Ce contrat était pénible. Véritablement. C’était à se demander comment certaines des entreprises locales n’avait pas déjà été attaquées ou volées. C’était de la chance insolente ou alors les dégénérés ou les voleurs du coin étaient particulièrement mauvais. Au moins, certains bâtiments importants étaient-ils, eux, de véritables forteresses, elle devait reconnaître ça. Somme toute, c’était très inégal et ce travail la rendait dingue. Les abrutis pour qui elle était en train de renforcer la sécurité peinaient à comprendre qu’une femme était capable d’accomplir un tel travail. Elle était de plus en plus tentée de commette une attaque surprise histoire de leur faire comprendre qu’ils étaient une bande de crétins arrogants et que leur sécurité allait en pâtir s’ils ne se mettaient pas leurs préjugés dans le fondement.
Si la chasse aux mutants l’aidait à se détendre, elle ne pouvait pas s’y adonner en permanence, c’était d’ailleurs bien triste, cette vermine méritait qu’elle s’y attaque à plein temps. Cela dit, elle avait un autre moyen de se défouler. La salle de sport était un bon endroit et elle ne parlait pas là de cardio mais bien de sport de combat. L’arrière salle était un ramassis d’amateur de contacts violents dans différentes disciplines, on y trouvait des flics, des semi-professionnels, des professionnels ou des reclassés. De la boxe au krav maga... On pouvait tout faire et Isobel réunissait un curieux mélange de plusieurs disciplines, qu’elles soient offensives ou défensives, tant que c’était utile, c’était bon pour elle. Un petit détour par là après le travail serait une bonne idée, après quelques cigarettes, histoires d’être un peu plus calme. Avec de la chance, Anja serait présente et elle aurait affaire à une adversaire à sa taille, pas à un imbécile qui se mettrait à flirter en lui donnant du compliment plus vaseux que flatteur. Sur cette pensée plus attractive que sa présente journée de travail, elle se remit à sa tâche par dépit.

Lorsqu’enfin l’heure arriva, Isobel était à deux doigts de fracasser le crâne d’un vigile dans l’écran en face duquel il était, ou alors de lui tirer une balle dans le genou pour le voir ramper. Elle darda sur lui un regard assassin et faute de pouvoir abîmer le matériel ou blesser gravement le personnel, elle passa derrière sa chaise qu’elle tira en arrière. Le front de l’homme percuta le bureau quand ses coudes glissèrent de la table, entraînant dans sa chute sa tasse de café. Oups. Quel dommage. Elle n’avait pas de problème de gestions de la colère, juste un agacement extrême envers les imbéciles.

- « Il semblerait que votre crâne soit aussi solide que votre stupidité. Tâchez de me nettoyer ça. Oh, ne me regardez pas comme ça, vous serez débarrassé de moi dans une semaine et moi de vous, Dieu soit loué ! »

Sur cette déclaration acerbe et froide, elle fit un crochet par chez elle pour récupérer son sac et sans prendre la peine de se changea, prit la direction de la salle. Il n’était plus surprenant de la voir passer en tailleur avec des talons pour ensuite la voir en tenue de sport, énergique et acharnée face à un adversaire ou un sac. Si elle n’était pas reconnaissable, on pourrait y voir une autre femme, sans aucun doute.
Une fois changée, elle s’étira pour éviter les risques de claquages ou autres joyeusetés. Prenant le temps nécessaire pour ce faire. Elle ne comptait plus le nombre de fois où elle avait assisté au phénomène et faute de la faire ricaner, elle ne pouvait pas s’empêcher de trouver ça stupide. Homme ou femme, c’était pareil, trop pressé, l’excuse bidon du : « Ça ne m’est jamais arrivé. », elle l’avait entendue plus d’une fois jusqu’à ce que ça arrive.

Ne voyant pas Anja à l’horizon, elle pesta intérieurement. Qu’à cela ne tienne, les sacs de frappe n’étaient pas faits pour les chiens, si elle arrivait entre temps, elle serait au moins prête pour la suite. Si pas, elle aurait pu passer ses nerfs malgré tout.

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Oui, Isobel passait ses nerfs sur ce pauvre sac. Il n’y avait pas grand-chose d’autre à faire dans le cas présent. Elle ne pouvait décemment pas tirer une balle dans la tête de ses collègues du moment, elle était sûre que plusieurs lois interdisaient d’assassiner une autre personne même pour cause de stupidité massive. Elle n’avait échappé à la prison que parce qu’elle avait imaginé et retourner son plan dans tous les sens. À vrai dire, elle s’était même attendue à faire un peu de prison mais, Kingsley l’avait aidé à ce sortir de ce mauvais pas une fois qu’elle fut suffisamment en confiance pour ça. Hélas, si elle récidivait en dehors de la chasse et sans prendre de précaution, il ne pourrait pas l’aider, même en lui dégottant le meilleur pénaliste du monde.
Elle se massa la nuque en vitesse pour tenter d’évacuer un peu plus de tension avant de frapper à nouveau rageusement dans le sac. Il n’y avait pas à dire, les employés de son clients du moment étaient franchement un ramassis de crétins. Elle en avait rarement vu de tels. Des champions ! Ce qui n’avait rien d’un compliment, bien entendu, sauf pour eux, peut-être.

Les regards qu’elle recevait en s’acharnant sur le sac, elle n’en fit rien. Elle avait l’habitude. Elle était cataloguée ici, elle ne savait. On ne pouvait pas demander à des membres des forces de l’ordre de ne pas enquêter sur la nouvelle venue qui squatte votre salle de sport et avec un passé récent comme le sien. Radcliff était peut-être une petite ville mais, les journaux avaient circulés jusqu’ici et certains savaient. Ancienne flic, ancienne démineuse, femme battue et meurtrière... certains y croyaient, d’autres pas, elle n’en avait cure. Elle agissait typiquement comme quelqu’un qui tentait de faire abstraction de ce qui se passait autour pour tenter de se reconstruire, poussant parfois le vice à agresser -sans le vouloir- un type qui avait posé la main sur elle. Elle maintenait l’image, c’était essentiel à ce qu’on ne se doute de rien même s’il fallait bénir le fait qu’elle ne pouvait être jugée deux fois pour le même crime. Bénis soient les États-Unis.
Lorsqu’Anja se présenta et se mit à maintenir le sac, elle ne pensait plus la voir ici. C’était à la foi plaisant et embarrassant. Les difficultés qu’éprouvaient Isobel à se lier étaient typiques d’une petite ville et des jugements et son caractère n’arrangeait pas les choses puisqu’elle supportait fort peu de monde. Elle hocha la tête et balança des épaules en souriant légèrement.

- « Tu n’as pas idée... » Elle soupira et lui fit signe de prendre sa place. « Vas-y, j’ai besoin de reprendre un peu mes esprits avant de continuer. »

Elle se décala et se saisit du sac à son tour pour l’empêcher de trop bouger, comme il l’avait fait pour elle avant l’arrivée d’Anja. Ces engins étaient lourds mais certains coups, bien ou mal placés, pouvaient faire osciller le sac de façon dérangeante et ça pouvait rapidement devenir soit épuisant, soit agaçant, soit les deux.

- « Qu’est-ce qui te contrarie ? »

Faire la conversation était généralement facile avec Anja, facile pour elle en tout cas, même si de son côté, Isobel ne pouvait en aucun cas se permettre de révéler certaines choses à son propos. Leurs conversations étaient souvent professionnelles, ou d’ordre relativement impersonnelles, ce qui facilitait clairement les choses pour la presque condamnée qu’elle avait été. Elle saisit au passage la main d’un type qui passait pas loin avant que cette dernière n’atterrisse sur ses fesses, main qu’elle relâcha avec colère.

- « C’était juste pour tester tes réflexes. »

- « Toujours aussi bons, je te remercie mais recommence ça et je teste ta résistance aux chocs en traître sous la ceinture. Tu as compris le message ? »

Isobel détestait l’irrespect et c’était encore plus vrai quand ce dernier était dû à son genre.

- « Nous disions donc ? »

Elle reporta son attention sur Anja comme si rien ne s’était passé quelques secondes plus tôt même si, clairement, elle était plus que contrariée. Il arrivait que certains hommes agissent plus par provocations et mauvais plan drague qu’irrespect mais ça l’énervait. Elle savait que celui qui venait de faire ça n’était pas bien méchant, pas bien lourd non plus, elle s’entraînait même parfois avec lui mais, ça n’était vraiment pas le jour.

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