix ou voir la colère dans ses yeux voilés. Peut-être parce qu'avoir un père qui houspille sa fille, c'était toujours plus que pas de père du tout et une mère absente. Alors oui, par moments, je me rendais compte que c'était complètement con et puéril, comme attitude, et que mon paternel n'avait pas besoin de me le dire pour que je sache qu'il m'aimait. Je m'étais imposée à lui et jamais, à aucun moment il n'avait semblé avoir envie de me foutre à la porte. Il m'avait même offert un chien, certes con, pour mon anniversaire. Bon sang quelle ingrate je faisais... Mais j'avais envie de m'impliquer dans sa vie, et ce Noël était le meilleur moyen pour le lui prouver : mettre les petits plats dans les grands, lui promettre un réveillon grandiose et lutter contre l'impatience qui m'animait à l'idée de lui offrir les cadeaux que je gardais précieusement planqués dans ma chambre. Ce Noël, ça serait pour moi l'occasion de me faire pardonner mes sautes d'humeur, mon insolence, mes mauvaises notes, mes retards... Un peu tout, quoi.

« Bah t'attends quoi pour m'apprendre à jurer comme une vraie Townshend qui se respecte ! »

Ça aussi ça n'avait pas pris de temps : j'avais troquer le Vailintin irlandais pour le très britannique Townshend dès mon arrivée aux States, à la manière d'un doigt d'honneur brandit à la figure d'une mère absente. Après tout, mon père ne m'avait peut-être pas bercée ni changé la couche, mais je me sentais bien plus proche de lui que de ma mère. Avec les années, elle avait pris tant de distance qu'elle n'était pas seulement devenu nocive pour moi, c'était surtout devenue une véritable étrangère. Ma bière dans une main, je contemple la bouteille avec une certaine fierté et en avale une gorgée.

« Ouais, tiens, c'pas faux ! Au final on devrait tous en boire une au p'tit dej', ça remplacerait les corn flakes, tu crois pas ? »

J'aurais p'tet dû aller baver ça à un nutritionniste, nul doute qu'il m'aurait rit au nez ! Lâchant ma bière, je me levais d'un bond pour aller chercher les décorations du sapin, non sans avoir laissé en plan un verre à moitié vide et un tapis tâché de rhum et de sucre. Décorer le sapin, c'était bien plus important que de tenter de garder cet appartement propre et bien rangé !

« Tu sais c'qu'il te dit, l'trauma ? Pis articule quand tu causes, on dirait un ours ! », grognais-je en tentant de ne pas me casser la figure avec le carton dans les bras.

C'est toi l'trauma... Non mais pour quoi il se prend, le vieux ? Titubant, je ramène les décorations et les posais au pied du sapin avec un soupir. Quelle idée de charger à ce point un carton, franchement ? A croire qu'il voulait me voir finir avec le dos en miettes et ça hors de question ! Y avait assez d'un infirme chez nous ! Alors que je m'apprêtais à sortir les vestiges de Noël qui prenaient la poussière dans le carton, mon père me demanda où était les balles de Bigorneau. Bonne question... C'con là avait pour habitude les planquer dans des endroits improbables et de pleurer pendant des heures après ! La dernière fois, il avait trouvé le moyen d'en coincer une dans la ventilation de la salle de bain. Parce que j'étais trop petite, j'avais dû attendre le retour de mon père pour qu'il la récupère et avais pris ma douche avec une balle tambourinant contre le mur au rythme de l'air ventilé. Un vrai bonheur ! Je soupirais à nouveau et me dirigeais vers ma chambre à la recherche d'une balle perdue. Ne restait plus qu'une balle à moitié mâchouillée et encore collante de bave, mais ça ferait bien l'affaire. En sortant de la chambre, je faillis bien envoyer la balle à mon père en lui disant « attrape ! » mais me rappelais au dernier moment que bigleux comme il était, il risquait bien de se la prendre dans la figure. Je m'approchais donc, lui attrapais la main et y fourrais la balle.

« Voiiiilà ! Amuse-toi bien ! Puis quant à la guirlande de ton frère... t'as d'la chance de pas pouvoir la voir. Franchement c'est moche et je sais même pas comment ça tient ! »

Avec un sourire espiègle, je retournais m'attaquer au sapin. Ça serait le sapin le plus cool de la planète, un sapin dont on se souviendrait et qui rendrait tout le monde jaloux, ça oui ! Mais avec la guirlande de tonton Alvin, j'avais des doutes... Puis que moi je rajoute une guirlande ? Il en avait de bonnes, le vieux !

« Heeeu... Ouais fin une guirlande de quoi ? J'peux te faire une guirlande de saucissons, ou alors avec des os de manchons de poulets ? Pas sûr que ça survive plus de dix minutes à l'appétit de goinfre de Bigorneau... Ou t'as pas des vieux magazines que j'peux réduire en boulettes ? Ça fera de la couleur à défaut d'avoir un contenu intéressant ! »

Ni une ni deux, je délaissais un moment les décorations poussiéreuses du carton pour aller récupérer quelques pub et vieux magazines qui traînaient sur la pile des trucs à jeter, le tout en me faisant la réflexion qu'il était peut-être temps de faire un tri mais bon. A peine m'en étais-je emparée que la question piège et délicate tomba. Je me figeais près de la porte, mes doigts crispés sur les couvertures glacées aux couleurs criardes des magazines que j'avais choisis. Parler de ma mère... De nos Noëls... La bonne blague, tiens ! Immédiatement, je me refermais comme une huître puis, silencieuse, j'allais me rasseoir sur le canapé. Il me fallu deux bonnes minutes pour consentir à ouvrir la bouche.

« Pourquoi tu tiens tellement à c'que j'te raconte ça ? On est pas censé s'amuser, à Noël ? Non parce que pour le coup, y a rien d'amusant dans c't'histoire, j't'assure. »

Je sentais à la crispation de mes épaules et à mon ton que j'étais agressive. Parce que je me sentais agressée par la question, agressée par le souvenir d'une mère que j'aurais voulu plus heureux et innocent... Un souvenir dont je ne parviendrais probablement jamais à me débarrasser. Arrachant une page pour en faire une boulette, je gardais les yeux rivés sur mes genoux pour ne pas avoir à affronter le regard de mon père. Il avait beau être aveugle, j'avais sans cesse le sentiment qu'il était capable de lire en moi comme dans un livre ouvert.

« Quand j'étais petite, je devais avoir quatre ou cinq ans, je me souviens d'un Noël passé chez ma grand-mère, à Cork. Ça sentait bon le pain d'épice chaud, y avait des décorations partout dans la maison, et même si on n'avait pas de neige, mamie me racontait des histoires et on chantait des chants de Noël toute la soirée. Mais y avait jamais maman. Y a jamais eu maman à Noël. Elle disait toujours que les malfaiteurs ne faisaient pas la trêve de Noël, qu'il fallait bien quelqu'un pour les arrêter, ce genre de conneries... Du coup elle passait juste pendant la nuit déposer mes paquets et elle repartait aussitôt. Et puis grand-mère est morte et y a plus eu personne pour passer Noël avec moi. Maman me laissait de l'argent pour que je commande à manger, mais quand j'ai eu 12 ans, j'ai commencé à faire le mur. J'utilisais cet argent pour aller au cinéma, me goinfrer de pop-corn ou aller à la fête foraine... C'était rigolo deux minutes, jusqu'à ce que je vois ces gamins qui riaient aux éclats en tenant la main de leur père et de leur mère. Moi je n'avais pour ainsi dire pas de père, et ma mère sacrifiait sa misérable vie de famille pour son boulot. »

Je les sentais monter, les larmes, à mesure que je parlais. Des larmes amères, de celle qui brûlent les yeux et les joues. Doucement, je posais les petites boulettes de papier coloré sur la table basse et poursuivis mon récit.

« Puis y a eu le drame... Pendant une arrestation, maman a dû tirer sur un jeune qui voulait pas lâcher son arme. Elle avait beau se dire que c'était pas sa faute, que c'était elle ou lui... Elle a plus jamais été la même après ça. La mort de c't'ado lui pesait sur la conscience et elle s'est mise à boire. C'est arrivé peu de temps avant Noël, alors ils lui ont offert des congés. Le premier Noël que j'ai passé avec ma mère a été un fiasco du début à la fin... J'm'en souviens, j'étais tellement heureuse et stressée de le passer avec elle que j'en ai renversé le plat avec la dinde. J'te raconte pas la torgnole que j'me suis prise après ça... De toute manière, maman était complètement bourrée. J'ai fini la soirée en la couchant ivre morte dans son lit avant d'aller nettoyer son vomi dans la salle de bain. »

Sans m'en rendre compte, les larmes s'étaient mises à couleur sur mes joues. Lorsque je relevais les yeux vers mon père, y avait de la colère et de la rancœur dans mon regard, mais aussi et surtout beaucoup de tristesse.

« Tu veux savoir à quoi ça ressemble, un Noël avec ma mère ? A rien. Parce qu'il n'y en a jamais vraiment eu. J'aime maman, tu sais ? Mais c'est pas une bonne mère, et j'suis bien placée pour le dire. C'est pour ça que j'ai fait autant d'effort ce soir. Pas seulement parce que ça me fait plaisir ou parc que c'est la tradition... C'est aussi parce que c'est la première fois que je passe un Noël normal avec un de mes parents. J'veux surtout pas gâcher ça. »

Les doigts crispés sur les pages du magazines, j'observais les petites boulettes de papier sur la table. A mesure que mon récit avançait, elles étaient devenues de plus en plus anarchiques, comme si ma colère s'y était cristalisée.
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MessageSujet: Re: (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ?   (Razaily | xmas) Have you ever seen the Christmas lights, daddy ? Icon_minitimeMar 30 Mai 2017 - 23:34

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Razen & Ailionora



Être aveugle n’est pas une chose facile dans un monde de formes, de couleurs, de lumière et surtout de coins de meuble létaux pour les petits orteils. Être aveugle est encore moins une chose facile lorsqu’on n’est pas né ainsi, lorsqu’on se souvient - vaguement - d’un temps où on pouvait encore contempler le sourire d’une fille, la connerie de son frère ou simplement regarder les gens dans les yeux et y lire toutes les émotions du monde. Être aveugle, enfin, est l’antithèse la plus complète de la simplicité lorsqu’on se retrouve avec une fille sur les bras, une fille comme Ailionora peut l’être : énergique, intenable, un ouragan dans un appartement, aussi maniaque que brouillonne, aussi spontanée que réservée, aussi sans-gêne que son père. Razen, donc, n’a pas la tâche facile. Et pourtant, cette tâche, il l’adore, surtout dans des moments comme celui-là, à des périodes comme celle-là. « Bah t'attends quoi pour m'apprendre à jurer comme une vraie Townshend qui se respecte ! » Surtout lorsqu’il l’entend dire ça. Une vraie Townshend. Qui n’est même pas scolarisée sous ce nom, d’ailleurs. « J’attends qu’tu sois sage, loukoum. J’attends qu’tu sois sage, qu’est-ce tu crois. » Et pour ça, il risque d’attendre longtemps, l’aveugle, vraiment longtemps.

Honnêtement : pas besoin d’avoir des yeux pour se rendre compte que si Aily a certainement hérité de tout un tas de qualités et de défauts de Gillian, elle n’a pas non plus craché des masses sur l’héritage de son paternel. Une vraie Townshend, ouais, elle en est une, jusqu’à la mutation, jusqu’à cette absence de raison et cette désinvolture face à tous les codes de politesse qu’on est suppposé intégré à leurs âges à tous les deux. Chez les Townshend, on s’en fout de dire merci ou merde, tant qu’on a ce qu’on veut. Chez les Townshend, la débrouillardise, l’autonomie et l’indépendance sont bien plus mis en avant qu’une quelconque convenance sur la consommation d’alcool, sur la diététique et sur toutes ces conneries de Razen a choisi d’enterrer en même temps que son enfance lorsqu’il a dû commencer à se battre pour garder Al’ et Ren avec lui. Pour ce que ça aura servi, tiens. Razen a laissé tomber tout ce qui était dispensable, pour se concentrer sur le strictement nécessaire. Pas de surprise, du coup, à ce que la bière soit considérée comme un bol de corn flakes fermenté mais qu’il soit hors de question de laisser un peu de crasse par terre. Pas de surprise à ce que Razen traite sa fille de trauma, mais qu’il s’inquiète instantanément pour un simple bruit de chute. « Tu sais c'qu'il te dit, l'trauma ? Pis articule quand tu causes, on dirait un ours ! » Le voilà qui lève les yeux au ciel.  « Et tu sais c’qu’il te dit, l’ours ? C’est qu’t’as plutôt intérêt à nettoyer ton bordel si tu veux pas l’réveiller » et il est plus que clair que non, Aily n’a pas intérêt à réveiller l’ours que son père sait être. Même si elle ignore l’étendue des réelles activités de Razen, la môme doit avoir compris, depuis l’temps, qu’il n’est clairement pas une bonne idée de lui désobéir lorsqu’il insiste sur les rares règles qu’il impose, ou sur ce qui a l’apparence d’une demande mais qui n’est qu’un ordre déguisé en suppo pour passer plus facilement.

Les pieds sur la table basse, Razen l’écoute poser des cartons, commenter les décorations ancestrales de la famille Townshend qui ont survécu à leur pérégrination, plus grâce au côté très nostalgique et matériel de l’aîné des frérots. Une guirlande en capsule, quelques boules survivantes de quelques vols dans des magasins, des anges découpés dans des journaux par Razen selon les indications d’Alvin - inutile de préciser qu’il doit y avoir des micro-ondes, des sachets de pâtes et des extraits de journaux pour adultes qui trainent dans le lot mais certainement pas des angelots - … les décorations de la famille ne sont clairement pas académiques, mais on ne peut leur nier une certaine originalité, ça non. Et cette année n’y fera pas exception, surtout si Razen laisse le champ libre à la dernière du lot. Une balle atterrit dans sa main, signe de la digne répartition des tâches. Lui, le chien, elle le sapin. « Ton chien bave, Aily. », fait-il remarquer, comme surpris par cette réalité, avec un sourire en coin qui doit - très certainement - répondre au sourire espiègle de la mioche.

Lui, le chien, elle, le sapin : l’instant est chargé d’émotions puisqu’Aily va à son tour s’inscrire dans la droite ligne de la tradition familiale en ajoutant sa propre décoration. Oh la con La balle quitte la main de l’aveugle, atterrit dans un sploch un peu plus loin. Puis les gratte-gratte des pattes de Bigorneau sur le sol, et le pong de l’animal qui dérape et se prend le mur. Avant, enfin, le retour. La balle repart. « Une guirlande en saucisson, c’pas de l’appétit d’ton chien qu’tu d’vras t’inquiéter », ça non. Les Townshend sont insomniaques, Razen encore plus et le canapé et la télé du salon sont ses refuges principaux lorsqu’il n’arrive plus à mettre la main sur le sommeil. Foutue cécité. « Mais ton idée avec les magazines est plutôt funky, t’en as en tas par là-bas… » d’un geste de la main, il désigne un endroit approximatif; Bigorneau au top de sa forme intellectuelle croit y voir un lancé de balle et repart dans son dérapage, et un éclat de rire de l’aveugle. Débarrassé du clébard, il entend bien réclamer une description du sapin.

Et des histoires, aussi. L’occasion d’en apprendre plus sur ce qu’il a loupé, l’occasion d’en apprendre plus sur la complicité - pas très poussée à ce qu’il a cru comprendre - entre Gill et Aily. L’occasion d’essayer de se projeter dans des souvenirs, pour s’y trouver une place. « Pourquoi tu tiens tellement à c'que j'te raconte ça ? On est pas censé s'amuser, à Noël ? Non parce que pour le coup, y a rien d'amusant dans c't'histoire, j't'assure. » L’occasion d’une foutue désillusion. Razen ouvre un oeil - inutile - et le referme sans bouger le reste de son corps. Ses mains jointes sont posées sur son ventre, se soulèvent au rythme de sa respiration. Pourquoi est-ce qu’il tient à ce qu’elle lui raconte ça ? « Pour savoir. » Et si elle a pas envie… et bien il ne lui proposera pas de changer de sujet. Pourtant, il sent sa crispation dans sa voix, il irait même jusqu’à dire qu’il la comprend alors qu’il n’en connaît aucun fondement, mais… on n’a pas attribué le qualificatif d’enculé et de connard à Razen pour rien. S’il connaît la définition d’empathie, elle souffre très souvent de son égoïsme et de son peu d’indulgence lorsqu’il a quelque chose en tête. Comme maintenant.

Ailionora commence à raconter, Razen, lui, ne bouge pas d’un iota. Mais il se tend. Ça oui, il se tend, il se crispe. La colère monte, aussi. Une colère glacée, comme il en a rarement.
« Mais y avait jamais maman. Y a jamais eu maman à Noël. » Pourquoi Gillian l’a-t-elle plaqué, déjà ? Parce qu’il était un vaurien, parce qu’il était un malhonnête, parce qu’il pataugeait dans l’illégalité ? Pourquoi lui a-t-elle caché l’existence d’Ailionora, déjà ? Pour les mêmes raisons ? Et tout ça, pour quoi ? Pour ne pas être là, pour abandonner leur fille, pour la laisser seule le soir de Noël alors qu’elle savait pertinemment à quel point il était attaché au caractère familial de la fête ? « Et puis grand-mère est morte et y a plus eu personne pour passer Noël avec moi. Maman me laissait de l'argent pour que je commande à manger, mais quand j'ai eu 12 ans, j'ai commencé à faire le mur. » Bien bien. Razen a toujours les yeux fermés, les lèvres pincées et en tête les mille et une mort qu’il puisse imaginer pour Gillian si un jour, elle a le culot de se pointer dans le coin, la bouche en coeur. Aucune chance que ça arrive, mais… remarquez, il pourrait lui-même faire le déplacement. Ou alors... « Moi je n'avais pour ainsi dire pas de père, et ma mère sacrifiait sa misérable vie de famille pour son boulot. » Ahah. Pas de père, le père en question entend un sacré reproche dans cette affirmation quand bien même il se sait totalement innocent dans l’histoire. Qu’a-t-il fait de mal, finalement ? Il est tombé amoureux d’une flic - malin - et elle a fini par apprendre la vérité sur lui - encore plus malin - et ils avaient entre temps couché pas mal de fois ensemble en se protégeant, mais de toute évidence pas systématiquement. Bien, bien, bien. Au moins, le mercenaire se rend bien compte qu’Ailionora, sans avoir eu envie de parler de tout ça, avait besoin d’en parler. Il entend des feuilles se froisser, il peut même se les représenter être réduites en charpie sous le récit de sa fille qui reprend. Puisqu’elle est lancée, autant ne pas l’interrompre.

« Puis y a eu le drame... » Quoi, elle s’est rendue compte qu’elle était - de toute évidence - une mauvaise mère qui n’avait rien à envier au vaurien de père de la gamine ? « Pendant une arrestation, maman a dû tirer sur un jeune qui voulait pas lâcher son arme. » How dramatic. Quand on est cop, on doit s’attendre à flinguer des mômes. C’est ce qu’ils font, les flics, non ? Au même titre que les services sociaux font des pieds et des mains pour séparer les fratries, histoire que les plus jeunes encore mignons, encore adoptables soient présentés sous leur meilleur jour et surtout sans leurs boulets de grands frères. Razen joue avec la balle de Bigorneau, pour mieux y canaliser toute sa colère grandissante. Il a des colères froides, Razen. Il a des colères polaires, Razen. Glacées. Coupantes. Le genre de colère qui nécrose la personne qui en est la cible, le genre de colère qui laisse des marques, mais qui n’apparaît pourtant pas très menaçante en premier lieu. Le genre de colère dont on ne se méfie pas, mais qu’on regrette après coup de ne pas avoir pris au sérieux. Le genre de colère qui fait de Razen un homme particulièrement rancunier. Parce que même s’il reste silencieux, avec un petit sourire détendu, Razen est actuellement en train de lutter pour garder son calme et la tête froide. Pour garder contenance, alors qu’Aily finit de raconter son si pathétique Noël avec sa mère, sa merveilleuse mère, celle qui ne pouvait qu’être une excellente mère à l’avis de Razen. Un avis revu, corrigé, raturé, chiffonné à la poubelle puisque de toute évidence il n’y avait rien à sauver dans ce ramassis de conneries. « J'ai fini la soirée en la couchant ivre morte dans son lit avant d'aller nettoyer son vomi dans la salle de bain. »

Il a beau être aveugle, le père, il ne peut s’empêcher de se représenter un peu trop bien la scène. Elle avait quel âge à ce moment-là, sa môme ? Il ne s’en souvient plus, n’a pas retenu ce détail - ou alors elle ne le lui a pas dit - mais très certainement, il l’imagine comme il peut, avec des couettes - des couettes qu’il aurait adoré détester lui faire quand elle avait huit ans - et une moue particulièrement Townshend aux lèvres. Une moue de tête à claque, une moue déterminée, une moue rageuse, de ceux qui veulent prendre leur revanche sur la vie et sur les cartes pourries qu’on leur a distribuées au départ. « Tu veux savoir à quoi ça ressemble, un Noël avec ma mère ? A rien.  » Razen se redresse. Finalement. Il rompt son immobilité pour s’asseoir correctement, les deux pieds bien à plat par terre et non plus sur la table basse. « Parce qu'il n'y en a jamais vraiment eu. J'aime maman, tu sais ? Mais c'est pas une bonne mère, et j'suis bien placée pour le dire. C'est pour ça que j'ai fait autant d'effort ce soir. Pas seulement parce que ça me fait plaisir ou parce que c'est la tradition... C'est aussi parce que c'est la première fois que je passe un Noël normal avec un de mes parents. J'veux surtout pas gâcher ça. » J’aime maman. Et bien elle a de la chance, parce que lui, Razen, il ne sait plus trop s’il l’aime encore Gillian. Il était déjà à peu près certain que non, le temps ayant fait son office, mais si ce qu’Ailionora lui dit est vrai…et elle n’aurait que peu de raisons de mentir, alors… Razen soupire, tend la main en direction d’Ailionora, tâtonne jusqu’à la trouve, l’agripper pour la faire venir à lui. « Bah tu vas voir à quoi ça ressemble, un Noël chez les Townshend, alors. Viens-là, Loukoum » Il ne lui laisse pas le choix pour la prendre dans ses bras, l’enlacer comme il apprend encore à le faire. C’est peut-être un ours, le Razen, mais c’est aussi un père. Qui a consolé Alvin une paire de fois, avec toute la maladresse que ça impliquait. « Sérieusement, Gill… C’est bien qu’t’aimes quand même ta mère, même si j’ai l’impression qu’elle s’est transformée en gremlins depuis que je l’ai perdue de vue… » Que peut-il dire de plus ?

Oh, tout un tas de choses, à commencer par un certain nombre d’insultes. Quelques insanités supplémentaires, aussi, quelques conneries – toujours – mais Razen, pour le moment, ne trouve rien d’intelligent voire de pertinent pour consoler Ailionora. Et pour se rattraper. Ce n’est visiblement pas elle qui a gâché quoique ce soit, c’est lui. Ah ben doué, le papounet. « Je te raconterai bien le Noël qu’on a passé ensemble, Gill et moi, mais j’suis pas sûr que ça te remonterait le moral. » Très doué. Un soupir, il lui ébouriffe les cheveux. « Allez, n’y pense plus, là, t’as un super papa sous la main » Lui, papa, il ne se désigne pas souvent comme tel parce qu’il faut bien être honnête, ça lui semble toujours extrêmement abstrait. Mais en l’occurrence… « Un super papa qui sait même faire des claquettes. » Ses talons claquent sans trop d’efficacité le sol, mais au moins il y a l’intention. « Tu vois, ça valait quand même le coup d’avoir des Noël de merde jusque là, non ? » Ahah, très drôle. Razen soupire, conscient de la portée de ses propos. « Bon, du coup, ces boules de Noël, on les fait ? Et ce sapin, faut que tu me le racontes ! »

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